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III – Les spécificités inhérentes à la nature des normes communautaires et à leurs rapports avec les ordres juridiques

Dans le document Doctorat de Droit Public (Page 196-199)

L‟inventaire des normes communautaire permet de dresser une typologie faisant ressortir trois composantes majeures : le droit primaire, le droit dérivé et le droit subsidiaire.

Le droit primaire constitue le « droit constitutionnel » de l‟organisation parce que ce droit détermine les compétences et pouvoirs des différents organes et la nature des actes pris par ces derniers. De nature conventionnelle, parce que soumis aux procédures d‟élaboration du droit des traités (négociation, signature et ratification), le droit primaire est constitué par les Traités constitutifs des organisations d‟intégration et les protocoles additionnels.

Le droit dérivé, lui, est le droit sécrété par les organismes mis en place par le droit primaire. On distingue en la matière, le droit dérivé unilatéral du droit dérivé conventionnel.

Le droit dérivé unilatéral désigne les actes unilatéraux pris par les organes et qui régissent les sujets du droit de l‟organisation d‟intégration (acte additionnel, règlement, directive, décision,

1 N‟GUYEN QUOC Dinh : « l‟unanimité de façade qu‟il préserve cache, le plus souvent, une coalition d‟insatisfait ».

197 actes uniformes, avis recommandations et déclarations) tandis que le droit dérivé conventionnel, lui, résulte des accords passés par les organes institués avec des partenaires extérieurs (Etats ou organisations internationales).

Quand au droit subsidiaire, il est constitué des principes généraux du droit et de la jurisprudence. En effet, le droit communautaire ne se résume pas au Traité constitutif et à l‟œuvre « législative » des organes de décisions mais s‟étend à l‟activité jurisprudentielle des différentes cours de justice.

La spécificité du droit communautaire au titre de ses caractéristiques se décline en deux particularités.

La première réside dans les caractéristiques qui s‟attachent au droit dérivé unilatéral.

En effet, dans la plupart des OIG, les actes unilatéraux n‟ont pas un caractère obligatoire.

Mais, en la matière, il existe deux exceptions :

- Dans le cadre l‟ONU en ce qui concerne le maintien de la paix et de la sécurité internationale, le Conseil de Sécurité peut prendre des actes unilatéraux obligatoires en vertu du chapitre 7 de la Charte des Nations Unies. Cela peut se traduire par une mise en garde, un embargo et même un recours militaire1.

- Dans le cadre des organisations supranationales d‟intégration (UE, UEMOA, CEDEAO, CEMAC, OHADA) du fait des caractères de primauté, d‟effet direct et d‟applicabilité immédiate reconnus au droit secrété par ces organisations.

En droit communautaire, les actes obligatoires du droit dérivé unilatéral s‟imposent à leurs destinataires (Etats ou particuliers).

La deuxième particularité est liée aux caractéristiques découlant de l‟application du principe d‟intégration de l‟ordre juridique communautaire aux ordres juridiques des Etats, principe qui appelle l‟applicabilité immédiate des normes communautaires2 contrairement à l‟applicabilité médiate du droit international3 et l‟effet direct des règles communautaires4, ce qui est l‟exception en droit international5. Il en résulte que du fait des spécificités attachées aux rapports qu‟il entretient avec les ordres juridiques nationaux, le droit communautaire diffère fondamentalement du droit international.

1 Guerre de Corée, invasion du Koweït par l‟Irak.

2 L‟applicabilité immédiate renvoie à l‟idée d‟insertion ou de pénétration du droit communautaire dans l‟ordre juridique interne. Le droit communautaire acquiert ainsi automatiquement statut de droit positif dans l‟ordre interne des Etats. C‟est la faculté qu‟ont certains actes de droit dérivé d‟entrer en vigueur dans l‟ordre juridique interne sans qu‟il soit besoin d‟une procédure de ratification ou de réception.

3 Exception faite des normes self executing c'est-à-dire celle dont l‟application ne nécessite pas de mesures internes complémentaires. P. DALLIER et A. PELLET, „‟Droit international public‟‟, Paris, LGDJ, 7ème édition, 2002, pp. 232-236.

4 L‟effet direct renvoie à l‟idée des effets de la règle de droit communautaire dans l‟ordre juridique interne des Etats c'est-à-dire que la règle de droit communautaire crée directement des droits ou met directement des obligations à la charge des particuliers. C‟est donc la capacité reconnue à la règle de droit communautaire de créer des droits ou mettre des obligations directement sur le chef des particuliers. En conséquence, c‟est la possibilité qui est conférée aux particuliers de revendiquer devant les juridictions nationales des droits découlant des actes communautaires. Il s‟agit d‟un droit d‟invocation du droit communautaire reconnue aux particuliers.

5 Mis à part les règles objectives notamment en matière de droits humains.

198 Ces spécificités du droit communautaire permettent d‟affirmer que le droit communautaire se définit comme le droit produit par une organisation supranationale aux fins de la construction d‟un espace économique intégré.

Du point de vue de leur contenu, les règles constitutives d‟un droit communautaire peuvent être classées en deux grandes catégories ou branches, à savoir le droit institutionnel et le droit matériel. Le droit institutionnel désigne l‟ensemble des règles qui ont trait à la création et à l‟évolution d‟une organisation d‟intégration régionale. Il s‟intéresse à l‟organisation, aux compétences et au fonctionnement des institutions mises en place par l‟organisation pour accomplir les missions que les Etats parties lui ont confiées. En outre, le droit institutionnel permet de comprendre la distribution des pouvoirs au sein de l‟organisation supranationale entre les organes de décisions, d‟exécution et de contrôle. Par ailleurs, il régit les rapports entre l‟ordre juridique communautaire et les ordres juridiques nationaux des Etats parties. Quant au droit matériel, il englobe l‟ensemble des règles et des mesures adoptées par les institutions communautaires dans le cadre de la mise en œuvre du traité originaire de l‟organisation. En d‟autres termes, le droit matériel est constitué par les règles et les mesures tendant à la concrétisation des objectifs assignés à l‟organisation d‟intégration régionale par les Etats fondateurs. A travers le droit matériel, il s‟agit donc de s‟intéresser à l‟action que mènent les différentes organisations d‟intégration.

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Chapitre II : L’avènement du nouveau régionalisme en Afrique de l’ouest francophone

Le début des années 1990, va connaître l‟avènement d‟un nouveau régionalisme porteur d‟une dynamique nouvelle amenée par l‟expérience européenne d‟intégration régionale. Les pays d‟Afrique de l‟ouest, largement stimulés par ses performances et profondément inspirés par les liens historiques qui les lient, ne vont pas rester en marge de ce mouvement nouveau qui a largement pris sa source dans les réalisations de l‟œuvre communautaire européenne. Toutefois, l‟individuation culturelle qui caractérise chacun des pays de la sous région va imprimer au modèle ouest africain le profil d‟une nature propre.

Mais, l‟avènement du nouveau régionalisme africain s‟illustre au mieux avec l‟affichage d‟un nouveau paysage institutionnel du fait de la création de nouvelles organisations, à l‟instar de l‟OHADA, l‟UEMOA, la CIMA, la CIPRES. Un nouveau régionalisme qui se caractérise par une quadruple contribution à l‟instauration d‟un cadre propice au développement économique, par la mise en place d‟une sécurité organisationnelle ; l‟adoption d‟un droit communautaire des affaires comme outil fondamental de l‟intégration économique et garantie par des institutions communautaires autonome, et la liberté de circulation communautaire dont l‟effectivité devrait consacrer la fonctionnalité de ce cadre communautaire.

Section I : Le paysage institutionnel du nouveau régionalisme ouest

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