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3 – Organisations normatives et organisations opérationnelles

Dans le document Doctorat de Droit Public (Page 79-82)

Sur le plan des méthodes de coordination, enfin, il est possible d‟opposer deux types d‟organisations, les unes se bornant à harmoniser et à orienter les comportements et les actions de leurs membres, les autres engageant elles-mêmes des actions de caractère opérationnel. On peut qualifier les premières d‟organisations normatives et les secondes d‟organisations opérationnelles. La portée et l‟utilité de la distinction apparaissent immédiatement : elles tiennent à la nature des relations entre l‟organisation et ses membres, d‟une part, à la nature des moyens mis en œuvre par l‟organisation, d‟autre part (l‟un commandant l‟autre, dans une très large mesure). Les moyens eux-mêmes ne sont pas sans avoir aussi des conséquences directes sur la structure, le fonctionnement et les méthodes de travail d l‟appareil d‟organes et, bien entendu, sur la compétence et les relations mutuelles des organes qui la composent.

1. Les organisations normatives ont essentiellement pour fonction d‟orienter le comportement de leurs membres en vue d‟éviter qu‟il ne devienne conflictuel2 et de faciliter la réalisation d‟objectifs communs par la coordination de leurs efforts.

1 Tous les auteurs ne sont pas d‟accord pour admettre que l‟OTAN et, surtout, l‟Organisation du pacte de Varsovie constituent des organisations internationales. Compte tenu de leurs développements organiques, ces deux institutions nous paraissent, cependant, répondre très exactement à la définition donnée plus haut. En fait, cependant, seule l‟OTAN a essayé de sortir du domaine purement militaire et de s‟occuper de règlement des différends internationaux et même de coopération économique et scientifique, mais sans grand succès.

2 Ou s‟il l‟est devenu, de faire cesser cette situation.

80 Plusieurs méthodes peuvent être utilisées à cet effet. Certaines n‟impliquent pas la prise de décisions par l‟organisation, sauf sur des questions de procédure. Son intervention peut se limiter, en effet, à mettre sur pied des consultations (conduisant ou non à des conclusions communes, mais permettant au minimum une information mutuelle), des négociations (orientées vers la réalisation d‟un accord, qui peut revêtir la forme juridique d‟un traité ou des formes moins contraignantes), ou un débat public.

Des différences de style très remarquables séparent les organisations suivant l‟importance relative qu‟elle accorde à ces divers procédés. Cette diversité peut fournir la base d‟une typologie plus raffinée, mais que les dimensions de ce chapitre ne permettent pas de développer.

Le comportement des Etats membres peut également être orienté par des décisions de l‟organisation elle-même, soit que ces décisions contiennent des directives à observer par les Etats, soit qu‟elles instituent diverses mesures de pression destinées à mener ceux-ci à se conformer à des engagements précédemment acceptés ou aux directives de l‟organisation. Ces mesures peuvent notamment prendre la forme d‟un contrôle de l‟exécution.

Ces décisions (qui sont le point d‟aboutissement d‟un débat public ou de consultations privées) peuvent elles-mêmes être plus ou moins impératives, suivant qu‟elles constituent une simple invitation (ou recommandation) ou sont juridiquement obligatoires pour leurs destinataires. Il y a là une différence dont il n‟est pas nécessaire de souligner le caractère fondamental, d‟un point de vue juridique, mais qui fait apparaître aussi deux modèles opposés de relations entre l‟organisation internationale a été habilité à prendre des décisions obligatoires sont rares, et limités habituellement à des domaines techniques (avec l‟exception notable du Conseil de sécurité, qui n‟a fait qu‟un usage extrêmement modéré de ce pouvoir).

La coopération résultant de ces décisions peut se limiter à une harmonisation des politiques et des comportements des Etats membres, par la définition de règles générales auxquelles chacun devrait se conformer. Elle peut aller jusqu‟à une véritable coopération, assurant la convergence des actions individuelles, en vue de la réalisation d‟objectifs définis (stratégie internationale pour le développement). Elle peut même aboutir à des opérations collectives, au service desquelles les Etats membres apportent des moyens dont l‟utilisation est coordonnée par les décisions de l‟organisation (mesures collectives décidées par le Conseil de sécurité, coordination des secours en cas de catastrophes, etc.).1

2. les organisations opérationnelles franchissent un pas de plus, en ce sens qu‟elles agissent elles-mêmes, par leurs propres moyens, ou par des moyens mis à leur dispositions par leurs membres, mais dont elles décident l‟emploi (et donc la direction opérationnelle). Bien entendu, dans la plupart des cas, les moyens mis en œuvre par les organisations internationales proviennent des Etats membres, mais il ya une différence de situation notable suivant qu‟ils ont été définitivement transférés à l‟organisation (comme dans le cas de contributions financières), ou qu‟ils lui ont été prêtés sur une base ad hoc (comme dans le cas de contingents militaires, ou d‟un appui logistique.

1 Il y a lieu, à cet égard, de distinguer entre les mesures collectives exécutées exclusivement par les Etats membres, par leurs moyens propres, comme la rupture des relations diplomatiques, le refus de reconnaissance et le boycottage, et les mesures exécutées par des organes de l‟organisation (force d‟urgence, mission de contrôle militaire), dont les éléments, bien que fournis par les Etats membres (contingents militaires, officiers observateurs), sont placés opérationnellement sous la seule autorité de l‟organisation.

81 Certaines organisations internationales ont une activité presque exclusivement opérationnelle : c‟est le cas, en particulier, des organisations financières et, notamment, des banques internationales qui peuvent avoir des ressources propres, comme la Banque mondiale. D‟autres ont une activité mixte, à la fois normative et opérationnelle : c‟est le cas des Nations Unies dont l‟activité reste avant tout normative et de la plupart des institutions spécialisées, à l‟exclusion des institutions financières. Elles relèvent alors simultanément alors simultanément de deux types, mais l‟importance relative prise par les activités opérationnelles s‟est traduite, en fait, par une évolution assez profonde de leurs fonctions et, souvent, par des changements structurels et de style assez remarquables, dont les répercussions sur le fonctionnement de l‟organisation ont été considérables.

§ III – Statut juridique des organisations internationales

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I – Personnalité juridique des organisations internationales 1 – Possession de la personnalité juridique

Toute organisation internationale est dotée, dès sa naissance, de la personnalité juridique internationale. C‟est un élément de sa définition. Cette personnalité est fréquemment reconnue de manière expresse dans les traités constitutifs des organisations, ou dans des instruments collatéraux2.

Que les actes soient silencieux sur ce point n‟autorise pas à admettre en doute la possession d‟une personnalité juridique internationale. Celle-ci résulte implicitement mais nécessairement des besoins exprimés par les Etats fondateurs à l‟occasion de l‟établissement de l‟organisation internationale. S‟il a été jugé opportun de mettre en place une institution permanente, et non pas une simple conférence, c‟est avec l‟intention de lui conférer les caractéristiques garantissant son efficacité : la possession de la personnalité est une des principales caractéristiques de toute institution sociale ; elle trouve son fondement dans la convention constitutive dans son ensemble, sans qu‟il soit besoin d‟une disposition l‟ « attribuant » expressément.

Comme toute personne morale, l‟organisation internationale possède une mesure minimale possède une mesure minimale de personnalité : ce « noyau dur » de la personnalité peut être qualité de « fonctionnalité » dans le cas des organisations internationales. La fonctionnalité des organisations est dérivée de la volonté des Etats, plus précisément des objectifs qu‟ils ont assignés à chaque organisation : le principe de spécialité détermine la fonctionnalité reconnue à une organisation. On peut en déduire les limites de la personnalité des organisations internationales, variables d‟une organisation à l‟autre. La personnalité in concreto correspond à l‟exercice de toutes compétences, y compris implicites, nécessaires à la

1 Ce paragraphe est largement inspiré de Quoc Din NGUYEN et al. , ‘’Droit international public : formation du droit, sujets, relations diplomatiques et consulaires, responsabilité, règlement des différends, maintien de la paix, espaces internationaux, relations économiques, environnement’’, 8e édition, L.G.D.J., Paris, 2009, pages 658 et suivantes.

2 OIT, Constitution, article 39 ; CPI (1998), Statut, article 4 ; Euratom, Traité, article 184 ; NU (1946), Convention sur les privilèges et immunités, article I, section 1 et NU (1947), Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées, article I, section 3. Par contraste, le Traité de Maastricht n‟évoque pas la personnalité juridique de l‟Union européenne, dont la nature juridique est incertaine, mais à laquelle le Traité de Amsterdam reconnaît une capacité partielle de conclure des traités.

82 réalisation des objectifs impliqués par la spécialité de l‟organisation, et seulement de ces compétences.

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