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Sources des microplastiques dans l’environnement marin .1 Sources primaires de microplastiques

Avant-Propos

Chapitre 1 Etat de l’art

I.2.2 Sources des microplastiques dans l’environnement marin .1 Sources primaires de microplastiques

Les MP d’origine primaire sont des particules plastiques fabriquées directement avec des tailles inférieures à 5 mm. Ils incluent : (i) les GPI utilisés pour la fabrication de plus grandes pièces plastiques (Figure 4A) (Barnes et al., 2009; Cole et al., 2011), (ii) les microbilles retrouvées dans les produits cosmétiques et d’entretiens (Figure 4B) (Chang, 2015; Fendall et Sewell, 2009; Napper et al., 2015; Zitko et Hanlon, 1991) et (iii) les microbilles utilisées comme abrasifs industriels (Gregory, 1996; Lusher et al., 2017a).

Figure 4 : Granulés pour l’industrie (GPI) récoltés sur la plage d’Equihen (62) (A) et microbilles de Polyéthylène retrouvées dans un produit cosmétique (B).

Les GPI se retrouvent dans l’environnement de manière non-intentionnelle suite à des problèmes lors du transport ou du stockage (Gregory, 1978). De nos jours, les microbilles plastiques dans les produits cosmétiques remplacent les particules naturelles comme par exemple des morceaux de noix ou de noyaux d’abricots utilisés auparavant (Gregory, 1996). Dans une étude, sur quatre marques cosmétiques retrouvées en supermarchés, Fendall et Sewell (2009) ont montré que les MP retrouvés dans ces produits sont majoritairement des fragments ou des billes de PE de tailles médianes comprises entre 196 et 375 µm. Dans une étude plus récente, des auteurs ont montré qu’entre 4 594 et 94 500 particules de PE (164 – 327 µm) pouvaient être libérées lors d’une seule utilisation (≈ 5 mL) d’un produit cosmétique sous forme liquide (Napper et al., 2015). De plus, depuis quelques années, la sensibilisation du grand public aux problèmes des microplastiques présents dans les produits ménagers et cosmétiques a eu pour conséquence une prise de conscience de l’industrie : certaines grandes marques et pays ont pour objectif de diminuer ou d’interdire l’utilisation de ces particules (Rochman et al., 2015a). Il existe, néanmoins, encore à ce jour un débat autour des risques

posés par ces microbilles provenant des cosmétiques (Burton, 2017; Hale, 2018). Malgré tout, en France, depuis le 1er janvier 2018, les particules plastiques sont interdites dans les produits cosmétiques (Legifrance, 2017).

Le cas des fibres textiles obtenues après passage en machine à laver est, dans le présent document, considéré comme une source primaire de MP dans l’environnement. Il faut ici noter que ces fibres peuvent être considérées d’origine primaire ou secondaire selon les auteurs (Salvador Cesa et al., 2017). Même si, ces fibres proviennent de la dégradation de vêtements synthétiques après passage en machine à laver (Salvador Cesa et al., 2017), elles ne suivent pas le même processus que pour des plastiques se fragmentant dans l’environnement (terrestre et marin). Ici, c’est l’action de laver ces vêtements synthétiques qui va produire les fibres de tailles microscopiques. En 2011, Browne et al. (2011) ont montré qu’un seul vêtement synthétique peut générer plus de 1900 fibres par lavage en machine. Par ailleurs, une autre étude a mis en évidence que le nombre de fibres produites par machine diffère significativement en fonction du type de tissus considéré. Un tissu en acrylique peut produire jusqu’à 729 000 fibres par lavage contre 138 000 et 496 000 fibres par lavage pour des tissus en polyester-coton et en polyester seul (Napper et Thompson, 2016). Une fois ces micro-fibres produites par les machines à laver, le système de collecte des eaux usées les mène jusqu’au système de traitement de ces eaux : les stations d’épurations.

Les stations d’épurations (STEP) déversent leurs effluents directement dans les cours d’eaux ou les mers sans utiliser de procédé particulier de filtration des MP. Du fait de leur petite taille, les MP peuvent être retenus ou non par les STEP et donc être libérés dans l’environnement (Carr et al., 2016; Dris et al., 2015; Leslie et al., 2017; Mason et al., 2016;

Michielssen et al., 2016; Murphy et al., 2016; van Wezel et al., 2016). Plusieurs études ont mis en évidence que les microbilles provenant des cosmétiques sont éliminées lors du traitement primaire des STEP (Michielssen et al., 2016; Murphy et al., 2016) alors que les fibres synthétiques sont majoritaires libérées dans les effluents de sortie de STEP (Mason et al., 2016; Michielssen et al., 2016; Mintenig et al., 2017; Ziajahromi et al., 2017b). Cela peut représenter entre 460 (Ziajahromi et al., 2017b) et 5 000 millions de particules déversées par jour (Mintenig et al., 2017). Dans une étude réalisée dans une STEP de région parisienne, il a été mis en évidence que chaque étape du traitement des effluents liquides diminue la concentration en MP, majoritairement des fibres, et qu’entre 83 et 95% des MP sont éliminés, surtout ceux ayant des tailles supérieures à 1 mm (Dris et al., 2015). Dans une étude similaire réalisée aux Pays-Bas, la concentration en fibres, fragments et sphères a aussi été diminuée (72 ± 61% (écart-type)) entre l’entrée et la sortie de la STEP mais les auteurs ont montré qu’il

y a tout de même 650 MP/kg de boues en sortie de STEP (Leslie et al., 2017). Récemment, il a été estimé qu’entre 63 000 et 430 000 tonnes de MP sont déversés sur les sols européens via les boues d’épuration (Nizzetto et al., 2016). De plus, comme ces boues d’épuration sont utilisées pour fertiliser les sols en agriculture, les auteurs suggèrent qu’une pollution des milieux terrestres et le ruissellement de ces MP crée une nouvelle voie de contamination du milieu marin (Leslie et al., 2017; Michielssen et al., 2016; Murphy et al., 2016).

Une autre source de MP dans l’environnement, qui peut être considérée comme primaire, est le dépôt atmosphérique de fibres synthétiques (Dris et al., 2016; Dris et al., 2015). En effet, il a été montré que les retombées atmosphériques contribuent à l’apport d’entre 2 et 355 particules/m²/j en région parisienne dont 29% des fibres retrouvées sont d’origines synthétiques.

I.2.2.2 Sources secondaires de microplastiques

Les MP d’origine secondaire sont des particules issues de la fragmentation des plastiques. Ceci inclue les déchets plastiques provenant des activités terrestres ainsi que les plastiques liés aux activités de pêche et d’aquaculture (Ryan et al., 2009; Watson et al., 2006). Les activités terrestres sont responsables de 80% des apports de plastiques dans l’environnement marin (Andrady, 2011).

La dégradation des plastiques correspond à la modification des propriétés des polymères engendrée par des mécanismes physiques, des réactions chimiques ou biologiques conduisant à la scission des liaisons chimiques (Singh et Sharma, 2008). Cette dégradation se traduit par la présence de fissures et de craquelures accompagnées d’une décoloration des polymères (Singh et Sharma, 2008) pouvant conduire à la fragmentation en plus petites particules. Il existe plusieurs types de dégradation des plastiques dont la principale en environnement marin est la photo-dégradation (Barnes et al., 2009). Les rayonnements ultra-violet (UV) vont favoriser l’oxydation des chaînes polymériques au niveau des liaisons C-H et C-C formant ainsi des radicaux libres (Singh et Sharma, 2008). Ces radicaux libres vont ensuite réagir avec l’oxygène pour former des radicaux hydroperoxydes. Ces radicaux hyperoxydes en se propageant vont ensuite conduire à l’autooxydation de la chaîne polymérique menant à sa destruction (Singh et Sharma, 2008). La vitesse de photo-dégradation par les UV dépend de la nature du polymère, c’est à diresa composition monomérique et la présence d’additif(s), ainsi que du milieu dans lequel il se trouve. En effet, la photo-dégradation des plastiques est plus rapide sur les plages où les UV en combinaison avec la chaleur et l’abrasion mécanique par les grains de sable agissent en synergie. Contrairement à la dégradation sur les plages, ce

phénomène à la surface de l’eau ou en profondeur est moins rapide car les rayonnements UV diminuent dans l’eau avec la profondeur (GESAMP, 2017). Il existe, en plus de la photo-dégradation, d’autres processus qui sont à l’origine de la dégradation des polymères plastiques en milieu marin. On retrouve la dégradation liée aux bactéries (Yoshida et al., 2016), la fragmentation liée à certains organismes, comme par exemple le krill d’Antarctique (Dawson

et al., 2018) et les « stress » mécaniques (vagues, abrasion, vent …) (Andrady, 2011; Lambert et Wagner, 2016a; ter Halle et al., 2016; Weinstein et al., 2016).

La Figure 5 présente les différentes sources de MP (primaires et secondaires) retrouvées dans l’environnement marin.

Figure 5 : Schéma représentant les sources primaires et secondaires des microplastiques dans l’environnement marin. I correspond à des sources primaires et II à des sources secondaires de microplastiques.