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LES SOLUTIONS APPORTÉES PAR LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DU SYSTEME DE DROIT CIVIL

INTERNATIONALE DE MARCHANDISES PAR LA PRIMAUTÉ DU DROIT CIVIL

SECTION 1 LES SOLUTIONS APPORTÉES PAR LES PRINCIPES GÉNÉRAUX DU SYSTEME DE DROIT CIVIL

Les principes généraux du droit civil (des obligations) ont eu une portée énorme pour les droits nationaux et pour le droit du commerce international. De la même façon que les usages et les contrats, ils font aussi partie de la lex mercatoria853 et sont appliqués dans les sentences de la CCI. Comme le notent les Professeurs Jacquet, Delebecque et Corneloup : « Commentant Dworkin, le philosophe P. Ricoeur n’écrit-il pas que « ce sont plus volontiers

des principes que des règles qui concourent à la solution des affaires difficiles. La jurisprudence arbitrale a d’ailleurs dégagé des principes de nature à résoudre bien des « cas difficiles » : si pacta sunt servanda ainsi que le principe de la bonne foi prennent la première place, d’autres principes plus précis s’en déduisent ou s’y rattachent. Ainsi le principe de la responsabilité internationale a été affirmé. Il en est de même du principe non adimplenti contractus, de la compensation entre deux dettes connexes ; la réparation doit se limiter au dommage prévisible. Le créancier d’une obligation inexécutée ou incorrectement exécutée doit toujours s’efforcer de minimiser son dommage »854.

Le rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats français indique quant à lui parmi ces objectifs : « 1° Affirmer les principes généraux du droit des contrats tels que la bonne foi et

la liberté contractuelle ».

En effet, cette ordonnance a consacré, dans un chapitre intitulé « Dispositions liminaires », les principes de liberté contractuelle, de force obligatoire du contrat et de bonne foi ; codifiés aux nouveaux articles 1102, 1103 et 1104 du Code civil.

Le rapport ajoute : « Ce choix de mettre en exergue trois principes fondamentaux

exprime l'un des objectifs essentiels poursuivis par l'ordonnance : il s'agit de trouver un équilibre entre justice contractuelle et autonomie de la volonté ».

853 Cf. JACQUET J-M, DELEBECQUE Ph. et CORNELOUP S., Droit du commerce international, 3e éd.,

Dalloz, Paris, France, 2014, p. 62.

Certains principes sont aussi expressément consacrés dans la CVIM. C’est le cas du principe de bonne foi, à l’article 7 nº 1. D’autres ont été retenus implicitement855, comme celui de la poursuite du contrat856, qui est sous-jacent dans les articles 34, 37, 48, 49, 51, 64, 71 et 72 de la CVIM857.

Dans cette section, nous démontrerons que la bonne foi, l’un des principes à la base du droit civil, a été retenu par la CVIM en tant que principe général dans son article 7, nº 1, sans le limiter à l’interprétation comme l’a prétendu erronément certains auteurs de common

law. Elle s’étend même aux pourparlers, comme en droit français ou chilien.

Nous constaterons que ce principe général de bonne foi issu du droit civil a reçu une consécration positive dans plusieurs instruments du droit commercial international, par exemple : le GATT (article XXIII :1 (b)), le GATS (article 26.1) et l’article 2 A de la loi type de la CNUDCI sur l’arbitrage commercial international. On comprend dès lors pourquoi la CVIM lui accorde une importance majeure.

Par ailleurs, nous allons voir comment la bonne foi-loyauté oblige, en tant que règle générale, de remplir les obligations contractées de la façon stipulée au contrat, voire en nature. De plus, la possibilité de demander la réduction du prix, création du droit civil reprise à l’article 50 de la CVIM, est en accord aussi avec cet esprit de collaboration inhérent à la bonne foi.

Dans la perspective de permettre d’accomplir le but contractuel, nous démontrerons que la résolution par infraction aux obligations des parties ne doit pas être extrêmement rigide et opérer pour n’importe quelle infraction contractuelle. En revanche, seules les inexécutions d’une certaine importance, voir essentielles, doivent donner lieu à une action en résolution du contrat de vente de marchandises, comme le prévoient les P.U. et la CVIM.

855

L’article 7 nº2 CVIM dispose : « les questions concernant les matières régies par la présente convention et

qui ne sont pas expressément tranchées par elle seront réglées par les principes généraux dont elle s’inspire ou, à défaut de ces principes, conformément à la loi applicable en vertu des règles du droit international privé ».

856 Le principe favor contractus, exige le maintien du contrat dans la mesure du possible. Cf. EBERHARD

Steven, Les sanctions de l’inexécution du contrat et les Principes UNIDROIT, Cedidac, Suisse, 2005, p. 70.

856

Compilation du droit en vigueur à un moment donné. Comme celui de la bonne foi, c’est une œuvre des juristes français. La meilleure preuve, nous la trouvons dans la règle « attributive » consacrée par le Code civil de 1804, article 1157.

857

Dans ce sens: DI MATTEO L., DHOOGE L., GREENE S. et al., International Sales Law, Cambridge University press, États-Unis d’Amérique, 2005, p. 23-24.

Nous démontrerons d’autre part que bien que l’atténuation du préjudice soit plutôt une obligation de la common law, la bonne foi-loyauté l’exige aussi. Partant, l’article 77 CVIM, même s’il est inspiré par la common law, est en acord aussi avec le système de droit civil aussi.

Finalement, on verra l’utilité pratique des principes de bonne foi et d’autonomie de la volonté dans le commerce international et comment le premier de ces principes a une relation directe avec d’autres principes omniprésents dans la Convention de Vienne de 1980, telle la poursuite du contrat.

On commencera par l’étude du principe d’autonomie.

§ 1 - L’autonomie de la volonté dans la vente internationale de