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§ 3 La validité des contrats

A. Les notions de base

24. Importance du contrat de vente - Depuis toujours, la vente a été le plus important des

contrats patrimoniaux, dans tous les systèmes de droit. La common law ne fait pas exception à cette règle économique et juridique : la vente est réglementée en droit anglais par la loi sur la vente de marchandises de 1979 précitée (Sale of Goods Act ; s.g.a.) et d’autres qui sont venues apporter des précisions22. Pour comprendre sa réglementation particulière, il est nécessaire d’étudier certaines notions générales du droit des contrats anglais, qui ont une relation supplétive avec le contrat de vente.

25. Notion du contrat - Selon le droit anglais, un contrat est une promesse ayant force

obligatoire, d’après la loi. Cette définition, issue du droit des contrats, a été posée par Sir

Jack Beatson dans l’ouvrage Anson’s Law of Contract (28e édition, Oxford University press, 2002, p. 1), où il indique plus précisément : « Le droit des contrats est la branche du droit

qui détermine qu’une promesse est légalement obligatoire pour la personne qui a fait cette promesse »23.

26. Le consensualisme - Les contrats sont consensuels, en règle générale (à l’exception des

contrats de mandat de paiement, d’administration des immeubles, prénuptiaux, pour acheter des immeubles futurs, de crédit, d’assurance, et pour l’achat de véhicules24) et bilatéraux.

22 Voir supra.

23 BRANAA, J-É., BRUNON-ERNST, A., CHAUDOIR, N., et al., op. cit, page 231. 24

Dans la plupart des cas, comme dans le droit civil, leur fondement réside dans l’autonomie de la volonté des parties25.

27. Types des termes dans un contrat - Les contrats, en droit anglais, comprennent trois

catégories de termes : conditions, warranties et innominate terms26.

Les conditions (conditions) sont des clauses d’importance capitale ; elles autorisent le cocontractant diligent à agir en résolution (avoidance) et à réclamer des dommages et intérêts en cas de rupture fautive de l’autre partie. Par exemple, l’obligation de délivrance en temps opportun pour les ventes commerciales, de périssables ou de matières premières.

Les warranties (garanties) sont des termes moins importants, voire non essentiels. En cas d’infraction, la partie diligente peut agir uniquement en dommages et intérêts. Par exemple, l’obligation de livrer des marchandises en bon état et conformes à leur fonction habituelle ou prévue.

Les innominate terms (termes innommés) ou intermediate terms (termes intermédiaires), s’obtiennent par exclusion des deux catégories antérieures (ce qui n’est ni une condition ni une garantie est un terme innommé ou intermédiaire). Les remedies (sanctions à l’inexécution) sont diverses et dépendent de la nature de la violation contractuelle : « la sanction en cas d’infraction d’un terme intermédiaire dépend de la

nature de l’infraction. Si le demandeur a perdu tout le bénéfice du contrat il sera autorisé à considérer le contrat comme répudié et agir en dommages et intérêts. Sinon, il pourra réclamer seulement des dommages et intérêts »27.

En conséquence, si l’inexécution est capitale et prive le contrat de tout son intérêt pour l’une des parties, on parle de fundamental breach28.

28. Classification des contrats en droit anglais - Les contrats peuvent être solennels (deed,

under seal or covenant) et simples ou consensuels (simple contracts) ; bilatéraux (bilateral)

25

A l’exception des contrats de consommation et du travail, parmi d’autres.

26 AZZOUZ, S., op. cit., page 34. 27 Ibidem, traduction libre. 28

ou unilatéraux (unilateral) ; explicites (express) ou implicites (implied) ou quasi-contrats ; valides, nuls, annulables, et illégaux.

Tout comme en droit civil, les contrats consensuels sont la règle. Les deeds sont requis, exceptionnellement, dans la vente d’immeubles et dans les donations ou charités.

Les contrats bilatéraux sont ceux dans lesquels les deux parties s’obligent réciproquement, dès la formation de la convention. Dans les contrats unilatéraux, en revanche, seule une partie est obligée dès l’origine et par la suite, seule l’autre partie reste éventuellement obligée (dans la vente d’un immeuble, par exemple, l’agent immobilier est obligé de montrer l’immeuble et de chercher des acheteurs potentiels - pas de vendre -, mais s’il le vend, le vendeur est obligé de lui payer une commission29).

Le contrat explicite est un contrat dans lequel les termes sont mentionnés par écrit par les parties ; l’implicite, en revanche, est celui qui se déduit de leurs rapports ou actions.

D’autre part, les quasi-contrats, comme en droit civil, sont des actes qui ne sont pas des contrats, mais qui sont reconnus par le droit, afin d’éviter un enrichissement injustifié (enrichissement sans cause).

Les contrats licites sont ceux qui produisent normalement tous leurs effets.

Les contrats nuls, sont ceux qui ont été déclarés non valables à l’occasion d’une instance judiciaire, en raison, par exemple, d’un vice (ou d’un défaut) de consentement. Annulables, ceux qui ont un vice ou une autre cause de nullité.

Les contrats illégaux, sont ceux qui portent atteinte à l’ordre public, aux bonnes mœurs, ou qui sont susceptibles de constituer une infraction pénale.

29. L’importance de la consideration dans la common law - Pour être valides, les contrats

doivent avoir une consideration, c’est à dire, une contrepartie pécuniaire – money

consideration – (d’habitude30), présente ou future31 ou quelque chose d’intérêt pour l’autre partie32. Les considerations passées, même celles qui ne sont pas susceptibles d’évaluation financière, ne sont pas valables en droit anglais33.

29 BRANAA, J-É., BRUNON-ERNST, A., CHAUDOIR, N., et al., op. cit, page 235.

30 Une garantie au moment de contracter serait une consideration suffisante, Roscorla vs. Thomas, (1842)

EWHC J74.

31 Currie vs. Misa, (1875) LR 10 Ex 153. 32 Dickinson vs. Dodds, (1876) 2 Ch D 463. 33

Il convient de préciser que la consideration est une notion différente de la cause du droit civil. Elle emporte un quid pro quo. De cette façon, les actes à titre gratuit n’ont pas de

consideration suffisant34 et doivent obéir à des conditions de forme spécifiques (deeds).

“Montant de la consideration.

Le montant de la consideration importe peu ; de fait son montant n’est pas une condition de sa validité. Tout ce qu’une personne pourrait consentir à échanger contre la promesse d’autrui peut servir de consideration à cette promesse. Les tribunaux n’exigent pas qu’il y ait égalité de valeur entre la consideration d’un côté et la promesse ou le préjudice de l’autre. Le fait que la consideration soit adéquate ou suffisante ne signifie pas qu’elle doive avoir une valeur économique suffisante. Les tribunaux voient dans un “simple grain de poivre35” une consideration ou contrepartie suffisante 36”.

30. La capacité - Il est nécessaire aussi que les parties aient la capacité contractuelle (sont

exclus les mineurs37, les malades mentaux et les personnes privées de jugement – alcooliques, drogués –, les faillis, les prisonniers, et ceux qui contractent au nom de personnes morales sans pouvoirs de représentation suffisants38) et qu’existe aussi l’intention

de créer une relation juridique (d’après la définition du contrat). Cette intention est

présumée dans les contrats commerciaux ou civils, s’ils sont onéreux, et souvent écartée dans les relations entre proches39.

Enfin, un accord de volontés (offre et acceptation) est nécessaire.

31. L’effet relatif des contrats - Les contrats de common law, en règle générale, comme en

droit civil, ne produisent pas d’effets à l’égard des tiers. Néanmoins, d’après la loi sur les contrats de 1999 – Droits des tiers - (Contracts – Rights of Third Parties- Act, 1999), il est

34

Bret vs. JS, (1600) Cro Eliz 756.

35 Cela explique le fait que souvent des sociétés importantes sont offertes et/ou vendues pour la modique

somme de seulement une livre sterling. Voir sur ce point (consultés la dernière fois le 30 septembre 2016) : http://news.bbc.co.uk/2/hi/uk_news/magazine/5262616.stm

https://www.theguardian.com/business/2008/nov/19/woolworths-highstreetretailers

36LEVASSEUR Alain A., Le contrat en droit américain, Dalloz, Paris,1996, pp 43-44.

37 A l’exception des contrats qui sont nécessaires pour le soutien de la vie de l’incapable (alimention,

logement, médicine). Cette règle est posée par l’article 3 de la loi sur la vente de marchandises de 1979 (Sale of Goods Act, 1979).

38 AZZOUZ, S., op. cit, page 46. 39

possible pour ces derniers de réclamer des droits, dans certains cas, par exemple, quand l’acheteur a fait savoir clairement au fournisseur qu’il achetait des produits pour un tiers40.

« Traditionnellement, le contrat ne produisait aucun effet à l’égard des tiers : il ne

créait aucune obligation à sa charge, ni aucun droit à son profit. Cette règle, à laquelle le législateur avait apporté d’assez nombreuses exceptions, a été abandonnée en 1999 (Contract (Right of Third Parties) Act, 1999).

Désormais, le tiers possède un droit à exiger du promettant que soit respectée la clause lui attribuant des droits et il peut s’opposer à ce que les deux parties modifient cette clause à son détriment »41.