3.3 T rois versions du théorème des zéros
3.3.3 Solutions analytiques
Il ne resteplus qu'àpar ourirladeuxièmemoitiédu hemin ommen é en se tion3.3.2:
démontrer que si
p
est un idéal diérentiel premier etp /∈ p
alorsp
admet une solution en série formelle, qui onverge dans un ouvertD
etqui n'annule pasp
.Proposition 7 Il sut de montrer que tout idéal diérentiel premier admet une solution
analytique.
Preuve On veut montrer que si
p
est un idéal diérentiel premier etp /∈ p
alorsp
admet une solution analytique qui n'annule pasp
. Considérons l'idéal diérentiel[p, p un+1 − 1]
où
un+1
est unenouvelleindéterminéediérentielle.Cet idéaladmetdes solutionsabstraites (ou en série formelle) d'aprèsles hypothèses et l'un des théorèmes des zéros quenous avonsdéjàdémontrés. Ilest don diérentde l'idéalunité etest ontenudans un idéal diérentiel
premier
p′
deR{un+1}
. D'une part, au une solution dep′
n'annulep
d'autre part, il y a bije tion entre lessolutions dep′
et lessolutionsdep
qui n'annulent pasp
. Il sut don de démontrer quep′
admetau moinsune solutionanalytiqueet don que toutidéal diérentiel premieradmet une solution analytique.La démonstration en est faite dans la proposition 9. Le résultat est onnu depuis les
travauxde CharlesRiquier[85℄. Lethéorème de Riquier,quiest une généralisationdu
théo-rème de Cau hyKovalevska, est à la base de théorèmes de Joseph Ritt [86℄ et du [96, 97,
EmbeddingTheorem℄ d'AbrahamSeidenberg. ArianePéladanGermaabien lariédanssa
thèse [80℄ lelienexistant entre lesensembles ara téristiqueset leshypothèses du théorème
de Riquier.Ré emment,FrançoisLemairea omplètementredémontré [62,Théorème
d'ana-lyti ité, page 50℄ e dernier ave un formalisme plus moderne et en séparant distin tement
la preuve d'existen e de solutionsen séries formelles de la preuve d'analyti ité. C'est sur e
dernier travailque je m'appuie i i.
Proposition 8 (théorème d'analyti ité)
Soit
C
un ensemble ara téristique diérentiel (ou en ore une haînediérentielle régu-lière) représentant un idéal diérentiel premierp
pour un lassement à lafois de Riquier et ompatible ave l'ordre total4
. Soient
L
l'ensemble des dérivées dominantes deC
etN
l'en-semble de toutes lesdérivées quine sontles dérivées d'au un élémentdeL
. Soit(u1, . . . , un)
une solution en série formelle de
p
, les oe ientscj,a1,...,am
des séries étant pris dans un 4sous orps
G0
du orps des nombres omplexes. Soit(˜u1, . . . , ˜un)
la restri tion àN
de la solution :˜
uj =X
˜
cj,a1,...,am
xa1
1 · · · xam
m
a1!· · · am!
dénie par
˜cj,a1,...,am = cj,a1,...,am
si∂a1+···+amuj
∂xa1
1 · · · ∂xam
m
∈ N
et zéro sinon. Les séries
u˜j
sont toutes analytiques au voisinage de l'origine si et seulement si les sériesuj
le sont aussi.Proposition 9 Tout idéal diérentielpremier admet une solution analytique.
Preuve On s'appuie dans ette preuve sur la notiond'ensemble ara téristique diérentiel
(ou en ore de haîne diérentielle régulière) qui est développée dans le hapitre 5.
Tout idéal diérentiel premier peut être présenté par un ensemble ara téristique
dié-rentiel
C
pour un lassement de Riquier ompatible ave l'ordre total. SoientN
l'ensemble des dérivées sous leses aliers etX
l'ensembledes dérivées dominantes deC
. LesystèmeC
, vu omme un système non diérentiel deQ[X ∪ N]
admet une innité de solutions ayant un nombre ni de oordonnées non nulles. D'après laproposition 32, page 100 et pour peuqu'elles n'annulentpas ertainspolynmesen nombre ni quidépendentde
C
, essolutions dénissent des séries formelles solutions de l'idéal diérentiel premier. Les restri tions àN
de essériessontanalytiques( e sontdespolynmes).D'après lapropositionpré édente, les
séries ellesmêmes sont analytiques.
Illustrons laproposition 8sur un exemple (linéaire) élèbre 5
:l'équation de la haleur
∂2u
∂x2 = ∂u
∂t·
Cette équation forme un ensemble ara téristique de l'idéal diérentiel qu'elle engendre,
quelquesoitle lassement hoisi.Sur et exemple,laseule hosequidépende du lassement
'estladérivée dominantede l'équation.Sile lassementest ompatibleave l'ordretotal,la
dérivéedominanteest
∂2u/∂x2
sinon 'est
∂u/∂t
.Pourmontrerl'importan edes hypothèses, supposons quela dérivée dominante soit∂u/∂t
. La solutionpurement algébrique∂k+ℓu
∂xk∂tℓ 7→ (k + 2ℓ)!
de l'équation de la haleur fournit un solution en série formelle
u(x, t) =X (k + 2ℓ)!
k! ℓ! x
ktℓ.
5
Historiquement, 'est l'exempledonts'est servieSophieKovalevskapourmontrerl'importan e
d'expri-merlesvariableslesplusdérivéesen fon tiondes autres, 'estàdirel'importan e des lassements
Pour
x > 0
ett > 0
lasérie ne onverge paspuisqu'elle roît plusvitequelasérie divergente bien onnue :X
ℓ! tℓ.
Pourtant,la restri tion àN =
∂ku
∂xk | k ≥ 0
de la série formelle est bien une série onvergente :
u(x, 0) =X
xk = 1
1− x·
La proposition (le théorème de Cau hyKovalevska sut) nous indique que ette situation
ne se produit pas si la dérivée dominante est
∂2u/∂x2
. L'exemple suivant, dû à François
Lemaire [60℄,montre l'importan edes lassements de Riquier.
∂2u
∂x2 = ∂
2u
∂x ∂t +
∂2u
∂t2 + v, ∂
2v
∂t2 = ∂
2v
∂x ∂t +
∂2v
∂x2 + u.
On hoisitlesdeux membres gau hesdes équations ommedérivées dominantesdu système.
Il faut pour ela que le lassement hoisi ne soit pas de Riquier. Il peut par ontre être
ompatibleave l'ordretotal.L'ensemble
N
est formédes dérivéesdeu
dérivées auplus une fois par rapport àx
etdes dérivées dev
dérivées au plus une fois par rapport àt
. On peut former une solution en série formelle(u, v)
dont larestri tion àN
est dénie paru(0, t) = ∂u
∂x(0, t) = e
t, v(x, 0) = ∂v
∂t (x, 0) = e
x.
On peut montrer que les séries
u
etv
ne sont pas analytiques au voisinage de l'origine. Pourtantla restri tion àN
de lasolution l'est.Théorème et dénition 3 (théorème des zéros pour les fon tions analytiques)
Dénissons une solution analytique de
Σ
omme la donnée d'unn
uplet de fon tions(u1, . . . , un)
dem
variables réelles ou omplexes,analytiques dans un ouvertD
.Alors un polynme diérentiel
p ∈ R
s'annule sur toutes les solutions analytiques deΣ
si et seulement si
p∈p[Σ]
. Enparti ulierΣ
est sans solution analytiquesi et seulement si1∈ [Σ]
.Pour des fon tions de
m
variables omplexes, lespropriétés suivantes sont équivalentes : être une fois dérivable ( 'estàdire holomorphe), être indéniment dérivable et êtreanaly-tique. Ce n'est pas le as pour les fon tions de
m
variables réelles ( f. les exemples donnés en début de hapitre).Il est remarquable quelethéorème des zéros est valableaussi pour lesfon tions
indéni-mentdérivablesde
m
variablesréelles.Eneet,sip∈p[Σ]
alorstoutesolutionindéniment dérivabledeΣ
est solutiondep
( 'estimmédiatsip∈ [Σ]
et,siune puissan ed'unefon tionindéniment dérivable
p
est nulle sur un ouvert alorsp
est nulle sur et ouvert). Inverse-ment, sip /∈ p[Σ]
alorsΣ
admet une solution analytique (et don indéniment dérivable) qui n'annulepasp
.C'estlemé anismedes indagesquiestfauxpourlesfon tionsindénimentdérivables
de
m
variablesréelles:l'ensembledes solutionsindénimentdérivablesde l'équationu v = 0
ontientdes solutionsqui ne sont nisolution de
u = 0
ni solutiondev = 0
.Enn, l'usage du théorème des zéros nous for e à her her des fon tions analytiques à
image dans
C
mais pas né essairement des fon tions analytiques dem
variables omplexes. Par exemple,l'équation diérentielleu2+ 1 = 0
de l'anneau de polynmes diérentiels
R = Q{u}
, muni de la dérivationδx
admet pour solutions les fon tionsu(x) = ±i
. Ces fon tions onstantes sont à image dansC
mais la variablex
peut être aussi bien une variableréelle que omplexe.Onn'arienpré iséausujetdudomaine
D
pouréviter ertainsproblèmesd'indé idabilité. La se tion6.1.5 page 100 fournit quelques pré isions.La théorie des haînes diérentielles
Élimination diérentielle et estimation
de paramètres
Comme dans la partie pré édente, je ommen e par montrer omment on peut utiliser
ertains outils algébriques et algorithmiques. Ces outils sont étudiés de façon approfondie
dans les hapitressuivants.
On dé rit dans e hapitreuneappli ation de l'éliminationdiérentielle eten parti ulier
desalgorithmesde hangementde lassementdansles haînesdiérentiellesrégulières.Cette
appli ationestmiseen÷uvre dansleprojetLÉPISMEdontleprin ipe,misaupointpar
Li-lianneDenisVidal,GhislaineJolyBlan hard etCélineNoiret [30℄,est exposé dans lathèse
[75℄. Cetteappli ation onsisteà tenter d'estimer lesvaleursde paramètres de systèmes
dy-namiquesdonttouteslesvariablesnesontpasobservées .Lorsquetouteslesvariablessont
observées, la méthode fon tionne toujours mais n'a plus besoin d'élimination diérentielle.
L'étude de l'identiabilité lo ale ou globale d'un système par des méthodes d'élimination
diérentielle est un problème an ien [105, 42, 78, 32, 34, 33, 64℄ et toujours a tuel [3, 93℄.
L'originalité de la thèse de Céline Noiret réside d'une part dans l'utilisationd'algorithmes
d'élimination diérentielle rigoureux, d'autre part dans l'étude omplète d'exemples, 'est
àdire jusqu'à l'estimation nale des paramètres. Elle mélange al ul symbolique et al ul
numérique. En pratique, elle suppose qu'on dispose d'une modélisation pré ise des
phéno-mènes qu'on observe et d'un nombre susant de mesures susamment pré ises. Dans le
adre du projet LÉPISME, nous avons tenté de l'appliquer à des systèmes issus de la
bio-logie. Bien que la méthode ait été appliquée ave un ertain su ès en pharma o inétique
[27, 102℄, jepenseque labiologien'estprobablementpas ledomaineleplus adaptéàla
mé-thode:lesmodèlessontsouventapproximatifsetlesmesures fortementbruitées. Jevaistout
de mêmeprésenter l'appli ationà partird'unexemple issu delabiologiemais en présentant
leproblème omme un hallengea adémique plutt que omme une vraieappli ation.
Le diagramme suivant représente e qu'on appelle un modèle à ompartiments tel
qu'on lesprésentedans [20℄.Les deux ompartimentsreprésentent lesang et un organe.Un
médi amentestinje té danslesang.Ilpeutpasserdusangdansl'organe,revenirde l'organe
dans lesang. Il peut aussi sortirdu système, sous l'a tiondes reins par exemple.On pré ise
temps susamment petit, la on entration de médi ament passant du ompartiment
i
au ompartimentj
estproportionnelleàla on entrationdemédi amentdansle ompartimenti
. La onstantede proportionnalitéest unparamètredu modèle.Elleest notéekij
.On suppose aussi que l'é hange entre le ompartiment1
et les reins suit une loi de type Mi haelis Menten . Cette loi est plus di ile à expliquer. Elle se dérive normalement à partir de laloi d'a tionde masse en himiesous ertaines hypothèses. Ellefait apparaître un terme
non linéairedans leséquations quidépend de deux paramètres : une vitesse maximale
Ve
et une autre onstanteke
.ompartiment
1
ompartiment2
organe sangk12
k21
ke, Ve
é hangedetypeMi haelis-Menten
é hangelinéaire
é hangelinéaire
À partirdu diagramme idessus, ilest possiblede dériverautomatiquementun système
diérentiel non linéaire. On asso ie à haque ompartiment
1
et2
une fon tion du tempsx1(t)
etx2(t)
représentant la on entration de médi ament qui s'y trouve à tout instantt
. Pour onstruire leséquations diérentielles, il sut de onsidérer lesé hanges les uns aprèslesautres. Chaque é hange ajouteun terme aumembre droitde l'équationdiérentielle qui
régit le ompartiment de départ (ave un signe moins) et le même terme (ave un signe
plus) aumembre droit de l'équationdiérentielle quirégit le ompartimentd'arrivée, e qui
impliquequ'il ya onservationdu médi ament.Attention au piège: e sontlesquantitésde
médi amentqui sont onservées alorsqueé hanges sont al ulésàpartirdes on entrations.
Pour simplier, on suppose idessous que les deux ompartiments ont un volume unitaire
et on onfond les deux notions. On obtient par e pro édé un système de deux équations
diérentielles non linéaires dépendant de quatre paramètres :
k12, k21, ke
etVe
. La se onde est soit linéaire soit polynomiale (ça dépend de la façon dont on voit les paramètres). Lapremièreestunefra tionrationnellemaiselleestéquivalenteàuneéquationpolynomiale:on
peutlamultiplierparsondénominateurdontonestsûrqu'iln'estjamaisnul:lesparamètres
sont tous des réels positifs etles on entrationsaussi.
˙x1 = −k12x1+ k21x2− Vex1
ke+ x1
,
˙x2 = k12x1− k21x2.
On en a ni ave le modèle générique. On s'intéresse maintenant à une instan e (à un as
parti ulier)de emodèle.Dans e asparti ulier,ondisposedequelquesinformationssurles
paramètres:onsuppose que
k12
etk21
sonttotalementin onnus, qu'on onnaîtun intervalle de valeurs70≤ Ve ≤ 110
pourVe
(il est assez réaliste de supposer onnues des four hettesde valeurs pour les paramètres) et que
ke = 7
est onnu ( 'est nettement moins réaliste quoiqu'ilarrivequ'on puissenormaliser leséquationsen divisant haque paramètre par l'und'eux). Surtout, on dispose de quelques informations sur les ompartiments : on suppose
que le ompartiment
1
est observé , 'estàdire qu'on dispose d'un hier de mesures pourx1(t)
mais que le ompartiment2
ne l'est pas. On saitjuste qu'initialementx2(0) = 0
'estàdire que l'organe ne ontient pas de médi ament initialement. Pour xer les idées,
voi iun extrait du hier de mesures donton dispose pour
x1(t)
.# t x1(t) 0.00000e-01 5.00000e+01 5.00000e-02 4.45078e+01 1.00000e-01 3.93623e+01 ... 1.40000e+00 6.63179e-02 1.45000e+00 5.72966e-02 1.50000e+00 4.95270e-02
Le hallengea adémiqueposéestlesuivant:le hierdemesures idessusaétéengendré
à partir du système diérentiel, par intégration numérique pour ertaines valeurs des trois
paramètres