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Les sites d’enquête : une typologie des contrastes sociaux dans l’espace urbain

Le choix de villes localisées dans l’agglomération parisienne pour la conduite de cette enquête n’est pas fortuit. Cette agglomération juxtapose une diversité remarquable de configurations du peuplement, de sorte que la représentation de l’espace sur laquelle la politique de la ville s’est historiquement construite, celle du contraste absolu entre des quartiers et le reste de la ville, n’apparaît pas opérante175. Les recommandations du CPER dessinaient une pluralité de stratégies possibles face à

une diversité d’enjeux territoriaux. Il sera particulièrement intéressant d’observer si la stratégie univoque de mixité sociale aujourd'hui définie par le pouvoir national retrouve localement une certaine plasticité et ouvre un espace pour une pluralité d’orientations afin de tenir compte de la diversité des contextes socio-urbains franciliens.

Pour observer les traductions locales de la norme nationale de mixité, nous avons sélectionné neuf villes représentatives d’une variété de contextes politiques et urbains : Argenteuil, Aubervilliers, Bagneux, Bourg-la-Reine, Clichy-sous-Bois, Créteil, Fontenay-aux-Roses, Montfermeil et Sceaux. Deux de ces villes sont regroupées en communauté d’agglomération (Clichy-sous-Bois/Montfermeil et Montfermeil) et les quatre communes du sud des Hauts-de-Seine (Bagneux, Bourg-la-Reine, Fontenay- aux-Roses et Sceaux) sont associées depuis une quinzaine d’années pour conduire les actions de la politique de la ville relatives au quartier intercommunal des Blagis. Nous avons également retenu des villes hétérogènes au plan politique : deux sont dirigées par l’UMP (Argenteuil et Montfermeil), deux par l’ex-UDF (Sceaux et Bourg-la-Reine), trois par le Parti socialiste (Clichy-sous-Bois, Créteil et Fontenay- aux-Roses) et deux par le Parti communiste (Aubervilliers et Bagneux). A l’exception de Bourg-la-Reine, Fontenay-aux-Roses et Sceaux, toutes les villes de notre échantillon sont engagées, à un stade plus ou moins avancé, dans des procédures de rénovation urbaine : deux sont gérées par l’UMP (Argenteuil et Montfermeil), deux par le PS (Clichy-sous-Bois et Créteil) et deux par le PCF (Bagneux et Aubervilliers). La nature des contrastes entre le peuplement des quartiers concernés par ces opérations, celui de leur ville d’appartenance et de leur environnement plus large, apparaît très dissemblable d’une ville à l’autre, indépendamment de leur coloration politique. Les cinq terrains d’enquête ont également été retenus parce qu’ils apparaissent représentatifs des cinq contextes territoriaux distingués par l’évaluation francilienne de la politique de la ville : Argenteuil est emblématique des territoires historiques de l’industrie et de l’habitat ouvrier affectés par la désindustralisation ; le quartier intercommunal des Blagis situé dans le sud des Hauts-de-Seine constitue une poche de pauvreté qui contraste fortement avec son environnement proche, du moins celui de Bourg-la-Reine et Sceaux ; à cheval sur les communes de Clichy-sous-Bois et Montfermeil, le quartier de grands ensembles appelé « Le Plateau » est manifestement disproportionné dans son environnement local à dominante pavillonnaire ; le développement de Créteil a été conçu selon les principes urbanistiques des villes nouvelles et, bien que peu marqués dans l’espace, certains de ses quartiers ou micro-quartiers connaissent aujourd'hui un processus de dévalorisation ; Aubervilliers, enfin, est typique des villes de petite couronne très spécialisées dans l’accueil de populations d’origine immigrée logées dans un parc privé dégradé176.

175 Voir Béhar D. (1999), Les enjeux territoriaux de la politique de la ville en Ile-de-France, in DATAR, « Pour

une métropolisation raisonnée. Diagnostic socio-économique de l'Ile-de-France et du Bassin Parisien », La documentation française.

Illustrant la diversité sociologique de l’agglomération parisienne, les neuf communes de notre échantillon offrent un tableau diversifié des configurations de peuplement et donnent à voir en situation ce que l’on sait d’un point de vue théorique : la mixité et son envers, la ségrégation, sont des notions toujours relatives qui n’ont de valeur descriptive d’une réalité sociale qu’en fonction des critères et normes de référence retenus. Apprécier la mixité sociale -ou son absence- sur un espace donné suppose par conséquent de privilégier certains critères (par exemple les revenus, les catégories socio- professionnelles, la composition familiale…) et de comparer la densité d’individus répondant à ces critères sur un espace donné à leur densité sur d’autres espaces. Afin de caractériser ces sous- espaces que sont les quartiers de la politique de la ville en les comparant à la composition sociologique de leur environnement, nous avons mobilisé les travaux scientifiques existants, en particulier les données produites par E. Préteceille dans sont étude sur les divisions sociales de l’espace francilien appréhendées par les CSP et l’inscription sur le marché du travail à l’échelle fine des IRIS (environ 2 000 habitants)177, et celles de J.-C. François et al. dans leur étude sur les disparités de revenus des

ménages franciliens178. Nous avons également procédé à une exploitation des données du

Recensement général de la population (RGP) relatives aux Zones urbaines sensibles concernées, à partir du Système d’information géographique de l’INSEE et de la Délégation interministérielle à la ville. Chacune des villes de notre échantillon comprend aussi un ou plusieurs quartiers fortement spécialisé(s) sur le plan ethnique. Comme les limitations de l’appareil statistique français ne permettent pas d’affiner la caractérisation du peuplement de ces quartiers et de leur ville d’appartenance sous cet angle, on se référera aux analyses livrées par les acteurs locaux que nous avons interrogés.

La présentation plus détaillée des sites confirme l’existence de situations territoriales fortement différenciées :

Argenteuil

Avec 95 300 habitants en 1999 et 36 000 logements en 1996 (dont 34,6% de logements sociaux), Argenteuil est de loin la première ville du département du Val d'Oise. Située dans la corne sud-est du Val d’Oise, Argenteuil est limitrophe de trois autres départements (Yvelines, Hauts-de-Seine et Seine- Saint-Denis). Localisé à proximité de pôles économiques d’envergure (Paris, la Défense, Boucle nord des Hauts-de-Seine, Cergy-Pontoise, la Plaine Saint-Denis, Roissy), le bassin économique d’Argenteuil et de la commune limitrophe de Bezons constitue le pôle industriel le plus important du Val d'Oise. Mais le nombre d’emplois présents à Argenteuil a diminué entre 1990 et 1999 (-6%) en raison de l’effritement du secteur industriel, à peine compensé par le renforcement d’un tertiaire orienté vers les services aux entreprises, le commerce, les transports et les communications. Corrélativement, une tendance à la baisse des actifs résidents a été observée, illustrant l’élargissement des bassins d’emplois pour les actifs mobiles179.

Si les industries de « matière grise » (Dassault, Thalès) se développent, Argenteuil reste très marquée par un passé industriel qui avait été le moteur de développement urbain dans les années 60. Conçue par l’architecte Roland Dubrulle en application des principes de la Chartes d’Athènes, une procédure ZUP avait été lancée en 1961. Sa célèbre dalle, située dans le quartier du Val d’Argent Nord, fut primée à Osaka dans les années 60. Outre le Val d’Argent nord, la ZUP comprenait trois zones : une zone

177 Préteceille E. (2003), op. cit.

178 François J.-C. et al. (2003), Les disparités de revenus des ménages franciliens en 1999 : approches

intercommunales et infracommunales en 1999 et évolution des différenciations intercommunales 1990-1999, DREIF, mars.

d’habitation (Val d’Argent sud), une zone industrielle à l’ouest et une zone vouée aux espaces verts dans la partie nord.

L’habitat social est présent sur l’ensemble des quartiers de la ville, mais le Val d'Argent (Nord et Sud) abrite à lui seul 27 000 habitants, pour plus de 10 000 logements construits entre 1965 et 1975, dont 85% en grands collectifs ; la proportion de logements sociaux y est voisine de 55%, le restant étant constitué de copropriétés, dont certaines sont en difficulté180. C’est dans ces copropriétés privées, en

proie aux marchands de sommeil, que se concentre une immigration récente. En dehors du cas des copropriétés dégradées, le quartier est décrit comme très diversifié sur le plan des origines ethno- raciales, des primo-arrivants (Irakiens, Pakistanais…) coexistant avec une immigration ancienne, notamment maghrébine et africaine, tandis que se maintient une population de souche française anciennement ouvrière.

La population du Val d’Argent, où prédominent les catégories d’employés et d’ouvriers, a été très affectée par la désindustrialisation. Mais le contraste social avec les autres habitants d’Argenteuil et ceux des territoires environnants est relativement faible, en particulier avec les quartiers du centre-ville, notamment celui du Val Notre Dame, massivement maghrébin et composé de logements pavillonnaires situés dans les interstices des activités industrielles. Ce constat vaut surtout pour la ZUS du Val d’Argent Sud dont les caractéristiques mises en évidence par le RGP de 1999 étaient très proches de celles de la ville dans son ensemble : 14,9% d’étrangers dans le quartier contre 16,3% dans la ville ; 16,5% de chômeurs contre 16 % ; 65,6% d'ouvriers et d’employés contre 61,8% ; 42,2% de logements locatifs HLM contre 35,0%. Les contrastes sont plus accusés entre la moyenne communale et la ZUS du Val d’Argent nord qui comprend 23,5% d’étrangers, 23,1% de chômeurs, 74,6% d'ouvriers et d’employés et 73,1% de logements locatifs HLM181. Au sein même d’Argenteuil, les contrastes les plus

significatifs opposent la ZUP Nord aux quartiers résidentiels en voie de valorisation rapide qui se sont développés sur le coteau au nord d’Argenteuil et qui forment un ensemble socialement favorisé assez compact.

Ces contrastes s’atténuent en revanche si l’on élargit le territoire de référence. Selon la classification d’E. Préteceille, la ville appartient au groupe « populaire ouvrier » qui couvre un espace à peu près continu du Nord de l’espace francilien, de qui va de Gennevilliers à Noisy-le-Sec et Aulnay-sous-bois, avec une extension au nord dans toute la partie sud-est du Val-d'Oise182. Dans le même sens, l’étude

de J.-C. François et al. sur la distribution des ménages franciliens par classes de revenus (base de données FILOCOM) montre que les quartiers les plus défavorisés du sud-ouest d’Argenteuil sont au contact de quartiers du même type de Bezons (commune avec laquelle Argenteuil est associée depuis 2006 dans une Communauté d’agglomération), mais aussi avec des quartiers en difficulté de Sartrouville dans les Yvelines. Quant au quartier défavorisé du nord-est d’Argenteuil, il est au contact avec des quartiers d’Epinay-sur-Seine, qui appartient à la Communauté d’agglomération de la Plaine Centrale (Seine-st-Denis), et de Saint-Gratien dans le département du Val d’Oise183.

180 Source : Convention ANRU, 2005.

181 Source : Système d’information géographique (SIG), INSEE, Délégation interministérielle à la ville. 182 Préteceille E. (2003), op. cit.

Les Blagis

Situé en première couronne parisienne, dans le riche département des Hauts-de-Seine, le quartier intercommunal des Blagis constitue le plus grand ensemble d’habitat social du département. Sa population était de 18 271 habitants au recensement de 1999, soit 18,6% de la population globale des quatre communes d’appartenance (98 406 habitants). Plus de la moitié des habitants des Blagis résident dans la commune de Bagneux, les autres se répartissant, par ordre démographique décroissant, entre Fontenay-aux-Roses, Sceaux et Bourg-la-Reine.

Le quartier a été bâti au tournant des années 60, après que la butte de Bagneux a été aplanie pour permettre l’implantation de l’entreprise Thomson. Il comprend plusieurs « sous-quartiers », dont celui de la Fontaine dans la partie sud de la commune de Bagneux, où un grand ensemble d’habitat social a été érigé à l’initiative de l’ex-SCIC. Son urbanisme est marqué par la présence de deux immenses barres, celle des Tertres (368 mètres de long sur 7 niveaux et 20 cages d’escaliers) et des Cuverons (331 mètres de long sur 7 niveaux et 18 cages d’escaliers). Le destin des Blagis est classique avec le départ progressif d’une partie des ménages moyens et l’arrivée d’une population d’origine maghrébine et d’Afrique noire paupérisée.

A l’inverse d’Argenteuil, les Blagis constituent une poche de pauvreté qui contraste fortement avec son environnement proche. Le revenu médian des habitants est y certes le plus élevé de toutes les ZUS des Hauts-de-Seine (+30% en moyenne), mais l’écart avec le revenu médian des quatre communes n’en est pas moins de 50%. Le recensement de 1999 a mis en évidence des écarts socio-économiques entre la ZUS des Blagis et les quatre communes d’appartenance : 61,2% d'ouvriers et d’employés dans la ZUS contre 42,7% en moyenne dans les quatre communes, 14,1% de chômeurs contre 9,6%, 13,6% d’étrangers contre 8,3%, 64,7% de logements locatifs HLM contre 37,0%184.

Cependant, ces contrastes sociaux doivent être relativisés, car les quatre communes qui l’abritent sont loin d’être homogènes. Avec 68% de logements sociaux en 2004, Bagneux tend à se spécialiser dans l’accueil de ménages pauvres, selon l’étude sur les disparités de revenus des ménages franciliens185.

Le parc social est présent non seulement au sud de la commune, dans le quartier des Blagis, mais aussi au nord. Ce dernier secteur, où vit environ 40% de la population balnéolaise, se caractérise comme les Blagis par des difficultés économiques et sociales importantes. Plus largement, le classement en Réseau d'éducation prioritaire de l’ensemble des établissements de Bagneux est un indicateur de la faible attractivité de la ville.

A l’inverse, Sceaux et Bourg-la-Reine ont été classés par E. Préteceille dans le « sous-groupe des espaces de l’élite dirigeante » qui présente les densités les plus fortes de professions libérales, cadres de la fonction publique, professeurs, professions littéraires et scientifiques, professions de l’information, des arts et du spectacle186. On ne trouve dans ces deux communes résidentielles haut de gamme que

quelques micro-territoires plus défavorisés correspondant aux zones de concentration du logement social : une portion minoritaire des Blagis et, non loin, deux petits quartiers de Sceaux, les squares d’Alsace et de Bretagne, composés de cinq bâtiments R+4 de logements sociaux gérés par l’Office municipal d’HLM ; à Bourg-la-Reine, les logements sociaux sont également situés à la limite de Bagneux dans la petite zone HLM des Bas Coquarts.

184 Source : SIG, INSEE, DIV. 185 François J.-C. et al. (2003), op. cit. 186

La commune de Fontenay-aux-Roses correspond à une situation hybride. L’étude d’E. Préteceille a classé la ville dans la catégorie des communes hétérogènes connaissant des situations de forte diversité interne, où les contrastes entre IRIS de types extrêmes sont accentués187. Sur 10 400

logements, un tiers sont des logements collectifs sociaux et intermédiaires, un autre tiers sont des logements collectifs privés, et un dernier tiers est composé de pavillons. Ne serait-ce que d’un point de vue topographique, Fontenay-aux-Roses présente des lignes de rupture qui structurent son paysage et contribuent à la délimitation de différents secteurs et quartiers. Alors que le tissu pavillonnaire est situé au sud de la ville, les logements sociaux sont très largement implantés aux Blagis et dans le secteur nord/nord-Est. Ce dernier comprend le quartier de Sorrières-Scarron dont les logements sociaux se présentent comme un prolongement des Blagis. A l’échelle de la ville, le contraste est fort entre la population des quartiers d’habitat social des Blagis et de Sorrières-Scarron et le reste de la population de la ville188.

Clichy-sous-Bois/Montfermeil

Situées à l’est du département de la Seine-Saint-Denis, les communes de Clichy-sous-Bois et Montfermeil ont connu une urbanisation rapide aboutissant au doublement de leur population depuis la fin des années 60, pour atteindre plus de 52 000 habitants en 1999 (28 288 à Clichy-sous-Bois et 24 122 à Montfermeil). L’aménagement du site a commencé au début des années 60 en tant qu'opération privée réalisée sous le contrôle de l’État. Mais le projet autoroutier de rocade qui aurait dû rendre attractif ce programme de logements en accession à la propriété ne verra jamais le jour et le nombre de logements construits sera revu à la baisse (un peu plus de 3 000 au lieu de 10 000), réduisant d’autant les équipements initialement prévus. Les communes sont situées à 15 kms de Paris et à proximité des deux pôles d’emplois de Roissy et de Marne la Vallée. Mais la topographie du site, localisé en haut du plateau de l’Aulnoye, conjuguée à l’éloignement des principaux axes routiers et réseaux de transports en commun, a généré un fort enclavement et de grandes difficultés de mobilité pour la population locale189.

L’autre grande particularité du site est l’importance des copropriétés dégradées (plus de 35% du parc de logements). Ces copropriétés ont rapidement rencontré des difficultés de commercialisation -liées en partie à l’inaccessibilité du site- et des défaillances dans la gestion ont provoqué des déséquilibres financiers aigus. Le cas le plus emblématique est celui des copropriétés des Bosquets à Montfermeil. Conçues pour attirer une population de cadres moyens, les particuliers s’en sont détournés rapidement. Dès l’origine, les propriétaires occupants étaient minoritaires, tandis que l’arrivée de familles nombreuses (d’origine) étrangère(s) a été favorisée par la vente de parts sociales à de grands propriétaires bailleurs en quête d’une forte rentabilité, et par l’action de petits associés qui ont cédé des logements à de nouveaux acquéreurs peu solvables. Dès le milieu des années 70, alors que le recouvrement des charges communes s’avérait des plus difficiles, le syndic a interpellé les pouvoirs publics. Le volume des impayés a conduit à la vente forcée de 468 logements acquis par l’Office départemental d’HLM (ODHLM)190.

187 Préteceille E. (2003), op. cit.

188 Source : Convention-cadre du Contrat de ville 2000-2006.

189 Pour des descriptions plus approfondies du site, voir Ville de Montfermeil (non daté), Projet de rénovation

urbaine à Montfermeil (Seine-st-Denis). Etude d’impact, ainsi que Le Garrec S. (non daté), La rénovation urbaine : le renouvellement de la Politique de la Ville ? Une application locale : la copropriété des Bosquets à Montfermeil (93), CRETEIL, Université Paris XII ; Dubois-Maury J. et al. (2003), L’encadrement juridique des politiques de renouvellement urbain à Paris et en Ile-de-France, CRETEIL, Université Paris XII, avril.

Aujourd'hui, la ZUS intercommunale (appelée « Le Plateau ») regroupe à elle seule plus de la moitié de la population des deux communes (57%). En 1999, la proportion d'ouvriers et d’employés dans la population active de la ZUS était de 76%, contre 67% à l’échelle des deux villes. De même, la proportion de jeunes de moins de 20 ans était de 41% contre 35%. Enfin, la proportion d’étrangers était 39% contre 27,2%191. La population du Plateau est très fortement ethnicisée -un acteur du logement

estime à 10% la population française de souche européenne- en même temps que variée sur le plan des origines. Cette hétérogénéité est plus marquée dans le quartier de la Forestière, à Clichy-sous- Bois, où coexistent des populations turques, asiatiques et d’Afrique sub-saharienne venues pour beaucoup à partir des années 90. Aux Bosquets, à Montfermeil, une population plus ancienne d’origine maghrébine est davantage représentée.

Selon l’étude des disparités de revenus à l’échelle francilienne, les deux communes considérées dans leur ensemble constituent un « isolat nettement défavorisé »192. Clichy-sous-Bois est d’ailleurs la seule

commune d’Ile-de-France à avoir été classée dans son intégralité dans le type le plus « populaire- ouvrier », celui qui compte le plus d'IRIS de ce type (les IRIS de type « populaire-ouvrier » sont en général isolés dans des communes comportant plus d’IRIS de type moins populaire et ouvrier)193. Les

ouvriers et employés représentent 75% de la population active à Clichy-sous-Bois et 58,9% à Montfermeil. Conséquemment, les caractéristiques socio-démographiques de la ZUS intercommunale contrastent faiblement avec celles de la commune de Clichy-sous-Bois et un peu plus fortement avec celle de Montfermeil.

Si contraste il y a avec l’environnement résidentiel, il est principalement d’ordre ethnique. Les seules populations de nationalité étrangère, souvent primo-arrivantes, représentent 50% de la population des Bosquets, 40% du Haut-Clichy et 30% du Bas-Clichy ; cette proportion est encore relativement faible dans les quartiers pavillonnaires environnants, caractérisés par une part importante de retraités (18%). Le contraste entre les Bosquets (environ un quart de la population) et le reste de la commune est beaucoup plus accusé à Montfermeil, dont les périphéries nord et sud sont constituées d’un tissu pavillonnaire où les propriétaires occupants sont majoritaires ; mais l’attractivité déclinante de ces maisons individuelles a favorisé l’installation de familles nombreuses d’origine immigrée aux revenus plus modestes194. A Clichy-sous-Bois, les proportions sont inversées entre les quartiers de grand

ensemble du Haut et Bas Clichy (environ 20 000 habitants) et les quartiers pavillonnaires (environ 8 000 habitants). Comme à Montfermeil, les indices de précarité, le pourcentage de jeunes et de personnes