Chapitre 4 : Modélisation du forgeage de l’Inconel 718
4.1 Principales approches utilisées pour simuler la recristallisation dynamique
4.1.1 Simulation de la recristallisation dynamique
4.2 Présentation du modèle développé ... 137
4.2.1 Modèle de déformation : CristalECP ... 137
4.2.1.1 Critère de plasticité et loi d’écoulement ... 138
4.2.1.2 Loi d’écrouissage et loi d’évolution de la densité de dislocations ... 139
4.2.2 Modèle de recristallisation : CAReX ... 140
4.2.2.1 Modèle RecUPS ... 140
4.2.2.2 Evolutions du modèle : CAReX ... 143
4.2.3 Chaînage séquentiel et automatisation ... 146
4.2.3.1 Chaînage séquentiel entre CristalECP et RecUPS (approche simplifiée) ... 146
4.2.3.2 Chaînage séquentiel entre CristalECP et CAReX (nouvelle approche) ... 147
4.2.4 Conditions aux limites et choix des agrégats ... 149
4.2.4.1 Conditions aux limites ... 149
4.2.4.2 Agrégat d’orientations aléatoires ... 150
4.2.4.3 Agrégat représentant une microstructure réelle ... 151
4.3 Résultats numériques ... 152
4.3.1 Identification des paramètres matériaux... 152
4.3.1.1 Paramètres du modèle de déformation ... 153
4.3.1.2 Paramètres du modèle de recristallisation ... 156
4.3.2 Exploitation des résultats à l’échelle mésoscopique ... 161
4.3.2.1 Etude de l’évolution des paramètres mésoscopiques ... 161
4.3.2.2 Validation du chaînage séquentiel à l’aide d’indicateurs mésoscopiques ... 166
4.3.2.3 Recristallisation métadynamique ... 171
4.3.2.4 Prise en compte du maclage thermique ... 173
132
L’objectif de ce chapitre est de prévoir le comportement mécanique et l’évolution de
microstructure de l’Inconel 718 au cours de la mise en forme à chaud à l’échelle mésoscopique. Cela
nécessite de prendre en compte les phénomènes de déformation plastique et de recristallisation
dynamique qui ont tous deux une influence spécifique sur l’évolution des propriétés des grains. Afin
de décrire le comportement mécanique local de l’Inconel 718, l’approche utilisée est du type chaînage
entre deux modèles cristallins, l’un de déformation, CristalECP, et le second de recristallisation,
CAReX.
Dans un premier temps, une étude bibliographique est proposée afin de situer l’approche
globale proposée par rapport aux autres travaux présentés dans la littérature. Dans un second temps, le
modèle polycristallin, basé sur la plasticité cristalline, sera présenté puis le modèle de recristallisation.
La suite du chapitre sera axée autour du chaînage réalisé entre ces deux modèles. Les différents
agrégats polycristallins et les conditions aux limites utilisées au cours de l’analyse numérique seront
introduits. Enfin, des comparaisons entre résultats expérimentaux et numériques seront présentées et
discutées.
4.1 Principales approches utilisées pour simuler la recristallisation
dynamique
Cette étude bibliographique recense dans un premier temps les différentes approches utilisées
afin de décrire le phénomène de recristallisation dynamique. Dans un second temps, les études
spécifiques des méthodes de simulation de la recristallisation couplées avec un code de calcul par
éléments finis, utilisant la plasticité cristalline, sont présentées.
4.1.1 Simulation de la recristallisation dynamique
Depuis trois décennies, divers méthodes numériques ont été développées dans le but de
prévoir les propriétés d’un matériau au cours de la déformation à chaud. Ces méthodes sont de deux
types :
- les modèles semi-analytiques. Ces modèles sont historiquement liés à la description de la
cinétique de type JMAK pour prévoir les évolutions de microstructure lors de la recristallisation.
Toutefois, des travaux plus récents complexifient cette approche : on peut citer les travaux de Thomas
et al. [THO07] sur les approches géométriques (˝geometrical framework˝) ou de Bernard et al.
[BER11] sur les champs moyens. Ces modèles ont l’avantage d’être peu coûteux en temps de calcul,
néanmoins, l’évolution de la microstructure n’est pas correctement décrite puisque les effets
morphologiques et topologiques sont difficilement pris en compte alors qu’ils ont un rôle non
négligeable. L’approche envisagée dans ce manuscrit a pour objectif la représentation explicite de la
microstructure. Par conséquent, ces modèles ne seront pas développés dans cette étude
bibliographique.
- les modèles basés sur une simulation de l’évolution de la microstructure. Ils sont
généralement coûteux en temps de calcul mais permettent de prendre en compte les champs
mécaniques locaux et les interactions entre grains voisins, nécessaires à la description du phénomène
de recristallisation dynamique qui est hétérogène.
Dans la littérature, les modèles basés sur l’évolution de la microstructure sont abordés sous
différents aspects. Le premier aspect est lié à la modélisation purement mésoscopique de l’évolution
de la microstructure, et le second correspond à une analyse multi-échelles du comportement
mécanique. Ces deux aspects peuvent être traités à l’aide d’une ou plusieurs méthodes de calculs. Les
différentes méthodes de simulation de l’évolution de la microstructure sont :
- la méthode Monte-Carlo. Cette méthode est retenue par Rollett et al. [ROL92] afin de
simuler la recristallisation dynamique à partir de modèles antérieurement développés pour simuler la
133
croissance de grains [AND84] et la recristallisation statique [SRO88]. Dans ces modèles, il est
supposé que l’incrément d’énergie stockée est identique quel que soit le site considéré. Quant aux sites
réorientés au cours de la recristallisation, ils sont sélectionnés aléatoirement. L’incrément d’énergie
stockée est également relié à la densité de dislocations (Equation 3.1.1). La contrainte d’écoulement
dépendant de la densité de dislocations, il est possible de déterminer le comportement mécanique de
l’échantillon simulé. Cette méthode est également choisie par Peczak qui y intègre une loi
d’écoulement du type Kocks-Mecking [PEC95]. Il faut également noter que la forme du réseau de
sites n’évolue pas, l’évolution de la forme des grains n’est donc pas prise en compte.
Cette méthode permet de décrire l’évolution de la microstructure (fraction recristallisée et
taille des grains) et la contrainte d’écoulement aussi bien dans le régime transitoire que dans le régime
permanent alors que la description des phénomènes physiques est très simplifiée.
- la méthode Vertex
19. Cette méthode considère une microstructure sous forme d’interfaces
dont la vitesse de migration est déterminée par la courbure locale du joint de grains. Cette approche a
été développée pour simuler la croissance normale et anormale de grains [WEY98]. Il est également
possible de simuler la recristallisation statique à partir d’une microstructure pouvant être décrite par
des cellules de dislocations. Ce dernier point limite l’usage de cette méthode aux matériaux à forte
énergie de défaut d’empilement. Il est donc difficile d’étendre l’usage de cette approche à l’étude de la
recristallisation dynamique discontinue.
- les automates cellulaires. Développés dans les années 1940 par von Neumann, ce sont des
algorithmes qui décrivent l’évolution spatiale et temporelle de systèmes complexes en appliquant des
lois de transformation déterministes ou probabilistes à un réseau régulier ou non de cellules. Ces
algorithmes sont utilisés pour la première fois pour modéliser l’évolution de microstructure en
recristallisation statique par Hesselbarth et Göbel [HES91] puis en recristallisation dynamique par
Goetz et Seetharaman [GOE98]. Un exemple de représentation des automates cellulaires,
correspondant au modèle défini par Raabe [RAA99] pour la recristallisation statique, est donné sur la
Figure 4.1.1.
Figure 4.1.1 : (a) Représentation schématique d’une grille d’automates cellulaires.L’exemple est
discrétisé en un réseau de cellules de mêmes dimensions. Chaque cellule est définie par une
orientation cristalline (φ
1, Ф, φ
2) et une valeur d’énergie stockée (représentée par ρ qui est la densité
de dislocations). L’automate est défini en trois dimensions considérant les premiers, deuxièmes et
troisièmes voisins. (b) Les grains et les sous-grains sont représentés comme des régions de cellules
ayant les mêmes orientations cristallines. La force motrice peut évoluer dans un grain [RAA99]
Le modèle défini par Raabe, basé sur les automates cellulaires, comprend deux étapes : un
critère (˝switching rule˝) est proposé, basé sur une loi déterministe de sélection (équation de Turnbull)
19
cette méthode n’a jamais été utilisée pour simuler la recristallisation dynamique, toutefois, les méthodes plus récentes comme les level-set ou les champs de phase sont issus de cette approche