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Chapitre 3 Impact socio-culturel sur les trois catégorisations de l’affiche

3.2. Signe en relation à son objet

3.2.1. Signe en relation à son objet sur le plan linguistique

Le plan linguistique fournit de prime abord un premier sens (dénotation) à travers les sens propres de termes utilisés, puis transmet un deuxième sens (connotation) dévoilé dans l’application concrète de l’affiche tenant compte du plan iconique, du plan plastique et du thème.

Figure 38

Transcription : Préservatifs : on dit un ou une ? Pays/Année : France/2004

L’affiche 38 joue sur la difficulté dans la langue française à déterminer le genre d’un mot. Dans la scène décrite, un jeune couple hésite sur le genre attribué au mot préservatif. Le message interrogatif « on dit un ou une ? » indique ainsi au lecteur que

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ce moyen de prévention contre le SIDA s’adresse autant aux hommes qu’aux femmes. Le terme préservatifs mis au pluriel dans une police de grande taille et de couleur rouge est placé en haut de l’affiche sert de titre visuellement accrocheur. De même, quel que soit le genre du mot préservatif, il s’accorde au pluriel par l’ajout d’un s. Le pluriel employé incite quant à lui les deux sexes à l’utiliser régulièrement.

Figure 39 Figure 40 Transcription : Aujourd'hui, Pierre, Paul, Jacques Transcription : Lucky stiffs mean fewer troubles ! en mettent mais pas Benoit. Le Traduction : Un mec chanceux signifie moins

combat continue. de problème. Pays/Année : France/2009 Pays : Etats-Unis

Pierre, Paul, Jacques est une expression française désignant un ensemble d’individus, il désigne ainsi dans l’affiche 39 ceux qui ont recours au préservatif. Cependant, Benoît écrit dans une police différente d’un style gothique, quant à lui, serait l’exception, en n’utilisant pas ce mode de protection, il favorise la propagation du SIDA. L’affiche nous encourage à continuer le combat en raison de l’existence de la potentialité de contamination due à quelqu’un comme Benoît. Chaque langue a ses propres sources et son propre environnement. La non connaissance de la langue utilisée ou de ses idiomes conduirait à commettre une non compréhension ou une mauvaise compréhension, elle peut laisser le lecteur « étranger » en dehors du message signifié. La traduction, quant à elle, se limite à une équivalence cognitive, le risque de faire perdre les propriétés et les subtilités de la langue initiale est souvent posé.

L’affiche 40 utilise le jeu de mot Lucky Stiffs faisant référence à s’y méprendre à la marque populaire de cigarette américaine Lucky Strike. Cette publicité s’inspire d’une

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campagne du cigarettier soutenant l’émancipation des femmes pendant les années 1920 (intertextualité). Voici ci-dessous une représentation (figure 40.1) de l’image de la première femme à avoir traversé l’Océan Atlantique utilisée par cette marque.

Figure 40.1 Publicité de Lucy Strick en 1928

Ces deux affiches (figure 40 et figure 40.1) présentent des similarités, en effet, il s’agit dans les deux discours-affiches sous forme de dessin, les portraits d’un pilote d’avion et la tête protégée par un casque. La publicité 40.1 de Lucky Strike présente Amelia Earhart - première femme à avoir traversé l’Océan Atlantique en juin 1928 - tandis que l’affiche 40 montre un pilote à l’allure de pionnier de l’aviation. De ce fait, à l’image de la marque Lucky Strike, la marque accompagnant les aventuriers, le préservatif dans la figure 40 devient « l’équipement » indispensable pour des relations sexuelles. De même, sur le plan linguistique, le slogan « Lucky strickes were the cigarettes carried on the « friendship » when she crossed the Atlantic. » contenu dans l’affiche 40.1 permet de mettre en avant l’aspect hors du commun de l’aventure menée par Mme Earhart. Ce rapport entre cette marque de cigarette et sa désignation comme un soutien à l’aventure, est transposé dans l’affiche 40, ainsi l’expression Lucky Stiffs réinterprété (imbécile heureux), représente ici la protection de personnes chanceuses lors d’une aventure amoureuse. Le logo reformulé en Lucky Stiffs, situé dans l’axe du regard du personnage, rappelle une cible de tir, le personnage tente d’atteindre la mouche avec le préservatif qu’il tient à la main. Parallèlement, le logo peut être considéré comme un préservatif enroulé dans son sachet, qui est associé au préservatif déroulé tenu par le personnage via la couleur blanche. De plus, en juxtaposant le plan linguistique avec le plan plastique, cela permet de présenter le préservatif sous la forme d’un produit commercial. Ainsi, le reste du plan linguistique est construit à l’image d’une publicité commerciale

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pour un bien de consommation courante avec un slogan vantant les bienfaits du produit : « Lucky Stiffs mean fewer troubles ! », et de donner l’information sur l’un de ses modes et de ses lieux de distribution : « Watch for Lucky Stiffs machines at area bars and clubs ». Les lieux de disponibilité qui sont mis en avant sont ceux fréquentés prioritairement par ceux qui recherchent une aventure amoureuse.

Figure 41 Figure 42 Transcription : Pour vaincre le SIDA, réfléchis et choisis ta Transcription : Prévention : l’abstinence,

tactique de jeu : l'abstinence, la fidélité ou la fidélité ou le condom. le condom. Pays : Maroc (Casablanca)

Pays/Année/Public ciblé : Mali/2002/Jeune/Sportif

Le slogan dans les affiches 41 et 42 diffusées sur le continent africain est identique au niveau de son contenu, il présente les trois moyens de préventions acceptables moralement l’abstinence, la fidélité ou le condom. Par ailleurs, ce discours est rencontré généralement dans des campagnes africaines et musulmanes, dans lesquelles le traitement des questions concernant les mœurs et particulièrement la sexualité ne relèvent jamais de la sphère publique et ne peuvent être traitées que de façon détournée et allusive. Le SIDA n’est pas traité par le biais de la maladie, mais à travers une valorisation des valeurs morales prédominantes, la campagne vise à faire évoluer les mœurs en présentant le risque de contamination tout en se conformant à la morale conservatrice de la société.

Après la mise en valeur des traces socio-culturelles du côté de la sémantisation du signe sur le plan linguistique, notre analyse portera maintenant sur la manifestation de ces traces au niveau iconique.

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