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2.2 Les services psychiatriques

2.2.2 Les services psychiatriques à Montréal

17 Pour compléter ce portrait des services psychiatriques et cerner de plus près la situation montréalaise, examinons deux rapports d'études portant précisément sur la question : le rapport Aubut et le rapport du Comité aviseur itinérance multiproblématique. Le premier accorde une place importante à la description des services existants et le second met l'accent sur les services à développer.

Les services existants

En 1991, un Comité aviseur du Ministre de la Santé et des Services sociaux présidé par le Dr Aubut analysait les services dispensés aux personnes itinérantes malades mentales et toxicomanes à Montréal. Dans son rapport, le Comité (Aubut et al., 1991 : 6, 14) constate que cette clientèle est bien connue dans différents points de service du réseau médical et social mais qu'elle ne s'y accroche pas. Il fait état d'une “ itinérance ” au travers du réseau de soins qu'il explique par divers facteurs : les préjugés ou le manque de connaissances des intervenants, la non adaptation des services aux besoins, un certain manque de ressources, le refus de toute forme d'encadrement par les personnes itinérantes à cause de leur style de vie ou de leur maladie et surtout, l'impuissance engendrée par la lourdeur, la chronicité et la complexité de la clientèle. Plus loin, il ajoute : “ cette itinérance n'est pas uniquement liée au fait que les ressources ne sont pas adaptées à la clientèle, il y a surtout le fait que la personne doit d'abord réaliser qu'elle a un problème, qu'elle désire le modifier, qu'elle connaisse bien les différentes ressources pouvant l'assister et finalement qu'elle s'y rende ” (Aubut et al., 1991 : 14). En conséquence, le Comité recommande de mettre en place un service de case management ayant pour fonctions de dépister et d'apprivoiser cette clientèle, d'identifier et de prioriser ses besoins, de la référer, de l'accompagner dans les services et de faire la liaison au travers du réseau de prise en charge.

L'année précédente, en 1990, la Ville de Montréal et le ministère de la Santé et des Services sociaux avec la collaboration du Conseil régional de la Santé et des Services sociaux de Montréal mettaient en place un programme conjoint pour faciliter l'accès des personnes itinérantes aux services de santé et aux services sociaux. En novembre 1991, dans une adaptation du programme conjoint suite à la fermeture de Dernier Recours Montréal, les parties se fixent entre autres comme objectif : “ d'assurer aux personnes itinérantes présentant à la fois des problèmes de maladie mentale sévère et de toxicomanie des services adaptés à leurs besoins ” (Ville de Montréal et MSSS, 1991 : 1). Le programme prévoit en conséquence :

Une équipe de quatre case managers ou intervenant(e)s primaires affecté(e)s à la clientèle des personnes itinérantes, malades mentales et toxicomanes sera constituée et rattachée à Diogène. Cette équipe aura pour fonctions, entre autres, le dépistage de la clientèle à risque, l'apprivoisement de cette clientèle qui est souvent récalcitrante à toute intervention, la référence rapide aux ressources et l'accompagnement de la personne dans ses différentes démarches. Cette équipe est disponible pour sa clientèle 24 heures par jour. De plus, elle collabore de manière très étroite avec l'équipe volante logée au CLSC Centre-Ville et l'unité spécialisée décrite ci-après. (Ville de Montréal et MSSS, 1991 : 9)

Dans une récente évaluation de suivi de ce programme, Mercier et ses collaboratrices (1994 : 15, 34-35) constatent que l'accessibilité aux services d'urgence psychiatrique demeure variable et que les communications avec certains centres hospitaliers s'établissent encore difficilement. Elles notent qu'il semble que plus on s'éloigne du centre-ville, moins les hôpitaux sont sensibilisés et ouverts à la problématique de l'itinérance. Pour ce qui est de l'organisation générale des services, elles affirment que l'unanimité est faite autour du modèle d'intégration des personnes itinérantes aux services réguliers, bien que l'on reconnaisse qu'il s'agisse d'un processus à long terme qui se réalise par étapes. Elles ajoutent que les attentes quant à une amélioration de l'accessibilité des services sont à la mesure des possibilités offertes par le système lui-même. Ainsi, dans un contexte où les services de traitement et de réadaptation en santé mentale et en toxicomanie sont débordés et où les programmes de soutien à la vie autonome sont largement sous-développés, les mesures d'accessibilité ne peuvent qu'avoir des effets limités, surtout quand on parle d'effets à long terme.

Les services à développer

En 1994, la Régie régionale de la Santé et des Services Sociaux de Montréal-Centre recevait le rapport du Comité aviseur itinérance multiproblématique qu'elle avait mandaté pour définir un projet de services spécialisés à l'intention des personnes itinérantes à problèmes multiples. Les personnes itinérantes ciblées dans le rapport souffrent à la fois de graves problèmes de santé mentale et de toxicomanie auxquels s'ajoutent souvent des maladies physiques. Le rapport trace d'abord un portrait des besoins de la population et résume les apports des écrits scientifiques sur les services à développer. Il privilégie une approche psychosociale qui s'appuie sur une vision d'ensemble de la personne et vise l'intégration et l'alliance des approches sociale, psychiatrique et médicale. Ainsi, cette approche globale vise à aider la personne à reprendre du pouvoir sur elle- même et sur son environnement afin d'en arriver à mieux se maîtriser et à désirer prendre soin d'elle.

Le rapport du Comité (1994 : 19, 24) énumère certains indicateurs de succès pour les services à mettre en place : être capable de répondre aux différents besoins des personnes,

19 comprendre leurs besoins variés et concrets, assurer la continuité de l'information auprès d'elles, être accessibles où elles se trouvent, individualiser les services tout en les adaptant à la réalité quotidienne de la personne, assurer une flexibilité dans le fonctionnement du système pour ce qui est de la durée de séjour, favoriser des attitudes de tolérance et s'adresser aux problèmes concrets pour lesquels ces personnes demandent de l'aide. Enfin, le Comité propose des principes directeurs : la coordination des services, une gamme complète de services, l'accessibilité, la continuité des soins, l'accompagnement stable et l'aide à la sortie de l'itinérance et à l'intégration dans un nouveau milieu de vie et d'appartenance.