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Des services adaptés aux territoires vécus ? Élar gissement du PTU et syndicats mixtes SRU

Desservir le périurbain aujourd’hu

2.2 La desserte des espaces peu denses confron tée aux périmètres administratifs

2.2.2 Des services adaptés aux territoires vécus ? Élar gissement du PTU et syndicats mixtes SRU

Le partage des compétences d’organisation des transports collectifs entre les différents niveaux de collectivité, malgré des difficultés réelles d’articula- tion entre les réseaux, est une répartition pertinente dans l’optique de mettre adéquation l’échelle de gouvernance et l’échelle de mobilité. Cependant, les

périmètres administratifs ou les services proposés ne sont pas toujours cohé- rents avec les pratiques de mobilité. Les questions de mise en adhérence des périmètres administratifs avec les territoires vécus ou d’adaptation des services de transport aux nouveaux besoins de mobilité sont d’ailleurs appropriées par certains territoires qui ont mis en place un syndicat mixte de transport Sru.

Des périmètres à la poursuite de la ville

La recherche de la pertinence territoriale des institutions en charge du transport collectif, en parallèle de la recherche d’une meilleure intégration in- tersectorielle, apparait comme un objectif dans la plupart des lois ayant at- trait à l’organisation des transports depuis 1973 (Offner et al., 2002). Cette re- cherche du territoire pertinent concerne essentiellement les transports collectifs urbains et périurbains. Bien que les réseaux Ter révèlent un certain nombre d’incohérences entre périmètre administratif et périmètre de mobilité13, la per-

manence des limites du territoire régional impose une collaboration avec les régions voisines pour mettre en pertinence le réseau et les mobilités. En ce qui concerne le transport collectif urbain, les structures intercommunales, support du Ptu, peuvent faire évoluer leur périmètre pour accompagner les dyna- miques urbaines et mettre en place des politiques dépassant le seul territoire de la commune–ville.

La couverture de la ville morphologique ou fonctionnelle par les transports collectifs a fait l’objet de plusieurs travaux de recherche, mettant en évidence des transports collectifs perpétuellement à la poursuite des dynamiques ur- baines. Beaucire et al. (2003) montrent qu’avant la loi Chevènement de 1999, les Ptu peinent à couvrir l’ensemble des communes des agglomérations mor- phologiques (pôles urbains de l’Insee) : l’élargissement de l’agglomération, pro- voquée par l’étalement urbain, n’est pas accompagné d’un élargissement équi- valent du Ptu. Après la loi Chevènement, le taux de couverture des communes des pôles urbains par un Ptu augmente. Cela n’implique pas une meilleure couverture de l’agglomération par les transports urbains, en effet dès 2000, on observe l’apparition d’une déconnexion entre l’appartenance d’une commune à un Ptu et sa desserte par les transports urbains (figure 2.9). Alors qu’avant 1999, l’ensemble des communes appartenant à un Ptu possèdent une desserte, au début des années 2000, moins de 75 % des communes des Ptu sont des-

13. Zembri (1997) montre ainsi que, après la régionalisation du transport ferroviaire, si certain réseaux régionaux ont une organisation cohérente (organisation autour d’un axe ou d’une étoile), d’autres régions (par exemple le Centre et la Basse-Normandie) héritent d’un réseau non adapté à leur territoire (fragment de lignes. . .).

Figure 2.9 – Extensions des pôles urbains et desserte des communes par les transports urbains 65% 70% 75% 80% 85% 90% 95% 100% 105% 110% 1000 1500 2000 2500 3000 3500 4000 4500 % d e c o mm u n es d es s e rvi es N o m b r e d e co m mu n es

Nbre de commune� dans le PTU Nombre de communes desservies par les transports urbains

% de communes desservies

Sources : Certu - Statistiques TCU, 2010 Traitements et réalisation : Drevelle, 2014

servies par les transports urbains ; un rattrapage apparait à la fin des années 2000 (en 2010, 85 % des communes des Ptu sont desservies par les transports urbains).

Cyprien Richer (2009) étudie la couverture des aires urbaines en 1976 et 2006 par les Ptu dans la région Nord-Pas-de-Calais. Là encore, le rattrapage de l’extension des périmètres fonctionnels (l’aire urbaine) par les périmètres institutionnels (le Ptu) est partiel sur les trente dernières années. Le nombre de communes dans les périmètres de transport urbain du Nord-Pas-de-Calais est passé de moins de 200 communes au milieu des années 1970 à environ 350 en 1995 et près de 450 communes en 2006. L’effort d’adaptation des Ptu semble d’ampleur mais reste modeste par rapport aux 720 communes comprises dans les aires urbaines de la région en 1999 (figure 2.10). La recherche met aussi en évidence la deconnexion entre élargissement du territoire intitutionnel et évo- lution de l’offre de transport. Dans de nombreux cas, suite à un élargissement du Ptu, les tranports urbains n’évoluent pas ou l’intercommunalité délègue au département la desserte des périphéries.

« D’un point de vue spatial, l’augmentation de la taille des pé- rimètres de transport urbain doit se traduire, en théorie, par un déplacement de la frontière entre transport urbain et transport in- terurbain et par une amélioration des dessertes des nouvelles com- munes de l’Aotu. En pratique, les évolutions de périmètres ont sur- tout nécessité une nouvelle répartition des services entre les Aotu et les départements, sans que l’offre de transport sur les périphéries n’ait évolué » (Richer, 2009).

Figure 2.10 – Périmètres de transport urbain et aires urbaines dans le Nord- Pas-de-Calais entre 1975 et 2006

© Mappemonde 2009 (GS) Réalisation: C. Richer, LIVE - ERL 7230, Université de Strasbourg Aire urbaine

Périmètre de transport urbain

Aire urbaine couverte par un périmètre de transport urbain

Périmètres de transport urbain en 2006 et zonage en aire urbaine en 1999 Périmètres de transport urbain en 1976

et zonage en aire urbaine en 1975 et zonage en aire urbaine en 1975

Aire urbaine couverte par un

et zonage en aire urbaine en 1999

A

Source : Richer (2009)

Une alternative à l’élargissement du Ptu de l’agglomération centrale peut être proposée à travers la constitution de communautés d’agglomération pé- riurbaines. Guerrinha (2007), à travers l’exemple du pays voironnais, montre comment l’intercommunalité prend en main l’organisation des transports col- lectifs dans un territoire en périphérie de Grenoble. Le financement du réseau, qui est majoritairement de nature interurbaine, reste cependant fortement dé- pendant d’un transfert de dotation du département. De plus, la construction de l’intercommunalité périurbaine par un discours d’opposition avec l’agglo- mération centrale interroge sur la perméabilité de la frontière entre les deux Ptu. Cette alternative permet cependant de questionner la pertinence de l’aire urbaine comme territoire adapté au transport urbain. Caroline Gallez (2010) craint en effet « qu’un tel cadre ne soit particulièrement favorable à la repro- duction d’un schéma de développement des réseaux de type radioconcentrique, peu adapté à la gestion du phénomène d’étalement urbain ».

La course à l’élargissement des périmètres de transports urbains n’appa- rait pas comme une solution adaptée aux évolutions urbaines : difficultés pour desservir correctement les franges, maintient des frontières de compétences, instabilité des périmètres peu favorable à une cohérence des pratiques sec- toriels. . . L’enjeu semble davantage se situer au niveau de l’effacement des frontières de compétence plutôt que par leur déplacement. Faire collaborer au sein d’une même structure les différentes échelles territoriales, tel est l’objectif des syndicats mixtes de transport.

Table 2.1 – Les trois âge des syndicats mixtes de transports

Source : Richer et al. (2011)

Dépasser les périmètres : les syndicats mixtes SRU

Les mobilités de plus en plus complexes au sein des archipels urbains ont fait émerger un besoin croissant de « politiques multiniveaux » (Jemelin et al., 2004) et imposent la recherche d’une « réponse à l’émiettement de la compé- tence transport entre plusieurs AOT » (Krattinger, 2012). Dans cette logique, la loi solidarité et renouvellement urbain encourage la mise en place de syndi- cats mixtes de nouvelle génération, regroupant plusieurs niveaux d’Aot « afin de facilier la coordination multi-échelle des autorités responsables des trans- ports » (Richer et al., 2011). Ces syndicats ont pour vocation de dépasser la Loti, marquée par un partage strict des compétences et des territoires.

Richer et al. (2011), réalisant une analyse chronologique et bibliographique des syndicats mixtes de transport, qualifient les syndicats mixtes Sru de « troi- sième age » de la forme syndicale dans les transports collectifs (voir tableau 2.1). Les syndicat mixtes Sru possèdent trois compétences obligatoires :

– la coordination des services de transports,

– la mise en place d’une communauté tarifaire de titres uniques ou unifiés, – l’information multimodale à destination des usagers.

Leur objectif principal est de faciliter et encourager l’utilisation des transports publics en « réduisant au maximum les obstacles que peut rencontrer un usager lors du passage d’un réseau de transport à un autre » (Richer et al., 2011).

En 2012, en France, on dénombre 12 syndicats mixtes de transport Sru (Jouve et Richer, 2013). Ces syndicats revêtent des formes très différentes : si deux syndicats Sru associent intercommunalités, départements et région, la plupart n’associent que des structures intercommunales (ou des communes)

Figure 2.11 – Les syndicats mixtes SRU en France en 2012

Réalisation : Cyprien Richer. Source : Certu (2014).

avec le département (voir figure 2.11). Les actions des syndicats sont donc variées, de la coordination d’une ligne de transports inter-Ptu (dans l’agglo- mération Mancelle) à l’articulation des transports sur tout un département ou une région. La présence du département dans presque tous les syndicats Sru est intéressante. Territoire pertinent pour lier la mosaïque des périmètres de transport urbain, le département apparait comme un « intercesseur territo- rial » (Béhar, 2002) ou dans une situtation privilégiée « d’Aot du périurbain » (Inrets-Certu, 2007).

Les syndicats mixtes Sru peuvent être une réponse adaptée pour « dépasser la rigidité de la Loti14[...] et promouvoir une échelle suburbaine de transport »

14. C’est-à-dire « effacer les frontières des réseaux de transport public et faire évoluer le schéma traditionnel d’organisation des AOT strictement dual entre l’urbain (PTU avec VT)

(Jouve et Richer, 2013). Ils facilitent également l’émergence de projets intermo- daux entre les différentes Aot et, à l’instar des Scot, permettent d’élaborer un « processus d’apprentissage collectif » (Frère et al., 2000) et contribuent donc à « améliorer l’intégration des politiques publiques de transport » (Jouve et Richer, 2013).

Cependant, la grande diversité de formes des syndicats mixtes nuisent à leur lisibilité. Les syndicats mixtes Sru ne semblent pas avoir réussi à ré- soudre sur le terrain la question du périmètre pertinent pour l’organisation des transport : l’échelle régionale, peu mobilisée dans les structures actuelles, est pourtant identifiée comme pertinente pour l’articulation entre les Aot (Raoul et Casteigts, 2011; Krattinger, 2012). L’exemple de la coordination des transports en Alsace (portée par la région sans structure dédiée) ou du dé- veloppement des plateformes d’information multimodale hors syndicat mixte (Certu, 2012) montrent d’ailleurs que, si l’outil est utile, il n’est pas nécessaire. N’étant qu’une structure à la disposition des politiques, les syndicats mixtes Sru ne peuvent résoudre l’ensemble des enjeux de l’intermodalité sans la vo- lonté des élus. Caroline Gallez (2010) doute ainsi de la réelle capacité des syndicats mixtes Sru a apporter des réponses aux nouveaux besoins de mobi- lité :

« Sur le plan institutionnel, la solution des syndicats mixtes pré- conisée par la loi Sru, a priori séduisante, élude la question de l’implication des communes ou des collectivités périphériques en matière de transports collectifs. En faisant de l’alliance à l’échelle de la région urbaine un préalable à la mise en oeuvre de politiques intermodales, ce partenariat encourage peu le développement de dessertes locales, qui pourraient par exemple accompagner la struc- turation de l’urbanisation autour de pôles secondaires. Au pire, elle légitime une position attentiste des communes périphériques vis-à- vis d’une structure dont elles espèrent avant tout l’amélioration des conditions d’accessibilité au centre. »

L’objectif de coordination multi-échelle des réseaux de transports en com- mun et d’effacement des frontières institutionnelles ne peut donc pas se pas- ser d’une réflexion sur la mobilité des habitants, au delà du rapport centre– périphérie, et d’une implication de l’ensemble des acteurs publics. Il ne peut également pas se passer d’une articulation entre les politiques d’urbanisation et de transport afin d’organiser le réseau de transport intermodal et inter- périmètre en adhérence avec les dynamiques territoriales.

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