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III.2. Evolution de la limite d’élasticité en fonction de la température

III.2.5. Sensibilité à la vitesse de déformation

Il est possible de classer les anomalies de la limite d’élasticité en fonction des mécanismes étant à l’origine de l’augmentation anormale de la contrainte. Les raisonnements sont basés sur une déformation plastique décrite par la loi d’Orowan :

ε& = ρm(

σ

*, T)b.v(

σ

*, T) (éq. III.3)

avec ρm la densité de dislocations mobiles,

σ

* la contrainte , T la température, b le vecteur de

Burgers et v la vitesse moyenne des dislocations. Les essais sont, dans ce cadre, réalisés à ε& constant. Les mécanismes mis en jeu peuvent être répartis en deux catégories [118]. La

première regroupe ceux agissant sur les dislocations à l’échelle individuelle (notamment sur leur vitesse) tandis que la seconde concerne ceux agissant sur les populations de dislocations (en particulier sur la densité de dislocations mobiles) De manière générique les anomalies sont donc soit des anomalies de vitesse (premiers types de mécanismes) soit des anomalies de densité (seconds types) Louchet [118, 140] montre que S, définie par :

ε ∆ σ ∆ ≈ ⎟ ⎠ ⎞ ⎜ ⎝ ⎛ ε ∂ σ ∂ = ε → ε δ & & & ln ln lim S 0 (éq. III.4)

est un paramètre pertinent pour discriminer entre les deux familles d’anomalie. En effet, S sera nécessairement positive pour les anomalies de vitesse, mais nulle (ou très faible) pour les anomalies de densité.

Pour FeAl, il est maintenant bien établi que S est très faible, voire nulle, dans le domaine d’anomalie [35, 97, 174] et fortement positive au-delà du pic. Nous avons vu que l’anomalie de la limite d’élasticité semblait être masquée par l’addition de nickel (III.2.2) ou par le raffinement de la taille de grains (III.2.3) La détermination de S dans ces deux cas nous donnera des indices pour discriminer entre le masquage du phénomène d’anomalie ou sa disparition. Avec cet objectif et pour certains des alliages modèles et semi-industriels étudiés précédemment, nous avons réalisé des essais de compression uniaxiale à différentes vitesses de déformation (10-2 10-3 et 5.10-4 s-1) ainsi que des essais comprenant des sauts de vitesses.

III.2.5.1. Alliages modèles

Figure III.21 : Evolution, en fonction de la température, de la réponse du matériau à des sauts de vitesse de

Pour quantifier la sensibilité, nous normalisons S par la limite d’élasticité à 10-2s-1. A partir de (éq.III.4) il vient donc :

m 1 ε lnσ ln ε lnσ 1 S

σ

σ

0,2% 0,2% ∂ = ∂ = ∆∆ = & & (éq.III.5)

Figure III.22 : Evolution, en fonction de la température, de la réponse du matériau à des sauts de vitesse de

déformation répétés vers le bas pour les alliages de type FeAlNi. Courbes contrainte-déformation.

Nous avons procédé à des essais de compression comprenant des sauts de vitesses répétés vers le bas, pour différents alliages (Figures III.21 et III.22) Les données issues de ces essais nous permettent d’avoir un aperçu précis de l’effet du bore et du nickel (Figures III.23 et III.24 respectivement) sur la variation de 1/m en fonction de

ε

et de la température. Quatre caractéristiques sont clairement identifiables.

a) b)

Figure III.23 : 1/m en fonction de la déformation pour différentes températures mettant en évidence l’effet du

Premièrement, la sensibilité à la vitesse de déformation est bien nulle (ou très faible) dans une certaine gamme de températures pour tous les alliages. Le plateau de contrainte pour FeAlNi4B, III.2.1.3, reflète donc un masquage du phénomène d’anomalie, non sa disparition. Cette tendance est confirmée pour le plateau des alliages FeAlNi10B et FeAlNi5B : S y est nul.

Deuxièmement, tous les alliages présentent une sensibilité à la vitesse de déformation qui s’accroît avec la déformation pour le régime basses températures et jusqu’à l’apparition du pic (ou du maximum de R0,2%) Au-delà de la température du pic, 1/m reste élevé et

relativement constant.

a) b)

Figure III.24 : 1/m en fonction de la déformation pour différentes températures mettant en évidence l’effet du

nickel sur, a) l’alliage binaire non dopé, b) l’alliage binaire dopé.

Troisièmement, le dopage en bore semble rendre le matériau plus sensible à ε&. En effet, si l’on se place à environ 80 % de la température du pic pour les alliages binaires, l’alliage dopé présente une sensibilité à la vitesse de déformation supérieure d’environ 20 % à celle de l’alliage non dopé. Le même constat peut être fait pour les alliages ternaires au nickel, FeAlNi4 et FeAlNi4B.

Quatrièmement, l’addition de nickel a tendance à diminuer la sensibilité de la contrainte d’écoulement de FeAl à la vitesse de déformation. En effet, à environ 90 % de Tpic la valeur

de 1/m pour FeAlNi4 est environ 75% plus faible que pour FeAl. Les comparaisons sont faites pour les valeur de 1/m en début de déformation –

ε

< 4 - 5 %. Le même constat qualitatif peut être fait pour les alliages dopés au bore (FeAl200B et FeAlNi2B) : 1/m diminue de 40 % environ dans cette situation.

Les résultats concernant l’effet du bore et de la déformation sont conformes aux études précédemment réalisées au laboratoire [35, 97] sur des alliages sans nickel. En outre nous avons noté, pour les alliages ternaires au nickel que, dans le domaine de très faible sensibilité (i.e. pour T ≤ Tpic), la déformation a fortement tendance à se localiser. Cette localisation peut

Figure III.25. Au-delà du pic, la déformation est plus homogène et les éprouvettes prennent la forme d’un tonneau.

a) b)

c) d)

Figure III.25 : Photographies

d’éprouvettes après déformation plastique de plus de 10 %. a) FeAlNi4B, de face ; b) FeAlNi4B de profil ; c) FeAlNi2B, de face et

d) FeAlNi2B, de profil.

III.2.5.2. Alliages semi-industriels

Les alliages semi-industriels étudiés dans cette partie, A1 et B2, sont représentatifs des

deux modes de consolidation mentionnés plus haut (Chapitre II.1) l’extrusion et la compression isostatique à chaud respectivement. En réalisant, sur ces deux alliages, des essais de compression uniaxiale à deux vitesses de déformation différentes (5 10-3 et 10-2 s-1) nous cherchons à confirmer ou à infirmer l’absence d’anomalie.

Figure III.26 : Limite d’élasticité d’alliages semi-industriels en fonction de la vitesse de déformation et de la

température, a) FeAlB I A1 et b) FeAlB I B2.

La Figure III.26 présente l’évolution de la limite d’élasticité en fonction de la vitesse de déformation et de la température. Nous constatons que les deux alliages présentent une sensibilité de la contrainte d’écoulement à la vitesse de déformation nulle ou très faible pour 200 et 400°C. Pour l’alliage modèle équivalent cette gamme correspond au régime d’anomalie : il existe donc bien un domaine de températures (200 < T< 400°C) pour lequel les alliages semi-industriels sont insensibles à la vitesse de déformation. En revanche, la

sensibilité S devient positive pour 600°C, c’est-à-dire lorsque l’écart avec la température du pic diminue.

Il y a cohérence entre le comportement des alliages ternaires modèles et des alliages semi-industriels et celui des alliages binaires. En effet, l’anomalie est toujours opérationnelle mais est simplement masquée par le durcissement BT (dû au nickel et/ou au raffinement de la taille de grains) De plus, nous avons montré que l’addition de nickel a tendance à diminuer la sensibilité de la contrainte d’écoulement de FeAl à la vitesse de déformation.