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LE SENS D’UNE RESPONSABILITE CONTRACTUELLE DU FAIT DES CHOSES

DU FAIT DES CHOSES ?

SECTION 1 LE SENS D’UNE RESPONSABILITE CONTRACTUELLE DU FAIT DES CHOSES

219. Engager la responsabilité contractuelle d’un débiteur du fait d’une chose revient à obliger celui-ci à verser des dommages-intérêts à un cocontractant victime d’un dommage causé par un objet lors de l’exécution d’une convention les unissant. Quelle différence existe-t-il alors avec la responsabilité contractuelle du fait personnel dont certaines règles, dans le domaine étudié, ont été observées précédemment527 ? De fait, deux hypothèses doivent être distinguées, cette expression pouvant être entendue de plusieurs manières (I). Il sera précisé laquelle de ces acceptions paraît utilisée en la matière (II).

I – Les sens envisageables

220. L’expression responsabilité contractuelle du fait des choses peut être entendue de deux manières. Elle peut viser un cas de responsabilité contractuelle du fait personnel (A) mais aussi une responsabilité autonome dans laquelle le dommage serait causé par une chose, indépendamment de tout fait de l’homme (B).

526 Sur ce point, v. supra n°s 4 et s.

527 Sur ce point, v. supra n°s 39 et s.

A – Une illustration de la responsabilité contractuelle du fait personnel

221. L’expression responsabilité contractuelle du fait des choses peut être employée pour désigner la responsabilité contractuelle du fait personnel dans le cas d’un dommage causé par une chose. Autrement dit, cette expression fait ici référence à la réparation du préjudice causé par un objet, commission rattachée à un fait personnel du débiteur et non au fait générateur, autonome, que serait le fait d’une chose. Dans cette acception, cette notion recouvre donc, notamment, les hypothèses étudiées dans la section précédente et ne fait que qualifier, différemment, une hypothèse de responsabilité dont le fait générateur est déjà reconnu : le fait personnel.

222. Un tel emploi n’est pas utopique. C’est d’ailleurs ainsi que certains juges du fond528 ont entendu ladite expression. Il n’empêche qu’une autre acception peut être envisagée.

B – Une responsabilité fondée sur le fait autonome des choses

223. L’expression responsabilité contractuelle du fait des choses pourrait également être employée pour désigner une responsabilité contractuelle détachée du fait personnel et fondée sur le fait d’une chose, autonome. Autrement dit, dans cette hypothèse, une personne pourrait être tenue pour responsable d’un dommage causé par une chose du seul fait que cette dernière a été la cause de celui-ci. La responsabilité serait alors fondée sur l’existence d’une relation entre la chose et la personne (droit de propriété, garde, emploi…) ; il ne serait pas nécessaire de rechercher l’imputabilité du dommage à cette dernière. Cette acception semble être celle retenue en droit.

528 En ce sens, v. not. Lyon, 30 novembre 1953, D., 1954, jurisp., p. 172 et s., note R. Rodière.

II- Le sens envisagé

224. Il semble que le sens retenu en droit positif en ce qui concerne l’expression responsabilité contractuelle du fait des choses est le second, c’est-à-dire celui consistant à viser le fait autonome d’une chose comme fait générateur de responsabilité. Dans le cas contraire, comment expliquer en effet que les termes responsabilité contractuelle du fait personnel et, plus simplement, responsabilité contractuelle529 demeurent ? Il est déconseillé de qualifier de plusieurs manières un même dispositif, sauf à vouloir semer le doute. S’il est vrai que dans l’hypothèse visée, la responsabilité contractuelle du fait personnel se révèle déjà qualifiée de deux manières (responsabilité contractuelle/responsabilité contractuelle du fait personnel), il n’empêche que la seconde expression ne paraît constituer qu’une précision de la première. L’emploi de nouveaux termes, différents, paraît donc bien faire référence à un cas de figure dissemblable. Par ailleurs, et à plus forte raison, l’expression existe déjà en matière extra-contractuelle. Or on admet communément qu’elle y désigne une responsabilité détachée du fait personnel, c’est-à-dire une responsabilité autonome reposant sur le fait d’une chose530. La similitude des expressions n’est pas dénuée de sens : elle vise à appliquer en matière contractuelle un concept similaire à celui rattaché à l’article 1384 alinéa 1 du Code civil, autrement dit, une responsabilité autonome.

225. C’est d’ailleurs ainsi que certains auteurs ont manifestement entendu la responsabilité contractuelle du fait des choses531. S’il paraît exact que le sens de l’expression fait aujourd’hui référence à une responsabilité autonome, pour les raisons évoquées, il n’empêche en effet que cette tendance est critiquable : une chose ne peut causer un dommage indépendamment de tout fait de l’homme ; une responsabilité du fait des choses, contractuelle ou non, reste l’illustration d’un fait personnel.

Cette idée constituant l’un des fondements de la présente proposition, il est toutefois apparu préférable de ne pas développer davantage la question à ce stade. Seule la conséquence d’un tel raisonnement sera ici exposée : la responsabilité contractuelle du fait des choses ne

529 Les deux formules, avec une prédominance pour la seconde, sont employées pour désigner ce fait générateur.

530 Sur la question, v. not. F. Terré, Ph. Simler et Y. Lequette, Droit civil, « Les obligations », Dalloz, 9e éd., 2005, spéc. n°s 745 et s., p. 727 et s.- A. Bénabent, Droit civil, « Les obligations », Montchrestien, 11e éd., 2007,spéc. n°s 600 et s., p. 397 et s.- Ph. Malaurie, L. Aynès et Ph. Stoffel-Munck, Les obligations, Defrénois, 3e éd., 2007, spéc. n°s 187 et s., p. 96 et s.- Ph. Malinvaud, Droit des obligations, Litec, 10e éd., 2007,spéc. n°s 607 et s., p. 442 et s.

Contra, v. infra n°s 408 et s.

531 En ce sens, v. not. R. Rodière, D., 1954, jurisp., p. 173 et s., note sous Lyon, 30 novembre 1953.

pouvant exister en tant que concept autonome, sa consécration par la Cour de cassation en 1995532 ne peut qu’illustrer un cas de responsabilité du fait personnel, spécialement fondé sur un manquement à une obligation de sécurité, initiative déjà globalement abordée533.

226. Quand bien même ledit concept ferait référence finalement à un cas de responsabilité contractuelle du fait autonome des choses, l’étude de la jurisprudence consacrée par la Cour de cassation en 1995534 révèle cependant que si l’initiative aurait pu présenter certains avantages au regard de la question de la réparation des dommages causés par les choses lors de l’exécution des contrats, de nombreuses questions perdureraient en ce qui concerne la portée d’une telle initiative. Quel que soit le sens véritable de cette expression, cette évolution du droit ne paraît donc pas constituer la solution aux problèmes exposés535, contrairement à ce que certains ont pu laisser entendre.

SECTION 2 – LA PORTEE D’UNE RESPONSABILITE CONTRACTUELLE