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Section 2 Ces critères sont applicables aux dirigeants sociau

des dirigeants sociau

CARACTÈRE PROFESSIONNEL DES DIRIGEANTS SOCIAU

1.1. Chapitre I Le dirigeant social est un professionnel

1.1.2. Section 2 Ces critères sont applicables aux dirigeants sociau

21.- Si on adapte les critères que nous venons de voir au cas particulier des dirigeants sociaux, nous constatons que les dirigeants sont des professionnels. En effet, chacune des caractéristiques proposées par Monsieur le Tourneau s’adapte aux dirigeants sociaux et toutes font de ceux-ci des destinataires spéciaux des normes sur la responsabilité civile. Reprenons les différents points caractérisant les professionnels afin de montrer que les dirigeants sociaux rentrent dans cette catégorie juridique.

22.- Le dirigeant peut être une personne physique ou morale, de droit privé ou de droit public44. Il sera investi individuellement ou collégialement selon le cas, « de l’un au

moins des trois pouvoirs suivants : d’une part, le pouvoir de représentation externe qui fait du dirigeant le porte-parole de la société dans ses rapports avec les tiers ; d’autre part le pouvoir de direction interne qui le place au sommet de la hiérarchie sociale ;

43 Lorsque le préposé utilise une chose qui lui a été confiée par le commettant pour l’exercice de ses fonctions, sans transgresser les ordres de celui-ci ni dépasser les limites de sa mission, la garde appartient au commettant. La victime pourra poursuivre le commettant sur le fondement de l’article 1384 alinéa1er ou art. 1385. « Mais cela ne l’empêche pas d’invoquer également contre lui l’article 1384 alinéa 5, de préférence à l’article 1384, alinéa 1er, ou concurremment avec ce texte. »

(VINEY (Geneviève), Les conditions de la responsabilité, op.cit, spéc. n°716). Il existe en principe une incompatibilité entre les qualités de préposé et de gardien. Exceptionnellement la garde peut appartenir au préposé, en particulier quand il a agit de manière indépendante. Cela se produit quand le préposé a utilisé la chose, de propriété du commettant, en dehors du cadre normal de ses fonctions, ou bien parce qu’il l’a utilisée à d’autres fins différentes de celles recherchées dans le cadre de sa mission, ou au mépris des ordres qui lui avaient été données. (Idem n°684)

44 Cass. Com. 8 janvier 2002, AJDA du 23 septembre 2002, n°11 p.808 note Claymour (Guylain), dans une affaire où le maire d’une commune, président du conseil d’administration d’une société d’économie mixte mise en redressement, puis en liquidation judiciaires, est condamné à une mesure de faillite personnelle.

enfin le pouvoir de contrôle qui l’érige en censeur des actes accomplis par d’autres organes. »45

23.- Le dirigeant est donc entendu d’une manière extensive, car la notion inclut aussi les membres du conseil de surveillance et non pas seulement les organes de gestion ou de représentation.

24.- Le dirigeant agit au nom de la société, c'est-à-dire qu’il manifeste avoir cette

qualité46 ou tout au moins en donne l’apparence. Traditionnellement, l’idée qui en découlait était basée sur la théorie de la représentation. Selon cette théorie, pour pouvoir exercer ses droits pécuniaires et extra-pécuniaires, la société doit recourir à des personnes physiques pour éviter de rester en léthargie47. La situation juridique de ces

dirigeants était analysée à travers la notion de mandat. Mais les limites de cette notion incitèrent à son abandon par une grande partie de la doctrine contemporaine française et étrangère48. En effet, le dirigeant ne peut pas être mandataire des associés puisqu’il

agit au nom et pour le compte de la société, et il ne peut pas être le mandataire de la société, puisque le mandat implique deux volontés et la société n’a pas de volonté propre. Donc certains auteurs, comme M. Ph. MERLE, préfèrent parler de

représentation originale de la personne morale par ses organes49. Selon cette théorie dite organiciste, la gestion sociale est exercée par des organes à travers des personnes légalement ou conventionnellement50 habilitées à administrer la société, mais à la

45PETIT (Bruno), Droit des sociétés, 4è édition, Paris : Litec, 2008, 286 pages, spéc. n°84. « Jamais un organe ne cumule ces trois pouvoirs et il arrive qu’il ne détienne qu’un seul d’entre eux : tel est le cas du conseil de surveillance, qui se borne pour l’essentiel à contrôler la gestion du directoire. Mais il se peut également qu’un même organe cumule deux pouvoirs : le gérant de SARL est ainsi chargé à la fois de diriger la société dans l’ordre interne et de la représenter dans l’ordre externe ; de même le conseil d’administration de la SA reste, malgré les retouches apportées par la loi du 15 mai 2001, investi du double pouvoir de représenter la société et de contrôler la gestion du directeur général. ». Malgré ces différences, les règles relatives à la responsabilité sont « identiques ou comparables ».

46 Le TOURNEAU (Philippe), Responsabilité civile professionnelle, op.cit, p.6, en présentant le premier des critères qui qualifie le professionnel comme tel.

47 MERLE (Philippe), Droit commercial, sociétés commerciales, 13ème éd, Paris : Précis Dalloz Droit Privé, 2009, 939 pages, spéc. n° 94.

48 REYES VILLAMIZAR (Francisco), Derecho societario, 2ème édition, Tome I, Bogota: Temis, 2006, 714 pages, cite des auteurs tels que les Argentins Juan Maria FARINA et C.A. Vanasco.

49 MERLE (Philippe), Droit commercial, sociétés commerciales, op.cit, spéc. n° 94

50 Pour certains auteurs cette incarnation ne peut être que légale: « le dirigeant est un représentant légal et non conventionnel : il est un organe de l’institution société dont le rôle et les pouvoirs sont pour l’essentiel définis par la loi et hors de portée de la volonté privée des associés » (PETIT (Bruno), Droit des sociétés, op. cit, spéc. n°86).

différence du représentant, ces personnes n’ont pas une individualité juridique propre distincte de celle de la société. L’organe forme un ensemble avec la société et les actes accomplis par ce premier sont réputés l’avoir été directement par la société et non par un représentant agissant en son nom 51. Les dirigeants son présentés comme des

organes de la personne morale plus que comme des mandataires, mais en pratique le mandat resurgit fréquemment et la qualification de « mandataires sociaux » est récurrente52.

25.- L’activité exercée par le dirigeant est une prestation de services et bien qu’elle soit rémunérée la plupart du temps, il arrive que cette prestation ne soit pas onéreuse. Le fait de ne pas avoir été rémunéré n’a pas d’incidence sur la détermination de la responsabilité, mais réduit la rigueur avec laquelle les juges considèrent sa responsabilité personnelle53. C’est comme si le fait d’exercer la fonction de direction

bénévolement ôtait une des conditions de la professionnalisation de l’activité et de ce fait, la responsabilité encourue ne serait plus celle du professionnel mais celle de droit commun exigible de toute personne dans ses rapports contractuels ou extracontractuels avec les tiers.

26.- Les dirigeants opèrent à l’intérieur d’organes de la société : telle serait leur

organisation fonctionnelle. Ces organes font partie d’une organisation plus importante :

la société elle-même. Cette organisation serait donc, s’agissant des dirigeants, à deux niveaux : l’un immédiat, et l’autre plus général. C’est grâce à leur appartenance à des organes de direction, représentation ou contrôle (niveau organisationnel immédiat), que le dirigeant exercera ses fonctions légales et statutaires d’une façon habituelle, ce qui comprend la répétition des mêmes actes dans la durée, même si l’habitude n’implique pas l’idée qu’il soit déclaré personnellement commerçant, car les actes de commerce sont accomplis par la société qui aura , elle seule, la qualité de commerçante (niveau général d’organisation).

51 REYES VILLAMIZAR (Francisco), Derecho societario, op.cit, spéc. p.563.

52 PETIT (Bruno), Droit des sociétés, op.cit, spéc. n°86

53

Collection Lamy droit civil, Lamy Droit de la responsabilité, Les responsabilités professionnelles – Les dirigeants sociaux, [novembre 2006] étude 480 « Les dirigeants responsables », spéc. n°480-40.

27.- Comme pour tout professionnel, cette organisation lui permettra d’être efficace dans son activité. Il lui sera possible de l’exercer conformément à la maîtrise des connaissances techniques de gestion, ou tout au moins, selon son expérience. Ainsi il est affirmé par Cozian, Viandier et Mme Deboissy, que « Dans les grandes sociétés

faisant publiquement appel à l’épargne, …, les dirigeants sont choisis en raison de leurs compétences techniques. Ce sont des managers professionnels ne possédant qu’une part infime du capital ; les sociologues parlent de technostructure … »54. Le

dirigeant est, comme n’importe quel professionnel, maître de ses techniques,

autrement dit, c’est un initié et non pas un profane55.

28.- Enfin, le dirigeant a autorité sur les salariés de la société qui exécutent les contrats de celle–ci. La société agit à travers ses représentants ; l’autorité sera donc exercée par les dirigeants sur les travailleurs, auxiliaires ou substituts que la société introduit dans l’exécution de ses obligations contractuelles. En vertu de leur subordination et par application du principe général de responsabilité civile du fait d’autrui, particulièrement celle des commettants par le fait des préposés, ainsi que du principe du voile protecteur qu’exerce la société (quand elle est solvable) sur les agissements de ses dirigeants56, la société sera directement responsable si ses dirigeants, salariés ou

pas, causent un dommage dans l’exécution des contrats, s’ils n’ont pas en tout cas agi

54 COZIAN (Maurice), VIANDIER (Alain), DEBOISSY (Florence), Droit des Sociétés, 22ème édition, Paris: Litec 2009, 725 pages, spéc. n° 253.

55

Le TOURNEAU (Philippe), Responsabilité civile professionnelle, op. cit, p. 7.

56Le dirigeant ne répond pas personnellement, en principe, des dettes contractuelles ou dérivées d’une disposition légale incombant à la société. Il sera responsable s’il est, par exemple, associé en nom collectif, ou si la société tombe en liquidation judiciaire et une faute personnelle lui est reprochable. En principe, la société joue un rôle de voile protecteur vis- à-vis du dirigeant, qui, d’un côté, ne sera responsable que de ses propres fautes et n’a pas à assumer les obligations qui incombent à la personne morale elle-même ; et d’un autre, doit avoir commis une faute « détachable » ou « personnelle », distincte de celle de l’organe dirigeant de la personne morale. V. VINEY (Geneviève), Les conditions de la responsabilité, op.cit, spéc. n°857.

sans excéder les limites de la mission qui leur avait été impartie57 et s’ils n’ont pas

abusé de leur fonction.

29.- Les dirigeants sociaux sont donc des professionnels. Une fois établi le caractère professionnel de ces agents, il est possible de mieux appréhender la gravité de leur conduite. Comme tous les professionnels, les dirigeants sont soumis à des devoirs spécifiques. Ces devoirs donnent un aperçu du modèle de comportement que les dirigeants doivent observer. La non observation de ses obligations constitue une faute professionnelle et engage leur responsabilité.

30.- Voyons quel est le modèle de comportement attendu des dirigeants qui permet d’apprécier la faute. Une fois exposé ce modèle de conduite, nous verrons les devoirs que les dirigeants doivent observer dans l’exercice de leur activité professionnelle. Le modèle de conduite et les devoirs donnent à la responsabilité des caractéristiques particulières permettant de sanctionner les dirigeants plus rigoureusement que s’il s’agissait d’un particulier.

Conclusion du Chapitre I

Un sujet est qualifié de professionnel à partir du moment où un certain nombre de critères sont réunis. En faisant échec au manque définition légale, nous avons suivi l’ensemble des conditions proposées par M. Philippe le Tourneau permettant de qualifier quelqu’un de professionnel. Ainsi, nous remarquons que la qualité de professionnel s’acquière principalement lorsque la personne est organisée fonctionnellement pour exercer l’occupation licite qu’elle déclare ouvertement exécuter. Le professionnel est une personne initiée. Chacune des caractéristiques proposées par M. le Tourneau peut être adaptée aux dirigeants sociaux. Les dirigeants sont en effet organisés fonctionnellement à deux niveaux : à un niveau immédiat, car ils appartiennent à un organe social de direction, représentation ou

57 Voir jurisprudences Blieck et Costedoat aux numéros 17 et suivants supra et les notes en pied-de-page, ainsi que le chapitre dédié à la faute détachable des fonctions dans la deuxième partie de ce travail aux numéros 495 et ss. infra.

contrôle et à un niveau général car l´organe social auquel ils appartiennent fait lui- même partie intégrante de la structure de la société. Par ailleurs, les dirigeants « font profession de », c´est-à-dire, ils déclarent ouvertement avoir la qualité qu´ils détiennent. Les dirigeants sociaux rentrent par conséquent dans la catégorie juridique des « professionnels». La qualité de professionnel justifie l’existence d’un régime de responsabilité plus adapté.

1.2. Chapitre II - Les particularités de la