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Série de Poincaré

5.2 Symétrie des multi-valuations

5.2.8 Série de Poincaré

Ce paragraphe fait suite à une suggestion d’Antonio Campillo. Soit C =C1∪ · · · ∪Cp un

germe de courbe réduite Gorenstein, et I ⊂MC un idéal fractionnaire.

La définition suivante est inspirée par [CDGZ03]. On rappelle queIv ={gI; val(g)>v}.

On considère l’ensemble des séries de Laurent formellesL =Z[[t11, . . . , tp1, t1, . . . , tp]]. Cet

ensemble n’est pas un anneau, mais il s’agit d’un Z[t11, . . . , tp1, t1, . . . , tp]-module.

On pose :

LI(t1, . . . , tp) = X

vZ

p

cI(v)tv (5.15)

avec cI(v) = dimCIv/Iv+1 et on définit

PI(t) =LI(t)

p

Y

i=1

(ti−1). (5.16)

Remarque 5.2.23. Le cas I = OC pour C une courbe plane est étudié dans [CDGZ03]. Les

auteurs montrent que PO

C

est en fait un polynôme, et que pour les courbes planes à au moins

deux composantes, le polynôme PO

C

(t)

t1· · ·tp−1 est le polynôme d’Alexander de la courbe (voir

[CDGZ03, Theorem 1]).

Remarque 5.2.24. Par la proposition5.2.11on a pour tout idéal fractionnaireI et toutvZp,

cI(v)∈ {0, . . . , p}.

Notre objectif ici est de déduire du théorème5.2.1une relation entre PI(t) et PI

(t).

Le lemme suivant est une conséquence directe de la définition (5.16) dePI :

Lemme 5.2.25. On pose pour vZp,

aI(v) = X

J⊆{1,...,p}

(−1)Card(J

c

)cI(veJ) (5.17)

où on pose pour J ={j1,· · ·, jk}, eJ =ej

1

+· · ·+ej

k

. Alors

PI(t) = X

vZ

p

aI(v)tv.

On utilise le lemme précédent pour montrer la propriété suivante :

Lemme 5.2.26. La série de Laurent formellePI(t) est un polynôme.

Preuve. Soitλ, νZptels queν+Np ⊆val(I)⊆λ+Np. Les seules valeursaI(v) éventuellement

non nulles sont celles pour lesquelles λ6v 6ν. En effet, supposons par exemple que vp < λp

ou vp > νp. On peut ensuite montrer grâce au corollaire5.2.12, et à la proposition 5.1.13 dans

le cas vp > νp, que pour tout J ⊂ {1, . . . , p} tel que p /J,cI(veJ∪{p}) = cI(veJ). Par la

définition donnée par (5.17), cela nous donne le résultat.

Lemme 5.2.27. SoitvZp. On a

cI(v) = Card i∈ {1, . . . , p} ; Λi v+e1+· · ·+ei−1,val(I)

6

=∅

.

Preuve. Par définition,cI(v) = dimCIv/Iv+1. On a donc

cI(v) = dimCIv/Iv+e

1

+ dimCIv+e

1

/Iv+e

1

+e

2

+· · ·+ dimCIv+e

1

+···+e

p−1

/Iv+1.

5.2. SYMÉTRIE DES MULTI-VALUATIONS 111

La symétrie du théorème5.2.1a la conséquence suivante :

Proposition 5.2.28. Avec les mêmes notations,

PI

(t) = (−1)p+1 tγ PI 1

t1, . . . ,

1

tp

!

. (5.18)

Preuve. Il suffit de comparer les coefficients de PI

etPI. Soit vZ. Le coefficient detv dans

PI

1

t

1

, . . . ,t1

p

est aI(−v). Nous allons donc montrer que

vZp, aI

(v) = (−1)p+1aI(γv). (5.19)

SoitvZp. On a par définition

aI

(v) = X

J⊆{1,...,p}

(−1)p+Card(J)cI

(veJ).

Montrons que cI

(v) =pcI(γv−1).

Par le lemme 5.2.27on a :

cI

(v) = Card

i∈ {1, . . . , p} ; Λi(v+e1+· · ·+ei−1,val(I))6=∅

cI(γv−1) = Card{i∈ {1, . . . , p}; Λi(γve1− · · · −ei,val(I))6=∅}

Or, par l’équivalence (5.13),

Λi(v+e1+· · ·+ei−1,val(I))6=∅ ⇐⇒ Λi(γve1− · · · −ei,val(I)) =∅.

Cela nous donne donc cI

(v) =pcI(γv−1). On a donc

aI

(v) = X

J⊆{1,...,p}

(−1)p+Card(J)(pcI(γ−(veJ)−1).

En remarquant queP

J⊆{1,...,p}(−1)Card(J)= 0 on obtient :

aI

(v) = (−1)p+1 X

J⊆{1,...,p}

(−1)Card(J)cI(γveJ

c

)

= (−1)p+1aI(γv)

Cela achève la preuve de la proposition 5.2.28.

Exemple 5.2.29. Déterminons explicitement le polynômePJ

C

pour la courbe de l’exemple5.2.19.

On indique sur la figure 5.10 les valeurs des cJ

C

(v). Pour un point vZ2, on lit sur le

des-sin la valeur de cI(v) dans la case dont le sommet en bas à gauche est v. Les cases en bleu

correspondent à la valeur 0, en vert à la valeur 1 et en mauve à la valeur 2.

On commence par remarquer que pour tout idéal fractionnaire I d’une courbe à deux

branches,

aI(v) =cI(v)−cI(ve1)−cI(ve2) +cI(v−1).

On représente les signes de la formule précédente sur le dessin suivant :

v

+

+ −

112 CHAPITRE 5. COURBES ET MULTI-VALUATIONS

val1

val2

10 15

15

20

0

1

2

1

1

0

2

2

Figure5.10 – Valeurs des cJ

C

(v)

Lemme 5.2.30. Soit C = C1 ∪C2 une courbe à deux branches, et I un idéal fractionnaire

de C. Alors pour tout vZ2, aI(v) ∈ {−1,0,1}. De plus, si aI(v) 6= 0, alors les valeurs de

cI(v), cI(ve1), cI(ve2) etcI(v−1)sont toutes égales sauf exactement une7.

Preuve. Soit vZ2. Montrons quecI(v)−cI(ve1)∈ {−1,0,1}. On a

cI(v)−cI(ve1) = dimCIv/Iv+e

2

+ dimCIv+e

2

/Iv+1

−(dimCIve

1

/Iv+ dimCIv/Iv+e

2

)

(5.20)

= dimCIv+e

2

/Iv+1−dimCIve

1

/Iv (5.21)

Comme par la proposition 5.2.11 dimCIv+e

2

/Iv+1 ∈ {0,1} et dimCIve

1

/Iv ∈ {0,1}, on a

cI(v)−cI(ve1)∈ {−1,0,1}.

Par conséquent, aI(v) ∈ {−2,−1,0,1,2}. Il reste donc à montrer que cI(v)−cI(ve1) et

cI(v−1)−cI(ve2) ne peuvent pas être simultanément égaux à 1 ou simultanément égaux à

−1. Supposons par exemple quecI(v)−cI(ve1) =cI(v−1)−cI(ve2) = 1. PosonscI(v) =b

et cI(v−1) = b0. Alors cI(ve1) = b−1. et cI(ve2) = b0−1. Comme pour tout vZ2,

cI(v)−cI(vei)∈ {−1,0,1}alors on a b0∈ {b−2, b−1, b} ∩ {b, b+ 1, b+ 2}et doncb0 =b. Il

y a donc deux cas possibles :

v1

1 0

0

v2

2 1

1

Dans chacun des deux cas, on aboutit à une contradiction. En effet, sicI(v) = 1, cela signifie

que Λ1(v,val(I))6=∅ou Λ2(v,val(I))6=∅, et donc ou biencI(ve2)>1 ou biencI(ve1)>1,

et donc le premier cas ne peut pas être réalisé. On vérifie de même que si cI(v) =cI(v−1) = 2

alors cI(ve1) =cI(ve2) = 2, et donc le deuxième cas ne peut pas être réalisé non plus, et

doncaI(v)6= 2. Une preuve analogue montre que aI(v)6=−2, ce qui nous donne le résultat.

La deuxième assertion se montre en regardant les différents cas possibles.

5.2. SYMÉTRIE DES MULTI-VALUATIONS 113

Nous pouvons déterminerPJ

C

à l’aide de la figure 5.10.

On trouve :

PJ

C

(t1, t2) =t91t142 t2t1+t1t22+t21t2t21t52+t31t62.

Par la symétrie de la proposition5.2.28, on a, vu que γ = (8,12),

PR

C

(t1, t2) =−t11t22t21t11+t11t22+t12t21t12t25+t13t26

Chapitre 6

Résidus logarithmiques le long des

courbes

Nous nous intéressons dans ce chapitre à une famille de singularités libres : les courbes. Dans

le paragraphe 6.1, nous considérons des courbes intersections complètes. Nous relions l’idéal

jacobien JC au module des différentielles de Kähler (voir proposition 6.1.3), puis, en utilisant

les résultats des chapitres précédents, nous déduisons la relation précise entre les multi-résidus

et les différentielles de Kähler.

Les courbes étant libres, par le théorème3.3.7, la dimension projective commeOS-module du

module Ωm1(logC) estm−2 et celle du moduleRC estm−1. Nous donnons ici une résolution

libre explicite de ces modules pour les courbes intersections complètes quasi-homogènes (voir

théorèmes 6.1.29 et 6.1.33). Nous donnons ensuite une caractérisation des arrangements de

droites plan qui utilise les multi-valuations du module des multi-résidus (voir proposition6.1.40).

Le reste du chapitre est consacré aux courbes planes. Nous calculons le conducteur du module

des résidus (voir proposition 6.2.3), et montrons comment retrouver les multi-valuations des

branches ou d’une union de branches deCà partir des multi-valuations deRC. Nous déduisons de

[BGM88] et [HH07] des algorithmes pour une branche (voir paragraphe6.2.4) et nous proposons

un algorithme de calcul des multi-valuations de RC pour une courbe à deux branches.

Dans le dernier paragraphe6.3, nous étudions le comportement du module des résidus dans

une déformation équisingulière de courbe plane. En particulier, nous la comparons à d’autres

stratifications. On termine en présentant le lien entre le module des résidus et le résultat de

[HH11] et [HHH15] sur la classification analytique des courbes planes à une ou deux branches.

Ce chapitre suit en grande partie [Pol14], [Pol15a], [Pol15b] et [Pol16].

6.1 Courbes intersections complètes

Dans cette partie, nous commençons par relier le module des multi-résidus d’une courbe

in-tersection complète au module des différentielles de Kähler. Nous donnons ensuite une résolution

libre explicite du module des multi-résidus et du module des formes multi-logarithmiques dans

le cas d’une courbe intersection complète quasi-homogène.