3.2 Champs de vecteurs multi-logarithmiques
3.2.4 Dualité entre l’idéal jacobien et les multi-résidus
∂h
i∂x
j1. . . ∂h
i∂x
jk+1∂h
1∂x
j1. . . ∂h
1∂x
jk+1..
. ...
∂h
k∂x
j1. . . ∂h
k∂x
jk+1= 0.
Par conséquent, δJi ∈Derk(−logC). Soitω =P1
haIdxI ∈ HomO
SDerk(−logC),Σ, avec
aI∈OS. Alors pour tout J ⊆ {1, . . . , m} eti∈ {1, . . . , k} on a :
ω(δiJ) =X
I
1
haIdxI(δ
i
J) = 1
h
k+1
X
`=1
(−1)`−1 ∂hi
∂xj
`aJ\{j
`}∈Σ.
Par (3.9), pour tout i ∈ {1, . . . , k}, on a dhi ∧ω = P
|J|=k+1ω(δJi)dxJ ∈ Ωek+1, et donc
ω∈Ωk(logC). D’où le résultat : HomO
SDerk(−logC),Σ= Ωk(logC).
3.2.4 Dualité entre l’idéal jacobien et les multi-résidus
Le lemme 5.4 de [Sch16] et le théorème3.1.40assurent que le dual de l’idéal jacobienJC est
le module des multi-résidusRC. Nous proposons ici une autre preuve de ce résultat, qui n’utilise
pas l’isomorphisme du théorème 3.1.40. La preuve que nous développons est la généralisation
d’une partie de la preuve de la proposition 3.4 de [GS14] au cas des intersections complètes.
Nous aurons besoin du lemme suivant :
Lemme 3.2.15 (Lemme d’Ischebeck, [Mat80, (15.E) Lemma 2]). Soit A un anneau
lo-cal noethérien et M 6= 0, N 6= 0 deux A-modules de type fini. Alors pour tout i < prof(M)−
dim(N), on a :
ExtiA(N, M) = 0.
On peut à présent montrer le résultat suivant :
Lemme 3.2.16. Supposonsk>2. Alors Ext1O
S(JC,OS) = 0 et :
Ext1O
S(JC,Σ) = HomO
C(JC,OC).
Preuve. On applique le foncteur HomO
S(JC,−) à la suite exacte :
0→Σ−−→×h OS→OC →0. (3.10)
On obtient :
0→HomO
S(JC,OC)→Ext1O
S(JC,Σ)→Ext1O
S(JC,OS)→. . .
La profondeur de OS est m et comme JC est un idéal fractionnaire (voir définition2.3.15), la
dimension deJC est m−k= dimOC. D’après le lemme d’Ischebeck (voir lemme3.2.15), on a
Ext1O
S(JC,OS) = 0. D’où le résultat.
60 CHAPITRE 3. LIBERTÉ D’UNE INTERSECTION COMPLÈTE
SoitI ⊂MC un idéal fractionnaire. On rappelle que le dual deI vérifie (voir lemme2.3.16) :
I∨ = HomO
C(I,OC) ={f ∈MC ; f ·I ⊆OC}.
Proposition 3.2.17. Le dual de l’idéal jacobien est J∨
C =RC.
Preuve. On suppose k>2. Pourk= 1, on renvoie à [GS14, Proposition 3.4].
Considérons le complexe double HomO
SDerk(−logC),→ΘkS, h: Σ→OS
. On obtient un
diagramme semblable au dual du diagramme (3.8) de [GS14]. De plus, par le lemme 3.2.16,
Ext1O
S(JC,OS) = 0, et donc on obtient le diagramme commutatif suivant qui est basé sur les
suites exactes (3.5) et (3.10) :
0 0
0 HomOS ΘkS,Σ HomOS
Derk(−logC),Σ Ext1OS(JC,Σ) 0
0 HomOS ΘkS,OS
HomOS
Derk(−logC),OS 0
0 HomOS(JC,OC) HomOS ΘkS,OC
HomOS
Derk(−logC),OC Ext1OS(JC,OC) 0
Ext1OS(JC,Σ) 0 Ext1OS
Derk(−logC),Σ Ext2OS(JC,Σ) 0
0
λ
σ µ
·h
π π
0Montrons à l’aide de ce diagramme que J∨
C =RC.
Soit ϕ : Derk(−logC) → Σ. Par une chasse au diagramme, nous allons lui associer une
application ψ : JC → OC. Par l’isomorphisme β de la preuve de la proposition 3.2.13, ϕ
correspond àωϕ = h1P
Iϕ(h∂xI)dxI ∈Ωk(logC). Alors ϕ(δ) =ωϕ(δ).
Par l’application verticale,ϕest envoyée surhϕ: Derk(−logC)→OS, δ7→hωϕ(δ). Comme
l’application horizontale λest un isomorphisme, il existe Φ : ΘkS →OS tel que Φ|Der
k(−logC) =
hϕ. Pour tout i∈ {1, . . . , k}, hi∂xI ∈Derk(−logC) donc hiΦ(∂xI) = hϕ(hi∂xI) = hiϕ(h∂xI)
et donc Φ(∂xI) =ϕ(h∂xI) =hωϕ(∂xI).
Notons Φ : ΘkS → OC l’image de Φ par l’application verticale π. L’image de Φ par
l’appli-cation horizontale µ est zéro donc Φ est l’image par σ d’un élément ψ de HomO
S(JC,OC).
Calculons-le. Comme ωϕ ∈ Ωk(logC), on a d’après le théorème 3.1.15, gωϕ = ξdh
1∧···∧dh
kh +η
avec g∈OS qui induit un non diviseur de zéro deOC,ξ ∈OS etη∈Ωek. Alors :
gΦ(∂xI) =ghωϕ(∂xI) =ξ∂xI(dh1∧ · · · ∧dhk)∈OC.
Commeg est un non diviseur de zéro deOC, on a
Φ(∂xI) =σ(ψ)(∂xI) =ψ(∂xI(dh1∧ · · · ∧dhk)) = resC(ωϕ)∂xI(dh1∧ · · · ∧dhk).
L’applicationψ s’identifie donc à resC(ωϕ) dansJ∨
C.
En identifiant les modules HomO
SDerk(−logC),Σ et Ωk(logC), on obtient donc
l’appli-cation
resC : Ωk(logC)→J∨
C
ω7→resC(ω)
Réciproquement, soit ψ : JC → OC. Son image par σ est une application Φ : ΘkS → OC
définie par Φ(δ) =ψ(δ(dh1∧ · · · ∧dhk)). La surjectivité deπ assure l’existence d’un antécédent
Φ : ΘkS →OSde Φ. Par l’isomorphismeλ, on lui associe une applicationϕe: Derk(−logC)→OS.
3.3. CARACTÉRISATIONS DE LA LIBERTÉ 61
Comme l’image de ϕe par π0 est nulle, elle provient d’une application ϕ : Derk(−logC) → Σ
qui vérifie hϕ = ϕe. On identifie ϕ à une forme ωϕ ∈ Ωk(logC). Le raisonnement précédent
montre que l’application ψ est donnée pour a ∈ JC par ψ(a) = resC(ωϕ)a. Par conséquent,
resC : Ωk(logC)→J∨
C est surjective et doncJ∨
C =RC.
Remarque 3.2.18. De la même façon que dans [GS14, (3.8)], on peut considérer le complexe
double associé à
HomO
Se
Ωk,→Ωk(logC), h: Σ→OS
.
On obtient alors la suite exacte longue :
0→Derk(−logC)→ΘkS −→σ Ext1O
S(RC,Σ)→Ext1O
SΩk(logC),Σ→Ext1O
Se
Ωk,Σ→ · · ·
(3.11)
Par une preuve semblable à la preuve du lemme 3.2.16 et de [GS14, Proposition 3.4] on
obtient Ext1O
S(RC,Σ) =R∨
C etσ(δ) = dh1∧ · · · ∧dhk(δ).
3.3 Caractérisations de la liberté
Nous montrons dans ce paragraphe le résultat principal de ce chapitre, à savoir le
théo-rème3.3.7.
Nous avons rappelé dans le Chapitre2 plusieurs caractérisations de la liberté des diviseurs.
Nous commençons par donner la définition de liberté proposée par M. Granger et M. Schulze
dans [GS12], qui s’inspire clairement du théorème 2.2.10(voir définition3.3.1). On montre sans
difficultés que cette notion de liberté conduit à une condition sur la dimension projective du
module desk-champs de vecteurs multi-logarithmiques qui est alorsk−1 (voir proposition3.3.5).
Dans le cas des hypersurfaces, la liberté du module Der(−logD) est clairement équivalente
à la liberté de Ω1(logD) grâce à la proposition2.1.23. La situation dans le cas d’une intersection
complète se complique, et le fait que la dimension projective de Derk(−logC) estk−1 n’indique
a priori rien sur la dimension projective de Ωk(logC).
L’objectif de ce paragraphe est de montrer que la liberté d’une intersection complète est
équivalente au fait que la dimension projective de Ωk(logC) estk−1. Pour obtenir ce résultat,
nous étudions en détails la suite exacte longue obtenue en appliquant le foncteur HomO
S(−,OS)
à la suite exacte courte 0→Ωek→Ωk(logC)→RC →0.
Commençons par définir la notion de liberté pour une intersection complète. Dans tout ce
paragraphe, nous ne considérons que des germes d’espaces et de fonctions en un point p ∈ D,
que nous ne mentionnons pas.
Définition 3.3.1 ([GS12, Definition 5.1]). Une intersection complète réduiteCest dite libre
si elle est lisse ou si le lieu singulier muni de l’anneau OC/JC est un OC-module de
Cohen-Macaulay de dimension m−k−1.
Proposition 3.3.2. Une intersection complète réduite C est libre si et seulement si l’idéal J(h)
de OS engendré par les mineursk×kde la matrice jacobienne et h1, . . . , hk est un idéal parfait
de codimension k+ 1dans OS.
Preuve. La preuve est essentiellement la même que la preuve de la proposition 2.2.20. Comme
OS est régulier, il est Cohen-Macaulay et donc grade(J(h)) = ht(J(h)) =m−dim(OS/J(h)).
D’après la formule d’Auslander-Buchsbaum2.2.14, on a dimproj(OS/J(h)) =m−prof(OS/J(h)).
Par conséquent,J(h) est parfait de codimensionk+1 dansOSsi et seulement si dim(OS/J(h)) =
prof(OS/J(h)) =m−k−1, c’est-à-dire si et seulement siOS/J(h) est Cohen-Macaulay de
62 CHAPITRE 3. LIBERTÉ D’UNE INTERSECTION COMPLÈTE
Exemple 3.3.3. Soit C une courbe intersection complète réduite. Alors C est libre. En effet,
si C est lisse, elle est libre par définition, et dans le cas contraire, comme C est réduite et de
dimension 1, son lieu singulier est de dimension 0 et est donc Cohen-Macaulay.
La caractérisation des surfaces libres de C3 de la proposition 2.2.23 se généralise aux
in-tersections complètes réduites de dimension deux avec une preuve essentiellement identique.
Proposition 3.3.4. Soit C ⊆ S un germe de surface intersection complète réduite. Soit J(h)
l’idéal deOS engendré par les équationsh1, . . . , hm−2 et par les mineurs maximaux de la matrice
jacobienne de (h1, . . . , hm−2). Alors C est libre si et seulement si J(h) est saturé.
Preuve. Par définition,Cest libre si et seulement siOS/J(h) est Cohen-Macaulay de dimension
1. Comme C est réduite, la dimension de OS/J(h) est au plus 1. Le lemme 2.2.22 nous donne
alors le résultat.
Les trois premiers points de la proposition suivante sont mentionnés dans [GS12]. On rappelle
que dimproj(M) désigne la dimension projective d’un OS-moduleM.
Proposition 3.3.5. SoitCune intersection complète réduite singulière. Les assertions suivantes
sont équivalentes :
1. C est libre,
2. l’idéal jacobien JC est un OC-module de Cohen-Macaulay,
3. dimprojDerk(−logC)6k−1,
4. dimprojDerk(−logC)=k−1.
Remarque 3.3.6. Comme JC est un idéal fractionnaire de OC, il est de dimensionm−k et
donc la condition 2.est équivalente àJC est unOC-module de Cohen-Macaulay maximal.
Nous ajoutons à la liste précédente les caractérisations suivantes, ce qui nous amène au
résultat principal de ce chapitre :
Théorème 3.3.7. On peut ajouter les assertions suivantes à la liste d’équivalences de la
pro-position 3.3.5 :
5. dimprojΩk(logC)6k−1,
6. dimprojΩk(logC)=k−1.
En particulier, pour k = 1, on reconnaît plusieurs des caractérisations de la liberté des
hypersurfaces mentionnées dans le Chapitre 2, à savoir la définition2.2.3et le théorème2.2.10.
Nous verrons sur des exemples dans la partie6.1 que le nombre de générateurs du module
Ωk(logC) dépend de l’intersection complète considérée et pas seulement deketm. En particulier,
cela indique qu’il semble plus difficile d’obtenir une généralisation du Critère de Saito2.2.8.
3.3. CARACTÉRISATIONS DE LA LIBERTÉ 63
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Singularités libres, formes et résidus logarithmiques
(Page 60-64)