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CHAPITRE 1 : Forme de croissance urbaine : la question de l’identité dans la ville

1.3. Les enjeux récents de la croissance urbaine

1.3.2. La ségrégation socio-spatiale

Tout au long de leurs croissances, les villes développent des déséquilibres sociaux et économiques, qui contribuent de leurs côtés à la création de différentes formes de « ségrégations socio-spatiales » (F. Navez-Bouchanine, 2002). La ségrégation entre des zones occupées par une population riche et les régions de population plus pauvre est renforcée par certains facteurs, ainsi la différentiation entre les différentes zones d’habitat, crée l’identité de l’espace urbain, qui n'est ni neutre, ni homogène; mais muni d’une structure « fortement hiérarchique » (F. Navez-Bouchanine, 2002).

La ségrégation est une notion plurivoque et complexe, d’où la nécessité de la définir. Mais elle peut être résumée comme étant l'action de séparation. Elle correspond à l’ensemble des phénomènes qui semblent nier la notion « d’égalité » entre les citoyens et les territoires. Les inégalités sont réelles, différentes et traversent tous les champs et dimensions territoriales ou territorial scales (Houssay-Holzschuch, 1999). C’est est donc une séparation spatiale de différents groupes démographique dans une région géographique donné (J. Saltman, 1991). Qu’ils soient minoritaires ou dominants, ils sont différenciés par le niveau socio-économique, de l'occupation, de la composition familiale ou de la culture. La ségrégation reste alors un phénomène marqué par une différence entre les villes européennes et les villes nord-américaines.

Ce que P. Merlin (1994) appelle « le partage de l’espace » n’est qu’un terme qui exprime la notion de ségrégation socio-spatiale qui a été selon lui « longtemps ignoré » par les villes. Cette notion s’est affirmée dans les sociétés industrielles (P. Merlin, 1994) suite à révolution et l’installation des usines et la prolifération des quartiers ouvriers autour des villes. Cela s’est traduit par contre plus tard dans les pays en voie de développement et ceux du bassin méditerranéen. L’industrialisation de s’est pays s’est fait suite aux colonisations. Les sociétés ne se sont donc vues ségréguées et leurs espaces réorganisées que vers le milieu du XXe siècle (P. Mario, 1990).

Dans le cas de Tunis, l’espace urbain de la ville est « un espace ségrégatif » (A. Belhédi, 2005), car depuis la classification sociale à l’intérieur de l’ancienne ville jusqu’à l’époque coloniale, le regroupement des populations s’est toujours effectué selon leur classe sociale, leurs origines, leurs revenus, leurs religions. Cela n’exclut toutefois pas les tentatives d’inclusions sociales et d’intégration par des plans d’Aménagement et la programmation de quartiers mixtes et à proximité des quartiers plus aisés.

Les distributions sont partiellement inversées entre les villes européennes où le centre est prestigieusement voué à la résidence des populations aisées tandis qu’en Amérique du Nord ce sont des localisations en périphérie, dans les suburbs ou les edge

ciliés (gated communities) qui attirent le plus les personnes aux revenus

Dans le cas de la Tunisie, et suite à l’indépendance du pays en 1956, l'espace urbain colonial était régi par « un modèle ségrégatif à base ethnique d'abord, socio-économique » ensuite. (A. Belhedi, 2005). La ville était donc dotée d’un modèle colonial (A. Belhedi 1980), caractérisé une ségrégation opposante d’un coté, le centre moderne détenant l'essentiel du pouvoir et de l'activité économique, un centre historique (la médina) marginalisé, vidé de ses fonctions et de sa population, et plus éloignés les lotissements pavillonnaires pour les populations aisées pour l'essentiel coloniales, mais à proximité des quartiers plus modestes autochtones, « gourbivilles et rbats». (A. Belhedi, 2005).

Conclusion

Nous avons tenté d'analyser les différents points de vue et littérature des professionnels de l’urbanisme, de la géographie, de la sociologie et de l’économie, quant aux formes de croissance urbaine des villes, ce phénomène qui se prolifère de plus en plus dans le monde. Nous avons donc vu que le concept de centralité urbaine a évolué dans le temps et que c’est devenu une notion plus symbolique que géographique et physique. Les formes de croissance urbaine sont donc ces facteurs qui ont contribué de près à l’affaiblissement du poids des centres et la dissipation de leur attraction. Nous avons vu qu’il existe de nombreuses formes d’extensions des villes et qu’elles varient selon les contextes.

Le développement urbain des villes est à la fois facteur et indicateur de leur croissance. Dans une conjoncture de mondialisation, les villes se développent plus rapidement et les besoins en espaces deviennent de plus en plus importants. L’évolution des formes de croissance urbaine constitue l’entité fondamentale du patrimoine urbain des villes. Or, la stratification de ces évolutions, leur impact sur l’espace et les changements technologiques, favorise la mise en place d’un nouvel ordre urbain et une nouvelle organisation spatiale des villes.

La croissance urbaine sous toutes ses formes, contribue à l’apparition de nouveaux enjeux qui conditionne la ville et l’implique dans un cycle continu de renouvellement urbain. Les nouvelles formes de croissance urbaine sont le fruit d’une demande croissante en espace et parfois une croissance démographique démesurée. Mais cela n’est pas toujours le cas, car l’exemple des villes nord-américaines montre bien que la croissance urbaine des villes n’est pas toujours en phase avec la démographie.

Certes, la croissance urbaine est un des facteurs d’avancement de l’humanité, mais cela a sans doute un impact sur les notions sociales et les identités dans les villes. Le

citoyen se trouve donc confronté à de nombreux questionnements identitaires. Soit, il perd ses repères dans sa ville et ne s’y retrouve plus, soit il développe une identité singulière nouvelle qui lui procure le réconfort psychologique et le sentiment d’appartenance. Les villes se ressemblent et s’étendent avec des vagues migratoires, dans les deux sens.

La croissance des formes urbaines génère parfois une ségrégation socio-spatiale dans l’agglomération. Ce phénomène conduit à la naissance de disparités spatiales et de regroupements sociaux par affinité et appartenance. Ce qui favorise la prolifération d’une identité urbaine. En effet, cette identité est parfois menacée par le poids de la croissance urbaine. Les centres des agglomérations étant les noyaux de formation des villes acquièrent avec le temps une identité et un cachet architectural et urbain spécifiques. Les nouvelles formes de croissance ne suivent pas nécessairement ce modèle et se détachent de son influence. Ce qui conduit à une diversification des formes de croissances, tel que nous allons voir au niveau de l’agglomération du grand Tunis. La naissance des banlieues et la création de nouveaux espaces urbains ont confié à la ville une nouvelle configuration spatiale.

Le développement des périphéries et l’augmentation du taux d’urbanisation sont généralement à l’origine des problèmes sociaux qui surgissent dans les villes, tels que les mutations comportementales, ainsi que les fractures spatiales. L’agglomération du grand Tunis connaît une croissance et un développement spatial, qui ont contribué à sa métropolisation et son expansion. Comment évoluent les formes de croissances urbaines à Tunis et quelles en sont les conséquences sur l’identité de la ville?

CHAPITRE 2 : Évolutions des formes de croissance