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Les risques liés aux piqures d’insectes et morsures d’animaux

EN PAYS TROPICAUX

III.1 Les pathologies à transmission vectorielle

III.1.2 Les risques liés aux piqures d’insectes et morsures d’animaux

Les plus graves des maladies transmises par les animaux sont le tétanos et la rage dont le traitement doit être systématiquement envisagé après morsure [1].

III.1.2.a La rage.

L'épopée pasteurienne n'a pas, contrairement à ce que l'on pourrait croire, conduit à la disparition de la rage humaine partout dans le monde. Elle reste encore une des priorités de I'OMS dans certaines parties du monde [67].

La rage est une zoonose virale due à un virus, qui appartient à la famille des Rhabdoviridae et au genre Lyssavirus. Avec sept génotypes différents, etdes virus en cours de classification, tous peuvent être responsables du même tableau clinique d’évolution fatale chez les mammifères [64][65].

Elle est transmissible accidentellement à l’homme, généralement à la suite d’une morsure, d’une griffure ou d’un léchage sur plaie par un animal enragé. Des cas de rage après greffe de cornée ont également été rapportés. Enfin, la manipulation d’animaux morts sans gant constitue aussi un danger. Enfin quelques rares cas de transmission par allogreffe sont notés[64] [68].

La rage est caractérisée cliniquement par l’apparition d’un tableau d’encéphalite dont les symptômes sont très variables selon les individus et les espèces considérés.

Elle est toujours fatale dans un délai bref. Le diagnostic différentiel avec d’autres encéphalites virales d’étiologie différente est souvent difficile voire impossible [64].

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L’animal est contaminant dans les 5 à 7 jours qui précèdent l’apparition des signes cliniques et ce jusqu’à sa mort. Après une morsure, le virus se multiplie au niveau de la plaie et dans les cellules musculaires avant de migrer vers le système nerveux. Sa présence est détectable pendant 2 à 3 jours au niveau du point d’inoculation. La migration du virus ne se fait pas par dissémination virémique mais par propagation à travers le flux axoplasmique rétrograde [68]. Les neurones et les cellules gliales sont les cibles privilégiées du virus où il se multiplie rapidement. Dans un second temps, il va diffuser de façon centrifuge et atteindre tous les organes dont les glandes salivaires. C’est la destruction progressive des tissus nerveux qui conduit inéluctablement au décès du patient [68].

Le chien est le principal réservoir du virus dans les pays en développement, mais tous les mammifères (y compris les chauves souris, les chats les singes) peuvent être atteints [12]. L’infection se transmet par la salive de l’animal contaminé par léchage des muqueuses ou morsure, qui peut être contagieux avant de présenter les signes de la maladie [1] [12].

La rage animale est présente dans de nombreux pays, en particulier en Asie, en Amérique et en Afrique. En conséquence, la rage humaine peut y représenter un vrai problème de santé publique. Elle a entrainé le décès de 35 à 45 000 personnes en 1997 dans le monde. Les dernières données font état de 55 000 décès annuels dont 60 % d’enfants [65].

La rage peut s’observer chez une personne en visite dans un pays indemne mais originaire d’un pays où la maladie est endémique [65].La rage peut être considérée comme une maladie du voyageur.

En France, le nombre de voyageurs traités contre la rage après avoir été mordu dans une région du monde où cette maladie est endémique a plus que doublé en 20 ans. La vaccination antirabique avant exposition est donc conseillée, selon le guide 2004 des Recommandations sanitaires pour les voyageurs, en cas de « séjour prolongé ou aventureux et en situation d’isolement dans un pays à haut risque (surtout Asie et notamment en Inde), recommandé en particulier chez les jeunes enfants dès l’âge de la marche, trois injections à J0, J7, J21 ou J28 sont préconisées avec un rappel un an plus tard. La durée de protection de ce vaccin est de cinq ans.

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La vaccination préventive ne dispense pas d’un traitement curatif qui doit être mis en œuvre le plus tôt possible en cas d’exposition avérée ou suspectée [65].

Afin dévaluer les connaissances sur le mode de transmission de la rage, les risques au cours du voyage et les mesures préventives des voyageurs marseillais, un questionnaire a été administré à 300 personnes avant leur départ et à 209 au retour. Les régions visitées étaient endémiques pour la rage dans 84,7 % des cas avec pour destinations les plus fréquentes le Sénégal, le Kenya, le mali, la Guyane française et la Thaïlande (13). 6,7 % des voyageurs évaluaient le risque de rage comme étant important alors que 40,1% le considérait faible ou moyen. Les autres ne savaient pas. Les morsures de chien étaient bien identifiées comme mode de transmission. Par contre, le léchage de plaies ou de muqueuses était peu connu (10 %) de même que les griffures (0,7 %). Les chats étaient cités comme vecteurs potentiels par 23,7 % des voyageurs, les renards par 28,3 %, les singes 10,3 % et les chauves-souris, 5,0 %. La vaccination préventive était connue par 50,7 % des voyageurs. 57,6 % des personnes se rendant en zone endémique s’était présentés à la consultation de conseil aux voyageurs moins de 21 jours avant leur départ, ne permettant pas d’envisager une vaccination complète.

Les mesures de lavage immédiat de la blessure étaient connues de 3,0 % des individus et la désinfection de la plaie par 21,3 %. Parmi les voyageurs au retour de zone endémique, 3,8 % déclarait avoir été exposés à un risque de blessure par un animal. 53,8 % avait rencontré des chiens, 10,3 % des singes, 17,9 %, des chauves-souris et 15 % des chats.

Cette étude souligne le fait que les connaissances des voyageurs marseillais vis à- vis des risques de rage ont besoin d’être renforcées, particulièrement en ce qui concerne les mesures de prévention et l’attitude à adopter en cas de blessure [66].

III.1.2.b Le tétanos.

Le tétanos demeure une maladie infectieuse sévère, responsable de près de 1 million de décès par an à travers le monde. Près de 80 % de ces décès surviennent en Afrique ou en Asie du Sud-est et le tétanos est toujours endémique dans 90 pays.

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Au Maroc, bien que le tétanos non néonatal soit en diminution avec une incidence de 19 cas en 2004 (soit 0,6 cas pour 100 000 habitants par an), des cas de tétanos grave sont encore enregistrés [70].

Le tétanos est une toxi-infection aiguë, cosmopolite, grave et potentiellement mortelle. Mais elle est évitable grâce à la vaccination. L’absence de contamination interhumaine ne nécessite pas l’isolement du malade, mais il s’agit d’une affection à déclaration obligatoire [69].

Le tétanos est dû à une neurotoxine sécrétée par le bacille Clostridium tetani, Gram positif anaérobie stricte, capable de sporuler, tellurique et ubiquitaire [69][71].

Ubiquitaire, il est très résistant à la chaleur, à la dessiccation et aux désinfectants, et situé sur le sol, contaminé par les excréments d’animaux (chevaux, moutons), ainsi que sur les plantes et les objets rouillés [69].

Le réservoir est tellurique, le germe persistant dans le sol et les déjections animales sous forme sporulée, puis pénétrant dans l’organisme à travers une plaie souillée [13].

Des conditions d’anaérobiose vont favoriser la germination de spores et la production de toxines, responsables de la maladie [13].

L’homme s’infeste lors d’une blessure, souvent minime, même superficielle (abrasion cutanée, brûlures, engelures) mais aussi à l’occasion d’une blessure avec un objet souillé

(figure 6), ou d’ulcères, d’abcès, d’actes chirurgicaux, d’avortement, ou encore de

toxicomanie intraveineuse [69].

Ces circonstances permettent l’entrée de spores lors d’une effraction cutanée ou muqueuse, avec prolifération de C. tetani dans des tissus mal oxygénés (nécrosés ou ischémiés), qui vont germer et secréter une neurotoxine, la tétanospasmine. Celle-ci va migrer le long des axones de nerfs jusqu’au tronc cérébral et être responsable des contractures musculaires et des spasmes. En effet, elle se fixe sur les terminaisons présynaptiques et bloque la libération des neurotransmetteurs inhibiteurs, la glycine et surtout l’acide gamma amino-butyrique (GABA). Il s’en suit une augmentation de l’activité des neurones moteurs et l’apparition des spasmes musculaires caractéristiques du tétanos. Le tétanos provoque environ 500 000 décès par an dans le monde, presque toujours dans les pays en voie de développement, en particulier en Afrique et en Asie [69] [71].

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En effet, la mortalité du tétanos varie selon les pays, allant de moins de 1 % dans les pays industrialisés à 90 % dans les zones rurales d’Afrique. Dans les pays en voie de développement, le tétanos est l’une des principales causes de décès néonatal. Dans le monde, la généralisation du vaccin diphtérie-tétanos-poliomyélite a permis une régression importante du tétanos [69].

Le vaccin, d’une efficacité et d’une innocuité quasiment parfaites, est disponible depuis 1938[13].

S’agissant du seul moyen de sa prévention, le tétanos va se déclarer uniquement chez des personnes présentant une vaccination absente ou incomplète. Alors que de nombreux pays en voie de développement sont touchés, en particulier par sa forme néonatale [13].

Figure 6 :Clostridium tetaniou bacille de Nicolaier.

Plaie tétanigène typique.

Il existe trois formes de tétanos : le tétanos localisé à la tête (tétanos céphalique avec atteinte des nerfs crâniens), le tétanos localisé à un membre et surtout, dans 80 % des cas, le tétanos généralisé, le plus grave. La forme néonatale est, le plus souvent, un tétanos généralisé qui survient environ 12 jours après la section du cordon ombilical avec un instrument souillé [69].

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Après une incubation variant entre 1 et 2 semaines, apparaissent une dysphagie puis un trismus(ou blocage de la mâchoire en position fermée) intermittent lors de la mastication puis permanent, puis un rictus « sardonique » (par contracture des muscles de la face) et un opisthotonos (par une hyperextension de la nuque et du dos par contracture des muscles paravertébraux) [69].

Ces symptômes sont caractéristiques du tétanos. En outre, le patient présente une contraction des muscles abdominaux, faisant évoquer un abdomen aigu, une transpiration abondante et surtout des spasmes douloureux des bras (en flexion) et des jambes (en extension) déclenchés par le bruit ou la lumière, mais le malade reste conscient [69].

Le bilan biologique ne montre rien de particulier. En réanimation, le traitement associe sérovaccination, antibiotiques, assistance respiratoire et produits décontracturants. Les contractions musculaires sont tellement puissantes que des fractures spontanées sont possibles. A ce stade, l’évolution est souvent mortelle par des spasmes laryngés qui entraînent un arrêt respiratoire.

En cas de possibilité de réanimation, le décès reste possible par atteinte des fonctions végétatives (hypo ou hypertension, hypo ou hyper thermie, trouble du rythme). Cependant, des évolutions favorables sont possibles en quelques semaines [69].

Le tétanos est une maladie infectieuse non encore éradiquée même dans les populations occidentales. Le traitement repose sur l’éradication de la source infectieuse et le contrôle de la rigidité et des spasmes musculaires [70].