• Aucun résultat trouvé

2.5) Ingénierie des anticorps

3) Le risque biologique provoqué

Les progrès de la médecine ont permis au cours du temps d'enrayer de nombreuses pandémies causées naturellement par les bactéries et les virus, par exemple. Cependant, le risque biologique peut être aussi provoqué intentionnellement, et les modalités de lutte contre ce risque peuvent être différentes de celles de la lutte contre le risque naturel.

3.1) Définitions

Le terme "agents biologiques" désigne i) les micro-organismes (naturels ou génétiquement modifiés) ii) les cultures cellulaires iii) les endoparasites humains iv) les toxines, susceptibles de provoquer une infection, une allergie ou une intoxication chez un hôte, humain ou non. (République française, 2008) Il est important de noter que les virus et prions, bien que non vivants, sont considérés comme des agents biologiques.

Une "arme biologique" peut être décrite comme l'association d'agent(s) biologique(s) et d'un vecteur de dissémination comme par exemple des bombes, des missiles, des nébulisateurs, voire des animaux, dans le but de nuire. (Mates, 1999) Par extension, le risque biologique provoqué peut se définir comme le risque d'utilisation délibérée d'armes biologiques dans le but de porter atteinte au genre humain. Les armes biologiques peuvent être utilisées pour atteindre directement les Hommes, par une contamination directe de la population, mais elles peuvent aussi être utilisées pour contaminer indirectement les Hommes, en ciblant les réseaux d'approvisionnement agroalimentaire. (Burrows & Renner, 1999;

Christopher, Cieslak, Pavlin, & Eitzen, 1997; Mobley, 1995; Weingart et al., 2010)

3.2) Historique

3.2.1) Les débuts du risque biologique provoqué

Si l'Homme, au cours du temps, a cherché à soigner les différentes maladies infectieuses, paradoxalement, il a aussi cherché à utiliser à des fins martiales les agents biologiques responsables de leur apparition.

Une des premières descriptions de l'usage d'armes biologiques date de 1350 avant Jésus-Christ. Dans les villages qu'ils venaient de piller, les Hittites (un ancien peuple

d'Anatolie) laissaient volontairement des animaux malades afin de contaminer les populations, et des analyses récentes supposent que ces animaux étaient atteints de tularémie. (Trevisanato, 2007) Des cas plus détaillés d'utilisation d'agents biologiques ont été reportés

dès le 14ème siècle, comme à Kaffa (aujourd'hui Théodosie, Ukraine), un ancien comptoir de

commerce génois sur les rives de la mer noire, où les Tartares qui assiégeaient la ville en 1346 auraient catapulté des cadavres atteints de la peste au dessus des fortifications de la ville. (Lang, 2003; Wheelis, 2002) Cet acte, a eu des conséquences physiques et psychologiques importantes sur les habitants de la cité. Il aurait causé la fuite des Génois par voie maritime, ce qui expliquerait en grande partie la propagation rapide de l'épidémie de peste pulmonaire qui ravagea l'Europe pendant cinq ans, tuant entre le tiers et la moitié de la population européenne (

Figure 56). (Reid, 2005)

Figure 56 : Hypothèse décrivant la propagation de l'épidémie de peste noire en Europe au 14ème siècle.

Selon une hypothèse avancée par Wheelis et al, (Wheelis, 2002), suite au catapultage de cadavres atteint de la peste dans l'enceinte de la ville de Kaffa, cette maladie se serait rapidement propagée dans toute l'europe à partir de ce port.

Plus tard, en 1763, un virus a été utilisé pour la première fois comme arme biologique, lors de la guerre de sept ans entre les Amérindiens et les Britanniques. Après la défaite des

Français face aux Britanniques durant la guerre de la conquête (1763-1766), ces derniers imposèrent aux Amérindiens des conditions beaucoup plus rigoureuses. Pontiac, un chef de guerre souleva alors les Amérindiens et ils remportèrent de nombreuses batailles. Selon des échanges épistolaires entre Henri BOURQUET (1719-1765), mercenaire à la solde des britanniques, et le général Jeffrey AMHERST (1717-1797), gouverneur militaire de la Nouvelle-France, il semblerait que les Britanniques aient offert aux Amérindiens des

couvertures infectées par la variole provenant des hôpitaux militaires, afin "d'éliminer cette

race exécrable". (F. Anderson, 2000; Nester, 2000)

Le 19ème siècle marque un tournant pour la microbiologie, avec les travaux de nombreux scientifiques parmi lesquels on peut citer Louis PASTEUR (1822-1895) avec l'antisepsie, la pasteurisation et la vaccination, Robert KOCH (1843-1910) avec la découverte du bacille du charbon et de la tuberculose, ou encore Alexandre YERSIN (1863-1943) avec la découverte du bacille de la peste. L'ensemble de ces travaux ainsi que d'autres avancées scientifiques majeures ont permis de mieux comprendre le fonctionnement des agents biologiques, mais leurs résultats peuvent aussi être détournés à des fins malveillantes.

La première guerre mondiale a été marquée par la première utilisation d'armes chimiques. En effet, le 22 avril 1915, près de la ville d'Ypres, l'armée Allemande utilisa du gaz moutarde (appelé ypérite par la suite) sur les troupes de la coalition française, provoquant la désorganisation de cette dernière et la perte de la bataille. Face au danger représenté par de telles armes, différents pays mirent en place des programmes de développement d'armes biologiques afin de pouvoir riposter à une attaque chimique ou biologique, et au moins afin de servir d'arme de dissuasion.

3.2.2) Les programmes de développement d'armes biologiques

Plusieurs pays ont mis en place des programmes de développement d'armes biologiques, à différentes échelles. Actuellement, les programmes portant sur les armes biologiques sont tous officiellement à finalité défensive, bien que plusieurs pays soient suspectés d'avoir des programmes comportant un volet offensif.

3.2.2.1) Le programme français

Dès 1921, le professeur Auguste TRILLAT (1861-1944) fut chargé de mettre au point le programme français. Ses premières recherches, sur le site de Sevran-Livry en Seine-Saint-Denis, concernaient la mise au point de vecteurs pouvant disperser une charge biologique sur un champ de bataille. (Korn, Berche, & Binder, 2008) Ces vecteurs militarisés furent testés en 1926 sur le champ d'expérimentation de Gâvres pour disséminer les agents de la peste, du charbon ou de la toxine botulique et ce, malgré la ratification quelques jours plus tôt du Protocole de Genève (traité du 17 juin 1925, ratifié le 9 mai 1926). Ces programmes étaient en partie présentés comme défensifs puisqu'ils étaient sensés permettre la compréhension du fonctionnement des armes biologiques, afin de mieux s'en prémunir. La dualité de ce programme, à la fois offensif et défensif, permit de poursuivre les recherches malgré la signature de traités limitant le développement des armes biologiques. Néanmoins, faute de soutien politique et par manque de financement, le volet offensif fut abandonné. Actuellement il ne persiste que des programmes portant sur la recherche de contre-mesures médicales, comme des outils de diagnostic ou des moyens de prévention et de traitement. Ces recherches sont menées depuis le début des années 1980 par la Direction Générale de l'Armement, principalement au Centre d'Etudes du Bouchet et au Centre de Recherche du Service de Santé des Armées. Les actes terroristes de l'automne 2001 aux Etats-Unis d'Amérique ont à nouveau attiré l'attention sur le risque biologique provoqué. En France, le plan BIOTOX (ANSM,

2001; Merens et al., 2012; Vidal et al., 2003) a été déclenché le 10 octobre 2001, et il a été

ordonné au Centre de Recherche du Service de Santé des Armées et au Centre d'Etudes du Bouchet de stopper leurs activités régulières pour être transformés en cellules de crise biologique. Ces deux centres ont ainsi pu analyser une grande partie des 4 500 échantillons

suspects reçus en France entre octobre et novembre 2001. (Vidal et al., 2003)

3.2.2.2) Le programme soviétique

Le programme soviétique, nommé Biopreparat et dirigé par Jacov FISHMAN, a débuté dès 1919 et a été prolongé bien après la fin de la seconde guerre mondiale. Son ampleur fut dévoilée à la suite des descriptions qu'en firent plusieurs scientifiques transfuges tels Vladimir PASECHNIK (1937-2001), Seguei POPOV ou encore Kanatjan ALIBEKOV (1950-). (Alibek & Handelman, 1999) Le programme Biopreparat disposait d'un budget

annuel de l'ordre d'un milliard de dollars et employa jusqu'à 65 000 personnes dans les années 1970. (Berche, 2006) Il permit la militarisation de huit agents biologiques (agents de la variole, de la peste, de la tularémie, de la morve, de l'encéphalite équine, du charbon, de la fièvre Q et du virus de Marburg) et la production de plusieurs tonnes d'agents infectieux. Les soviétiques débutèrent aussi, dans le centre d'Obolensk, des programmes de modifications génétiques afin d'augmenter la pathogénicité de plusieurs agents biologiques. (Berche, 2006;

J. Miller, Engelberg, & Broad, 2001) Des projets, comme le projetBonfire ou le projet Factor

ont permis de modifier génétiquement certains agents tels que les bacilles du charbon et de la peste, pour les rendre plus résistants à la plupart des antibiotiques et aux écarts de température. Les soviétiques ont aussi essayé d'insérer des gènes codant pour des toxines dans

des organismes commensaux non pathogènes comme E. coli. Le développement de tels

programmes n'est pas sans risque, et des accidents ont rappelé le danger pour la population et les personnels. Ainsi, à Sverdlovsk (actuellement Yekaterinburg), en 1979, lors d'une opération de maintenance l'un des filtres du système d'aération du laboratoire où les spores du bacille du charbon étaient produites n'aurait pas été remis en place ce qui aurait provoqué la dissémination de ces spores sous forme d'aérosol, provoquant plusieurs décès. Suite à cet accident la dose létale médiane humaine du bacille du charbon par nébulisation a pu être

estimée entre 8 000 et 10 000 spores. (Meselson et al., 1994) La chute de l'Union Soviétique,

en 1991, mit fin à ces programmes. Cependant deux problèmes majeurs se sont posés. Les stocks d'armes biologiques ont persisté pendant 11 ans jusqu'à l'annonce officielle de leur destruction en 2002, faisant craindre des vols. De plus, la fin du financement des programmes de recherche a aussi eu pour conséquence de laisser de nombreux scientifiques sans salaire, faisant redouter leur récupération par d'autres pays ou groupuscules développant des programmes de recherches illégaux. Afin de pallier à ce dernier problème, plusieurs

programmes internationaux, ont été mis en place (cf paragraphe "3.2.3) Les conventions de

non prolifération des armes biologiques").

3.2.2.3) Le programme japonais

Le programme japonais fut créé par mandat impérial en 1925 durant la guerre sino-japonaise, et le centre de recherche principal, baptisé unité 731, fut implanté en Mandchourie (Figure 57). Officiellement cette unité avait pour but "la prévention des épidémies et la purification de l'eau". Elle fut dirigée par le docteur Shiro ISHII (1892-1959) puis par Kitano

MISAJI (1894-1986) et rassemblait plus de 3 000 personnes. Plusieurs centaines de kilogrammes d'agents pathogènes tels que les bacilles de la peste, du charbon ou encore du choléra furent produits. Cette unité est tristement célèbre pour les expérimentations qu'elle réalisa dès 1932 sur l'Homme. Les agents pathogènes développés par l'unité 731 furent inoculés à des milliers de prisonniers chinois mais aussi dispersés dans l'environnement par épandage ou par l'utilisation de vecteurs biologiques tels que la puce. (Girdwood, 1985; Rich, 1995) On estime qu'entre 1940 et 1942, près de 12 essais d'épandage auraient été effectués sur

des villes. Selon les travaux publiés en 2002 par le Symposium International sur les Crimes de

la Guerre Bactériologique, l'utilisation de ces armes biologiques auraient fait plus de 580 000 morts. (Barenblatt, 2004) En 1942, le manque de contrôle des agents pathogènes se retourna contre les troupes japonaises elles même, faisant plus de 1 700 morts et stoppant les recherches sur le terrain. (Williams & Wallace, 1990) En 1945, suite à l'invasion de la Mandchourie par l'armée soviétique, la destruction de l'unité 731 fut ordonnée. Dès 1946, des négociations secrètes débutèrent entre les Etats-Unis d'Amérique, représentés par le général américain Douglas MacARTHUR (1880-1964), et l'unité 731, représentée par lieutenant-général Shiro ISHII. (Gold, 1996) L'accord qui en a résulté garantissait l'immunité de tous les membres de l'unité 731 lors du procès de Tokyo (1948) pour crime de guerre, en échange du transfert de l'ensemble des résultats de l'unité japonaise aux Américains.

Figure 57 : Vue aérienne du complexe de l'unité 731.

Photographie aérienne de l’unité 731 à Pingfang. Un musée sur les crimes de guerre a été établi dans l'un des bâtiments historiques. (Williams & Wallace, 1990)

3.2.2.4) Le programme américain

A partir de 1942, George Wilhelm Herman Emanuel MERCK (1894-1957) dirigea les 5 000 personnes du programme américain établi à Camp Detrick (actuel Fort-Detrick) et nomma Ira L. BALDWIN (1895-1999) directeur scientifique de ce programme. (Covert, 2000) Plusieurs milliers de bombes contenant le bacille du charbon ont été produites et la militarisation d'une cinquantaine d'agents viraux fut étudiée. Entre 1949 et 1968, des essais d'épandage d'aérosols contenant des agents biologiques habituellement considérés non

pathogènes, comme Bacillus subtilis, Bacillus globigii ou encore Serratia marcescens

auraient été effectués au dessus de villes américaines ou dans le métro de New-York afin de démontrer la vulnérabilité des Etats-Unis face à une attaque biologique. (Douglass, Joseph D

Livingstone, 1987; Korn et al., 2008; Mobley, 1995; SCRS, 1995) Entre 1949 et 1968, une

centaine d'épidémies causées par ces organismes opportunistes a été constatée, et plusieurs procès ont alors été engagés. Cependant aucune correspondance n'a pu être formellement établie entre les souches détenues par l'armée et les souches isolées chez les malades. L'armée américaine a donc été disculpée et l'origine de ces épidémies demeure encore inconnue. En 2001 il a été révélé qu'entre 1954 et 1973, l'armée américaine avait exposé dans le cadre de

l'opération whitecoat plus de 2 000 volontaires, appartenant tous à l'Eglise adventiste du 7ème

jour, à différents agents biologiques. (Aaron, 2001) Comme cette religion interdit de boire de l'alcool ou du café et de fumer, les volontaires issus de cette communauté présentaient des conditions physiques optimales. La plupart des membres de cette communauté étant des objecteurs de consciences refusant la conscription dans l'armée, des essais biologiques leurs furent proposés par le gouvernement en alternative au service militaire. Les volontaires furent exposés aux bactéries de la fièvre Q, de la fièvre jaune, de la peste et de la tularémie ainsi qu'aux virus de l'hépatite A et de l'encéphalite équine Vénézuélienne avant d'être soignés, pour évaluer l'efficacité des différents traitements. Des vaccins induisant une protection vis à vis de divers agents du risque biologique provoqué ont aussi pu être testés sur plusieurs de ces personnes. (Snyder, 2003) Aucun décès n'a été déclaré parmi ces 2 000 personnes qui ont été suivies à long terme par l'armée américaine.

3.2.2.5) Le programme irakien

Le programme irakien a débuté plus tardivement, en 1979, et avait pour objectif l'obtention d'armes de destruction massive. Le programme fut principalement développé à

partir de 1985 par le docteur Rihab Rashid Taha AL-AZAWI (1957-), et devait permettre la militarisation d'agents pathogènes en cinq ans. Ces travaux étaient menés dans des usines, sous la couverture d'une production de nourriture pour poulets. Du matériel comme des fermenteurs ou des dessiccateurs, ainsi que des souches biologiques ont pu être légalement achetés par l'Irak auprès de firmes occidentales. En particulier, 24 agents pathogènes différents, dont les agents du botulisme, de la gangrène, de la brucellose et du charbon,

avaient été acquis auprès de l'American Type Culture Center. Ce programme fut stoppé suite à

la guerre du Golfe de 1991. Les rapports des inspecteurs mandatés par le conseil de sécurité des Nations-Unies et les révélations en 1995 du général Hussein KAMAL (1954-1996) ont permis d'estimer que 8 500 litres de bacille du charbon, 19 000 litres de toxine botulique et 2 200 litres d'aflatoxine avaient été produits et placés dans des dispositifs explosifs de

diffusion. Parmi ces dispositifs, 157 bombes R-400 et 25 missiles Scud avaient été remplis

avec trois agents différents. (Henderson, 1999; Trevan, 2004; UNSCOM, 1991; Zilinskas, 1997)

3.2.2.6) Le programme anglais

Paul FILDES (1882-1971) dirigea le programme britannique qui débuta au cours de la seconde guerre mondiale, et était établi à Porton Down. Ce programme se focalisa plus particulièrement sur le bacille du charbon. En particulier, 5 millions de rations de nourriture pour bétail furent infectés par les spores de ce bacille. L'objectif, qui n'a jamais été mis en

application, était d'infecter le cheptel allemand. Des essais de diffusion de spores de Bacillus

anthracis à l'aide de bombes (,-bombs) ont été menés sur l'île de Gruinard et ont provoqué la contamination du sol pour plusieurs décennies. Seule une formolisation complète des terres permit la décontamination et la zone ne fut rendue librement accessible qu'en 1990. (Aldhous, 1990; Manchee, Broster, Stagg, & Hibbs, 1994) Les chercheurs britanniques ont aussi introduit la toxine botulique dans des grenades afin de permettre la contamination de

personnes à la suite des blessures provoquées par leurs éclats (cf paragraphe "4.5) Cas

3.2.2.7) Le programme sud-africain

Le programme sud-africain, officiellement de nature défensive, fut mené entre 1985 et

1994 (Korn et al., 2008). Il était connu sous le nom de Project Coast et avait comme objectif

la mise au point d'armes biologiques et chimiques, dans le cadre de l'apartheid. Plusieurs personnes l'ont dirigé, dont le général Constand VILJOEN (1933-) et le Dr Wouter BASSON (1950-). Compte tenu du fort soutien financier, politique et industriel dont disposait ce programme, un centre de recherche dédié put être établi à Roodeplaat. L'implication de quatre compagnies privées permit l'obtention légale d'agents biologiques sous couvert d'une utilisation industrielle. (Gould & Fold, 2003) Le but de ces recherches était de tuer ou stériliser sélectivement la population noire sud-africaine, par exemple en développant des molécules ciblant la mélanine. Plusieurs objets de la vie courante comme des cigarettes, tournevis, parapluies ou canettes de soda furent infectés avec des agents biologiques tel que

Bacillus anthracis, mais on ignore si des personnes sont mortes à la suite de ce programme. La justice sud-africaine acquitta en 2002 le Dr Basson, mais en 2005 un recours devant la cour constitutionnelle autorisa à rejuger ce dernier pour crimes contre l'humanité.

3.2.3) Les conventions de non prolifération des armes biologiques

La communauté internationale a cherché à restreindre l'ampleur des projets visant, ouvertement ou sous couvert de recherches médicales, à développer des armes biologiques. Le traité de Genève du 17 juin 1925 est le premier protocole qui s'attacha à limiter l'utilisation des armes biologiques en temps de guerre. Il étendait l'interdiction d'utilisation d'agents

chimiques d'un précédent protocole aux "moyens de guerre bactériologique". Parmi les

principales limites de ce protocole, on peut noter qu'il interdisait uniquement l'utilisation des armes biologiques et non pas leur développement, et qu'il n'avait pas prévu la création d'un organisme pour contrôler son application. En outre, bien que présents à la conférence de Genève, plusieurs pays ne ratifièrent pas le protocole, et d'autres le ratifièrent en émettant certaines limites, comme la France, le Royaume-Unis, l'URSS ou le Canada. Une des principales réserves était que ce protocole ne devait s'appliquer uniquement qu'aux Etats signataires, et que son application devait être arrêtée si un Etat ennemi ou allié venait à ne pas le respecter. (Ronzitti, 1989; UNODA, 1987) Ces réserves perdureront de très nombreuses

années ; par exemple, la France ne les lèvera qu'en 1996 et le Canada qu'en 1999, alors que ces deux Etats avaient signé entre temps la convention de 1972. Actuellement, 25 des 134 Etats signataires formulent toujours des réserves, comme la Chine, la Syrie, Israël ou les Etats-Unis d'Amérique.

Des négociations menées sous l'égide de l'Organisation des Nations Unies, entamées lors de la Conférence du Comité de Désarmement de Genève de 1969 aboutirent le 10 avril

1972 à la signature par plusieurs Etats, d'une "convention sur l'interdiction de la mise au

point, de la fabrication et du stockage des armes à agents biologiques ou à toxines et sur leur destruction". (Bureau des affaires du désarmement des Nations Unies, 1972) Ce traité va plus

loin que la convention de Genève de 1925 puisque les Etats signataires "s'engagent à ne

jamais, et en aucune circonstance, mettre au point, fabriquer, stocker, ni acquérir d'une manière ou d'une autre ni conserver des agents microbiologiques ou autres agents biologiques, ainsi que des toxines [...], des armes, de l'équipement ou des vecteurs destinés à l'emploi de tels agents ou toxines à des fins hostiles ou dans des conflits armés". Ce traité entra en vigueur dès le 26 mars 1975 et est à ce jour ratifié par 155 des 171 pays signataires. Cependant, il résulte de consensus difficilement obtenus entre les pays signataires, ce qui a pour conséquence de limiter le caractère contraignant de ce texte, qui ne prévoit pas de