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Ancrages théoriques de la recherche

3. Revue de la littérature

Lors de l’ébauche de notre projet de recherche et d’une première analyse de la littérature, nous avons choisi de décomposer notre objet en trois axes principaux. En effet, analyser la « place de la diversité culturelle dans la formation et le travail des enseignants » requiert un regard sur différents espaces éducatifs et différents acteurs. De plus, souhaitant approcher notre objet de manière compréhensive et globale, il nous a fallu nous intéresser aux recherches produites à propos des différentes strates le composant. La pluralité des approches interculturelles (Dasen, 2002) ainsi que la complexité d’un système éducatif et des enjeux de la prise en compte de sa diversité renforcent notre intérêt pour une analyse de la littérature dans un champ large.

Cette perspective nous a conduit à une décomposition de notre revue en trois axes thématiques.

Premièrement, la littérature met en lumière un écart culturel pouvant exister entre certains élèves, leurs parents et l’institution. Cet écart a été traité sous différents angles tels que celui des acteurs dans lequel le rôle de l’enseignant a été particulièrement investigué. Il est l’un des engrenages de l’écart culturel avec ses élèves ou leurs parents et les conceptions qu’il véhicule relatives à leurs origines sociales ou culturelles peuvent impacter les interactions entre acteurs.

Il peut également œuvrer lors du développement des approches interculturelles en classe. Ainsi, comprendre les enjeux relatifs à sa fonction ou à son identité nous paraît essentiel.

Mettre en lumière cet écart a également nécessité un regard sur les curricula et sur la manière dont ils pouvaient ou non prendre en compte la diversité culturelle. Ils font également partie des engrenages pouvant influencer la proximité de certains élèves avec l’institution. Leur analyse est donc nécessaire et différentes recherches présentées ici mettent en évidence la possible monoculturalité des programmes scolaires. Enfin, ce sont également les conséquences académiques et relationnelles qui sont analysées à l’aune de cet écart culturel entre les élèves et leur école.

Deuxièmement, la formation des enseignants est apparue comme l’un des espaces clé à investiguer pour comprendre comment la diversité culturelle pouvait être prise en compte par les enseignants. De nombreuses recherches mettent en évidence la nécessité de changer la formation pour changer la profession. Pour comprendre les différents enjeux relatifs à la préparation des enseignants, nous présentons différents positionnements face aux contenus à leur transmettre. En remontant à l’origine des différents courants de l’éducation interculturelle nous proposons une analyse des recommandations émises par différents chercheurs.

Troisièmement, notre analyse de la littérature porte sur la question des enseignants issus de la diversité culturelle. Nous avons choisi de mener un projet dans lequel le travail enseignant sera analysé selon deux axes : les pratiques pédagogiques, et les pratiques pédagogiques spécifiques aux enseignants issus de la diversité culturelle. De nombreuses compétences sont attribuées aux enseignants appartenant à des minorités culturelles : ils seraient plus empathiques, plus engagés et plus motivés à changer la vie des élèves issus des minorités. La littérature met souvent en avant l’impact des parcours particuliers de ces enseignants sur leurs motivations à entrer dans la profession. Il faut tout de même préciser que ce champ est encore peu développé en Suisse

et est quasi-inexistant dans d’autres pays proches. Notre projet s’inscrit donc dans la lignée de certains des travaux présentés plus loin et vise, entre autres, à contribuer à la production de connaissance à propos de ce domaine de recherche.

Ces trois thématiques et leurs composantes nous permettent d’appréhender notre objet de recherche qui est la place accordée à la diversité culturelle dans la formation et le travail des enseignants. Mais plus encore, l’analyse de ces trois thématiques nous permet une compréhension plus fine des approches interculturelles et de leur mise en œuvre au sein des systèmes éducatifs. A travers les différents axes étudiés dans la littérature, ce sont des enjeux, des tensions, des points de vue et des revendications qui émergent et qui nous permettent de construire tant notre posture théorique que méthodologique, utile au développement de notre recherche.

3.1. Caractéristiques des travaux analysés

La revue de la littérature présentée ici est essentiellement basée sur des documents académiques : articles scientifiques, ouvrages collectifs issus de groupes universitaires, chapitres de livre, monographie, compte-rendu de recherches. Les articles ou ouvrages publiés par des organisations internationales ont été écartés de ce corpus puisqu’ils serviront de base de données pour répondre à la première question de recherche de ce projet8.

Un peu plus de 140 références ont été mobilisées pour faire cet état des lieux de la recherche à propos de l’interculturel en contexte éducatif. La plupart d’entre elles ont été écrites dans les années 2000 et 55 références ont été écrites entre 2010 et 2018. Nous avons essayé de privilégier des sources récentes, cependant certains auteurs nous paraissaient indispensables et ont été mobilisés malgré la date de leur publication. Nous pensons notamment à des auteurs comme Ladson-Billings (2011 ; 1994) ou Irvine (1990) qui, grâce à leurs écrits, nous ont permis de guider notre travail et de poser des balises théoriques. Il serait alors assez juste d’écrire que la période principale autour de laquelle nous avons structuré notre analyse de la littérature se situe dans les vingt dernières années, cependant nous nous sommes autorisés des références que nous jugions pertinentes pour notre thématique même si elles pouvaient se situer hors de cette période. En outre, ces références hors-période restent minoritaires dans le corpus.

Cette revue de la littérature revêt un caractère à la fois international et local. De nombreuses références sont issues du contexte suisse mais également de contextes externes à ce pays.

L’aspect international de cette revue est tout de même nuancé puisqu’il est essentiellement centré sur des pays occidentaux - notamment la France, les Etats-Unis et le Canada. Dans une moindre mesure une littérature émanant de la recherche allemande en sciences de l’éducation nous a permis de compléter ce chapitre. Sa proximité avec la Suisse et les interactions entre les différents auteurs (suisses et allemands) rendent compte de la pertinence de sa mobilisation pour notre recherche. Ces zones géographiques ont été les témoins de multiples attitudes,

8 Cette question de recherche portera sur les tendances internationales, portées par les organisations internationales, en matière de formation des enseignants à la prise en compte de la diversité culturelle.

réactions et initiatives liées à la prise en compte de la diversité culturelle en contexte éducatif.

Les histoires respectives des différents contextes ont été sources d’une forte pluralité culturelle dans les écoles. Pour cette raison les productions relatives à cette thématique sont nombreuses, variées et très répandues.

L’un des effets de la mobilisation d’une littérature internationale est sans doute un effet de confusion possible entre certains concepts clés. Par exemple, l’usage du terme « minorités culturelles » aux Etats-Unis ou en France, ne renvoie pas à la même population (par exemple : afro-américains v. maghrébins). Toutefois, si nous nous permettons la transgression, c’est que de nombreux processus de renvoi à l’altérité, de définition de l’Autre par un déficit, de discriminations systémiques etc. sont, au final, similaires et tout du moins provoquent un sentiment d’exclusion et cela indépendamment des spécificités des contextes. Payet (2017) explique d’ailleurs qu’il est possible d’effectuer ces rapprochements entre les contextes au regard de certaines similitudes, notamment celles relatives au statut de minoritaire, aux inégalités scolaires, à la ségrégation ethnique ou résidentielle et enfin aux difficultés d’« accès à une mobilité individuelle » (p.54).

Un grand nombre de mots-clés a été utilisé pour effectuer cet état des lieux de la recherche. Ces derniers ont permis l’établissement des trois axes thématiques étudiés dans la suite de ce travail : 1) l’écart culturel entre école et public scolaire, 2) la formation des enseignants aux approches interculturelles, 3) les enseignants issus de la diversité culturelle. Le processus de catégorisation et donc d’affinement des mots-clés s’est déroulé au fil des lectures9. Certaines références nous ont également été recommandées (notamment celles concernant les travaux allemands) et ont parfois été trouvées via des publications analysées pour ce chapitre.

L’importance des références internationales dans notre revue de la littérature nous a conduits à nous interroger sur la structure globale de ce chapitre. Il est vrai que ces références sont d’une réelle utilité pour la construction de notre objet de recherche et notre cheminement à travers les différents champs le composant. Toutefois, il nous parait nécessaire de pouvoir porter un regard spécifique sur la littérature développée dans le contexte de notre étude. Pour cela, une partie du chapitre est consacrée aux productions suisses concernant « la place de la diversité culturelle dans la formation et le travail des enseignants ». D’une part, ce dernier axe nous permet de prendre en compte les particularités de notre contexte, et d’autre part de savoir comment contribuer à la recherche dans le domaine de la diversité culturelle en contexte éducatif, en Suisse.

Voici donc notre revue de la littérature organisée de manière thématique selon les trois axes présentés précédemment.

9 Un classement des mots-clés mobilisés pour la revue de la littérature est disponible en annexe (Annexe 1).

3.2. Entre école et public scolaire : un écart culturel

Il faut remonter aux origines de l’école ou plutôt de l’organisation de la transmission des savoirs pour comprendre comment a pu se creuser un fossé entre certains élèves et le monde scolaire.

Afin de leur transmettre des savoirs, des séries de règles façonnant l’école ont été édictées.

L’organisation qui en découle donne lieu à la forme de l’école ou autrement dit à la « forme scolaire » (Vincent, 1980, cité par Schneuwly & Hoftstetter, 2017). Cette dernière n’a pas pour unique objectif d’organiser l’intérieur de l’école, elle participe aussi à la régulation de ce qui se passe à l’extérieur (notamment en séparant les enfants et en empêchant leur « vagabondage » (Vincent, 2012, cité par Schneuwly & Hoftstetter, 2017)).

Bien qu’elle participe à la structuration de la société, la forme scolaire a tout de même pour but principal d’organiser la transmission des savoirs. Le cadre qu’elle impose « rend la

« transmission formelle » » (Schneuwly & Hoftstetter, 2017, p.156).

« […] elle devient « impersonnelle » puisqu’élèves et maitres sont interchangeables ; la transmission ne se fait plus par le « montrer », « faire-voir » et « faire », mais à travers des catégories de pratiques spécialisées, qui instaurent un rapport distancié au langage, au monde et aux pratiques (Schneuwly &

Hoftstetter, 2017, p.156).

Toutefois, la complexité de ce concept se niche dans son évolution. Si elle est décrite comme très structurante et faite de règles aux apparences immuables, la forme scolaire est également décrite, dans une thèse portée par Schneuwly et Hoftstetter (2017) comme un moyen de faire accéder tous les élèves à un savoir universel. Ainsi à l’école aujourd’hui « les moyens mêmes qui donnent l'accès [au savoir] sont aussi toujours partiellement ceux de la différenciation et de l'exclusion. » (Schneuw1y, 2007, p. 2.0) » (Schneuwly & Hofstetter, 2017, p.164). Nous verrons au fil de cette revue de la littérature que le paradoxe entre objectif de contrôle et d’émancipation propre à la forme scolaire, peut être source d’injustices et d’inéquités entre les élèves.

Ce bref retour aux origines de l’école permet d’entrevoir la manière dont s’est installé cet écart entre certains publics scolaires (élèves et familles) et l’institution. Effectivement, les normes de l’école, voulues universelles (et revendiquées comme telles) n’atteignent pas tous les élèves de la même manière (Caffieaux, 201110). Ainsi, les « messages » véhiculés au sein de l’école sont de nature à favoriser les élèves qui ont les codes pour les comprendre.

A la notion de « forme scolaire » s’ajoute celle de « culture scolaire ». Depuis les années 60, grâce aux travaux de Bourdieu et Passeron, les inégalités sont analysées sous le prisme des différences « culturelles » entre l’école et les familles. Les « héritiers » (Bourdieu & Passeron, 1964), ces élèves étant proches de la culture scolaire de par leur « habitus primaire » (Caffieaux, 2011) ont donc de plus grandes facilités à évoluer dans une culture différente de la leur, mais tout de même assez proche car véhiculant des codes similaires (Bourdieu & Passeron, 1964). A l’inverse, « lorsque l’habitus primaire d’un enfant est trop différent de celui qui est attendu par

10 Pages indisponibles

l’école, il risque d’être en échec quels que soient les efforts qu’il fasse dans les activités scolaires » (Caffieaux, 2011).

L’origine du questionnement autour de la « culture scolaire » se trouve dans les caractéristiques historiques de l’école. En plus des objectifs précités, elle avait pour but de contribuer au renforcement des Etats-Nations, de consolider l’identité du Citoyen et en somme d’effacer toute forme de diversité au nom de l’unité (Akkari, 2009). L’exemple français est sans doute l’un des plus parlant. Les valeurs de la République, leur affirmation, ainsi que l’indifférence aux différences ou la vision égalitaire des élèves rendent compte du caractère monoculturel de cette école et d’un manque de reconnaissance de la diversité dans ce contexte (Akkari, 2006 ; Bastenier, 2015 ; Payet & Van Zanten, 1996, cités par Payet, 2006). Toutefois, l’expression

« habitus monolinguistique » utilisée pour décrire le système scolaire allemand traduit cette prégnance d’une culture, et ici d’une langue dominante, au sein de différents système éducatifs (KarakaŞ, 2013). Ainsi, on peut dire qu’originellement l’école se définissait par une volonté de lisser les cultures et de rechercher une certaine homogénéité en son sein (Barrère & Jacquet-Francillon, 2008). Certains auteurs expliquent d’ailleurs que l’école s’inscrit dans un

« paradigme ethnocentrique traditionnel » (Burden, Hodge, O’Bryant, & Harrison, 2004, p.17411), qu’elle est monoculturelle, et qu’elle développe une approche assimilatrice de la prise en compte de la diversité culturelle (Nikolaou, 2009). Il a également été dit à son propos qu’elle peut être à la source d’une véritable violence institutionnelle envers les individus qui en sont les plus éloignés (Payet, 2000). Pour ces raisons, le passage d’un enfant dans un monde scolaire si différent de ce qu’il connait est parfois qualifié de « survie » (Nikolaou, 2009).

Au regard de ces premiers constats, il semble difficile de ne pas questionner le concept de méritocratie souvent mobilisé dans les discours sur l’éducation. Il met en avant l’idée que « […]

les résultats [scolaires] découlent des efforts ou des talents plutôt que des caractéristiques héritées (genre, ethnicité, origine sociale) » (Duru-Bellat & Brinbaum, 2009, cités par Dionne, Viviers, Picard, & Supeno, 2018, p.3). Au regard de cette définition, il semblerait alors que tous les éléments constituant l’écart entre certains élèves et leur école – vus dans cette première partie d’analyse de la littérature - ne seraient pas des facteurs participant à leur échec, à leur

« orientation contrariée » (expression reprise de Brinbaum & Guégnard, 2012) ou à leur maintien dans des catégories sociales souvent défavorisées. La méritocratie semble alors être un principe permettant aux individus d’accepter, sans questionner, leur place dans un système qui, au regard des arguments avancés précédemment, n’est pas équitable (O’Brien & Major, 2009 ; Son Hing et al., 2011, cités par Darnon, Wiederkehr, Dompnier, & Martinot, 2018b).

Pour Darnon, Smeding et Redersdorff (2018a), la méritocratie semble être un outil de la légitimation d’un ordre scolaire (et plus tard social) inégal. En d’autres termes, les éléments avancés dans cette première partie d’analyse impliquent une remise en question ferme de l’affirmation « quand on veut, on peut »12 puisqu’au regard de ces apports, la constitution de l’école et de la forme scolaire, ne permet pas à tous ceux qui « veulent » de « pouvoir » réussir et s’orienter librement dans leur parcours scolaire.

11 Les auteurs traitent ici de la formation des enseignants d’éducation physique.

12 Utilisation de cette expression inspirée de Darnon et al. (2018b)

Ainsi, la plupart des contextes dans lesquels la question de l’écart entre public scolaire et école est traitée font état de résultats convergents que nous présentons ici. Ils concernent généralement les relations entretenues entre certains publics issus de cultures minoritaires13 et les institutions scolaires. La question des conséquences de cet écart culturel est particulièrement développée dans la littérature. Il peut avoir un impact sur le curriculum, les relations avec l’enseignant, la profession enseignante, les relations famille-école, la réussite scolaire et de manière plus globale la justice sociale en éducation.

3.2.1. Les enseignants

Le corps enseignant est à la fois le reflet et le produit de la culture scolaire. C’est-à-dire qu’il en a les codes, les a intégrés et les véhicule. Actuellement, il est particulièrement homogène (Causey, Thomas, & Armento, 2000) et très peu d’enseignants sont d’origine étrangère (Dehalu, 2008). Aux Etats-Unis, ils sont en grande majorité blancs, monolingues et sont généralement des femmes de classe moyenne (Ladson-Billings, 2011). En Ecosse, une étude traitant des futurs enseignants a montré qu’ils étaient également majoritairement blancs et monolingues mais aussi qu’une majorité d’entre eux avait la nationalité écossaise (Santoro, 2016).

Afin d’appuyer les propos des auteurs relatifs à la forte homogénéité du corps enseignants, le tableau ci-dessous récapitule quelques données tirées de la littérature qui y sont relatives.

Tableau 2. Homogénéité du corps enseignant

Etats-Unis Recherche portant sur la formation interculturelle

13 En France, la littérature porte souvent sur les élèves issus des migrations du Maghreb, aux Etats-Unis, sur la condition des élèves afro-américains et hispaniques. L’histoire des populations minoritaires et leur relation avec leurs anciens oppresseurs conditionnent parfois leur cheminement à travers l’institution scolaire.

10% sont étrangers ; 17% des suisses ont une origine étrangère (mais 75% de ceux-ci viennent des pays voisins)

(Bischoff, Edelmann &

Beck, 2016)

Face à ces enseignants essentiellement monoculturels, la diversité culturelle des systèmes éducatifs se renforce. La plupart des recherches évoquant l’homogénéité du corps enseignants la mettent d’ailleurs très régulièrement en perspective avec la grande diversité des élèves (voir par exemple : Burden, et al., 2004 ; Bressler & Rotter, 2017). Ainsi, « homogénéité » et

« diversité » semblent alors s’opposer et entériner l’écart existant entre elles.

Si les caractéristiques du corps enseignant sont abordées ici, c’est qu’elles ont un impact non négligeable sur la manière dont la diversité des élèves est prise en compte. En effet, il a été démontré que le regard porté par l’enseignant sur un élève peut influencer son estime de soi et son sentiment d’efficacité personnelle (Young, 2011). Dans une perspective d’égalité des parcours scolaires, il est intéressant de comprendre les mécanismes organisant les perceptions des enseignants à propos de leurs élèves aux origines diverses.

Premièrement, il faut aborder ce qui est parfois appelé « colorblindness »15 ou « indifférence aux différences » (Perrenoud, 1990 ; Akkari, 2009). Ce terme, issu de la littérature nord-américaine (essentiellement des Etats-Unis), fait référence au fait de ne pas voir la couleur de peau et donc l’ethnicité d’un individu (Blaisdell, 2005 ; Sleeter, 2009 ; Boutte, Lopez-Robertson & Powers-Costello, 2011). Certaines études françaises parlent de « cécité à la couleur » (Francis, 2015) et pour généraliser ce concept, le terme « egalitarianism » (égalitarisme) est également mobilisé (Hachfeld, Hahn, Schroeder, Anders, Stanat, & Kunter, 2011, p.987). Malgré la place importante de ces concepts dans la littérature, très peu d’enseignants expliquent ne pas voir les différences (Blaisdell, 2005). Par contre, parmi ceux qui expliquent y faire attention, ils sont nombreux à tout de même revendiquer un traitement égal de tous leurs élèves :

Ils voient de l’égalité et de la justice dans le fait de traiter leurs élèves exactement de la même manière indépendamment de leur origine raciale, et l’adhésion à cette opinion empêche ces enseignants d’agir sur les différences raciales qu’ils voient (Blaisdell, 2005, p.34)16.

Cela signifie qu’en traitant les élèves de manière égale, ces enseignants peuvent créer de l’inégalité puisqu’ils ne tiennent ni compte des influences que peut avoir l’origine ethnique sur leur parcours scolaire (Blaisdell, 2005 ; Hachfeld, et al., 2011), ni compte de l’élève dans son entièreté, ce qui est recommandé dans l’approche promue par Sleeter (2009)17. A ce propos,

14 La littérature suisse est abordée dans l’une des parties suivantes de ce chapitre, la Suisse-alémanique est tout de

14 La littérature suisse est abordée dans l’une des parties suivantes de ce chapitre, la Suisse-alémanique est tout de