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Restructuration et optimisation de l’absorption et du transport

6.3 Résultats numériques

6.4.2 Restructuration et optimisation de l’absorption et du transport

Abordons maintenant l’influence des différents paramètres sur l’optimisation du transport excitonique au cœur, et plus particulièrement sur la minimisation du temps d’absorption τ . Ces phénomènes sont en fait intimement liés à la restructuration des états propres |ΨR0i et |ΨR±i engendrée par le couplage avec le piège. En effet, lorsque Γ = 0, l’état superradiant |ΨR

0i est une superposition des deux états |0, 0i et |χN1, µN2i, tandis que les deux états subra-

diants forment des superpositions des trois états |0, 0i, |χN1, µN2i et |χN1, 0i (voir équation

6.12). Mais ces états se transforment lorsque Γ est très grand. Dans ces conditions, l’état superradiant se localise au cœur si bien que |ΨR0i ∼ |0, 0i. De la même façon, les deux états subradiants deviennent de moins en moins sensibles aux effets du piège et forment des super- positions du type |ΨR±i ∼ (|χN1, 0i ± |χN1, µN2i)/

√ 2.

Dans ce contexte, la façon avec laquelle le paramètre Γ agit sur les états peut être ap- préhendée comme suit. Lorsque Γ part de zéro, le piège agit sur la dynamique excitonique telle une très faible perturbation. Dans ces conditions, les trois états |ΨR0i et |ΨR

±i, sensibles aux effets du piège, sont impliqués dans le processus d’absorption. Ce qui se traduit alors par une augmentation quasi-similaire de leur taux de décroissance. Ceci étant, lorsque Γ conti- nue d’augmenter l’action du piège absorbant ne peut plus être perçue comme une simple perturbation. Les trois états sont alors progressivement restructurés. En l’occurrence, l’état superradiant se localise peu à peu sur le cœur. En parallèle, les états subradiants perdent de leur population sur ce même site. La transition de superradiance apparaît alors lorsque cette restructuration permet de produire des chemins efficaces de la périphérie vers le cœur du graphe. Au moment précis où Γ = ΓST, les taux de décroissance des états subradiants atteignent une valeur maximale et le temps d’absorption τ est minimisé. Dès lors que Γ dé- passe cette zone d’optimisation, la localisation de l’état superradiant devient si forte que le processus d’absorption perd en efficacité. Le cœur du graphe se singularise du reste du réseau et ne peut plus admettre de couplage efficace avec les autres sites. Dans ces conditions, tout se passe comme si le graphe en étoile d’étoiles présentait N1 étoiles périphériques très faible- ment couplées avec le site de cœur. Raison pour laquelle le spectre réel des états subradiants présente un rétrécissement jusqu’à une valeur seuil de δω = 2ΦN2. En l’occurrence, les états subradiants deviennent |ΨR±i ∼ (|χN1, 0i ± |χN1, µN2i)/

2 et leur énergie devient réelle

ωN1,N2

± = ±Φ

N2 du fait de l’extinction de leur taux de décroissance. Ces états décrivent alors des "états homogènes généraux" sur l’ensemble des étoiles périphériques similaires aux états homogènes introduits dans le cas d’un graphe en étoile unique (cf. Chapitre 2).

Ceci étant, le paramètre Γ n’est pas le seul paramètre influençant le processus d’ab- sorption. En effet, nos résultats numériques ont montré que les paramètres de taille N1 et

N2 jouent aussi un rôle très important concernant le processus de restructuration des états propres. Pour comprendre l’effet de ces paramètres nous devons considérer les deux cas asymp- totiques N1 N2 et N2  N1.

Lorsque N2  N1et Γ = 0, les équations (6.12) montrent que l’état superradiant |ΨR0i cor- respond à un état fortement localisé sur |0, 0i, tandis que les deux états subradiants |ΨR±i ont une forme très proche de (|χN1, 0i ± |χN1, µN2i)/

2. Partant de ces états, l’augmentation de Γ produira l’apparition d’une transition de superradiance. Cependant, les trois états propres du système étant déjà très proches des états asymptotiques atteints lorsque Γ est très grand, aucune restructuration majeure ne se produira. Dans ce contexte, nous retrouvons alors des résultats similaires à ceux obtenus dans le cas de la configuration A avec (N1 = 3, N2 = 8). On parle alors de processus d’absorption sub-optimisé.

CHAPITRE 6. TRANSITION DE SUPERRADIANCE SUR UN GRAPHE EN ÉTOILE D’ÉTOILES

A l’inverse, lorsque N1 N2 et Γ = 0, la forme des états propres associés au sous-espace du trimère est bien différente. Lorsque Γ = 0, l’état superradiant |ΨR0i est fortement loca- lisé sur |χN1, µN2i et les deux états subradiants possèdent une forme |Ψ

R

±i très proche de (|0, 0i ± |χN1, 0i)/√2. Dans ce contexte, la forme de départ des ces états est si différente de celle atteinte lorsque Γ est très grand qu’une très forte restructuration se produit autour de la transition de superradiance. Cette restructuration a pour effet d’optimiser l’extension des trois états sur le trimère produisant alors des pics dans les mesures d’IPR. Cette extension per- met de générer un transport excitonique optimal d’une extrémité à l’autre du trimère et donc un meilleur piégeage. On parle alors de super-optimisation de l’absorption excitonique. Ce processus est clairement celui observé dans le cas de la configuration B avec (N1 = 8, N2= 3). Bien entendu, lorsque les deux paramètres N1 et N2 sont similaires, un comportement intermédiaire se produit. La restructuration des états est plus modérée et le régime d’absorp- tion est à la croisée d’une sub-optimisation et d’une super-optimisation. Pour donner une illustration de ces comportements, la figure6.13représente les temps optimaux d’absorption

τ obtenus numériquement pour différents couples de paramètre de taille (N1, N2).

2

4

6

8

10

1.5

3.2

9

4.9

8

6.6

7

10

8.3

6

8

9

10

54

6

7

5

4

3

3

10

Figure 6.13 – Temps minimaux d’absorption τ en fonction des paramètres N1 et N2. Nous voyons ici que la région N1 > N2 contient les couples de paramètres présentant les temps d’absorption les plus faibles. Pour prendre un exemple concert, le cas extrême (N1 = 10, N2 = 3) représente un cas de régime super-optimisé pour lequel le temps d’absorption est de τ ' 1.68Φ−1. En contrepartie, son homologue (N1 = 3, N2 = 10) représente un cas de régime sub-optimisé pour lequel le temps d’absorption est de τ ' 9.84Φ−1.

6.5

Références

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CHAPITRE 6. TRANSITION DE SUPERRADIANCE SUR UN GRAPHE EN ÉTOILE D’ÉTOILES

[17] G. L. Celardo, G. G. Giusteri, and F. Borgonovi, “Cooperative robustness to static disorder : Superradiance and localization in a nanoscale ring to model light-harvesting systems found in nature,” Physical Review B, vol. 90, no. 7, p. 075113, 2014.

[18] G. L. Celardo, P. Poli, L. Lussardi, and F. Borgonovi, “Cooperative robustness to depha- sing : Single-exciton superradiance in a nanoscale ring to model natural light-harvesting systems,” Physical Review B, vol. 90, no. 8, p. 085142, 2014. 126

[19] A. Volya and V. Zelevinsky, “Exploring quantum dynamics in an open many-body sys- tem : transition to superradiance,” Journal of Optics B : Quantum and Semiclassical

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126

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[27] S. L. Gilat, A. Adronov, and J. M. Frechet, “Light harvesting and energy transfer in novel convergently constructed dendrimers,” Angewandte Chemie International Edition, vol. 38, no. 10, pp. 1422–1427, 1999.

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Chapitre 7

Interaction entre le désordre et la

transition de superradiance

P

our juger de l’efficacité du transport excitonique sur un graphe, la question fondamen- tale est toujours la suivante : l’exciton se délocalise-t-il de manière cohérente ou, au contraire, se localise-t-il sur le réseau ? Dans ce contexte, notre précédente étude a clairement montré le rôle important que joue la symétrie du réseau sur l’évolution excitonique. Sur un graphe en étoile d’étoiles, la dégénérescence des états propres est si forte qu’un phénomène de localisation se produit. On parle alors de localisation par dégénérescence spectrale. Un exciton qui initialement se trouve sur la périphérie du réseau restera majoritairement localisé dans cette région et ne pourra que très faiblement se délocaliser vers le cœur. Dans le cadre d’un processus d’absorption au cœur du graphe, ce phénomène de localisation altère alors la qualité du piégeage : seule une petite partie de la densité excitonique peut être absorbée. Partant de ces observations, nous nous sommes alors posés une question simple : que faire pour améliorer la transmission excitonique de la périphérie du graphe vers son cœur ? Pour y répondre, nous nous sommes tournés vers un concept intéressant : celui de désordre.

Pour un physicien du solide, la notion de "désordre sur réseau" rappellera naturellement le concept de localisation introduit par P.W. Anderson [1]. En effet, dans son article de 1958, Anderson démontra que la présence d’un désordre sur un réseau pouvait engendrer des effets négatifs sur le transport quantique d’une particule. Dans ces conditions, la perte d’extension spatiale des états propres du système conduit au confinement de la particule sur un nombre restreint de sites. On parle alors de "localisation d’Anderson". Ceci étant, de récentes études [2–4] ont révélé que la présence d’un faible désordre pouvait aussi posséder une action positive lorsque l’on considère des réseaux complexes. Dans ces contexte, le transport quantique gé- néré devient très subtil. Les mécanismes de transfert sont à la fois gouvernés par la symétrie du réseau mais aussi par la présence de défauts locaux. Cette dynamique hybride permet alors d’améliorer la délocalisation des particules.

Inspirés par ce concept, ce dernier chapitre présente une étude visant à caractériser les effets d’un désordre local sur un graphe en étoile d’étoiles avec un piège absorbant au cœur. L’idée d’une telle étude est de souligner les interactions bénéfiques possibles entre l’absorption (transition de superradiance) et le désordre. Ainsi, dans une première partie nous allons présenter le modèle de réseau en étoile d’étoiles désordonnée et le Hamiltonien excitonique correspondant. Nous introduirons ensuite les observables dont la connaissance nous permettra de caractériser la dynamique excitonique. Dans une seconde partie nous présenterons une analyse numérique de l’influence du désordre sur le processus d’absorption. Ces différents résultats seront discutés et interprétés dans une troisième et dernière partie.