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Équivalence entre graphe et Hamiltonien de liaisons fortes

1.2 Transport quantique sur des réseaux complexes

2.1.1 Équivalence entre graphe et Hamiltonien de liaisons fortes

Pour modéliser la marche quantique d’un exciton, nous allons construire un Hamiltonien de liaisons fortes excitonique Hex en lien direct avec la structure du réseau que l’on sou-

haite étudier. Pour ce faire, notre point de départ est simple : nous considérons un graphe (non-dirigé), possédant au total NS sites. Ce graphe représentera pour nous une architecture moléculaire hypothétique sur lequel un exciton pourra se déplacer. Partant de ce réseau, nous réalisons alors deux hypothèses importantes.

Tout d’abord, chaque site du graphe représente une sous-unité moléculaire dont les pro- priétés physiques (électroniques ou vibrationnelles) peuvent être modélisées par un système à deux niveaux. Ainsi, si l’on décrit chaque site par un indice ` = 1, 2, . . . , NS, nous pouvons

alors associer à chacun d’entre eux un état fondamental |g`i d’énergie nulle (référence en énergie), et un état excité |e`i d’énergie ω`. En l’occurrence, la quantité ω` représentera la fréquence de Bohr d’excitation de chacun des sites. Dans ce contexte, on considérera que tous

les états introduits ici sont orthonormés, d’où les relations he`0|e`i = δ`0`

hg`0|g`i = δ`0`

hg`0|e`i = 0

(2.1)

En partant de cette hypothèse, nous allons considérer un espace de Hilbert excitonique formé par la jonction de deux sous-espaces de Hilbert à zéro et un exciton comme Hex= H0

ex⊕ H1ex.

Le sous-espace à zéro exciton H0ex est sous-tendu par un unique vecteur de vide excitonique |∅exi défini comme

|∅exi ≡

O

`

|g`i (2.2)

Cet état décrit une situation où tous les sites du graphe se trouvent respectivement dans leur niveau fondamental. Concernant le sous-espace à un exciton H1ex, ce dernier sera sous-tendu par un ensemble de NS états locaux du type

|`i ≡ |e`i ⊗   O `06=` |g`0i   (2.3)

Chaque état |`i décrit une configuration pour laquelle seul le site ` se trouve dans son état excité, tous les autres sites étant dans leur état fondamental. Plus simplement, l’état |`i signifie la présence d’un exciton sur le site ` du graphe. En nous basant sur les relations d’orthogonalité définies par (2.1), on peut alors montrer que les états introduits jusqu’à présent suivent des relations similaires

h`0|`i = δ`0`

h∅ex|`i = 0

(2.4)

Pour poursuivre dans la construction du modèle de liaisons fortes, nous devons maintenant considérer les interactions entre sites. Pour ce faire, nous allons émettre l’hypothèse que les couplages entre états excités locaux (i.e. les |`i) suivent la connexité du réseau considéré. En d’autres termes, si un exciton se trouve sur un site initial `, alors ce dernier pourra se propager vers un site `0 si et seulement si les deux sites en jeu sont connectés sur le réseau. Dans ce contexte, nous savons que la donnée clé est la matrice d’adjacence A du réseau. On rappelle que cette matrice se définie comme

A``0 =

(

1 si les sites ` et `0 sont connectés.

0 sinon. (2.5)

En connaissant la forme de A, nous pouvons construire une matrice de couplage excitonique Φ réelle et symétrique dont les éléments dans la base locale {|`i} sont

Φ``0 = φ``0A``0 (2.6)

où φ``0 représente la constante de saut excitonique entre deux sites ` et `0 du graphe. A ce

stade, marquons un bref arrêt pour discuter l’origine physique de tels couplages excitoniques. Dans la nature, les amplitudes d’interactions φ``0 sont en réalité basées sur des interactions

coulombiennes à faible portée [1]. Lorsqu’un exciton se trouve sur un site `, un couplage se produit entre le dipôle d`du site porteur de l’exciton et le dipôle d`0 d’un site voisin connecté.

Ces interactions dipôle-dipôle permettent à la molécule initialement porteuse de l’exciton de transmettre son énergie à la molécule qui lui est attenante. La force de cette interaction étant encodée dans une constante de saut φ``0 ∝ d`0d`/R3

``0 qui dépend directement de la distance

CHAPITRE 2. DYNAMIQUE EXCITONIQUE LIBRE SUR UN GRAPHE COMPLEXE

En réunissant ces deux hypothèses, nous pouvons alors définir pour chaque graphe que nous étudierons un Hamiltonien de liaisons fortes qui s’écrit comme (avec ~ = 1)

Hex = NS X `=1 ω`|`ih`| + NS X `,`0=1 Φ``0|`ih`0| (2.7)

Dans le cas présent, la diagonale du Hamiltonien décrit les propriétés locales de chaque site du graphe, i.e. les fréquences de Bohr ω` des systèmes à deux niveaux locaux. Les éléments

non-diagonaux représentent quant à eux les couplages Φ``0 existant entre les différents sites

connectés du graphe. Afin de donner une illustration claire de ce que représente chaque élément de ce Hamiltonien, nous avons représenté sur la figure 2.1 le graphe équivalent à un complexe moléculaire de Fenna-Matthews-Olson (FMO). Pour présenter quelque peu ce graphe, il faut savoir que les complexes FMO sont des réseaux moléculaires photosynthé- tiques présents au sein des bactéries sulfureuses vertes sur lesquels le transport énergétique est réalisé par des excitons de Frenkel. Ce type de réseau a été étudié dans divers contextes de transport quantique allant de la marche quantique excitonique en présence d’un environne- ment [2] (concept ENAQT), aux effets de transition de superradiance [3]. Sur la partie gauche de l’image, les sept sous-unités moléculaires composant l’unité FMO sont représentées. Les flèches reliant les différents sites symbolisent les couplages excitoniques Φ``0 considérés. On

notera que les paramètres physiques donnés ici sont exprimés en cm−1. Par ailleurs, les éner- gies locales on été décalées de sorte à poser comme référence l’énergie du site moléculaire numéro 3 avec ω3 ' 12 000 cm−1. Nous avons représenté sur la droite de l’image la structure du graphe équivalent au complexe FMO avec l’ensemble des paramètres physiques Φ``0 et ω`

introduits précédemment.

1

2

7

3

6

5

4

Complexe moléculaire FMO

Graphe équivalent

Figure 2.1 – Complexe moléculaire Fenna-Mathews-Olson et son réseau équivalent

Pour clore cette discussion sur le Hamiltonien de liaisons fortes excitonique Hex, intro- duisons la forme diagonalisée de cet opérateur

Hex = NS

X

k=1

ωk|χkihχk| (2.8)

Il s’agit là d’une réécriture qui nous sera très utile dans nos études futures. En l’occurrence, les quantités ωkreprésentent les énergies propres du Hamiltonien Hexet les |χki les états propres à un exciton associés. On remarquera que dans les deux formes données du Hamiltonien Hex

l’état de vide excitonique |∅exi n’apparaît pas explicitement. La raison est simple, |∅exi est

un état totalement indépendant du reste des états à un exciton (aucun couplage avec les |`i). Il s’agit donc d’un état propre singulier du système excitonique d’énergie propre nulle.