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Les tentatives de formation logique des systèmes d’habitat social et leur classement

I. 5.- Reduccion d’Antonio Ruis de Montaya (1582-1652)

Durant la période de la colonisation des Espagnols et des Portugais de l’Amérique du sud88(Lorette, C, 2000 :51), il y avait des missionnaires jésuites qui ont fondé des Reduccions. Ce sont

87 Il a revendiqué le droit d’examens de tout ce qui existe dans le monde via des expériences sensibles en vérifiant les faits et la causalité. La philosophie d’après lui est démontrée seulement avec les sens.

88 Lorsque Hernán Cortés débarque sur la côte de Veracruz en 1519 avec 800 hommes, une vingtaine de chevaux et quelques canons, l’empire Aztèque est à son apogée sous le règne de Moctezuma II (1502-1520) ; il compte entre 15 et 20 millions d’habitants. En route vers Tenochtitlan, Cortés soumet les Txalcaltèques et les Totonaques et s’en fait des alliés pour détruire

124 des cités où les indiens peuvent se regrouper et reçoivent une éducation sociale et religieuse. ‘Ce sont des petites « républiques » théocratiques, indépendantes et autarciques fondées sur l’autonomie, l’entraide et la liberté relatives des indiens. Chaque Reduccion (Figure III-3 et III-4) est divisé en quartiers, représentés au conseil municipal par des chefs traditionnels élus tous les ans sur la liste approuvée par les missionnaires’ (Lorette, C, 2000 :51). Le travail impose une vie austère et rude, avec une stricte hiérarchie. Donc, on constate qu’il y a une volonté de réaliser des systèmes urbains et par conséquent des systèmes d’habitat où les habitants se trouvent avec un toit pour chacun, en aucun cas un morceau de la ville ne représente un intrus.

Figure III- 3: Les composantes de la ville imaginaire de Antonio Ruis de Montanya : 1) Le logement des Autochtones, 2) Cabildo, 3) Cimetière 4) Eglise 5) salles de classe, 6) Salle à manger, 7) Cuisine, 8) Atelier et entrepôt.

Figure III- 4: Vue sur la ville imaginaire de Antonio Ruis de Montanya Especialización Docencia Univ. Carrera de Posgrado a Distancia. (www.proyectoyobra.com/misiones.asp)

La cité Reduccion est conçue avec une géométrie rigoureuse, régulièrement étudiée et symétrique. Les habitations convergent vers un centre où on dispose des équipements d’accompagnement comme l’école, l’église, l’asile et des ateliers où travaillent les femmes. Cette géométrie permet le contrôle de la vie de la cité. Ce mode d’organisation de l’espace urbain est une manière de maitriser les rapports sociaux en cherchant d’assurer une équité sociale et un climat de paix…leur économie est basée sur l’agriculture et les pâturages mais loin de la cité. De ce qui précède, on peut dire que cette cité idéale a été planifiée sur la base d’une logique réconciliant les aspects suivants: social, économique, cultuel et culturel, et la gouvernance en respectant les terrains agricoles et l’environnement, autrement dit les actuels registres logiques de planification urbaine.

Dans cette cité, il n’existe pas la notion de la propriété privée excepté une maison ou un couteau. Selon Robert Laconbe dans son ouvrage ‘Guaranis et Jésuites : un combat pour la liberté’, apparu à Paris en 1993, les dernières Reduccions sont dissoutes en 1768, plus d’un siècle après la mort de Montaya, avec le bannissement des missionnaires Jésuites des territoires espagnols et le massacre des indiens Guaranis. Cet exemple en plus qu’il soit basé sur les registres qu’on a évoqué montre que la religion est apparue comme stabilisateur de l’ordre moral de la société. Ce qui étaye notre vision qu’il y a des éléments qualitatifs et d’autres quantitatifs.

la puissance aztèque. En 1521, après un siège sanglant, les Espagnols s’emparent de Tenochtitlan et la détruisent ; ils capturent le dernier empereur Cuauhtémoc. Les indigènes deviennent alors les vassaux des encomenderos espagnols (sorte de seigneurs féodaux). En parallèle à la conquête militaire, les moines franciscains et dominicains convertissent de force les indiens. Un premier vice royaume est constitué en 1535 : la Nouvelle-Espagne, qui comprend tous les territoires conquis au nord de l’isthme de Panamá. Au sud de cet isthme, les terres coloniales sont rassemblées, en 1544, dans le vice royaume du Pérou. Source : www.mexique-voyages.com/histoire/periode-coloniale.php.

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Figure III- 5 : Missions jésuites XVI- XVIII siècle ; jour de fête à Saint-Xavier-de-Mocobies, sur le territoire de l’actuelle Bolivie. Prospère jusqu’au départ de la compagnie, ce village décline ensuite (aquarelle du père jésuite Fmorien Paucke qui y a séjourné de 1748 à 1769). Les communautés chrétiennes indigènes placées sous le houlette des jésuites vivent selon une économie. (À la recherche de la cité idéale , 2000 :54).

Figure III- 6 : Le paradis terrestre 1675 ; Erudit allemand établi à Rome, le père jésuite Athanasius Kircher publie, en 1675, Arca Noé, un ouvrage richement orné où chaque table renferme et le récit et son interprétation. Ici celle d’un Eden riant et fertile, régulièrement organisé par la pensée divine, tandis qu’autour, sur des terres arides, rodent les animaux sauvages.

Figure III- 7 : l’Arche de Noé ; la cosmologie fantastique et savante du père Athanasius Kircher reconstruit l’univers et ordonne rationnellement son histoire. L’Arche de Noé devient une cité idéale clairement structurée, dans laquelle se meut une

société où les rôles sont précisément distribués. (À la recherche de la cité idéale , 2000).

Ces exemples des cités idéales (Figures III-5, III-6 et III-7) de l’époque montrent les germes assez développés d’une philosophie cherchant un système d’habitat. Ce système est fait de manière à garantir un toit pour toutes les espèces notamment pour l’homme créateur. Ils nous montrent aussi que la mise en scène est basée sur des registres logiques d’implantation à savoir : social, économique et agriculture, gouvernance et fortification, protection des terres fertiles et des faunes et des flores ; ce qui nous conduit à dire que le développement durable n’est qu’une autre manière de traduire ces registres qui perdurent depuis longtemps. Il faut ajouter à cela, que la nature est un système bien organisé et équilibré par excellence.

Mais ce n’est pas la fin de l’utopie urbaine, cette démarche basée sur l’imagination où chaque individu doit avoir un logis se poursuit sans cesse, elle a donné aussi le signal de début d’une autre période riche d’expériences. Donc le socialisme s’est bien forgé à la fin de cette période, de même qu’il y avait des ouvrages écrits en ce sens (comme celui de Claude-Nicolas Ledoux89

89 En 1804, selon lui l’architecture n’est considérée qu’en rapport avec l’art, les mœurs et la législation. La ville idéale se situe autour d’une manufacture intégrée à la ville pour continuer un projet urbain pour répondre aux questions sociales et urbaines : circulation, salubrité, équilibre et équipement de la ville.

126 1806). Ces créations sont le résultat de bouleversements qu’ont connus les sociétés des pays européens au début de l’ère industrielle.

Cette période a vivement participé à façonner et à impliquer l’esprit de pensée sociale en deux tendances importantes. Celui d’une tendance purement économique sous un régime libéraliste et d’autre part d’une industrialisation basée sur les inventions pseudo-scientifiques ou sur des règles religieuses. Ces tentatives ensoleillent et alimentent la pensée logique menée par la volonté de réaliser des systèmes d’habitat. Donc, logiquement, on doit habiter un territoire habitable avec une pensée humaine et une architecture conventionnée. Les composantes de cette pensée représentent un ensemble de registres géométrique, régulier, économique, social et environnemental. De ce qui précède, on peut avancer que cette période dessine les germes de l’actuel Projet Urbain en tant qu’alternatif.