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1 PRINCIPAUX RÉSULTATS – MISE EN PERSPECTIVE

1.2 LE RÔLE DU MÉDECIN GÉNÉRALISTE

1.2.1 Pathologies mentales et médecins généralistes

Les principales pathologies décrites par les médecins généralistes interrogés étaient les

syndromes anxio-dépressifs et la souffrance au travail.

Des études confirment cet état de fait : la majorité des troubles psychiatriques en médecine générale

sont de type dépressif ou anxieux (7) (17).

Cependant, il est intéressant de remarquer que les médecins abordaient peu un ensemble de

pathologies qui appartiennent pourtant au champ de la santé mentale : les troubles alimentaires, les

addictions et les douleurs chroniques ont été mentionnés une seule fois, la pédopsychiatrie, la

gérontopsychiatrie, les troubles de la sexualité et bien d’autres pathologies de santé mentale n’ont

jamais été citées.

Ces pathologies sont-elles effectivement absentes du quotidien des médecins généralistes ou

existe-t-il d’autres raisons pouvant expliquer l’absence de référence à ces troubles aux cours des

entretiens ? Leur vision du domaine de la santé mentale serait-elle un peu restreinte ? Ou bien la

définition de la santé mentale serait-elle bien connue par les médecins ?

1.2.2 Rôle majeur du médecin généraliste

Les médecins interrogés estimaient avoir un rôle majeur dans le parcours de soins en santé

mentale avec une place de premier recours.

Cette place est confirmée par une étude lilloise de 2010 qui estimait à 42 % la part de la population

qui se tournait vers le médecin de famille comme premier acteur en cas de difficultés psychologiques

(17).

Les médecins affirmaient avoir une vision globale du patient et être facilement accessible par

rapport à d’autres spécialités médicales. Grâce à leur écoute et à leurs suivis sur le long terme, ils

étaient traducteurs de la somatisation et pouvait être le révélateur du trouble mental. Ils faisaient le

lien entre la médecine et le patient en traduisant par des mots simples la pathologie médicale.

Le médecin se définissait comme tuteur pour le patient afin de l'accompagner dans sa vie médicale

et son environnement social. Il le conseillait sur les décisions qu’il devait prendre et le valorisait pour

le retour de la confiance en soi.

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Il est intéressant de constater que les médecins mettaient en avant l’importance de la clinique.

Hors, peu de médecins ont évoqué la recherche d’une organicité secondaire pouvant être à l’origine

d’un trouble mental et la réalisation d’examens complémentaires pour étayer l’étiologie

diagnostique. Finalement, la sémiologie médicale psychiatrique semblait peu utilisée.

La pratique semblait être basée davantage sur le ressenti avec une participation subjective et

expérimentale importante. Pourquoi la sémiologie médicale psychiatrique n’est-elle pas plus

approfondie par le médecin généraliste ?

Une enquête sur la prise en charge des patients dépressifs en soins primaires de 2010 montrait que

seulement 28 % des généralistes connaissaient les guides de pratique clinique (9).

1.2.3 Rôle de prescripteur

1.2.3.1 Importance de la psychothérapie

La totalité des médecins interrogés déclaraient avoir un rôle de prescripteur, avec en première

ligne les antidépresseurs et les anxiolytiques. La prescription d'arrêts de travail était un recours

également fréquemment utilisé.

Cependant, la grande majorité pensait que le chemin de la guérison ne résidait pas uniquement dans

la thérapeutique chimique et que le soutien psychologique avait toute son importance.

Dans une étude de 2012, les médecins déclarent percevoir les psychothérapies comme un traitement

à part entière de la dépression et les jugent efficaces (19). De plus, une étude de 2014 rappelle qu'un

acte de médecine générale sur dix comporte un soutien psychothérapeutique (7).

Malgré la reconnaissance unanime de l'utilité de la psychothérapie, peu de médecins la

pratiquaient au cabinet. Les raisons évoquées étaient le manque de temps et la faible rémunération.

Il pourrait être intéressant de valoriser la rémunération de la consultation d’accompagnement

psychothérapeutique afin de sensibiliser davantage les médecins à cette pratique. Une cotation

spéciale dans la CCAM (Classification Commune des Actes Médicaux) pourrait être créée.

À ce jour, la seule cotation en rapport avec la santé mentale en médecine générale est celle d'une

évaluation psychique par une échelle d'évaluation de la dépression (Hamilton, Beck…), applicable

une fois par an et par patient.

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1.2.3.2 Surveillance de la iatrogénicité

Le rôle et l’implication du médecin généraliste semblaient différents pour les patients déjà

suivis par un spécialiste. Leur prise en charge paraissait facilitée : le médecin précisait que sa tâche

pouvait se limiter au renouvellement du traitement de fond.

Un médecin interrogé notait son implication pour la surveillance clinico-biologique chez les

patients suivis chez le spécialiste.

Cependant, aucun n’a fait référence à la iatrogénicité possible de certains traitements qui pourraient

induire des troubles psychiatriques, ni à la vigilance requise face aux interactions médicamenteuses

des psychotropes et à leurs effets secondaires.

Cet aspect de la médecine place pourtant le médecin généraliste en première ligne dans la

surveillance thérapeutique. De plus, la dernière recommandation HAS de 2015 (2) préconise une

surveillance de la iatrogénicité des traitements en santé mentale. Elle propose d’identifier clairement

le soignant assurant le suivi somatique et d’évaluer systématiquement les bénéfices et les risques du

traitement psychotrope.

Il pourrait alors être intéressant d'analyser plus précisément la pratique des médecins

généralistes : la surveillance de la iatrogénicité est-elle réellement non réalisée ou fait-elle partie

intégrante de leur exercice au point d'être effectuée automatiquement dans leur quotidien ?