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3 FACTEURS INFLUENÇANTS LE RESSENTI DES MÉDECINS GÉNÉRALISTES POUR LA PRISE EN

3.6 EN LIEN AVEC LE PATIENT

3.6.1 Le patient et la pathologie mentale

3.6.1.1 Représentation de la pathologie mentale

Le patient aurait sa propre perception de la pathologie mentale. Cela influencerait le positionnement

du médecin généraliste pour aborder la consultation de santé mentale.

Pour certains des praticiens interrogés, la perception globale de la pathologie mentale évoluait

positivement.

ESD 1 L167 : "cette connotation “pathologie psychiatrique” ou "psychologique" entre

guillemets ou heu…voilà, ça fait encore peur à certains mais globalement, en vingt-cinq ans de

pratique, je trouve que ça a quand même beaucoup beaucoup évolué et que les gens sont plus à

même de considérer que voilà, qu’on peut tous avoir des problèmes existentiels qui génèrent des

souffrances et que ces souffrances, on peut, on peut…se faire aider ! "

Malgré tout, plus de la moitié des médecins interrogés décrivaient encore quelques difficultés lors de

consultations pour aborder sereinement la pathologie mentale.

ESD 5 L254 : "Mais elle dépend du patient aussi, parce qu'on a des patients qui sont en

véritable résistance. "Moi la psychiatrie, j'veux pas en entendre parler" etc."

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D'après certains médecins rencontrés, il persistait un sentiment de honte chez certains patients.

ESD 2 L230 : "C'est que...nos patients y'en a plein qui... qui ont des problèmes et…qui, qui

n'osent pas en parler parce que c'est tabou, parce que c'est pas bien, parce que..."

Pour un des médecins interrogés, diagnostiquer un trouble mental pouvait avoir des conséquences

importantes pour le patient.

ESD 1 L107 : "il y a tout l’élément diagnostic aussi, c’est tout un coup de Trafalgar que

d’aller mettre une étiquette de maladie mentale sur quelqu’un, pour tout le monde hein ! C’est une

déflagration !"

3.6.1.2 Contexte de vie du patient

Le patient était influencé par son contexte de vie, facteur qui peut parfois limiter l'intervention des

médecins généralistes.

ESD 8 L195 : "Puis voilà, surtout, en plus le burn-out, souvent c'est le contexte

environnemental, quoi, qui va pas. Des fois c'est la famille, des fois c'est le boulot, etc."

3.6.1.3 Investissement financier

D'après un médecin, un élément qui pouvait influer le manque d'implication des patients dans leurs

soins en santé mentale était l'aspect financier enchevêtré au phénomène sociétal.

ESD 4 L117 : "Heu...en même temps, j'sais bien qu'on est dans une société où tous les soins

sont avancés gratuitement donc investir dedans c'est un peu difficile, ça peut parfois coûter du fric,

hein, c'est vrai, des fois c'est normal."

3.6.2 Le médecin face au patient

La majorité des praticiens rencontrés indiquait qu'il était plus facile de mener la consultation de santé

mentale avec un patient qui appartenait déjà à leur patientèle.

ESD 7 L146 : "Bah, y'a ceux qu'on connaît, et y'a ceux qu'on ne connaît pas !"

3.6.2.1 Connaissance des besoins et des réactions du patient

Les réactions des praticiens devaient être adaptées aux besoins et aux réactions du patient.

ESD 5 L277 : "et puis y'a ces cas frontières où là…c'est comme on sent le patient. On le

connaît, on va le tenir"

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Il semblait alors plus difficile pour les médecins généralistes interrogés de prendre en charge un

trouble mental présenté par un patient peu connu.

ESD 4 L319 : "Donc c’est pour ça qu’le nomadisme médical, c’est pas terrible, parc’qu’à

chaque fois, t'es obligé de repartir à zéro."

3.6.2.2 Relation de confiance

Quand une relation de confiance entre le patient et le médecin était déjà solide, cela facilitait la prise

en charge des médecins généralistes.

ESD 6 L174 : " C'est plus facile à amener quand les gens…quand ils…quand ils sont

en confiance. Ils n'ont pas l'impression qu'on s'en débarrasse parce qu'on les prend pour des…des

cinglés ou voilà."

3.6.2.3 Portrait du "patient psychiatrique"

Les médecins rencontrés avaient des représentations différentes et personnelles du "patient en santé

mentale".

La relation entre le médecin et le patient qui présentait un trouble mental était également influencée

par l'attitude du patient face au médecin.

Le ressenti était plutôt péjoratif. Les médecins décrivaient des patients exigeants dans leurs

demandes de soins et de prescription.

ESD 4 L86 : "Je te dis après, ce qui m'emmerde le plus, ça reste toujours les exigences des

patients qui sont traités depuis longtemps, qui ont fait du nomadisme médical, qui, s'ils ne sont pas

contents vont voir quelqu'un d'autre."

Les praticiens pouvaient être confrontés à des incivilités et à des accès de violence.

ESD 1 L127 : "Bah, il y a une appréhension lorsque, quand il y a des attitudes de violences,

et de fond, du refus systématique etc., où là, on sait qu’on va devoir utiliser des méthodes qui sont

heu… qui ne sont certainement pas celles que tu aurais aimé utiliser si la personne était dans

l’acceptation du fait…"

La communication était parfois biaisée par la prédominance du trouble mental. Certains médecins

généralistes exprimaient leur inconfort face à certains patients.

ESD 6 L131 : "Il m'a dit : "Faut pas essayer de me comprendre, de toute façon les gens

autour de moi, ils me comprennent déjà, je le sens!" Enfin il était…dans un autre…dans un autre

monde! Donc heu oui là, voir un psychiatre c'était…c'était…"

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La majorité des praticiens interrogés décrivaient un malaise lorsqu'un patient exprimait des idées

suicidaires.

ESD 9 L77 : "Bon, là où on a peur, là ce qui me fait peur, c'est quand j'sens vraiment des

mecs, vraiment mal quoi...les mecs qu'on interroge : "Alors vous avez des idées noires, des idées de

suicide ?- Oui, j'ai envie de m'jeter du pont du truc". Oh...putain heu... (Grande inspiration)!"

La relation des médecins avec certains patients pouvait être altérée suite à des non-observances ou

des abus de confiance.

ESD 6 L159-192 : " "il a pris […] des alprazolams, du Vératran® (DCI : Clotiazépam), du

Voltarène® (DCI : Diclofénac) parce qu'il avait mal au dos" et j'lui dis : "Mais, j'vous ai pas fait de

prescription" et en fait il les achète sur le marché noir (rire) !... Voilà. […] il est déjà suivi et moi je

ne m'en sors pas trop avec les traitements, il est dans l'abus, dans la surconsommation…"

ESD 4 L356 : "Le nombre de fois où on doit se faire avoir tu sais… Les mecs ils sont

déprimés, "Oh ça va pas", et puis bon, ils sortent de chez toi et ils vont au troquet et rigoler avec les

copains, mais bon !"

Un médecin considérait que son implication était parfois vaine. Il décrivait une certaine fatalité.

ESD 8 L205 : "J'sais qu'y'a des gens qui vont recevoir les conseils, qui vont les entendre et

puis qui vont les mettre en application alors que d'autres, pas du tout et puis que...on a beau leur

dire les choses, ça changera pas, parce que...le contexte est tellement compliqué que ça...ça

marchera pas quoi. Du coup voilà."

3.6.3 Objectif thérapeutique fixé

L'investissement des médecins généralistes dans la prise en charge de la pathologie mentale et leur

degré de satisfaction dépendait également des objectifs thérapeutiques fixés avec et pour le patient.

ESD 3 L298 :"L’idée c’est que la personne, heu, non pas guérisse, mais soit capable de se

remettre debout et d’avancer."

ESD 9 L167 : "La belle réussite de la thérapie c'est quand le mec est bien intégré dans la

société. Il vit bien, il vit bien son truc."

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3.6.4 En lien avec le patient : situations pour lesquelles les médecins

généralistes nécessitent de l'aide par une intervention extérieure

Un seul médecin généraliste confiait orienter des patients vers d'autres professionnels de santé

lorsque la relation ne lui semble pas saine.

ESD 8 L103 : "Qu'est-ce qui me fait passer la main ? Quand je sens que j'ai des patients avec

qui ça va pas accrocher. Ou qu'il y a des patients que moi je pense que j'aime pas. Y'a des patients

qu'on n'aime pas hein ! Je sens qu'ça va pas accrocher, je sens que ça va me saouler, ou je sens...des

patients qu'on sent pas quoi. Du coup, là je…direct ! Là je…là je passe la main parce que je sens

que je vais pas pouvoir les aider"