• Aucun résultat trouvé

1. Contexte scientifique

1.4.1. Résumé des différents réservoirs

Lieu/Echantillon Espèce D/H × 10-6 Références

"Big Bang" (théorique) H 20-50 (Geiss & Gloeckler 1998) ; (Schramm 1998) Milieu interstellaire H 16 ± 1 (Linsky et al. 1993)

Nuages moléculaires froids

HCO+, NH3,

HCN, H2CO, … 10 000-30 000 e.g. (Robert et al. 2000) Nébuleuse protosolaire

(4.567 Ga) H2 25 ± 5 (Geiss & Gloeckler 1998)

Le Soleil (vent solaire) H2 21 ± 5 (Geiss & Gloeckler 1998) Planètes gazeuses

Jupiter (atm. in situ) H2 26 ± 7 (Lellouch et al. 1996) ; (Mahaffy et al. 1998)

Saturne H2 15-35 (Griffin et al. 1996)

Uranus H2 55 (Feuchtgruber et al. 1999)

Neptune H2 65 (Feuchtgruber et al. 1999)

Planètes telluriques

Vénus (atm. in situ) H2O 16000 ± 200 (Donahue et al. 1982) La Terre (atm. in situ) H2O 149 ± 3 (Lécuyer et al. 1998)

Mars (atm. in situ) H2O 780 ± 80 (Owen et al. 1988) Comètes (OCC)

P/Halley H2O 210 ± 30 (Brown et al. 2012)

C/1996 B2 (Hyakutake) H2O 290 ± 100 (Bockelée-Morvan et al. 1998) C/1995 O1 (Hale-Bopp) H2O 330 ± 80 (Meier et al. 1998a)

C/2002 T7 (LINEAR) H2O 250 ± 70 (Hutsemékers et al. 2008) C/2001 Q4 (NEAT) H2O 460 ± 140 (Weaver et al. 2008) C/1995 O1 (Hale-Bopp) HCN 2300 ± 400 2300 ± 600 (Crovisier et al. 2004) (Meier et al. 1998b)

C/2009 P1 H2O 206 ± 22 (Bockelée-Morvan et al. 2012) Comètes (JFC)

8P/Tuttle H2O 409 ± 145 (Villanueva et al. 2009) 103P/Hartley 2 H2O 161 ± 24 (Hartogh et al. 2011)

45P/Honda H2O < 200 (Lis et al. 2013)

67P/Churyumov-Gerasimenko H2O 530 ± 70 (Altwegg et al. 2015)

Wild 2 coma 150-500 (McKeegan et al. 2006)

IDPs H2O et MO 111-3 840 (Messenger 2000) ; (Aleon et al. 2001) MMs H2O et MO 99-4 600 (Engrand et al. 1999) ; (Duprat et al. 2010) Météorites

CI H2O 141.3-202.5 e.g. (Robert 2003)

CI MOI 294 (Alexander et al. 2007)

CM H2O 126.4-310.0 e.g. (Robert 2003)

CM MOI 149-638 (Alexander et al. 2007)

CR H2O 236-263 e.g. (Robert 2002) ; (Robert 2003)

CR MOI 582-617 (Alexander et al. 2007)

OC H2O 165-390 (Robert 2002)

OC MOI 201-1 070 (Alexander et al. 2007)

Table 1-4. Compositions isotopiques de l’hydrogène dans différents réservoirs du système solaire et de la galaxie. D’après (Robert et al. 2000), (Engrand et al. 1999), (Duprat et al. 2010), (Dobrică 2011) et (Bockelée-Morvan et al. 2015).

32

Lieu/Echantillon Espèce 14N/15N Références

Milieu interstellaire local (NH3, N2H+) 450 Nuages moléculaires froids

= dark clouds = starless cores

L1544 (ESO) CN 510 ± 70 (Hily-Blant et al. 2013)

L1544 HCN 230-350 (Hily-Blant et al. 2013)

L1498 (ESO) CN 476 ± 70 (Hily-Blant et al. 2013)

L183 HCN 190-280 (Hily-Blant et al. 2013)

Nébuleuse protosolaire

(4.567 Ga) TiN 424 ± 3 (Meibom et al. 2007)

Le Soleil (vent solaire) H+ 441 ± 5 (Marty et al. 2010) ; (Marty et al. 2011) Jupiter (atm. in situ) NH3 435 ± 57

450 ± 106

(Owen et al. 2001) (Fouchet et al. 2004) La Terre (atm. in situ) N2 272 (Anders & Grevesse 1989)

Mars (atm. in situ) primordial N2 280 ± 5 (Mathew & Marti 2001) Comètes

C/1995 O1 (Hale-Bopp) HCN 323 ± 46 330 ± 98 (Ziurys et al. 1999) (Jewitt et al. 1997) C/1995 O1 (Hale-Bopp) CN 140 ± 35 (Arpigny et al. 2003) C/1995 O1 (Hale-Bopp) HCN 205 ± 70 (Bockelée-Morvan et al. 2008)

17P/Holmes HCN 139 ± 26 (Bockelée-Morvan et al. 2008) 17P/Holmes CN 165 ± 40 (Bockelée-Morvan et al. 2008)

21 comètes CN 141 ± 29 (Manfroid et al. 2009)

73P (fragment C) CN 220 ± 40 (Manfroid et al. 2009)

103P/Hartley 2 CN 155 ± 25 (Jehin et al. 2011)

12 comètes NH2 90-190 (Rousselot et al. 2014)

C/2012 S1 (ISON) NH2 139 ± 38 (Shinnaka et al. 2014)

C/2012 F6 NH2 140 ± 30 (Decock et al. 2014)

OCCs (moyenne) CN 144 ± 6.5 (Bockelée-Morvan et al. 2015) JFCs (moyenne) CN 156.8 ± 12.2 (Bockelée-Morvan et al. 2015)

IDPs bulk material hotspots -> 118 bulk = 180-305 (Floss et al. 2006) (Floss et al. 2006) Météorites

Murchison (CM) acides aminés 230-263 (Pizzarello et al. 1994) ; (Engel & Macko 1997) Chondrites les plus primitives

(CI) MOI

bulk -> 195 hotspots -> 65

(Alexander et al. 2007) (Busemann et al. 2006) Table 1-5. Compositions isotopiques de l’azote dans différents réservoirs du système solaire et de la galaxie. D’après (Bockelée-Morvan et al. 2015).

33 De nombreuses études ont montré que la composition isotopique de l’hydrogène varie fortement dans les différents réservoirs de formation des corps du système solaire ((Robert 2001) ; (Robert 2002)). Les rapports D/H dans les réservoirs moléculaires (H2O, HCN, matériaux organiques) sont très différents : on constate un enrichissement parfois extrêmement élevé en D. La Table 1-4 résume les rapports D/H dans différents réservoirs. La Table 1-5 résume les rapports 15N/14N dans différents réservoirs. La plupart des objets du système solaire ont des rapports D/H et 15N/14N élevés par rapport à la valeur de référence de la phase gazeuse de la nébuleuse proto-solaire (PSN).

Le milieu interstellaire :

La valeur de référence dans le milieu interstellaire contemporain est inférieure à celle de la PSN à cause de la combustion continue du deutérium dans les étoiles : (D/H)H₂ = 16 ± 1 × 10-6 (Linsky et al. 1993). La valeur du rapport D/H du "Big Bang" (théorique) varie entre 20-50 × 10-6 (Geiss & Gloeckler 1998).

Les nuages moléculaires :

De très forts enrichissements en deutérium sont observés dans les molécules (HCO+, NH3, HCN, H2CO, …) dans les nuages moléculaires froids (T ~ 10 K). Il est important de noter que les forts D/H mesurés dans ces nuages sont portés par certaines molécules qui ne représentent qu’une très faible proportion en masse de ces nuages.

La nébuleuse proto-solaire (PSN) :

Les observations astronomiques de l’hydrogène galactique suggèrent une valeur moyenne proto-solaire du rapport D/H de ~ 20 × 10-6 (avec une incertitude de ~ 25%). Cette valeur est confirmée par les mesures effectuées dans le vent solaire (21 ± 5) × 10-6 (Geiss & Gloeckler 1998) et dans l’atmosphère jovienne par la sonde Galileo (26 ± 7) × 10-6 (Mahaffy et al. 1998). On adopte la valeur : δD = ‒ 840 ± 30 ‰, i.e. D/H = 21 ± 5 × 10-6 (Geiss & Gloeckler 1998), (Mahaffy et al. 1998), (Griffin et al. 1996). Pour l’azote, on adopte la valeur δ15N = ‒ 350 ± 100 ‰, i.e. 15N/14N = 2.39 ± 0.32 × 10-3 (Owen et al. 2001).

Les planètes :

L’atmosphère d’Uranus et Neptune présente des rapports D/H supérieurs d’un facteur ~ 3 par rapport à la valeur protosolaire (e.g. (Feuchtgruber et al. 1999) ; (McKeegan & Leshin 2001)). Cet enrichissement suggère une contribution de matériaux riches en D des noyaux de ces planètes glacées. Les glaces y constituent une fraction importante de leur masse par opposition aux planètes joviennes où la masse est dominée par leurs enveloppes gazeuses.

Les planètes telluriques présentent des enrichissements variables du rapport D/H par rapport à la valeur proto-solaire. La valeur isotopique de l’hydrogène de la Terre est de 149 ± 3 × 10-6 (Lécuyer et al. 1998). Les océans terrestres sont donc enrichis en D d'un facteur ~ 8 par rapport à la valeur proto-solaire (McKeegan & Leshin 2001). De nombreux auteurs proposent une valeur isotopique de la Lune similaire à celle de la Terre (Saal et al. 2013), (Tartèse et al. 2013). Cependant, les valeurs mesurées dans les échantillons Apollo varient de 24-810 × 10-6 (Liu et al. 2012). L’atmosphère martienne actuelle a une valeur enrichie d’un facteur 6 ± 3 par rapport à celle de la Terre (Owen et al. 1988), ce qui est probablement dû à la photodissociation de l’eau dans l’atmosphère et son échappement.

La composition isotopique de l’azote de l’ammoniac (NH3) de l’atmosphère de Jupiter (Fouchet et al. 2000), (Owen et al. 2001), 14N/15N = 440, est interprétée comme représentative de la composition isotopique de l’azote de la nébuleuse solaire (PSN).

34

Les comètes :

Figure 1-26. Résumé des rapports D/H dans les comètes et autres réservoirs (d’après Bockelée-Morvan et al. (2015)).

Des valeurs élevées du rapport D/H ont été observées dans les comètes. La composition isotopique de l’hydrogène de la vapeur d’eau a été déterminée avec une précision d’environ 10 à 30% dans 4 comètes : 1P/Halley, C/1996 B2 (Hyakutake), C/1995 O1 (Hale-Bopp) et C/1999 S4 (LINEAR) (Eberhardt et al. 1995), (Bockelée-Morvan et al. 1998), (Meier et al. 1998b), (McKeegan & Leshin 2001), (Hutsemékers et al. 2008). La vapeur d’eau dans les 4 comètes a donc un rapport D/H d’environ 3 × 10-4 (δD = 1000‰).

Les mesures récentes du Herschel Space Observatory donnent une valeur de 161 ± 24 × 10-6 pour la comète 103P/Hartley 2 (Hartogh et al. 2011) et une valeur maximale de 200 × 10-6 pour la comète 45P/Honda (Lis et al. 2013), toutes deux des JFC . De même, le D/H de la comète C/2009 P1 (Garradd-OCC) a été déterminé à 206 ± 22 × 10-6 (Bockelée-Morvan et al. 2012). Il semble donc que certaines comètes (notamment les JFCs) aient des valeurs de D/H compatibles avec la valeur SMOW. Récemment, la mesure effectuée par l’atterrisseur Philae de la sonde spatiale Rosetta en novembre 2014 sur la comète de type JFC nommée 67P/Churyumov-Gerasimenko donne une valeur très enrichie en deutérium de 530 ± 70 × 10-6 (Altwegg et al. 2015). Le rapport D/H de la molécule HCN mesuré dans la comète C/1995 O1 (Hale-Bopp) est 2.3 ± 0.8 × 10-3) (Meier et al. 1998b).

Le rapport 15N/14N dans la molécule HCN dans la comète C/1995 O1 (Hale-Bopp) :

15N/14N = 3.1 ± 0.4 × 10-3 (14N/15N = 323 ± 46) (Jewitt et al. 1997) est plus faible que la valeur terrestre. L’azote dans la molécule CN est fortement enrichi en 15N (Arpigny et al. 2003). Dans la molécule CN, les rapports 15N/14N sont, dans la comète Levy : 15N/14N ≤ 5.0 × 10-3 (Wyckoff et al. 2000), et dans les comètes Hale-Bopp et WM1/LINEAR : 15N/14N = 7.1 ± 1.8 × 10-3

(Arpigny et al. 2003).

Les comètes ont préservé certaines des molécules volatiles qui étaient présentes dans le nuage proto-solaire. La composition isotopique de l’azote de la molécule CN a été mesurée dans plusieurs comètes OCCs (14N/15Nmoy = 144 ± 6.5) et JFCs (14N/15Nmoy = 156.8 ± 12.2), révélant un large et constant fractionnement isotopique (130 < 14N/15N < 170) sans qu’une dépendance avec l’origine ou la distance héliocentrique ait été établie.

H2O

H2 H2

CH4

CH4

35

Les chondrites et les IDPs :

Les valeurs de D/H des chondrites carbonées (CCs) sont comprises entre 120 × 10-6 et 275 × 10-6 (Robert 2006), (Alexander et al. 2012). La matière organique des chondrites est très enrichie en D (Robert & Epstein 1982), (Kerridge et al. 1987), (Robert et al. 1987), (Alexander et al. 2010). La matière organique insoluble (IOM) des météorites présente toujours de forts enrichissements en D par rapport aux valeurs terrestres.

La composition isotopique de l’azote dans les acides aminés de la chondrite carbonée Murchison est 230 < 14N/15N < 263. Les chondrites les plus primitives sont caractérisés par des enrichissements en 15N bulk jusqu’à 14N/15N = 195 dans l’IOM (Alexander et al. 2007). Les chondritic clasts dans l’unique météorite Isheyevo sont caractérisés par les enrichissements en 15N bulk les plus élevés à ce jour, avec 14N/15N = 50 (Briani et al. 2009), (Bonal et al. 2010).

Les IDPs montrent des variations du rapport D/H entre ~ 9 × 10-5 et ~ 8 × 10-3 (δD de ~ -423 à 50 000 ‰) (Messenger 2000). De forts enrichissements en 15N ont été révélés dans les IDPs : bulk tel que 180 < 14N/15N < 305 – hotspots jusqu’à 14N/15N = 118 (Aleon et al. 2003), (Floss et al. 2006). Les excès en D et en 15N sont associés aux phases organiques.

Figure 1-27. Distribution des rapports isotopiques en hydrogène et en azote dans les différents réservoirs de formation du système solaire.

36

1.4.2. Les fractionnements de l’hydrogène et de l’azote à basse