• Aucun résultat trouvé

II. Partie 2 : Les salles de consommation à moindre risque dans le monde

II.3. C Résultats [58]

La condition à l’ouverture d’Insite était une évaluation rigoureuse de son fonctionnement et des résultats qu’elle apportait. Cette évaluation a été confiée à des scientifiques du BC

Centre for Excellence in HIV/AIDS et à des employés de la faculté de médecine de

l’Université de la Colombie britannique. La plus longue évaluation a eu lieu de 2003 à 2006 et se dénomme SEOSI (Scientific Evaluation Of Supervised Injecting), elle a suivi environ 1000 usagers.

- Caractéristiques des usagers d’Insite

Lors de SEOSI, de nombreux usagers choisis de façon aléatoire et randomisée ont répondu à une enquête. Cette enquête a notamment permis de mettre en évidence les caractéristiques des clients d’Insite. Le profil type de l’usager est un homme jeune (entre vingt et trente ans) qui s’injecte dans les lieux publics de l’héroïne ou de la cocaïne consomme quotidiennement. Il est sans logement ou en situation instable et a survécu récemment à une overdose suite à sa consommation. L’usager régulier d’Insite s’injecte de grandes quantités de drogues et n’est pas sous traitement substitutif.

Une autre partie de l’enquête portait sur la prévalence des infections virales chez ces usagers. Entre décembre 2003 et juin 2004, sur 691 usagers sélectionnés aléatoirement, 87.6% affirmaient être infectés par le VHC et 17% étaient séropositifs au VIH. Insite est donc un point de contact important pour les séropositifs et leur assure un meilleur suivi de leur état de santé.

- Impact sur la consommation de drogues

Insite étant un site d’accueil à bas-seuil, son but principal n’est pas de diminuer le taux de consommation de drogues mais de permettre une consommation dans les conditions d’hygiène les plus optimales possibles. Cependant l’évolution de la prévalence de la consommation de drogues dans le quartier a été étudiée suite aux craintes d’augmentation exprimées par les habitants du quartier et les élus locaux.

Entre décembre 2003 et mars 2005, 18% des clients d’Insite ont commencé un programme de désintoxication. Ils affirment d’ailleurs que le contact et les entretiens avec un employé d’Insite ont été déterminants dans l’inscription à ce programme. Les services de désintoxication de la ville ont d’ailleurs observé une augmentation de 33% des inscriptions entre l’année précédant l’ouverture d’Insite et l’année suivante. Les usagers d’Insite sont 1,6 fois plus susceptibles d’entamer un traitement à la méthadone que les autres usagers de drogues.

Le taux d’inscription au programme de servage augmentant, il faut maintenant s’assurer que la création de la SCMR ne favorise pas la consommation de drogues chez d’autres usagers. Sur 871 anciens UD interrogés, on ne relève pas d’augmentation significative de la rechute vers l’injection (17% avant l’ouverture de la salle et 20% après). Pendant l’étude SEOSI, il n’a été relevé qu’une seule personne sur 1065 pour qui la première injection avait lieu à Insite. Les usagers étaient des usagers habituels pour qui la consommation datait en moyenne de 16 ans.

- Impact sur la santé

De mars 2004 à août 2005, 336 cas de surdose ont eu lieu dans l’enceinte d’Insite, dont aucun n’a eu d’issue fatale. Il y a eu un traitement à l’oxygène dans 87% des cas. 68% de ces surdoses ont suivis une consommation d’héroïne et 17% une consommation de cocaïne. La majorité des UD ayant vécu une surdose à Insite sont soit des injecteurs peu expérimentés, soit des consommateurs quotidiens d’héroïne.

On estime qu’entre 8 et 51 décès ont pu être évités entre le 01/03/04 et le 01/07/08. Il y a eu à cette période 453 cas assez graves pour appeler le service d’urgence (911) ou injecter de la naloxone.

Les soins infirmiers sont plus faciles à obtenir à Insite grâce aux longues plages horaires d’ouverture et à la grande expérience des infirmières dans les soins aux UD. A Insite, 6 à 10% des UD présentent une infection cutanée alors qu’ils sont 10 à 30% en dehors.

- Impact sur les comportements en dehors du centre

Lors de l’enquête SEOSI, 33,5% des UD interrogés avaient reçu une formation à Insite pour apprendre à trouver une veine et y insérer la seringue proprement.

L’étude VIDUS qui a eu lieu de décembre 2003 à juin 2004 démontre que 70% des clients d’Insite sont moins susceptibles de partager leurs seringues [59].

De plus, une étude menée de juillet 2004 à juin 2005 a montré que les UD réguliers d’Insite : utilisaient 3 fois plus l’eau stérile ; nettoyaient 2,8 fois plus le site d’injection ; jetaient 2 fois plus leurs seringues de façon sécuritaire ; filtraient 2,8 fois plus leur drogue ; étaient 2,8 fois plus à ne pas se presser ; et étaient 2 fois plus nombreux à ne pas partager leurs seringues par rapport au groupe témoin.

Une baisse significative du nombre de seringues abandonnées a été attribuée à Insite. Entre 2003 et 2005, plus de 1000 UD ont été interrogés sur leur utilisation des préservatifs qui sont distribués avec le matériel stérile. Le taux d’utilisation a augmenté de 30% pour les UD ayant un partenaire régulier et de 13% pour les célibataires et ceux faisant des rencontres occasionnelles. Cette mesure limite le risque d’infections sexuellement transmissibles.

- Relation avec les forces de l’ordre

Les services de police de Vancouver ont diffusé les données de criminalité liée à la drogue dans les quartiers de Dowtown Eastside, Victory Square, Chinatown, Gastown et Strathcona. En comparant les données de l’année précédant l’ouverture d’Insite et l’année suivante, on relève : 124 trafics de drogues en 2003 et 116 en 2004 ; 147 vols en 2003 et 180 en 2004.

Pour la police, ces résultats ne montrent pas de hausse significative du crime aux abords suite à l’ouverture d’Insite [58].

Sur 1090 clients d’Insite interrogés, 17% y avaient été aiguillé par les services de police alors qu’on les avait surpris en pleine injection dans des lieux publics. Ce qui prouve une bonne coordination des efforts de maintien de l’ordre et de santé publique.

- Impact économique

Les frais annuels d’exploitation s’élèvent à 3 000 000$ soit 14$ par visite (pour la période d’août 2006 à août 2007). Mais malgré ces frais, comme Insite préviendrait selon un modèle

mathématique 35 nouveaux cas de VIH par an et environ 3 décès par an, elle ferait réaliser une économie de 6 000 000$ par an au Canada [60].

III.

Partie 3 : Les salles de consommation