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I. PARTIE 1 : La prévention des risques en France

I.2. D Résultats

Les impacts positifs en réduction des risques

Depuis 1995, les TSO ont démontré leur intérêt dans la prévention des risques. D’un point de vue sanitaire et médical, la consommation d’héroïne diminue chez les UD, même si environ 10% des usagers traités continuent à en consommer. La diminution de la consommation engendre une diminution des injections à risque, ce qui permet de ralentir la propagation des infections virales, surtout le VIH [26] et de diminuer le nombre d’infections bactériennes contractées au moment de l’injection. La prescription des MSO étant stricte, les usagers sont suivis plus régulièrement par un médecin et leur état de santé s’améliore grâce à ce meilleur accès aux soins. En effet, l’enquête Anisse révèle que chez les usagers traités par BHD le nombre de consultations médicales lors des 6 derniers mois passe de 4.4 à 8.8, les hospitalisations passent de 12% à l’inclusion à 9% au bout de 6 mois de traitement, les abcès de 5.5 à 3.9%, les overdoses de 1.4 à 1% et enfin les tentatives de suicide de 5.8 à

2% [36]. Ces consultations permettent aussi d’instaurer un traitement anti-VIH plus rapidement. En parallèle, le nombre de décès par overdose attribué à l’héroïne a chuté de 84% entre 1995 (année de la commercialisation des MSO) et 2001 [34]. Ce taux se stabilise depuis.

D’un point de vue social, les TSO aident à l’insertion sociale de ces toxicomanes souvent marginalisés. Ils sont mis en relation avec des structures d’aide, mais l’impact sur l’emploi reste un point à améliorer.

Les limites et mésusages

Les mésusages de MSO concernent principalement la BHD. Le comprimé est pilé et dissout avec du jus de citron, puis il est filtré et injecté par voie IV. Cette pratique concernerait 9% des patients sous protocole de TSO d’après l’enquête OPPIDUM (Observation des Produits Psychotropes Illicites ou Détournés de leur Utilisation Médicamenteuse) de 2008 [37]. Ces mésusages doivent être recherchés par les médecins et les pharmaciens au contact du patient car ils peuvent être le signe d’une prise en charge non adaptée : dosage insuffisant et/ou dépendance très sévère nécessitant un traitement par méthadone. Le diagnostic se fait par observation des traces cutanées principalement et doit tenir compte des facteurs de risque comme l’impulsivité ou les antécédents d’injection [38]. Cette pratique se révèle très dangereuse, car elle est responsable de nombreuses infections telles que les abcès cutanés, les endocardites et les infections ostéo-articulaires. Les infections au Staphylococcus aureus (retrouvé sur la peau) et au Candida albicans (retrouvé dans la salive) sont les plus fréquentes et sont le signe du caractère non stérile de l’injection.

De plus, des troubles de la circulation veineuse et lymphatique sont fréquemment retrouvés du fait de la toxicité des excipients présents dans les comprimés de BHD, l’amidon de maïs et le stéarate de magnésium, qui sont insolubles et altèrent les parois des vaisseaux. On peut ainsi observer chez certains injecteurs de BHD un syndrome de Popeye qui correspond à un œdème des mains et des avant-bras. Cet œdème qui était épisodique devient persistant, la peau s’épaissit, ce qui provoque une gêne fonctionnelle, esthétique et psychologique chez le patient [39]. Peu d’UD consultent pour s’en plaindre par culpabilité vis-à-vis de leur toxicomanie. Cet œdème peut être réduit par l’application de plusieurs épaisseurs de bandes peu élastiques pendant 24 et 36 heures puis par le port de dispositif de compression par le patient [40].

Le risque d’overdose est aussi élevé, d’autant plus si l’injection de BHD est associée à la consommation d’alcool ou de psychotropes. En 2012, 60% des morts par injection étaient imputables au moins en partie aux MSO [41].

Depuis le début de la commercialisation des MSO, on retrouve un marché parallèle. La BHD y est retrouvé uniquement en princeps (Subutex®) à un prix oscillant entre 3 à 5 euros du comprimé. La méthadone est diluée dans des seringues de 10ml, mais sa présence sur le marché parallèle est plus anecdotique. Pour alimenter ce marché, des usagers se font prescrire des MSO afin de les revendre. Alertée par ce problème, la CNAMTS (Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés) a élaboré un plan d’action contre ce phénomène. Ainsi, les UD ayant une consommation importante (supérieure à 32 mg journaliers), les UD adeptes du nomadisme médical (plus de 5 médecins ou pharmacies d’officine) ou présentant des co-prescriptions sont convoqués par un médecin conseil. En cas de poursuite de ces activités illégales, les revendeurs (« dealers ») risquent un contentieux [42].

Enfin, on retrouve depuis quelques années une dépendance primaire aux MSO, c’est-à-dire des usagers dépendants aux MSO alors qu’ils n’ont par ailleurs aucune dépendance aux autres opiacés. On parle dans ce cas d’usage non substitutif de BHD ou de méthadone. Dans ce cadre, les MSO leur procurent une sensation de bien-être non retrouvé dans un cadre de substitution, car ils n’ont jamais pris d’héroïne auparavant. L’effet psychotrope est plus marqué mais est associé à des nausées et vomissements. Le premier contact avec le MSO peut avoir lieu dans plusieurs contextes : un contexte festif où la prise est surtout sublinguale, et dans des contextes plus intimes entre amis où la consommation se fera plus rapidement par injection ou inhalation grâce à l’initiation par les autres usagers [43]. Ces usagers de drogues s’approvisionnent soit via le marché noir, soit par des prescriptions en mentant sur leur consommation aux professionnels de santé [44].