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Résultats des estimations et discussion

Le Tableau 5 présente les résultats de l’équation de gravité estimée par un modèle à effets aléatoires (colonnes 1 et 2) et par un modèle de Poisson par Pseudo-Maximum de Vraisemblance (PPML) (colonnes 3 et 4). Ce dernier estimateur a l’avantage de corriger la troncation des données à zéros et le biais potentiel engendré par la log-linéarisation (Silva et Tenereyro, 2006). Les résultats du test d’Hausman a justifié le choix du modèle à effets

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aléatoires contre le modèle à effets fixes (Prob>chi2=0,4107). L’équation de gravité a été estimée avec deux modifications : - les effets fixes des pays exportateurs et des pays importateurs ne sont pas pris en compte (colonnes 1 et 3) ; - nous introduisons des variables muettes qui captent les effets fixes des pays exportateurs et des pays importateurs (colonnes 2 et 4) afin de prendre en compte les termes de résistance multilatérale (Anderson et Van Wincoop, 2003 ; Feenstra, 2004).

L’estimation de l’équation de gravité par le modèle de Poisson par pseudo-maximum de vraisemblance donne les meilleurs résultats. Nous nous concentrons sur la colonne (4) qui prend en compte les effets fixes exportateurs et importateurs dans l’estimation. Les signes des coefficients sont conformes à la littérature et aux résultats des travaux empiriques.

Le PIB du pays importateur a un effet positif significatif sur le flux des importations agricoles intra-régionales. En effet, l’estimation PPML (colonne 4) indique qu’une hausse de 1% du PIB du pays importateur engendre une augmentation de 0,17% du volume des importations. En revanche le PIB des pays exportateurs n’a pas une influence significative sur le niveau des exportations agricoles intra-zone. Ce résultat s’expliquerait par le fait que la spécialisation dans les exportations de produits agricoles est davantage due aux spécificités naturelles et agroclimatiques qu’au niveau de développement des pays.

Les variables muettes « Contigij » et « Comlangij » décrivent respectivement, l’existence d’une frontière commune (pays contigus) et le partage d’une langue par les pays partenaires aux échanges. Les résultats indiquent que les flux des échanges agricoles sont significativement plus intensifs entre les pays qui partagent une frontière ou une langue commune.

Tableau 5. Résultats des estimations du modèle de gravité

(1) (2) (3) (4) Variables Ln(importij) Ln(importij) Ln(import)ij Ln(import)ij

Ln(gdp_d) .75728***

Ln(cost_o) .1753636 -4.353843 -.102754*** .0188913

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(.132016) (4.593548) (.0119774) (.0463458)

de pays Oui-Aléatoire Oui-Aléatoire Oui-Aléatoire Oui-Aléatoire Effets spécifiques pays

Observations 1058 1058 1058 1058

Période 1986-2013 1986-2013 1986-2013 1986-2013

Nombre de paires de pays 126 126 126 126

Note : écarts-types robustes entre parenthèses, *** indique un coefficient significatif à 1% ;** à 5%, *à 10%.

Source : calculs de l’auteur.

Les forces de résistance aux échanges internationaux sont constituées par les coûts de transport associés à la distance géographique séparant les pays coéchangistes et par des coûts au commerce spécifiques à chaque pays et liés à la présence d’obstacles aux échanges au passage des frontières. Les contraintes au commerce liées à la distance ont un signe négatif et significatif au seuil de 1% (colonnes 4). Le coefficient de -0,19 dans l’estimation 4 signifie qu’une augmentation des coûts de transport ou des contraintes au commerce lié à la distance de 1%

réduirait les flux de commerce de 0,19%.

L’un des principaux intérêts de cette régression concerne les coûts liés à la présence d’obstacles non réglementaires spécifiques à chaque pays. Il s’agit précisément des prélèvements et autres tracasseries routières qui entravent les échanges au passage des frontières. Les résultats (colonne 4) indiquent que ces coûts de transaction spécifiques à l’environnement des affaires

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effet, une hausse de ces coûts non réglementaires de 1% induit une baisse des flux de commerce agricole de 0,13 point de pourcentage.

L’autre principal intérêt dans cette équation de gravité est le coefficient de la variable d’accord commercial et d’intégration « UEMOA ». Comparativement à l’accord du marché commun (CEDEAO), l’accord UEMOA indiquant une intégration économique et monétaire totale, permet une augmentation significative (d’environ 19%) du commerce agricole intra-régional dans l’espace UEMOA. Ce résultat souligne l’extrême importance de l’Union économique et monétaire en termes de commerce intra-régional. En effet, ces effets positifs de l’Union sur les flux commerciaux transfrontaliers sont dus à la fois à la stabilité des taux de change nominaux qui tient de l’Union monétaire et à l’intégration commerciale et économique engendrée par le marché commun et l’harmonisation des politiques économiques dans l’espace UEMOA.

6. Conclusion

Cette étude analyse les déterminants des échanges agricoles intra-zone dans l’espace UEMOA.

En effet, ces échanges de biens agricoles jouent un rôle crucial dans la sécurité alimentaire des pays membres de l’Union.

L’étude a d’abord examiné la structure de la production et des échanges agricoles dans la zone.

De cette analyse, il est ressorti une tendance à la spécialisation des pays de l’Union due aux avantages naturels spécifiques à chaque pays. Par ailleurs, nous mettons en évidence une liaison statistique négative entre la dynamique du déficit alimentaire et celle des importations agricoles dans l’Union. Ce résultat suggère que des gains importants en termes de sécurité alimentaire peuvent être réalisés par l’accroissement des flux de commerce agricole dans l’espace UEMOA.

D’une part, l’existence de facteurs de résistance au commerce, en l’occurrence les coûts de commerce liés à la distance séparant les pays et les coûts liés aux obstacles non réglementaires et d’autre part, la tendance à la spécialisation des Etats membres, offrent les conditions théoriques pour que les flux de commerce soient décrits par une équation de type gravitaire.

Ainsi, nous appliquons le modèle de gravité à l’analyse des déterminants des flux commerciaux agricoles dans l’UEMOA.

Les résultats économétriques révèlent que les niveaux de PIB des pays importateurs ont des effets positifs significatifs sur les importations agricoles intra régionaux. Le partage d’une frontière commune, d’une langue ou de liens historiques communs favorise le commerce agricole intra-régional.

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En revanche, les coûts de transport captés par la distance entre les pays coéchangistes et les coûts de transaction liés aux obstacles non réglementaires engendrent une baisse significative des flux commerciaux.

L’étude a montré l’extrême importance de l’Union économique et monétaire en termes de commerce intra-régional. En effet, l’appartenance à l’UEMOA a permis un supplément significatif de commerce de biens agricoles intra-régional relativement à l’espace CEDEAO.

La stabilité des taux de change que confère le partage d’une monnaie unique a ainsi permis aux pays de l’Union d’améliorer le commerce intra-régional en limitant les détournements de commerce.

Toutefois, compte tenu des avancées réglementaires en matière d’élimination des droits de douane et de l’existence d’une monnaie unique, les résultats en termes de flux commerciaux agricoles intra-zone restent encore faibles et entravés par les coûts de transport et des obstacles non réglementaires.

Des efforts supplémentaires vers une intégration plus profonde doivent en effet être accomplis.

Il s’agit d’éliminer de manière effective tous les obstacles visibles à travers de nombreuses restrictions quantitatives et tarifaires sur les importations par une application stricte des textes de l’intégration. Par ailleurs et comme l’indique le rapport 2011 sur le commerce international (OMC, 2011), le faible développement des infrastructures de transport augmente considérablement les coûts logistiques du commerce des biens agricoles (McCord et al., 2005).

Aussi importe-t-il de renforcer et mettre en œuvre les programmes économiques régionaux en faveur des infrastructures afin d’induire une baisse sensible des coûts de transport et de transaction au niveau intra régional ce qui permettrait d’intensifier la dynamique des flux commerciaux agricoles dans l’Union.

Il apparait également important de poursuivre les efforts d’ouverture des marchés nationaux vers les marchés des autres pays de l’UEMOA mais aussi vers les pays de la CEDEAO. Cet élargissement de l’intégration économique régionale doit être renforcée tout en préservant les acquis de l’union douanière la plus ancienne et la plus avancée, celle de l’UEMOA.

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