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Partie 3 Attaque des matrices cimentaires par les acides organiques

2.2 Influence des conditions expérimentales (agitation et mode de maintien du pH)

2.2.2 Résultats et discussion

2.2.2.1 Quantités d’acide utilisées et évolution des pH des solutions

La figure II-5 présente l’évolution du pH en fonction du temps d’immersion pour les trois solutions. 3,9 4,1 4,3 4,5 4,7 4,9 5,1 0 10 20 30 40 50 60 70 Jours pH

Solution agitée renouvelée

Solution non-agitée renouvelée

Solution régulée par ajout d'acide acétique pur

Figure II-5 : Evolution du pH des solutions en fonction du temps

Il y a peu ou pas de différences de pH entre les solutions renouvelées non agitées et agitées (solutions 1 et 3 du tableau II-9). Pour deux échéances seulement, le pH de la solution non- agitée était inférieur à celui de la solution agitée et cette différence était inférieure à 0,1 unité de pH.

En revanche, à partir du 3ème ajustement de pH de la solution non renouvelée (solution 2), le pH de cette solution reste assez nettement inférieur au pH des solutions renouvelées. Cela est lié vraisemblablement aux quantités d’acides qui ont dû être ajoutées à la solution 2 pour ramener le pH à 4.

Le tableau II-10 présente les nombres totaux de moles d’acide acétique utilisées lors du changement des solutions ou lors de l’ajout d’acide pour ramener le pH à 4 pour les 3 conditions opératoires explorées au cours des 2 mois d’expérience.

Tableau II-10 : Nombre total de moles d’acide acétique utilisées pour ramener le pH à 4 au cours des 2 mois d’essais

Conditions opératoires

Solution agitée Renouvelée entièrement

(1)

Solution non agitée Renouvelée entièrement

(2)

Solution non agitée Ajout d’acide concentré

(3) Nombre de

La quantité d’acide utilisée pour les solutions renouvelées régulièrement (3,5 moles) correspond au produit de la concentration de consigne (0,28 M), du volume de la solution (1,25 L) et du nombre de renouvellements (10).

La solution maintenue à un pH de 4 par ajout d’acide concentré a mobilisé plus de deux fois plus d’acide que les solutions renouvelées régulièrement, malgré un pH assez peu supérieur à 4 (figure II-5).

Cela est vraisemblablement lié :

- à la zone tampon de l’acide acétique, d’une part. Comme il a été vu au paragraphe 1.2.3.1, une grande quantité de base doit être ajoutée à la solution d’acide acétique à pH 4 pour atteindre un pH de 4,5. A contrario, une grande quantité d’acide doit être ajoutée à la solution à pH 4,5 pour ramener le pH à 4 ;

- à la loi d’Ostwald sur les réactions acido-basiques, d’autre part. Cette loi dit que plus un acide faible est concentré, moins il est dissocié. Dans les cas de nos solutions fortement concentrées en acides, la diminution de pH (liée à la présence d’ions hydronium en solution) est donc moins marquée puisque l’acide est moins dissocié.

2.2.2.2 Aspect des échantillons

Les échantillons des trois expériences ont le même faciès à savoir une coloration orange avec des fissures à la surface. Cette observation a déjà été effectuée lors d’études précédentes (Pavlik 1995, Bertron et al. 2005b, Oueslati et al. 2012). Cette couche périphérique n’est pas dissoute au cours de l’attaque.

Néanmoins, après plusieurs semaines, l’échantillon plongé dans la solution au pH régulé par ajout d’acide concentré (solution 2) a présenté plus de fissuration que les deux autres, indiquant vraisemblablement une attaque plus sévère que les solutions (1) et (3), probablement liée aux fortes concentrations en acides de la solution 2.

2.2.2.3 Pertes de masse et profondeurs dégradées

Les résultats des mesures des pertes de masse au cours du temps des échantillons de pâte de ciment immergés dans les trois solutions sont présentés dans la figure II-6.

Le tableau II-11 présente les profondeurs dégradées des échantillons exposés aux trois conditions opératoires après 2 mois d’immersion.

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 0 10 20 30 40 50 60 70 80 Temps (jours) Perte relative de m ass e (% )

pH régulé par ajout d'acide acétique pur Solution agitée

Solution non-agitée

Figure II-6 : Perte de masse en fonction du temps d’immersion des pâtes de ciment immergées pour les trois conditions d’essai

Tableau II-11. Profondeurs dégradées des pâtes de ciment immergées dans les trois solutions après 2 mois d’immersion

Conditions opératoires

Solution non agitée Renouvelée entièrement

(1)

Solution non agitée Ajout d’acide concentré

(2) Solution agitée Renouvelée entièrement (3) Profondeurs dégradées (mm) 4,2 8,7 6,1

Les échantillons plongés dans la solution dont le pH a été maintenu par ajout d’acide concentré (solution 2), ont présenté sensiblement plus de dégradation en termes de perte de masse (figure II-6) et de profondeur dégradée (tableau II-11) que ceux plongés dans les solutions renouvelées (1) et (3) (pertes de masse environ deux fois supérieures au bout de 2 mois et profondeurs dégradées supérieures de 43% et 112% respectivement à la solution agitée et à la solution non agitée).

L’agitation a eu également pour effet d’augmenter les vitesses d’altération, mais de manière réduite : pertes de masse supérieures de 25 % et profondeurs dégradées supérieures de 45 % au cas de la solution non agitée au bout de deux mois.

Les grandes quantités d’acide concentré ajoutées pour ramener le pH à 4 ont donc générées une attaque bien plus sévère en termes de vitesse d’altération que celle générée par le renouvellement des solutions. Ce résultat souligne bien que la concentration en acide est plus significative de l’agressivité d’une solution que son pH.

- l’agitation peut favoriser le décrochage d’éléments dégradés de la matrice cimentaire, ce qui pourrait éventuellement expliquer une perte de masse supérieure ;

- l’agitation peut aussi favoriser la pénétration d’agents agressifs dans les éprouvettes. En effet, sans agitation, un gradient de concentration et de pH en solution se crée pouvant amener à s’approcher d’un équilibre local aux abords de la matrice cimentaire et ainsi limiter les vitesses de pénétration des agents agressifs dans la matrice d’une part et de départ des cations cimentaires vers la solution d’autre part. A contrario, l’agitation favorise ainsi les dégradations.

2.2.2.4 Analyses chimiques de la matrice cimentaire

L’échantillon plongé dans la solution agitée a été analysé par microsonde électronique après deux mois d’immersion (figure II-7). Les résultats ont été comparés à ceux obtenus sur des études menées sur l’attaque par acide acétique en milieu non-agité (Chapitre III, figure III- 4a).

L’échantillon plongé dans la solution additionnée d’acide acétique concentré n’a pu être analysé en microsonde car la zone dégradée manquait de cohésion et ne pouvait pas être préparée pour une analyse à la microsonde.

0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 0 1000 2000 3000 4000 5000 6000 7000

Distance à la surface en (micromètres)

% O xydes To tal, CaO , SiO 2 0 5 10 15 20 25 30 35 40 % O xydes Al 2 O3 , SO 3 , Fe 2 O3 % Total % CaO % SiO2 % Al2O3 % Fe2O3 % SO3 Zone 3 Z.2 Z.3

Figure II-7: Profil de composition chimique d’un échantillon de pâte de ciment CEM I immergé dans une solution d’acide acétique agitée pendant 2 mois (analyse par microsonde

électronique)

Le profil de composition chimique (figure II-7) comporte trois zones, depuis l’intérieur de l’échantillon vers la surface en contact avec la solution agressive :

- la zone 1 ou zone saine, de composition chimique identique à celle d’un échantillon témoin ;

- la zone 2, ou zone de transition, légèrement décalcifiée et enrichie en sulfates ;

- la zone 3, largement décalcifiée et ne contenant pas de sulfates, constituée essentiellement de silicium, d’aluminium et de fer.

La profondeur dégradée, correspondant à l’épaisseur de la zone 3 (la zone 2 provoque le virage de la phénolphtaléine), est de 6,1 mm, tel qu’indiqué dans le tableau II-11.

Le profil de composition chimique est similaire à celui observé sans agitation indiquant que les mécanismes de dégradation chimique de l’acide acétique sur la matrice cimentaire de CEM I sont les mêmes avec et sans agitation.