• Aucun résultat trouvé

dif-fraction

1.3.1 L’algorithme de charge-flipping

La seule information à laquelle nous avons accès à partir des clichés de diffraction est celle sur les intensités des réflexions, autrement dit sur le module du facteur de structure. Or, c’est la phase qui contient l’information la plus importante sur les positions atomiques et qui est donc indispensable à la résolution structurale (Figure 1.13). On peut noter qu’à partir d’image haute résolution, il est possible d’obtenir une information sur les phases pouvant être utilisées à des fin de résolution structurale [52]. Au cours de ce travail de

thèse, nous n’avons utilisé que les intensités et nous avons dû utiliser une méthode pour retrouver les «phases perdues». Actuellement, il existe différentes méthodes qui permettent de résoudre le «problème de la phase» en cristallographie. Nous pouvons citer les exemples des méthodes directes, de la méthode de Patterson, ou du recuit simulé. Au cours de ce travail de thèse, c’est l’algorithme itératif dit de «charge flipping» qui a été utilisé. Développé dans les années 2000 [53, 54], cette approche est incluse dans le programme SUPERFLIP de résolution structurale [55]. Le principe est basé sur le fait que dans la maille, le potentiel électrostatique (ou la densité électronique dans le cas de données RX) n’est pas distribué aléatoirement. Les zones de forts potentiels correspondent aux atomes et sont entourées de zones de potentiels plus faibles mais jamais négatifs. C’est une méthode de résolution structurale ab initio, c’est à dire que l’algorithme ne nécessite aucune connaissance préalable du type chimique des atomes, de la composition, ni même de la symétrie du cristal.

Figure 1.13 – A partir de la transformée de Fourier d’une image (le canard ou le chat) les informations sur les amplitudes et les phases sont extraites. En com-binant les phases relatives au chat avec les amplitudes du canard, c’est majori-tairement un chat qui est obtenu par une transformée de Fourier inverse. source http ://www.ysbl.york.ac.uk/˜cowtan/fourier/magic.html

Le fonctionnement de l’algorithme est résumé sur la Figure 1.14. Ce dernier est ini-tialisé en affectant aléatoirement une phase Φ(hkl) à chaque amplitude des facteurs de structure observés |F(hkl)|. A partir de ces facteurs de structure, la carte de potentiels

Figure 1.14 – Schéma de principe de l’algorithme de charge flipping

électrostatiques V(xyz) est calculée par une transformée de Fourier inverse. Un seuil δ est fixé à une valeur très faible et positive. L’algorithme sépare ensuite les potentiels en fonc-tion de leur valeur. Le signe des potentiels dont les valeurs sont supérieures au seuil δ est conservé, le signe de ceux qui obtiennent des valeurs inférieures au seuil (potentiel très faiblement positifs ou négatifs) est inversé. C’est l’étape dite de «flipping». Une nouvelle carte de potentiel modifiée V’(xyz) est donc obtenue. Elle contient une très grande majorité de potentiel positif. Le nouveau facteur de structure temporaire G(hkl) est calculé (mo-dules |G(hkl)| et les phases Φ’(hkl)) à partir de la carte de potentiel modifié. Les facteurs d’accord permettent de comparer les amplitudes calculées |G(hkl)| aux amplitudes obser-vées |F(hkl)|. Le cycle suivant combine les amplitudes observées aux phases calculées par le cycle précédent. Ces cycles sont répétés jusqu’à convergence ou lorsque le nombre de cycles prédéfinis est atteint. Le résultat de l’algorithme est une carte de potentiel finale de symétrie P 1 qui est ensuite interprétée en terme de positions atomiques. La symétrie doit être déduite de la carte de potentiel. Notons également que le programme SUPERFLIP permet l’analyse des phases modulées incommensurables.

Cet algorithme donne des résultats stables et fonctionne même si les données sont de «faible qualité». En effet, si on associe à toutes les fortes intensités d’un jeu de données une valeur de 1 et de 0 pour les intensités faibles, un modèle structural convenable peut être atteint. Cependant, la procédure nécessite une bonne complétude des données et la portion minimale du réseau réciproque nécessaire pour avoir une information complète dépend de la symétrie du cristal.

Simultanément à cette procédure, les éléments de symétrie sont testés et un facteur d’accord leurs sont associés. Ce résultat peut être utilisé comme une aide pour la déter-mination des éléments de symétrie potentiellement présents dans le cristal en combinant ces informations avec celles extraites, par exemple, des sections reconstruites du réseau réciproque.

1.3.2 La diffraction électronique : c’est dynamique !

Les intensités diffractées peuvent être exploitées en considérant l’approximation ciné-matique classiquement utilisée par les programmes de résolution structurale. Cette ap-proximation n’est plus valable dans les deux cas suivant :

— en diffraction des rayons X sur de très larges cristaux parfaits (cristaux monochro-mateurs)

— dans tous les cas de diffraction électronique quelque soit le cristal.

La principale conséquence de la forte interaction des électrons avec le potentiel élec-trostatique du cristal est l’apparition de phénomènes de diffraction multiple. Sur la Fi-gure 1.15, si un faisceau incident de vecteur d’onde k satisfait la condition de Bragg pour une famille de plan {hlk} avec un angle Θ, le faisceau est alors diffracté avec le même angle Θ par ces plans. Ce faisceau diffracté k0 peut lui aussi satisfaire une nouvelle fois la condition de Bragg et être diffracté de nouveau. Ce processus peut avoir lieu une ou plusieurs fois en fonction de l’épaisseur du cristal étudié.

L’effet principal de la diffraction multiple sur l’allure d’un cliché de diffraction est la distribution uniforme des intensités des taches de diffraction car à chaque réflexion est as-sociée, non plus un seul, mais plusieurs événements de diffraction. A partir d’un cliché tel que celui présenté en exemple sur la Figure 1.16 a, l’information est de mauvaise qualité puisque les intensités des réflexions sont moyennées sur tout le diagramme. Dans ce cas, la relation de proportionnalité entre les intensités observées et le carré du module du

fac-Figure 1.15 – Exemple de diffraction multiple illustré dans un cas d’une famille de plans {hlk} satisfaisant la condition de Bragg pour un angle Θ.

teur de structure n’est pas vérifiée. De plus, les intensités observées sur un diagramme de diffraction sont extrêmement sensibles à d’autres facteurs tels que l’orientation ou l’épais-seur du cristal. Une faible désorientation peut être à l’origine d’une variation importante d’intensité. De la même façon, l’épaisseur joue un rôle important dans les phénomènes d’absorption qui influent également sur la valeur des intensités observées. Une autre consé-quence de la diffraction multiple est la présence de réflexions normalement interdites par la symétrie du cristal. Il est alors difficile de déterminer certains éléments de symétrie.

Une conséquence directe de ces effets est une modification importante de l’allure du profil des réflexions. En conditions cinématiques, le maximum d’intensité correspond à la position exacte de la réflexion sur la sphère d’Ewald (Sg = 0) (Figure 1.17). Dans le cas dynamique le profil est plus complexe et, suivant l’épaisseur du cristal, la position pour laquelle Sg est égal à 0 ne correspond pas nécessairement à un maximum d’intensité. Beaucoup d’intensité et donc d’information se situe hors condition de Bragg. Sur un diagramme de diffraction en axe de zone orienté les intensités que l’on souhaite analysées sont faussées et on doit s’attendre à n’intégrer qu’une petite part du profil d’intensité de la réflexion qui ne correspondra pas forcement à son maximum d’intensité. Depuis de nombreuses années, différentes stratégies ont été utilisées pour limiter au mieux les

Figure 1.16 – Diagrammes de diffraction de la direction [111] de l’uvarovite (a) en sélec-tion d’aire sans précession, (b) diagramme PED avec un angle de précession φ= 3. (c) Diagramme cinématique calculé [56].

effets dynamiques et tendre vers des conditions cinématiques dans le but de réaliser une analyse non plus seulement qualitative des données de diffraction électroniques, mais aussi quantitative. La première méthode qui semble la plus évidente est de travailler sur des cristaux très fins pour limiter les possibilités de double diffraction. Le choix d’un cristal fin n’est cependant pas suffisant pour considérer que les conditions sont cinématiques. D’autres approches complémentaires sont basées sur le principe d’éviter l’acquisition sur des axes de zone denses, où la probabilité que les événements de diffraction multiple se produisent est la plus forte. Ce sont les principes des techniques de précession des électrons (PED) [12, 13], de la technique par rotation des électrons (RED) [21], ou de la diffraction en mode tomographie (EDT) [19, 20, 57].

Dans le cadre de cette thèse les effets dynamiques ont été diminués en combinant la technique de diffraction par précession des électrons et une acquisition en mode tomogra-phie (PEDT).