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Dans ce chapitre, nous avons tout d’abord montré la possibilité de former de nouvelles phases dérivées des phases d’Aurivillius pour une composition ABi7Nb5O24 = Bi5Nb3O15

+ABi2Nb2O9 avec A = Ca, Sr, Pb et Ba. Les analyses préliminaires ont montré que ces nouveaux composés présentent des caractéristiques structurales différentes des phases d’Aurivillius classiques en raison de la présence d’une modulation incommensurable (SAED), et d’un empilement en escalier (HREM). A travers l’exemple de A = Ba, nous avons pu déterminer un modèle et définir un groupe de superespace grâce à l’utilisation de données PEDT. Cette série peut être décrite dans une maille monoclinique de paramètre a ∼ b ∼ c ∼ ap2, β ∼ 90, 5 et, un vecteur de modulation q = αa+ γc. A partir de l’analyse des sections du réseau réciproque, nous proposons un SSG X21(α0γ)0 avec X = (0,12,12,12). Ce modèle a permis de modéliser les diagrammes DRXP et DNP et de montrer l’exis-tence d’une séquence d’empilement originale |p=1|p=2|p=2|, avec l’alternance de blocs perovskite d’épaisseurs p de même parité sur une longue période. A partir des résultats des analyses EDS effectuées sur les composés de la série, nous nous sommes rendu compte que la forte dispersion de composition obtenue, en particulier pour A = Ba semble pouvoir être accommodée par la structure incommensurable de ces composés. En effet, malgré les fluctuations de compositions, les observation en diffraction électronique restent proches. Ces résultats nous ont amené à explorer le domaine d’existence de ces phases d’Aurivillius en escalier en focalisant les recherches sur la zone comprise entre ABi2Nb2O9 et Bi2WO3 (Figure 2.29) en passant par Bi5Nb3O15. Nous avons constaté qu’il est possible de former des composés qui présentent les mêmes caractéristiques structurales que ABi7Nb5O24 sur une très large gamme de compositions comprises dans les systèmes Bi-A-Nb-O, notam-ment A = Ba, et, Bi-W-Nb-O. Ainsi, à partir de l’analyse des diagrammes de diffraction

DRXP, et des données PEDT, le modèle établi pour ABi7Nb5O24 a pu être généralisé pour l’ensemble des composés. De cette façon, les unités de base de ces phases, à savoir les blocs fluorine et les blocs perovskite d’épaisseurs p, s’agencent en escaliers pour s’ac-commoder des substitutions sur les sites A ou B de la perovskite ABO3. L’ajustement se fait au niveau de la séquence d’empilement, ainsi que de la longueur des terrasses di-rigées respectivement par les composantes γ et α du vecteur de modulation. Ces deux composantes sont affectées différemment en fonction de la nature du cation utilisé pour la substitution ainsi que, le taux de substitution sur les sites A ou B. La nature du cation A affecte principalement la longueur des couches en agissant sur la composante α. La composante γ est, en première approximation, directement reliée à la variation de x dans la formulation (A, Bi)1−xBxO3−3x. La variation de γ avec la nature de A existe à la marge et semble refléter un degré supplémentaire de flexibilité du système. D’autre part, le taux de substitution sur les sites A influence surtout l’épaisseur des blocs p=2, montrant ainsi que les cations A2+ se placent préférentiellement en substitution des Bi situés entre les couches d’octaèdres des blocs p=2.

En terme de propriétés, les mesures diélectriques effectuées sur les composés BaBi7 Nb5O24 et SrBi7Nb5O24 ont révélé un comportement inhabituel et non retrouvé dans la littérature. Ils présentent tous les deux la signature d’une transition ferroélectrique re-laxeur avec une dépendance de la permittivité diélectrique relative en fréquence et en température, mais également des caractéristiques propres comme l’existence d’une tran-sition structurale inhabituelle pour les relaxeurs à Tm d’un groupe CS dans le domaine paraélectrique X21/a(α0γ)00 vers un groupe non centrosymétrique X21(α0γ)0 dans le domaine FE. En combinant ces résultats avec les analyses structurales, nous pensons que le système tend vers un état FE, mais le désordre très particulier (couches cisaillées et désordre cationique) fait obstacle à un ordre à longue distance des nano domaines polaires et mène à une interaction dipolaire coopérative comme celle observée dans les verres de spin. Bien sûr, une explication plus précise de la nature de la transition observée pourra être mieux évaluée à partir de mesures diélectriques à venir sur différents composés du système Bi5Nb3O15-BaBi7Nb5O24. Au sein de ce système, en allant de Bi5Nb3O15 vers BaBi7Nb5O24, le facteur de tolérance t estimé pour les blocs p=2 tend à augmenter. Au sein de la structure, cela se traduit directement par une diminution de l’amplitude de rotation des octaèdres des blocs perovskite p=1 et p=2 et par l’atténuation progressive

des intensités des réflexions h = 2n + 1 du plan (h0lm) dans le réseau réciproque. Ces variations laissent présager une évolution des propriétés diélectriques au sein des composés du système Bi5Nb3O15-BaBi7Nb5O24, mais également ceux compris entre Bi5Nb3O15 et Bi2WO3. Les mesures à venir pour ces composés pourront sans doute permettre de mieux appréhender la nature de la transition qui a lieue, et de proposer des explications plus robustes sur les mécanismes qui entrent en jeu dans ce type de composés en escalier.

Plus généralement, il résulte de cette étude la découverte d’une nouvelle famille struc-turale présentant déjà un nombre important de membres. Ce résultat n’aurait clairement pas pu être obtenu sans l’apport de la PEDT qui prouve son utilité dans la recherche et la caractérisation de matériaux nouveaux en chimie du solide bien qu’elle soit utilisée dans le cadre de l’approximation cinématique. C’est l’étape d’affinement structural qui montre les limites de cette approximation. La PEDT échoue à atteindre le niveau de fiabilité attendu et que l’on souhaiterai proche de celui obtenu en en DRXP et en DNP. Nous verrons dans le chapitre suivant que cet objectif n’est pas utopique grâce à la prise en compte des effets dynamiques lors de l’affinement.

Application de la théorie dynamique en

cristallographie aux électrons

C

e chapitre est destiné à montrer le gain de fiabilité obtenu en utilisant la théorie dynamique de la diffraction pour affiner un modèle structural à partir des données PEDT. Le principe de cette théorie sera brièvement exposé dans une première partie afin de présenter les différents paramètres de sélection des données et de calcul qui entrent en jeu dans les affinements dynamiques. Dans une seconde partie, la procédure ainsi que les tests visant à valider la méthode et à déterminer les paramètres optimum seront détaillés pour deux composés en poudre présentant tous les deux une structure perovskite ABO3 déformée par rotations des octaèdres BO6. Ces résultats permettront de conclure sur la précision que l’on peut attendre de cette approche.

Dans les chapitres précédents, nous avons vu que l’utilisation de la précession des électrons combinée au mode tomographie (PEDT) est un outil puissant de résolution structurale applicable également à des structures complexes. Grâce à cette technique, l’approximation cinématique devient une hypothèse suffisante pour traiter les intensités diffractées de façon quantitative dans une des méthodes de résolution structurale, tel que l’algorithme dit de « charge flipping » [55, 140]. La structure obtenue constitue un pre-mier modèle qu’il est nécessaire d’affiner pour être validé et éventuellement amélioré, soit à partir du même jeu de données, soit à l’aide d’autres données provenant généralement de la diffraction des rayons X ou des neutrons sur poudre. Dans ce chapitre, c’est l’étape d’affinement qui sera détaillée, car si pendant longtemps il n’a pas été possible d’utiliser la diffraction électronique pour affiner de façon fiable un modèle structural, de récentes avancées permettent désormais d’utiliser les données de PEDT non seulement pour dé-terminer un modèle structural, mais également pour l’affiner avec une bonne précision en utilisant la théorie dynamique de la diffraction [36,45,46]. L’ensemble de ce travail se base sur les travaux récents de Lukas Palatinus et a été réalisé en collaboration avec l’Institut de Physique de Prague.