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5.5 Régulation du cycle cellulaire chez C. albicans

5.5.1 Régulation pour les hyphes

Afin de déterminer si le cycle cellulaire des hyphes est régulé et de quelle façon, on peut à présent tracer pour chaque étape définie le volume final Vf en fonction du volume initial Vi. Pour rappel, les 3 comportements typiques décrits en introduction sont représentés en figure 5.19.

Afin de mieux visualiser ces 3 situations, nous pouvons aussi les représenter schématiquement sur la figure5.20. Les volumes sont indiqués en ordonnées et le temps en abscisse. Pour chaque cas, la croissance de deux cellules, ayant des volumes initiaux ainsi que des vitesses de croissance différents, est illustrée. Nous avons vu que globalement une faible vitesse de croissance était associée à des faibles volumes d’où la représentation ici de la cellule de volume V0

i ayant une pente inférieure à celle de volume Vi.

Pour un sizer (figure5.20a), le volume final est constant quelles que soient les valeurs initiales, ce qui donne donc une pente nulle sur le graphe de Vf en fonction de Vi(figure5.19). Au contraire, cela entraîne une grande variabilité sur la durée de la phase : de petits volumes initiaux doivent croître beaucoup plus longtemps que les grands volumes, d’où la courbe indiquée sur la figure

5.19b.

Figure 5.19 – Illustration des 3 trois comportements décrits en introduction, à savoir le sizer, l’adder et le timer. (a) Volume final Vf en fonction du volume initial Vi. (b) Durée de la phase (Ti→f entre initial et final) en fonction du volume initial Vi.

consiste à ajouter un volume fixe c quelle que soit la taille initiale (figure 5.20b). Cela implique tout de même des durées variables mais dans une moins grande mesure que pour le sizer (figure

5.19b).

Un timer quant à lui, fixe la durée de croissance, ce qui engendre de grandes disparités au niveau des volumes finaux. Sur la figure 5.20c, on voit bien que le volume ajouté est plus grand pour des volumes initiaux plus grands (car leur vitesse de croissance est plus grande). Cela mène donc à une pente supérieure à 1 sur la figure 5.19a.

Ce type de représentation pourra également être utilisé par la suite pour comprendre les graphes de Vf en fonction de Vi obtenus.

Étant donné que dans notre cas, les hyphes sont confinées dans des microcanaux de 2 µm de hauteur et largeur, on considérera de façon simplifié la longueur des articles.

Les données représentées ont été évaluées pour environ 150 cycles sur une quarantaine d’hyphes. Pour l’ensemble des figures de cette partie, les points noirs correspondent aux données brutes, et les données binnées, c’est-à-dire regroupées par classe, sont en rouge.

1ère étape : naissance à apparition du préseptum (L0 à L1)

Pour la première étape, il s’agit donc de tracer L1 en fonction de L0, ce qui est représenté sur la figure5.21. Comme indiqué précédemment, cette étape est quasi-inexistante : on voit que

L1 ' L0.

On peut remarquer que L1 est souvent légèrement inférieure à L0, ce qui signifierait que la naissance (c’est-à-dire la séparation des anneaux de septine en amont) se produirait après la formation du nouveau préseptum. En réalité, la naissance a à priori bien lieu avant ou au même moment que l’apparition du nouveau préseptum et le décalage observé provient des incertitudes de mesures. L1 correspond à la taille de l’article, mesurée à partir de la position des septums. La longueur L0 est quant à elle déterminée à partir de la position de l’apex de l’hyphe à l’instant de séparation complète des anneaux. Or l’intervalle de temps entre les images (généralement égal à 5 minutes) ne permet pas d’obtenir cette longueur avec précision.

Figure 5.20 – Représentation schématique des comportements de sizer, adder et timer. Le volume est tracé en fonction du temps pour deux volumes initiaux différents Vi > Vi’ associés à des vitesses de croissance différentes, le plus grand volume ayant une plus grande vitesse. En fixant un volume final, un volume ajouté ou une durée, ces schémas permettent d’expliquer les pentes obtenus sur la figure 5.19et rendent compte de la variabilité finale en terme de tailles ou de durées.

Notons également que la séparation des deux anneaux de septine n’est pas instantanée, on peut en effet les voir s’écarter sur plusieurs images successives. Ici la séparation complète a été prise en compte, ce qui peut aussi surestimer L0.

2ème étape : apparition du préseptum à division du noyau (L1 à L2)

La longueur à division du noyau L2 en fonction de la longueur à formation du préseptum L1

est représentée sur la figure5.22a. Un ajustement des données binnées donne l’équation suivante :

L2 = 1, 1L1+ 11, c’est-à-dire une pente légèrement supérieure à celle d’un adder.

On peut également tracer la durée de cette phase en fonction de la longueur L1, comme le montre la figure 5.22b.

Cette durée semble varier très peu avec la longueur initiale L1, avec une moyenne égale à 40 minutes. On constate que les valeurs sont plus élevées pour les très faibles longueurs L1, ce qui pourrait suggérer un faible mécanisme de compensation pour réguler la taille finale. Mais le faible nombre de points dans cette zone nous invite tout de même à la prudence sur ce phénomène.

Le fait d’avoir une durée relativement constante pour cette étape est cohérent avec d’autres observations effectuées sur d’autres organismes [212] [223]. En effet, pour S. cerevisiae, cette étape correspond à l’ensemble des phases S/G2/M, et a été caractérisée comme un timer [212]. Même si cette étape n’est pas un pur timer, on peut en définir une durée minimale Tmin. Ce paramètre est important car il correspondrait donc à la durée minimale nécessaire pour effectuer le cycle de réplication et division du noyau. Ainsi, même si la longueur initiale est très grande, la durée de cette étape ne peut pas être drastiquement réduite.

On peut alors reprendre la représentation schématique d’un adder avec deux volumes initiaux différents auquel on ajoute une durée minimale de croissance. Comme on le voit sur la figure5.23, cela a pour conséquence de fixer la durée de la phase pour les grands volumes initiaux/grandes

Figure 5.21 – L1, la longueur de l’article, c’est-à-dire au moment de la formation du préseptum en fonction de L0, la longueur à la naissance de l’article, qui correspond au moment de séparation avec l’article précédent (n=153).

Figure 5.22 – Détermination du mode de régulation de l’étape 2 chez les hyphes. (a) L2, la longueur de l’article au moment de la division du noyau en fonction de L1, la longueur de l’article, c’est-à-dire au moment de la formation du préseptum (n=153). (b) Durée de cette phase (entre

L1 et L2) en fonction de la longueur initiale L1.

vitesses de croissance, tandis que les faibles volumes/faibles vitesses peuvent dépasser cette durée minimale pour des critères de taille.

Cela est cohérent avec le résultat de la figure5.22b, ainsi que celui de la figure5.22a puisque l’ajout de cette durée minimale entraîne de plus grandes variations en taille donc une pente supérieure à 1. On a donc ici une étape ayant un comportement intermédiaire entre un adder et un timer, qui pourrait s’expliquer avec une durée de phase minimale fixée. Toutefois, des faibles modulations de cette durée permettent de réduire les fluctuations en taille résultant en une pente seulement légèrement supérieure à 1. On notera également que ce modèle (en figure

5.23b) semble en accord avec celui de sizer dépendant de la vitesse de croissance mentionné dans la partie précédente : la taille finale dépend de la vitesse de croissance, par l’intermédiaire d’une durée minimale.

Figure 5.23 – Représentation schématique permettant d’expliquer le type de régulation de la phase 2 avec l’ajout d’une durée minimale du cycle.

3ème étape : division du noyau à division cellulaire (L2 à L3)

Enfin on cherche à déterminer le type de régulation de la dernière étape. Pour cela, on trace la longueur à séparation des articles L3 en fonction de la longueur à division du noyau L2, sur la figure 5.24a. L’ajustement des données donne ici une pente égale à 1, ce qui suggère un mécanisme d’adder.

En traçant la durée de cette phase en fonction de la longueur initiale L2, on s’aperçoit qu’il y a cette fois une plus nette variation de cette durée. De faibles volumes initiaux, qui ont une plus faible vitesse, vont croître plus longtemps avant d’effectuer la division cellulaire, et donc d’entamer un nouveau cycle. Cela peut effectivement correspondre à un modèle de régulation en taille comme le adder car cette modulation de la durée de la phase a pour effet de réduire les fluctuations de taille finale, comme indiqué sur la figure 5.19.

Figure 5.24 – Détermination du mode de régulation de l’étape 3 chez les hyphes. L3, la longueur de l’article à division cellulaire, c’est-à-dire au moment de la séparation des anneaux de septine en fonction de L2, la longueur de l’article au moment de la division du noyau (n=111). (b) Durée de cette phase (entre L2 et L3) en fonction de la longueur initiale L2.

Enfin, on peut également tracer L3 en fonction de L0 sur la figure 5.25 afin d’avoir une idée globale du type de régulation sur l’ensemble du cycle. Le faible nombre de valeurs pour les petites longueurs L0 permet difficilement de se fier aux points les plus extrêmes. Cependant, le reste de ce graphe semble indiquer une plus grande pente pour les grands L0 que pour les petits, ce qui suggère une meilleure régulation en taille pour les faibles volumes initiaux.

Figure 5.25 – Détermination du mode de régulation global du cycle cellulaire chez les hyphes.

L3, la longueur de l’article à division cellulaire, c’est-à-dire au moment de la séparation des anneaux de septine en fonction de la longueur L0 à la naissance (n=112).