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La réforme commerciale au Mexique

Dans le document La Colombie dans le Groupe des Trois (Page 33-38)

Chapitre premier: La libéralisation et les tendances commerciales des pays du G-

1.2 La réforme commerciale au Mexique

Le processus d’industrialisation au Mexique avant la crise de la dette était une combinaison de barrières tarifaires et non-tarifaires, qui protégeait l’industrie nationale qui, pendant des décennies, était limitée à un marché intérieur peu développé. En 1956, les importations sou- mises à un permis étaient de 28%. Au cours des décennies suivantes, la protection interne augmenta progressivement jusqu’à 91% en 1976. En 1979, avant la réforme, 60% de l’ensemble des importations était sous le système de licences d’importation (SLI), ce qui permettait une protection de la production intérieure d’environ 90%.

Tableau I

Libéralisation des restrictions commerciales au Mexique (1983-1991)

Années 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 Couverture des licences 100 83 35,1 27,8 26,8 21,2 14,07 13,7 9,1

D'importation-1 Prix de référence 13,4 13,4 25,4 18,6 13,4 0 0 0 0 Droits de douane: Moyenne simple 27 23,3 25,4 22,6 10 9,7 13,1 13,1 13,1 Moyenne pondérée 16,4 8,5 13,3 13,1 5,6 6,2 10,1 10,5 11,2 en fonction des échanges Positions tarifaires 16 10 10 11 5 5 5 5 5 Droits maximaux 100 100 100 100 20 20 20 20 20

1. Pourcentage des importations couvertes. 2. Pourcentage de la production de 1986 couverte. Source: OECD, 1996.

Ce système de licences était formé de dix niveaux de tarifs de protection différents, allant de 23,5% à 100% selon les produits. Cependant, au début des années 1980, presque toutes les importations étaient assujetties à un permis d’importation. Ainsi, le boum pétrolier, pendant la période de l’ISI, a permis aux pouvoirs publics de remettre à plus tard la réforme commerciale, limitant le développement du secteur industriel au Mexique. Cette situation n’évolua pas les années suivantes, car, en 1983, 100% de la production nationale béné-ficiait d’un système de licences d’importation, avec seize tarifs différents, compris entre 27% et 100% (voir: tableau I). La réforme commerciale débuta finalement en 1985, lorsque le gouvernement instaura une réduction graduelle des tarifs douaniers à dix niveaux, avec un niveau maximal des droits de douane de 100%. De plus, les autorités ont prévu l’élimination des prix officiels de référence, impliquant, selon Lustig, le début de la libéralisation du

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commerce, l’élimination des restrictions à la propriété étrangère et l’adaptation de la législation mexicaine aux normes internationales de commerce.

En 1989, le système tarifaire fut modifié, afin d’équilibrer les revenus de l’Etat et de réduire la dispersion18. D’ailleurs, le système des tarifs s’abaissa à cinq positions, avec un niveau maximal de 20%, c'est-à-dire que la protection intérieure tomba à 22.1% et que les prix officiels de référence furent complètement éliminés.

Le changement soudain des tarifs dans le système, qui passa de 100% en 1983 à 13,7% en 1990, engendra la chute du protectionnisme de la production nationale. Mais, dans certains secteurs comme par exemple le gaz naturel (100%), les produits dérivés du pétrole (86.4%) et les transports et équipement (41.0%), les tarifs douaniers furent augmentés.

L’importation de certains produits fut aussi libéralisée grâce à la suppression du régime de licences d’importation, notamment le matériel informatique (1990), le papier journal (1990), quelques graisses et huiles animales et végétales (1990) et une grande proportion des pro- duits pharmaceutiques (1991). En 1990, le programme d’ouverture commerciale touchait le secteur de l’automobile et les industries d’assemblage de la chaîne de production. C’est ainsi que le Mexique commença alors à importer des automobiles neuves, des autobus et des semi-remorques.

Par la suite, les restrictions aux exportations furent également éliminées. En 1991, les permis à l’exportation ne pouvaient être requis que dans les cas de marchandises et de biens sous contrôle des prix, en l’occurrence le café, le sucre, l’acier et les textiles, bien que ces produits ne représentaient que 24% de l’exportation non-pétrolière du Mexique. Alors que la diversification des exportations industrielles était devenue l’objectif primordial dans la nouvelle politique commerciale, le Mexique décida de fortifier sa politique extérieure de commerce sur la base de cinq stratégies:

I La politique commerciale multilatérale du Mexique

L’accession à l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), en 1986, donna une singulière impulsion à ce processus, en particulier en ce qui concerne l’abolition des licences d’importation. De plus, la moyenne des droits de douane fut ramenée à 13.1% en 1991. Donc, avec l’accession au GATT, le Mexique a consolidé son projet de libéralisation des échanges. Dès lors, le Mexique poursuivit sa participation aux travaux de cet organisme

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En conséquence, la protection nominale et effective fut réduite et la structure de la protection est devenue plus transparente et plus stable. (GATT, 1993).

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multilatéral, spécialement aux négociations de l’Uruguay Round, dans le but d’améliorer les flux du commerce international et de renforcer le système du commerce multilatéral19

En tant que membre du GATT (aujourd’hui de l’Organisation mondiale de Commerce, OMC), le Mexique participa activement au Cycle de l’Uruguay, avec l’ensemble des pays en voie de développement. La rapide reconversion commerciale de l’économie mexicaine et l'assouplissement du régime des investissements étrangers ont positivement sensibilisé les négociations face aux Etats-Unis, principalement pour les services, la propriété intellectuelle et les investissements20.

Cette sensibilisation des politiques favorisa la négociation d’un accord de libre-échange entre le Mexique et les Etats-Unis. Un autre facteur important à signaler fut la rupture de la position défensive dans la politique agricole, obtenue en favorisant l’élimination des subventions pour les produits agricoles21.

II La politique commerciale conjoncturelle

En 1986, les droits antidumping et les droits compensateurs ont été officiellement établis avec l’adoption, par le Mexique, d’un régime commercial libéral. D’ailleurs, le Mexique a aussi établi un système de sauvegarde, ce qui n’était pas une pratique courante dans les pays en voie de développement, car les dispositions concernant les droits antidumping autorisaient les producteurs mexicains à se plaindre lorsqu’ils considéraient que le dumping constituait un obstacle au libre déroulement de l’industrie nationale.

La clause de sauvegarde fut établie dans le cadre des réformes commerciales et législatives au Mexique, associées à la négociation de l’ALENA. En effet, les mesures de sauvegarde appliquées par le Mexique sont similaires à celles des Etats-Unis et du Canada. La loi mexicaine de 1993 subordonna l’application de ces mesures à l’élaboration et à la mise en œuvre d’un programme d’ajustement sectoriel. Par rapport à la politique sur la concurrence, l’application de procédures telles que les droits antidumping et les mesures de sauvegarde a assuré une participation plus active dans les négociations entre les parties. De même, la loi sur le commerce extérieur habilita le SECOFI à informer le gouvernement au cas où le droit de la concurrence aurait pu être violé.

19

Voir: GATT, «Trade Policy Review Mexico», 1993, page 115.

20

Voir: Bosworth, Collins, Lustig, «Coming Together, Mexico-U.S Relations», 1997, page 27.

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Lors des négociations dans le Cycle d’Uruguay, le Mexique a ramené de 55,2 à 40,3% la moyenne pondérée des taux consolidés applicables à l’ensemble des échanges de marchandises. Par rapport à l’agriculture, les obstacles non tarifaires tels que les licences et les restrictions quantitatives ont été convertis, en 1994, en équivalents tarifaires, afin de respecter les engagements souscrits par le Mexique dans le cadre du Cycle d’Uruguay.

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III La politique de soutien aux exportations

La réduction de l’intervention de l’Etat dans l’économie et l’amélioration des échanges extérieurs furent des éléments clés de la politique économique gouvernementale. Néanmoins, le gouvernement décida de soutenir certaines activités, spécialement les exportations, en créant deux programmes destinés à aider les entreprises qui travaillaient pour l’exportation. De même, le rôle de la Banque de commerce extérieur fut renforcé, «afin de favoriser les investissements dans le secteur de l’exportation, de moderniser la production et d’encourager la diversification de la production. L’ensemble du programme des maquiladoras22 fit également partie intégrante de l’effort pour renforcer le secteur du commerce extérieur23».

IV La transformation du régime aux investissements étrangers

Les montants des IDEs au Mexique n’étaient pas suffisamment importants dans les années 1980, dû principalement aux restrictions imposées par le gouvernement, qui tenait à préserver une certaine souveraineté économique et ne réservait pas un très bon accueil aux investissements extérieurs24. Après la crise de la dette, le Mexique pensait qu’une injection des IDEs pourrait stimuler la concurrence et l’accès à la technologie. En fin de compte, le régime fut transformé avec l’incorporation d’une classification des investissements qui pourraient entrer dans le pays, délimitant les secteurs d’influence25. Ces limitations du régime des investissements étrangers furent considérées comme «ad-mixture of nationalism and

deliberate industrial policy26».

En 1984, la politique changea grâce à la libéralisation des échanges. De fait, plusieurs mesures ont été adoptées dans le sens de l’assouplissement des restrictions à l’IDE. Par exemple, en 1993, une loi visant la réduction des droits de propriété pour les investissements étrangers fut adoptée, avec une complète libéralisation des droits de propriété et l’élimination de l’organisme d’approbation pour les IDEs.

Finalement, la même année, le gouvernement réduisit les limitations dans les classifications d’inversion, notamment dans le secteur de la pétrochimie, ainsi que dans le secteur financier,

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Les Maquilas sont des usines de montage qui fonctionnent sur le territoire mexicain en bénéficiant d’un régime spécial en matière de douane et d’investissements étrangers. Le système des maquiladoras est fondé sur l’importation temporaire en franchise d’éléments utilisés pour la fabrication d’un bien destiné à être exporté ultérieurement. Voir: Richard, 1995, cité Etienne, 1998.

23

Voir: OCDE, «Politiques du libre-échange au Mexique», 1996.

24

En 1989, le total des investissements étrangers au Mexique atteignait seulement 26,6 milliards US$, chiffre peu notable par rapport aux IDEs reçus aux Etats-Unis dans la même année. Voir: USITC, Review of Trade and industrialization, page 39.

25

Voir: Foreign Investment Law, 1973.

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permettant aux investisseurs étrangers l’achat des banques et des corporations jusqu’à 30% de leur valeur.

V La négociation des accords de commerce régionaux

L’accord commercial avec les Etats-Unis et le Canada constituait, pour divers motifs, l’un des éléments les plus importants de la nouvelle politique mexicaine. «Le gouvernement était convaincu que la future croissance de l’économie mexicaine dépendait de l’accès aux marchés extérieurs et de l'investissement étranger27». Les Etats-Unis étaient, depuis toujours, le principal partenaire commercial du Mexique, par leur proximité et par l’ampleur du marché. En 1989, les chiffres commerciaux entre les deux pays étaient de 52 billions de dollars28, c’est-à-dire que 70% des exportations du Mexique étaient dirigées vers les Etats-Unis, et un pourcentage plus ou moins identique de ses importations en provenait29.

D’autre part, en 1989, le commerce bilatéral entre le Mexique et le Canada ne représentait pas un grand volume, n’atteignant que 2,3 milliards de dollars. Par la consolidation du programme de libéralisation et la modernisation économique, le Mexique trouva, au sein de l’ALENA, l’occasion d’obtenir un effet positif dans les investissements extérieurs, ainsi que l’accès à une société de consommation plus vaste. La recherche d’un accord de libre-échange avec les Etats-Unis et le Canada fut le complément naturel pour la politique commerciale mexicaine. Négocié durant deux ans, l’accord fut signé en décembre 1992, et finalement ratifié en 1993 par les corps législatifs des trois pays. Il est entré en vigueur en janvier 1994. Donc, «l’ALENA reste très important parce qu’il est un symbole politique, symbole de la pérennité des réformes mexicaines et de la volonté des Etats-Unis de rester ouverts aux produits mexicains30».

Après la ratification de l’ALENA, le Mexique continua son chemin vers la recherche d’accords de libre-échange au niveau régional avec la plupart des pays de l’Amérique latine, notamment la Colombie et le Venezuela, (aujourd’hui membres, avec le Mexique, du G-3), ainsi qu’avec la Bolivie, le Costa Rica, l’Equateur et le groupe de libre-échange du MERCOSUR.

Bien que la libéralisation du commerce ait été l’objectif principal de la politique mexicaine, d’autres politiques complémentaires ont accompagné ce processus. L’élimination des restrictions aux investissements directs étrangers (IDEs) fut la première mesure prise afin

27

Voir: OECD, «Politiques de libre-échange au Mexique», 1995c, page 14.

28

Voir: Cohen, «United States –Mexico Trade Relations», Inter-American Dialogue, 1990, page 3.

29

Voir: Lustig, «Mexico The Remarking of an Economy»,1998, page 13.

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d’améliorer la concurrence effective de biens et services dans le pays. En second lieu, l’introduction d’une politique de privatisation du secteur public fut un complément très attirant, ayant pour effet l’élargissement de la place du secteur privé dans l’économie et l’établissement d’une procédure pour l’élimination des monopoles et des oligopoles dans plusieurs secteurs31. Par ailleurs, d’autres réformes furent appliquées: les principales furent la libéralisation des taux d'intérêt, l'élimination des contrôles directs sur le crédit et la réduction des conditions élevées dans les réserves pour les banques commerciales. Des restrictions quantitatives à l'attribution de crédits furent également levées, et plusieurs instruments financiers mis en place. La mesure la plus tardive fut le renforcement du secteur financier, avec l'introduction d'un schéma de rapatriement du capital. Celui-ci encourageait le rapatriement des capitaux mexicains dans les banques nationales, n’imposant qu’un taux fiscal de 1%. Finalement, une étape importante vers l'accomplissement du processus de libéralisation financier a été réalisée entre 1991 et 1993, lorsque 18 banques furent privatisées32.

1.3

Les conséquences et les effets de la libéralisation commerciale

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