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Réciproquement, tout A-module projectif de type fini est isomorphe au module des sections lisses d’un fibré vectoriel sur V

Quelques remarques d’ordre épistémologique

2. Réciproquement, tout A-module projectif de type fini est isomorphe au module des sections lisses d’un fibré vectoriel sur V

Évoquons la partie réciproque du théorème : si l’on se donne un A-module projectif de type fini M , on peut construire un fibré vectoriel W au dessus de V dont le module des sections est isomorphe à M . On procède comme suit. On considère une matrice de projection F = (fij) ∈ Mn(A) telle

que Im F ' M et l’on pose

W = { (x, h) ∈ V × Rn| h ∈ Im F |x} ,

où F |xdésigne la matrice (fij(x)). La lectrice pourra montrer alors que Im F

s’identifie au module des sections Γ(W ) : à l’élément s ∈ Im F on fait correspondre la sections définie par x 7→e es(x) = (x, s|x). Par ailleurs, dans

le cas où F est la matrice de projection standard

Ik,n=

Ik 0

0 0r

(k + r = n),

il est clair que W est trivial : il est égal à V × Rk× {0}r. Enfin, un module projectif de type fini devient libre après localisation en des éléments comaximaux convenables (théorème V -6.1, point 3, ou théorème X -1.7, forme matricielle plus précise). En conséquence, le fibré W défini ci-dessus est localement trivial : c’est bien un fibré vectoriel.

Vecteurs tangents et dérivations

Un exemple décisif de fibré vectoriel est le fibré tangent, dont les éléments sont les couples (p, v), où p ∈ V et v est un vecteur tangent au point p. Lorsque la variété V est une variété plongée dans un espace Rn, un vecteur

tangent v au point p peut être identifié à la dérivation au point p dans la direction de v.

Lorsque la variété V n’est pas une variété plongée dans un espace Rn,

un vecteur tangent v peut être défini comme une dérivation au point p, c’est-à-dire comme une forme R-linéaire v : A → R qui vérifie la règle de Leibniz

v(f g) = f (p)v(g) + g(p)v(f ). (1) On vérifie par quelques calculs que les vecteurs tangents à V forment bien un fibré vectoriel TV au dessus de V .

À un fibré vectoriel π : W → V, est associé le A-module Γ(W ) formé par les sections lisses du fibré. Dans le cas du fibré tangent, Γ(TV) n’est rien

d’autre que le A-module des champs de vecteurs (lisses) usuels.

De même qu’un vecteur tangent au point p est identifié à une dérivation au point p, qui peut être définie en termes algébriques (équation (1)), de même, un champ (lisse) de vecteurs tangents peut être identifé à un élément du A-module des dérivations de la R-algèbre A, défini comme suit. Une dérivation d’une R-algèbre B dans un B-module M est une appli- cation R-linéaire v : B → M qui vérifie la règle de Leibniz

v(f g) = f v(g) + g v(f ). (2) Le B-module des dérivations de B dans M est noté DerR(B, M ).

Une dérivation d’une R-algèbre Bhhtout courtiiest une dérivation à valeurs

dans B. Lorsque le contexte est clair nous noterons Der(B) comme une abréviation pour DerR(B, B).

Les dérivations au point p sont donc les éléments de DerR(A, Rp) où Rp= R

muni de la structure de A-module donnée par l’homomorphisme f 7→ f (p) de A dans R. Ainsi DerR(A, Rp) est une version algébrique abstraite de

l’espace tangent au point p à la variété V .

Une variété lisse est dite parallélisable si elle possède un champ (lisse) de bases (n sections lisses du fibré tangent qui en tout point donnent une base). Cela revient à dire que le fibré tangent est trivial, ou encore que le A-module des sections de ce fibré, le module Der(A) des dérivations de A, est libre.

Différentielles et fibré cotangent

Le fibré dual du fibré tangent, appelé fibré cotangent, admet pour sections les formes différentielles sur la variété V .

Le A-module correspondant, appelé module des différentielles, peut être défini par générateurs et relations de la manière suivante.

1. Fibrés vectoriels sur une variété compacte lisse 7

De manière générale, si (fi)i∈I est une famille d’éléments qui engendre

une R-algèbre B, le B-module des différentielles (de Kähler) de B, no- té ΩB/R, est engendré par les dfi (purement formels) soumis aux rela-

tions hhdérivéesii des relations qui lient les fi : si P ∈ R[z1, . . . , zn] et

si P (fi1, . . . , fin) = 0, la relation dérivée est

Xn

k=1

∂P ∂zk

(fi1, . . . , fin)dfik = 0.

On dispose en outre de l’application canonique d : B → ΩB/R, définie par df = la classe de f (si f =P αifi, avec αi ∈ R, df =P αidfi), qui

est une dérivation1.

On montre alors que, pour toute R-algèbre B, le B-module des dérivations de B est le dual du B-module des différentielles de Kähler.

Dans le cas où le B-module des différentielles de B est projectif de type fini (par exemple si B = A), alors il est lui-même le dual du B-module des dérivations de B.

Cas des variétés compactes algébriques lisses

Dans le cas d’une variété algébrique réelle compacte lisse V , l’algèbre A des fonctions lisses sur V admet comme sous-algèbre celle des fonctions polynomiales, notée R[V ].

Les modules des champs de vecteurs et des formes différentielles peuvent être définis comme ci-dessus au niveau de l’algèbre R[V ].

Tout module projectif de type fini M sur R[V ] correspond à un fibré vec- toriel W → V que l’on qualifie de fortement algébrique. Les sections lisses de ce fibré vectoriel forment un A-module qui est (isomorphe au) le module obtenu à partir de M en étendant les scalaires à A.

Alors, le fait que la variété est parallélisable peut être testé au niveau le plus élémentaire, celui du module M .

En effet l’affirmation concernant le cas lissehhle A-module des sections lisses

de W est libreiiéquivaut à l’affirmation correspondante de même nature

pour le cas algébriquehhle R[V ]-module M est libreii. Esquisse d’une preuve :

le théorème d’approximation de Weierstrass permet d’approcher une section lisse par une section polynomiale et un champ de bases lisse (n sections lisses du fibré qui en tout point donnent une base), par un champ de bases polynomial.

Examinons maintenant le cas des surfaces compactes lisses. Une telle surface est parallélisable si, et seulement si, elle est orientable et possède un champ de vecteurs partout non nul. De manière imagée cette deuxième condition se lit : la surface peut être peignée. Les courbes intégrales du champ de

vecteurs forment alors une belle famille de courbes, c’est-à-dire une famille de courbes localement rectifiable.

Donc pour une surface algébrique compacte V lisse orientable les propriétés suivantes sont équivalentes.

1. Il existe un champ de vecteurs partout non nul. 2. Il existe une belle famille de courbes.

3. La variété est parallélisable.

4. Le module des différentielles de Kähler de R[V ] est libre.

Comme expliqué précédemment, la dernière condition relève de l’algèbre pure (voir aussi la section 2).

D’où la possibilité d’une preuvehhalgébriqueiidu fait que la sphère ne peut

pas être peignée.

Il semble qu’une telle preuve ne soit pas encore disponible sur le marché.

Module des différentielles et module des dérivations d’une algè- bre de présentation finie

Soit R un anneau commutatif. Pour une R-algèbre de présentation finie

A = R[X1, . . . , Xn]/hf1, . . . , fsi = R[x1, . . . , xn],

les définitions du module des dérivations et du module des différentielles s’actualisent comme suit.

On note π : R[X1, . . . , Xn] → A, g(X) 7→ g(x) la projection canonique.

On considère la matrice jacobienne du système f1, . . . , fs,

J (X) =    ∂f1 ∂X1(X) · · · ∂f1 ∂Xn(X) .. . ... ∂fs ∂X1(X) · · · ∂fs ∂Xn(X)   .

La matrice J (x) définit une application A-linéaire An→ As. Alors, on a

deux isomorphismes naturels ΩA/R ' CokertJ (x) et Der(A) ' Ker J (x).

Le premier isomorphisme résulte de la définition du module des différentielles. Le deuxième peut s’expliciter comme suit : si u = (u1, . . . , un) ∈ Ker J (x),

on lui associehhla dérivation partielle dans la direction du vecteur tangent uii

(en fait c’est plutôt un champ de vecteurs) définie par

δu: A → A, π(g) 7→ Xn i=1ui ∂g ∂Xi (x).

2. Formes différentielles sur une variété affine lisse 9

Exercice 1.Démontrer l’affirmation qui vient d’être faite concernant le