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Anneaux et modules cohérents fortement discrets

Un anneau (resp. un module) est dit fortement discret lorsque les idéaux de type fini (resp. les sous-modules de type fini) sont détachables, c’est-à-dire encore si les quotients par les idéaux de type fini (resp. par les sous-modules de type fini) sont discrets.

Cela revient à dire que l’on a un test pour décider si une équation liné- aire LX = c a ou non une solution, et en calculer une en cas de réponse positive.

correctii, il y a le fait que le programme doit s’arrêter après un nombre fini d’étapes. Ceci cache unhhil existeii, qui en mathématiques constructives renvoie de manière irréductible à la notion de construction. Voir à ce sujet la section -4 de l’Annexe.

7. La notion générale de corps en mathématiques constructives sera définie page 494. Nous verrons que si un corps est un ensemble discret c’est un corps discret.

4. Systèmes fondamentaux d’idempotents orthogonaux 33

Un résultat essentiel pour l’algèbre constructive et le calcul formel affirme que Z[X1, . . . , Xn] est un anneau cohérent fortement discret.

Plus généralement, on a la version constructive suivante du théorème de Hilbert (voir [MRR, Adams & Loustaunau]).

Si A est un anneau noethérien cohérent fortement discret, il en va de même pour toute A-algèbre de présentation finie.

La proposition suivante se démontre comme la proposition 3.1.

3.7. Proposition. Sur un module cohérent fortement discret M , tout sys- tème linéaire BX = C (B ∈ Mk×n, C ∈ Mk×1, X ∈ An×1) peut être testé.

En cas de réponse positive, une solution particulière X0 peut être calculée.

En outre les solutions X sont tous les éléments de X0+ N où N est un

sous-A-module de type fini de An×1.

4. Systèmes fondamentaux d’idempotents

orthogonaux

Un élément e d’un anneau est dit idempotent si e2= e. Dans ce cas, 1 − e est aussi un idempotent, appelé l’idempotent complémentaire de e, ou encore le complément de e. Pour deux idempotents e1et e2, on a

he1i ∩ he2i = he1e2i , he1i + he2i = he1, e2i = he1+ e2− e1e2i ,

avec e1e2 et e1+ e2− e1e2 idempotents. Deux idempotents e1 et e2 sont

dits orthogonaux lorsque e1e2= 0. On a alors he1i + he2i = he1+ e2i.

Un anneau est dit connexe si tout idempotent est égal à 0 ou 1.

Dans la suite nous utilisons implicitement le fait évident suivant : pour un idempotent e et un élément x, e divise x si, et seulement si, x = ex. La présence d’un idempotent 6= 0, 1 signifie que l’anneau A est isomorphe à un produit de deux anneaux A1 et A2, et que tout calcul dans A peut

être scindé en deux calculshhplus simplesiidans A1et A2. On décrit cette

situation comme suit.

4.1. Fait. Pour tout isomorphisme λ : A → A1× A2, il existe un unique

élément e ∈ A satisfaisant les propriétés suivantes.

1. L’élément e est idempotent (on note son complément f = 1 − e). 2. L’homomorphisme A → A1 identifie A1 avec A/hei et avec A[1/f ].

3. L’homomorphisme A → A2 identifie A2 avec A/hf i et avec A[1/e].

Réciproquement, si e est un idempotent et f son complément, l’homomor- phisme canonique A → A/hei × A/hf i est un isomorphisme.

J

L’élément e est défini par λ(e) = (0, 1). 

4.2. Fait. Soit e un idempotent de A, f = 1 − e et M un A-module.

1. Les monoïdes eN= {1, e} et 1 + f A ont le même saturé.

2. En tant que A-module, A est somme directe de hei = eA et hf i = f A. L’idéal eA est un anneau si l’on prend e comme élément neutre pour la multiplication. On a alors trois anneaux isomorphes

A[1/e] = (1 + f A)−1A ' A/hf i ' eA.

Ces isomorphismes proviennent des trois applications canoniques

A → A[1/e] : x 7→ x/1, A → A/hf i : x 7→ x mod hf i ,

A → eA : x 7→ e x,

qui sont surjectives et ont même noyau.

3. On a trois A-modules isomorphes M [1/e] ' M/f M ' eM. Ces isomorphismes proviennent des trois applications canoniques

M → M [1/e] : x 7→ x/1, M → M/f M : x 7→ x mod hf i , M → eM : x 7→ e x,

qui sont surjectives et ont même noyau.

Par ailleurs, il faut prendre garde que l’idéal eA, qui est un anneau avec e pour élément neutre, n’est pas un sous-anneau de A (sauf si e = 1). Dans un anneau A un système fondamental d’idempotents orthogonaux est une liste (e1, . . . , en) d’éléments de A qui satisfait les égalités suivantes :

eiej= 0 pour i 6= j, et P n

i=1 ei= 1.

Ceci implique que les ei sont idempotents. Nous ne réclamons pas qu’ils

soient tous non nuls8.

4.3. Théorème. (Système fondamental d’idempotents orthogonaux)

Soit (e1, . . . , en) un système fondamental d’idempotents orthogonaux d’un

anneau A, et M un A-module. Notons Ai= A/h1 − eii ' A[1/ei]. Alors :

A ' A1× · · · × An,

M = e1M ⊕ · · · ⊕ enM.

Notez que e1M est un A-module et un A1-module, mais que ce n’est pas

un A2-module (sauf s’il est nul).

Le lemme suivant donne une réciproque du théorème 4.3

8. C’est beaucoup plus confortable pour obtenir des énoncés uniformes. En outre c’est pratiquement indispensable lorsque l’on ne sait pas tester l’égalité à zéro des idempotents dans l’anneau avec lequel on travaille.

4. Systèmes fondamentaux d’idempotents orthogonaux 35

4.4. Lemme. Soient (ai)i∈J1..nK des idéaux de A. On a A =

L

i∈J1..nK

ai

si, et seulement si, il existe un système fondamental d’idempotents ortho- gonaux (ei)i∈J1..nK tel que ai= heii pour i ∈J1..nK. Dans ce cas le système

fondamental d’idempotents orthogonaux est déterminé de manière unique.

J

Supposons A = L

i∈J1..nKai. On a des ei ∈ ai tels que Piei = 1, et

comme eiej∈ ai∩ aj= {0} pour i 6= j, on obtient bien un système fonda-

mental d’idempotents orthogonaux.

En outre si x ∈ aj, on a x = xPiei= xej et donc aj= heji.

L’implication réciproque est immédiate. L’unicité résulte de celle d’une

écriture d’un élément dans une somme directe. 

Voici maintenant deux lemmes très utiles.

4.5. Lemme. (Lemme de l’idéal engendré par un idempotent)

Un idéal a est engendré par un idempotent si, et seulement si,

a + Ann a = h1i .

J

Tout d’abord, si e est idempotent, on a Ann hei = h1 − ei. Pour l’im- plication réciproque, soit e ∈ a tel que 1 − e ∈ Ann a. Alors e(1 − e) = 0, donc e est idempotent. Et pour tout y ∈ a, y = ye, donc a ⊆ hei . 

4.6. Lemme. (Lemme de l’idéal de type fini idempotent)

Si a est un idéal de type fini idempotent (i.e., a = a2) dans A, alors a = hei

avec e2= e entièrement déterminé par a.

J

On utilise le truc du déterminant. On considère un système géné- rateur (a1, . . . aq) de a et le vecteur colonne a = t[ a1 · · · aq].

Puisque aj ∈ a2 pour j ∈ J1..qK, il existe C ∈ Mq(a) telle que a = C a, donc (Iq− C) a = 0 et det(Iq− C) a = 0. Or det(Iq− C) = 1 − e avec e ∈ a.

Donc (1 − e)a = 0, et l’on applique le lemme 4.5.

Enfin, l’unicité de e est déjà dans le lemme 4.4.  Rappelons enfin le théorème chinois, outil très efficace, qui cache un sys- tème fondamental d’idempotents orthogonaux. Des idéaux b1, . . ., b` d’un

anneau A sont dit comaximaux lorsque b1+ · · · + b`= h1i.

4.7. Théorème des restes chinois.

Soient dans A des idéaux (ai)i∈J1..nK deux à deux comaximaux et a =

T

iai.

1. On a l’égalité a =Q

iai,

2. l’application canonique A/a →Q

iA/ai est un isomorphisme,

3. il existe e1, . . ., en dans A tels que ai= a + h1 − eii et les πA,a(ei)

forment un système fondamental d’idempotents orthogonaux de A/a.

4.8. Lemme. (Lemme des noyaux)

Soit P = P1· · · P` ∈ A[X] et une application A-linéaire ϕ : M → M

vérifiant P (ϕ) = 0. On suppose que les Pi sont deux à deux comaximaux.

Notons Ki= Ker Pi(ϕ), Qi=Qj6=iPj. Alors on a :

Ki= Im Qi(ϕ), M = ` M j=1 Kj et Im Pi(ϕ) = Ker Qi(ϕ) = M j6=i Ki.

J

On considère l’anneau B = A[X]/hP i. Le module M peut être vu comme un B-module pour la loi (Q, y) 7→ Q · y = Q(ϕ)(y). On applique alors le théorème des restes chinois et le théorème de structure 4.3.

Cette démonstration résume le calcul plus classique suivant. À partir des égalités UijPi+ UjiPj = 1, on obtient des égalités UiPi+ ViQi = 1 ainsi

qu’une égalitéP

iWiQi= 1. Notons pi= Pi(ϕ), qi = Qi(ϕ) etc.

Alors, tous les endomorphismes obtenus commutent et l’on obtient des égalités piqi= 0, uipi+ viqi= IdM,Piwiqi= IdM. Le lemme en découle

facilement. 

5. Un peu d’algèbre extérieure

Qu’un système linéaire homogène de n équations à n inconnues admette (sur un corps discret) une solution non triviale si, et seulement si, le déterminant du système est nul, voilà un fait d’une importance capitale dont on n’aura jamais fini de mesurer la portée.

Anonyme

Éliminons, éliminons, éliminons les éliminateurs de l’élimination !

Poème mathématique (extrait) S. Abhyankar Quelques exemples simples illustrent ces idées dans la section présente.