• Aucun résultat trouvé

Le réarrangement de particules ribonuléoprotéiques (RNP) par les hélicases à ARN

A. Fonctions moléculaires des hélicases à ARN

2. Le réarrangement de particules ribonuléoprotéiques (RNP) par les hélicases à ARN

Les ARN cellulaires sont en réalité toujours associés à des protéines. Les ARN hélicases agissent donc toujours sur des ARN complexés à des protéines, contrairement à ce qui est souvent testé in vitro. Il est donc possible qu’in vivo ces enzymes servent plus à

48

conditionner les associations ARN/ARN ou ARN/protéine au sein de particules ribonucléoprotéiques (RNP) plutôt que de dissocier des duplexes d’ARN nus.

Plusieurs évidences indiquent que la fonction de certaines hélicases est de dissocier des interactions ARN/protéine. Ainsi, la mutation de la protéine U1-C, qui fait partie de la snRNP U1, permet à la cellule de se dispenser de l’hélicase Prp28p. Plus précisément, la protéine U1-C stabilise l’interaction de la snRNP U1 avec l’ARNm. Prp28 intervient pour déstabiliser cette interaction et permettre le détachement de la particule U1 du pré-ARNm en cours d’épissage (Chen et al., 2001). Ensuite, l’activité ATP dépendante de Prp5p est requise pour dissocier la protéine CUS2 de la snRNP U2 (Perriman et al., 2003). Ce qui semble aussi être le cas pour les hélicases Dbp5p et Sub2p requises respectivement, pour la dissociation de Mex67p et MUD2 des ARN auxquels elles sont associées (Kistler and Guthrie, 2001; Lund and Guthrie, 2005). Cependant les mécanismes permettant à ces hélicases de cibler ces protéines sont encore méconnus. On ne sait pas si ces hélicases dénaturent des duplexes d’ARN, ce qui aboutit au détachement des protéines associées, ou si ces enzymes catalysent directement la dissociation des protéines.

Parallèlement à ces études in vivo, des études in vitro ont permis de montrer que les hélicases NPH-II et Ded1p peuvent détacher des protéines d’un ARN, en utilisant de l’ATP mais sans dérouler des duplexes d’ARN. La première étude a été effectuée en utilisant deux brins ARN qui associés forment un site de liaison spécifique de la protéine U1A. Cette protéine intervient dans l’épissage des pré-ARNm. Dans ce modèle, la protéine U1A forme un homodimère fixé sur l’ARN. Il a été testé si l’hélicase ARN d’origine virale NPH-II pouvait détacher U1A de l’ARN. Dans cette expérience NPH-II, en présence d’ATP et à condition que le substrat porte une région simple brin pour charger la protéine, augmente la constante de dissociation de U1A par trois ordres de grandeur. Ce qui indique que NPH-II n’enlève pas passivement la protéine de l’ARN pour ensuite dissocier le duplex d’ARN restant, mais agit bien activement dans ce processus. De plus, le déplacement d’U1A dans ce contexte est plus rapide que la séparation des brins d’ARN (Jankowsky et al., 2001) . Ce résultat indique qu’une hélicase à ARN est capable de dissocier activement une protéine d’un ARN, sans que cela nécessite d’autres co-facteurs que l’ATP. Cependant, cette expérience ne permet pas de savoir si le déroulement de l’ARN aux environs du site de liaison de U1A est nécessaire à la dissociation de cette protéine. Des expériences complémentaires ont donc été réalisées.

Deux autres substrats ont été utilisés, dans lesquels des complexes protéiques s’associent à l’ARN sans que cela nécessite la présence de structures secondaires. Ainsi, le complexe TRAP, formé de 11 unités, est capable de se lier spécifiquement à une séquence

49

d’ARN de 53 nucléotides (nt). Ce complexe a donc été utilisé pour créer un substrat correspondant à un ARN sans structure secondaire sur lequel est fixé un complexe protéique. Un autre complexe protéique à été utilisé pour réaliser la même expérience, c’est l’EJC qui est capable de se lier à l’ARN sans structure secondaire et sans spécificité de séquence à environ 20nt de la jonction entre les exons. En présence d’ATP, NPH-II est capable de dissocier activement ces deux complexes protéiques de l’ARN correspondant (Fairman et al., 2004). NPH-II est donc capable de détacher activement des protéines fixées sur des ARN non structurés. De plus, la constante de dissociation des deux complexes suite à l’action de NPH- II n’est pas la même ce qui indique que la nature des interactions ARN/protéine module la vitesse de dissociation de ces substrats.

De nombreuses RNP, comme les complexes d’épissage ou les ribosomes, sont constituées d’interactions ARN/ARN et ARN/protéines. Le même type d’expérience a donc été réalisé avec comme complexe protéique, la particule snRNP U1 associée à un ARN comportant le site de reconnaissance de cette particule. Dans ce cas, NPH-II est toujours capable de dissocier activement la ribonucléoparticule de l’ARN (Bowers et al., 2006). Ce qui indique qu’une hélicase à ARN est capable de dissocier des surfaces d’interactions complexes mettant en jeu des associations ARN/ARN et ARN/protéines.

La combinaison de ces quatre expériences a démontré que NPH-II est capable de déplacer activement plusieurs types de complexes protéiques d’un ARN, qu’il comporte ou non des structures secondaires. Des hélicases ayant une plus faible activité ATPase et moins processives telles que les membres de la famille à boîte DEAD, peuvent-elles jouer des rôles similaires ? L’équipe de Jankowsky a réalisé le même type d’expérience avec Ded1p une hélicase beaucoup moins processive et dont l’activité ATPase est plus faible. Ded1p en présence d’ATP est capable de déplacer l’EJC et la particule snRNP U1 avec des cinétiques de réaction comparables à celles obtenues avec NPH-II. Tandis qu’elle est incapable de dissocier le complexe TRAP ni l’homodimère U1A (Bowers et al., 2006). Ces résultats indiquent, que d’autres hélicases que NPH-II peuvent dissocier des complexes ARN/protéines

in vitro en dépit d’une différence de processivité et d’une activité ATPase plus faible. Le fait

que Ded1p ne parvienne pas à dissocier certains complexes peut provenir de la nature même de ces complexes et que Ded1p dans ce cas pourrait nécessiter l’aide de co-facteurs. Néanmoins, ces résultats n’expliquent pas comment une hélicase est capable de dissocier ces complexes protéiques au niveau moléculaire ; seuls des modèles peuvent être envisagés (Bowers et al., 2006) (figure 29).

Figure 29 : Modèle de déplacement d’une protéine par une hélicase à ARN.

50

Il existe donc une autre fonction pour certaines hélicases, différente du simple déroulement d’un duplex d’ARN, la capacité à détacher des complexes protéiques associés aux ARN. On nomme ces protéines des RNPases (Linder et al., 2001).

3. Les hélicases à ARN peuvent perturber des associations