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Les différents motifs conservés des hélicases sont assez bien caractérisés et leur fonction est de mieux en mieux comprise. Les séquences qui séparent ces différents motifs sont divergentes mais leurs longueurs sont bien conservées (Gorbalenya and Koonin, 1993). Dans l’ensemble, ces domaines centraux incluent des résidus conservés impliqués dans la liaison et l’hydrolyse d’NTP, équivalents aux boites Walker A et Walker B retrouvées dans beaucoup d’ATPases (Leipe et al., 2003; Smith and Rayment, 1996; Walker et al., 1982), elles ne suffisent donc pas pour définir une hélicase. On retrouve aussi un doigt arginine (R) qui joue un rôle central dans le couplage de l’énergie aux changements de conformations (Scheffzek et al., 1997).

1. Motif Q (G-F-X-X-P-X-P-I-Q):

C’est le motif le plus récemment découvert. Il est uniquement retrouvé dans les hélicases à ARN du type DEAD, cela en fait un motif caractéristique. Au départ, c’est la glutamine (Q) qui a été caractérisée comme essentielle in vivo, dans cinq protéines du groupe des hélicases à ARN DEAD (SFII) : Dbp1, Dbp2, Fal1, Prp5 et eIF4 (Tanner et al., 2003). Ce motif est composé de neuf acides aminés. Ces résidus sont situés entre deux hélices !, ce qui est en accord avec l’observation de Gorbalenya sur la localisation des motifs conservés entre des domaines structurés (Gorbalenya and Koonin, 1993). Par la suite, ce motif à été retrouvé dans l’ensemble des protéines appartenant aux hélicases DEAD. De plus, la conservation de la glutamine s’étend à d’autres hélicases telles que Rad3 (famille des ChlI), Mtr4 (famille des Ski2), Sth1 (famille des Swi), Dna2 (famille des Upf1) (Tanner et al., 2003). Cependant, cette glutamine semble essentielle in vivo uniquement pour les protéines à boîtes DEAD.

Ces résidus interviennent dans la liaison et l’hydrolyse de l’ATP et confèrent une spécificité de reconnaissance de l’ATP (Tanner, 2003). Pour cela, ils semblent participer à la création d’un contexte de reconnaissance de l’ATP « fuzzy recognition template » (Moodie et al., 1996) . Ce Q motif semble très bien conservé dans la famille des hélicases à ARN DEAD. Ceci reste inhabituel car généralement, la base de reconnaissance de l’ATP est très variable quant à la nature des résidus impliqués, ce qui est le principe même du « fuzzy recognition template ». Enfin, en participant à des remaniements de structure pour reconnaître l’ATP ce

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motif peut aussi jouer un rôle dans le couplage de l’hydrolyse de l’ATP à l’activité hélicase de ces enzymes (Cordin et al., 2004).

2. Motif I (A/G-X-X-G-X-G-K-T)

Ce motif a tout d’abord été décrit comme le domaine A des ATPases par Walker (Walker et al., 1982) . L’enchaînement AXXGXGKT est le consensus pour les hélicases ARN de la superfamille SFI. Tandis que GXXXXGKT, est plutôt caractéristique de la famille SF2 et se retrouve dans certaines ATPases, GTPases et hélicases à ADN (Gorbalenya et al., 1989). Dans les deux cas, la fonction et la structure de ce domaine semblent conservés. La lysine (K) du GKT est impliquée dans la liaison du ! et du " phosphate de l’ATP. En effet, la mutation du K en un acide aminé non chargé (asparagine N) abolit la liaison de l’ATP (Pause and Sonenberg, 1992). Plus généralement, les mutations dans ce domaine inhibent l’activité ATPase en réduisant l’affinité pour le nucléotide et la vitesse de son hydrolyse (Blum et al., 1992; Cordin et al., 2004) .

3. Motif Ia (P-T-R-E-L-A) et Ib (TPGR)

Des informations sur la structure des hélicases appartenant aux familles SFI et SFII, indique que ces motifs sont requis pour la liaison au substrat via son ossature sucre- phosphates en association avec les domaines IV et V (Caruthers and McKay, 2002; Korolev et al., 1998; Rogers et al., 2002). Une étude réalisée sur le motif Ia de la protéine UL9 de HSV-I a permis de confirmer un rôle de ce motif pour la liaison au substrat (ici de l’ADN simple brin) (Marintcheva and Weller, 2003). De plus, tous les mutants dans ce domaine d’UL9 sont capables de se dimériser, mais ne présentent aucune activité hélicase. Ensuite, la mutation V539I du domaine Ia de Prp22p peut restaurer l’activité hélicase perdue suite à une mutation du domaine III de cette protéine in vitro, en facilitant l’ouverture de la poche catalytique (Schwer and Meszaros, 2000). Ainsi, le motif Ia est nécessaire à la liaison du substrat mais aussi aux modifications de conformations engendrées par l’hydrolyse de l’ATP.

4. Motif II (X-X-D-E-X-X)

Ce motif correspond au domaine Walker B, présent dans toutes les ATPases (Walker et al., 1982). L’acide aspartique et le glutamate présents dans ce motif sont conservés et associés à d’autres acides aminés, ils permettent de distinguer différentes familles comme

Figure 22 : Représentation des différents motifs des hélicases et de leur

interaction avec l’ATP et le substrat ARN

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DEAD ou DEAH. Le résidu D (acide aspartique) interagit avec le Mg2+, qui est requis pour la liaison à l’ATP. Ce domaine est donc décrit comme étant nécessaire à la liaison de l’ATP.

5. Motif III (S-A-T)

Ce motif est mieux caractérisé pour les membres de la superfamille SFII, car les protéines de la superfamille SFI ont un domaine III plus long et plus variable (PcrA : gDaDQsiYrWR). Dans tous les cas, la fonction de ce domaine n’est pas très bien définie. Des mutations dans ce motif découplent l’hydrolyse de l’ATP et l’activité hélicase (Graves- Woodward et al., 1997; Schwer and Meszaros, 2000). Ainsi, Rocak et ses collaborateurs (Rocak et al., 2005) ont montré que des mutations dans ce domaine de Has1p n'ont que de faibles effets sur la liaison et l’hydrolyse de l’ATP comme sur la liaison à l’ARN. Cependant, l’activité hélicase est fortement réduite. Ces résultats indiquent bien un rôle de ce motif dans le couplage de l’hydrolyse de l’ATP à l’activité hélicase.

6. Motif IV

Ce motif a été peu étudié, aucune conservation de séquence n'a pu être réellement déterminée. Ceci étant, il est composé de trois à huit résidus avec une séquence minimale L/V-I-F et la charge des résidus adjacents est importante (Gorbalenya and Koonin, 1993). Il est supposé être important pour la liaison au substrat dans la mesure où les dernières arginines du domaine IV d’eIF4A (VIFCNTRR) lient l’ARN simple brin (Caruthers et al., 2000; Caruthers and McKay, 2002).

Très récemment, Banroques et ses collaborateurs ont identifié une phénylalanine (F) très conservée chez les membres de la famille SFII. La mutation de ce résidu cause des problèmes de croissance. Les levures exprimant ces mutants deviennent thermosensibles ce qui suggère une implication de ce motif dans le maintien de la conformation des hélicases de la famille SFII (Banroques et al., 2008). De plus, in vitro l’effet le plus marquant est la baisse de la capacité à lier l’ARN même en présence d’ATP. Ainsi, ce motif interviendrait aussi dans le coulage de l’hydrolyse de l’ATP à des changements de conformation permettant une meilleur liaison au substrat.

7. Motif V

Il a été proposé que ce motif joue un rôle dans la liaison au substrat en association avec les domaines Ia, Ib et IV. Néanmoins, un rôle dans le couplage de l’activité ATPase à

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l’activité hélicase ne peut pas être exclu (Caruthers et al., 2000). Des mutations dans l’arginine (R) et l’acide aspartique (D) de Prp28p ont un effet sévère sur la survie cellulaire (Chang et al., 1997). De plus, le motif V de Prp22p est important dans la stimulation de l’activité ATPase suite à l’association avec de l’ARN (Schneider et al., 2004). Or, comme nous allons le voir ultérieurement, la fixation du substrat influe sur la liaison de l’ATP et réciproquement. Ce qui indique un rôle principal de ce domaine dans la liaison au substrat.

8. Motif VI (X-R-X-G-R-X-G-R)

Ce motif est localisé à l’interface des deux domaines structurellement fonctionnels composés d’un côté par les motifs (Q, I, Ia, Ib et II) et d’un autre côté par les motifs (IV, V et VI) chez les hélicases DEAD, et il a été montré qu'il était requis pour l’activité ATPase et la liaison au substrat (Pause et al., 1993; Rogers et al., 2002). Il a été proposé que la deuxième arginine (R), qui est essentielle pour la liaison à l’ATP et son hydrolyse, pourrait fonctionner comme un « doigt arginine » qui stabiliserait la liaison eau-Mg2+-!/" phosphate pour l’hydrolyse de l’ATP.

De plus, il a été démontré que ce motif pouvait avoir un rôle dans le couplage de l’hydrolyse de l’ATP à l’activité hélicase. Ainsi, des mutations de ce domaine dans eIF4A provoquent une diminution de l’activité ATPase mais aussi une diminution de l’activité hélicase (Rogers et al., 2002).

En résumé, ces motifs semblent requis pour la liaison et l’hydrolyse de l’ATP (Q, I et II), la liaison au substrat (Ia, Ib, IV et V) et le couplage de l’hydrolyse à l’activité hélicase (III, VI), (figure 22). Des études parallèles ont été menées afin de mieux comprendre comment ces activités s’expliquent au niveau structurel et comment l’ensemble de ce processus enzymatique aboutit à une activité hélicase.