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2. La planification prothétique

2.2. Le guide radiologique physique

2.2.2. Réalisation du guide radiologique

Une fois l'indication posée d'effectuer une réhabilitation prothétique implanto-por- tée, le praticien effectue des empreintes et demande la réalisation d'un « wax-up ». Le prémontage issu des cires d’analyses validé, il en découle un guide radiologique en résine que le patient gardera en bouche pendant l'acquisition tridimensionnelle radiographique.

Les données enregistrées sont codées au format DICOM (« Digital Image for COm- munication in Medicine »), ce qui constitue le format standard pour les logiciels de radiographie numérique. Ces informations seront lues par les logiciels de planifica- tion implantaire tels que le NobelGuide®, Simplant® ou encore GALILEOS® Im- plant.

Une fois le projet informatique validé, l'ensemble pourra être envoyé au laboratoire pour l'usinage du guide chirurgical.

Un des objectifs du guide radiologique est, comme nous l'avons vu, de permettre la fabrication d'un guide chirurgical. Ce dernier est élaboré par stéréolithographie : procédé largement utilisé dans l'industrie depuis les années 80, il permet la réali- sation d'un objet aux proportions exactes définies par informatique. Or cette préci- sion peut être faussée par de nombreux facteurs :

48  Guide radiologique instable :

Deux types d'appuis peuvent être utilisés pour positionner le guide en bouche : mu-

queux ou dentaire. La dent est un tissu dur indéformable, et ses contre-dépouilles

sont exploitables pour augmenter la rétention. A l'opposé, une muqueuse est un tissu mou élastique, donc imprécis, d'autant plus s’il existe des crêtes flottantes : selon Daas et al. (2008)19 il est indispensable de réaliser une clé d'occlusion rigide pour stabiliser en bouche un guide à appui muqueux.

 Imprécisions propres à la radiographie 3D :

Un praticien a le choix entre 2 types d'examens radiographiques : scanner ou cone- beam. Selon Loubele et al. (2005)20, le cone-beam présente une précision inférieure à 0,35mm, cela peut aller jusqu'à 0,22mm (Moore, 2005)21.

Le scanner est lui plus irradiant et onéreux. De ce fait, de moins en moins de den- tistes y ont recours alors que son niveau de précision est plus grand selon Liang et al. (2009)22 (jusqu'à 0,137mm).

Une étude analysant la précision des mesures via cone-beam dans un bilan pré-im- plantaire dans la région postérieure maxillaire n’a pas montré de différence signifi- cative avec les valeurs réelles mesurées in vivo (Veyre-Goulet et al., 2008)23.

Aujourd’hui la société Sirona® propose au chirurgien-dentiste de réaliser lui-même la prise en charge d'un patient du début à la fin, du projet prothétique à la couronne implanto-portée, entièrement au cabinet d'omnipratique. C’est la méthode dite

“chairside” : elle comprend notamment le guide radiologique, l’utilisation du cone-

beam (GALILEOS® ou ORTHOPHOS® XG 3D), le recours au guide chirurgical (usiné par le CEREC®, ou commandé à l’entreprise Sicat®), l’utilisation de l’usineuse… Ces différents points seront étudiés en détail par la suite.

2.2.2.1. Cerec Guide®

La première étape est commune à tout autre type de chirurgie implantaire : anam- nèse, diagnostic, plan de traitement, « wax-up » et discussion avec le patient. Une fois cette étape effectuée, le praticien prend une empreinte de l’arcade concernée, le

49 modèle coulé servira à la réalisation du guide chirurgical « chairside » à l’aide de l’usineuse : le Cerec guide®.

Sur ce modèle, on va d’abord veiller à ce qu’aucune contre-dépouille ne vienne per- turber la mise en place et le retrait du guide. On comble ces dernières à l’aide d’une résine photopolymérisable, par exemple le l’Opaldam® (Ultradent), le LC Block-Out Resin® (Ultradent) ou encore le Notre Dam® (Elsodent) (Fig. 16.a et b).

On place alors de la pâte thermoformable dans de l’eau bouillante, pour la rendre molle et pliable (Fig. 16.c). Au bout de 2 à 3 minutes, le thermoplastique est totale- ment fondu et transparent. Il peut être sorti de l’eau chaude à l’aide d’un instrument, puis manipulé et modelé pour ensuite le déposer sur la zone édentée (Fig. 16.d). Avant sa solidification complète, un « corps de référence » (ou « reference body »), est inséré dans le matériau, approximativement à la future place des implants (Fig. 16.e et f), le plus apicalement possible.

Fig. 16.a. Comblement des contre- dépouilles à l’aide d’une résine pho- topolymérisable.

Fig. 16.b. Fin de comblement et photo- polymérisation.

50 La pâte thermoplastique conseillée par Sicat® est la TAK Hydroplastic® (Fig. 17), disponible en billes ou en bâtonnets, usuellement utilisée pour la conception de pièces du type porte-empreinte unitaires. Elle présente plusieurs intérêts, parmi lesquels sa facilité d’usage : il suffit de la placer dans l’eau bouillante pour l’utiliser. Elle refroidit en l’espace de 5 à 10 minutes en un matériau rigide et de forte stabilité dimensionnelle (moins de 1% de contraction de prise), ne contient pas de mono- mère et est non toxique pour les tissus dentaires et pour la muqueuse buccale. Elle présente enfin l’intérêt d’être remodelable simplement en la replaçant dans l’eau bouillante.

Fig. 16.c La résine thermoformable est Fig. 16.d Manipulation et modelage ramollie par de l’eau chaude. de la résine sur le modèle.

Fig. 16.e. Insertion du corps de référence Fig. 16.f. Après refroidissement. dans la résine encore chaude.

51 Un soin tout particulier sera accordé au modelage de la résine, puisque cette pièce du guide radiologique sera réutilisée pour obtenir le guide chirurgical (vu au cha- pitre suivant). La résine sera retouchée et polie si nécessaire, de manière à n’en- gendrer aucune sur-extension ni gêne une fois en bouche.

Ce guide radiologique, dont nous venons de voir la conception sur modèle en plâtre, peut également être réalisé directement en bouche. Si elle reste utilisable, la résine TAK Hydroplastic peut dans ce cas être remplacée pour des raisons de facilité par la résine Duroc Clear® (Elsodent®) (Fig. 21). Nous l’illustrons dans le cas clinique24 ci-dessous (Fig. 18 : cas du Dr Christian MOUSSAILLY) : après comblement des contre-dépouilles (Fig. 19 : digue photopolymérisable Notre Dam®, Elsodent), la ré- sine est mise en place au niveau de l’édentement (dent 46) et sur les dents proxi- males à ce dernier (Fig. 20), pour finalement y insérer le corps de référence (Fig. 21a et b).

52 La résine bi-acrylique Duroc Clear® (Fig. 22),

développée initialement pour l’enregistrement de l’occlusion, va servir ici pour la conception de guides chirurgicaux. Ses caractéristiques sont adaptées à son utilisation en bouche : sa prise est rapide (1 minute) et de forte stabilité dimensionnelle (moins de 0,1% de contraction Fig. 18

Fig. 19 Fig. 20

Fig. 21a Fig. 21b

53 de prise). Le matériau ne coule pas dans les embrasures et peut être rebasé facile- ment. Une fois durci, il présente une dureté et une résistance à la flexion de 95 MPa, ce qui supprime le risque de déformation au retrait.

Après avoir vu les différents matériaux utilisés pour la conception du guide, intéres- sons-nous à la pièce qui va servir de référence radiographique lors du scan cone- beam : le corps de référence (« reference body »). Il se compose de deux parties :

Ce corps de référence est disponible en 3 tailles en fonction de la largeur de la sur- face basale : petite, moyenne, et grande (S, M, L), respectivement de couleur orange, blanche et grise. La plus petite taille étant malgré tout assez large, il conviendra donc de vérifier l’espace disponible au niveau de l’édentement. Chaque taille va correspondre à un bloc, qui sera usiné pour la réalisation du futur guide chirurgical (Fig. 24.a).

Fig. 24.a. Les 3 différents blocs Cerec Guide® et leur corps de référence associé.

54 La dernière étape consistera à réaliser un cone-beam avec le guide radiologique en bouche. La stabilité de celui-ci sera assurée, comme expliqué précédemment, par un ap- pui dentaire. Un « clip » doit se faire sentir lors de l’insertion, et son immobilité est con- trôlée (Fig. 24.b et c).

L’étape suivante va correspondre à l’acquisition radiographique 3D, guide en bouche, pour ensuite planifier la position de l’implant, en concordance avec et le projet prothé- tique choisi. Ce projet prothétique va ici pouvoir être réalisé de manière virtuelle, par modélisation de la future prothèse après empreinte optique avec une caméra CEREC®. Nous verrons toutes ces prochaines étapes ultérieurement, dans le chapitre dédié à la planification prothétique (2.5.2.1).

2.2.2.2. Les guides radiologiques Sicat®

Sicat® est une entreprise filiale de la société Sirona Dental System®. Fondée en 2004, elle propose un ensemble de produits destinés aux domaines tels que la chi- rurgie maxillo-faciale, le diagnostic, l’endodontie, mais a pour principale activité le domaine de l’implantologie dentaire. Sa vocation est d’accompagner le praticien dans sa planification implantaire en mettant au point des logiciels tel que le GALI-

LEOS Implant® mais aussi en réalisant des guides chirurgicaux : le Sicat Opti- guide® et le Sicat Classicguide®.

Ces 2 types de guides chirurgicaux ont le même objectif : guider le chirurgien dans la séquence de forage implantaire. Néanmoins, leur réalisation va nécessiter deux

Fig. 24.b. Mise en place du Cerec Guide® en bouche.

Fig. 24.c. Un « clip » doit être constaté à l’insertion.

55 méthodes différentes : l’OptiGuide® sera fabriqué entièrement au laboratoire Si-

cat® uniquement d’après des données radiologiques et numériques, alors que la

réalisation des différents ClassicGuide® (nous allons voir qu’il en existe 3 sortes)

commencera au cabinet pour être terminée au laboratoire Sicat®.

De plus, la réalisation de l’OptiGuide® va faire intervenir un guide radiologique

numérique, alors que celle des ClassicGuide® va demander la réalisation de diffé-

rents guides radiologiques physiques, répondant aux différentes propriétés énoncées au chapitre 2.2.2. Les ClassicGuide® demandent donc un travail plus im- portant en amont et font appel aux méthodes traditionnelles : utilisation de produits radio-opaques, travail sur modèle en plâtre par exemple.

2.2.2.2.1 Les différents guides radiologiques fabriqués selon la mé- thode du ClassicGuide®

Sicat® permet la fabrication de 3 guides chirurgicaux selon la méthode « classique », c’est-à-dire passant par la réalisation préalable d’un guide radiologique : ce sont les guides ClassicGuide®. Il en existe trois différents, leur indication sera choisie en fonction de différents paramètres dont l’édentement, et la présence d’artefacts mé- talliques à attendre. Ces trois guides sont :

Le guide radiologique conventionnel ; Le guide radiologique direct ;

56 Le point commun de l’ensemble de ces guides radiologiques est de présenter un élément qui leur permettra d’assu- rer leur stabilité lors du cone-beam : ils seront positionnés sur une plaque à mordre (Fig 25) spécifique à Sicat®. Celle-ci est composée de repères appe- lés “marques sphériques” radio opaques qui seront visibles lors de la planification implantaire numérique.

2.2.2.2.1.1 ClassicGuide® : guide radiologique conventionnel Dans un premier temps il faut vérifier que le laboratoire possède le matériel suivant:

Modèle en plâtre maxillaire et/ou mandibulaire du patient. Le plâtre

doit être de type 4, c’est à dire un plâtre “super dur” ;

Plaque à mordre avec marques sphériques (spécifique Sicat®) ;  Feuille à emboutir élastique dure, transparente, qui se fixe au PMMA

(épaisseur min. 1,5mm à max. 2,0mm) ;

Appareil d'emboutissage ;

Plastique polymérisable à froid (PMMA) ;

Plastique opaque aux rayons X ou poudre de sulfate de baryum.

Le guide radiologique doit ensuite être réalisé de la manière suivante :

Après avoir réalisé un wax-up sur le modèle en plâtre (Fig. 26), on va fabriquer une gouttière qui se moulera sur les dents et le « wax-up ». On parle de « gouttière

emboutie » (Fig. 27). Le wax-up est ensuite retiré de la gouttière : on va alors venir verser une résine opaque aux rayons X (exemple : Acryline x-ray®, Anaxdent®) dans la gouttière à l'emplacement du wax-up (Fig. 28 et 29).

Fig. 25. Plaque à mordre Sicat®. Les flèches indiquent l’emplacement des billes radio-opaques.

57 La dernière étape va consister en l’assemblage de la plaque à mordre avec la

gouttière (on peut par exemple utiliser de la résine Acryline® de chez Anaxdent®)

(Fig. 30a et b).

Après avoir vérifié la stabilité de l’ensemble en bouche, le guide radiologique réalisé selon la méthode conventionnelle est prêt (Fig. 30c). L’acquisition radiographique 3D va pouvoir être réalisée.

Fig. 26 Fig. 27 Fig. 28

Fig. 29 Fig. 30a Fig. 30b

58 2.2.2.2.1.2 ClassicGuide® : guide radiologique direct

« Direct » signifie que l’on va créer le guide radiologique directement en bouche, sans avoir à passer par l’étape de réalisation d’un « wax-up » comme dans la tech- nique décrite précédemment. La visualisation d’une proposition de prothèse va alors se faire virtuellement, on peut même parler de « wax-up numérique », via le logiciel CEREC® par exemple.

Ce type de guide radiologique n’est indiqué qu’en cas d’édentement d’une ou de

deux dents : la stabilité du guide en bouche dépend du bon respect de cette indica-

tion.

Ainsi, sa réalisation est extrêmement simple : on va d’abord percer 4 trous dans la plaque à mordre Sicat®, aux emplacements prévus à cet effet : ils serviront de ré- tention au produit enregistreurb (Fig. 31). Ce dernier est alors appliqué sur toute

la surface de la plaque à mordre (Fig. 32) et placé en bouche. Après durcissement complet du matériau, le guide radiologique est prêt (Fig. 33). On vérifiera encore une fois sa stabilité et qu’il se repositionne de façon sûre et nette en bouche.

2.2.2.2.1.3 ClassicGuide® : guide radiologique pour édenté total Ce guide est de conception plus complexe. Pour procéder à sa réalisation le praticien doit se munir de la prothèse amovible totale du patient. Si celui-ci n'en possède pas

b Produits recommandés par Sicat® : Futar® Scan (Kentenbach®), Metal Bite® (R-Dental®), Flexi-

time® Bite (Heraeus®).

59 ou est mal adaptée, alors il devra en concevoir une autre : un modèle en cire sera suffisant, il devra néanmoins respecter les règles esthétiques, fonctionnelles et pho- nétiques. La réalisation du guide va passer par une succession de duplicatas, ainsi que par l’incorporation de produits radio-opaques permettant de différencier dents et muqueuses, via différentes concentrations de sulfate de baryum.

On va commencer par rebaser la prothèse pour augmenter sa stabilité (Fig. 34). Son intrados est ensuite coulé, pour avoir un modèle en plâtre de la muqueuse telle qu’elle vient d’être rebasée (Fig. 35). Une empreinte de la prothèse posée sur son modèle en plâtre est alors réalisée, grâce à un moule de doublage (Fig. 36).

Ce guide radiologique doit permettre de différencier les dents de la muqueuse : on va alors couler uniquement la partie de l’empreinte ayant enregistré les dents

prothétiques avec une résine dosée en sulfate de baryum à 15 ou 20% (selon

les marques) puis placer le modèle en plâtre sur l’arcade qui vient d’être coulée (encore molle) (Fig. 38). Une fois le matériau dur, les excès au niveau des dents

sont éliminés afin qu’elles soient chacune correctement individualisées et visibles

au cone-beam (Fig. 39).

Fig. 34 Fig. 35 Fig. 36

60 Cette arcade sur son modèle en plâtre est maintenant replacée dans le moule de

doublage. Après avoir percé deux trous au niveau de ce dernier, on va y faire s’écouler une résine moins dosée en sulfate de baryum (8 ou 10%) (Fig. 41).

Après durcissement, le duplicata radio-opaque de la prothèse est terminé (Fig. 42). Comme lors de la création du guide radiologique conventionnel, l’étape finale va voir

l’assemblage du duplicata du projet prothétique à la plaque à mordre Sicat® (Fig. 43a et b). La stabilité de l’ensemble en bouche est vérifié. L’acquisition radio-

graphique 3D est prête à être réalisée.

Fig. 41 Fig. 42 Fig. 43a

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