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C. LES EFFETS DE L’AMALGAME DENTAIRE

1. Les réactions locales

précisément en raison de ces deux voies possibles d'absorption (pulmonaire et intestinale) que les toxicologues recommandent les dosages sanguins ou urinaires pour apprécier les risques de toxicité neurologique et rénale (le sang est le passage obligé du mercure pour aboutir au cerveau et aux reins).

Enfin, le calcul de la dose journalière de mercure ingérée en provenance des obturations est erroné car il repose sur le postulat que la concentration du mercure dans la salive multipliée par le débit salivaire correspond à la quantité de mercure libérée par les amalgames chaque jour. En fait, c'est oublier que le mercure présent dans la salive peut provenir de trois sources : le mercure excrété par voie biliaire le mercure associé aux cellules exfoliées de la cavité buccale reflétant aussi le stockage dans ces cellules épithéliales du mercure libéré sur une période plus longue que 24 heures) et le mercure effectivement libéré par l'amalgame. Seule cette dernière source correspond à l'apport direct par les amalgames. Ces trois sources ne peuvent être constantes sur la journée et donc l'extrapolation sur une période de 24 heures d'une quantité mesurée sur un prélèvement assez ponctuel de salive est un exercice qui reste très aléatoire.

Même si les conclusions du rapport concernant un dépassement de la dose journalière reposent sur une extrapolation ignorant ces aspects métaboliques, il n'en reste pas moins vrai que le mercure libéré par les obturations comme le montre l'étude de Tübingen représente la principale source d'exposition au mercure pour la population générale non soumise à des risques professionnels et ayant une consommation modérée de poissons. L'OMS considère que cet apport reste inférieur à la dose journalière acceptable (42 µg/jour).

Certains risques peuvent apparaître. Les risques des alliages en général dans le tissu mou du corps humain sont les réactions inflammatoires, tissulaires telles que le

« tatouage », forme de pigmentation disgracieuse de la gencive ou immunologiques (allergies au sens strict).

Les réactions allergiques liées aux amalgames sont connues, mais, sauf exception (1), peu étudiées. On pourra regretter notamment que les présentations de l’amalgame dentaire figurant dans des ouvrages censés être de référence y consacrent si peu de développements. Il n’y a pas d’accord général sur la proportion de patients sujets aux allergies, mais certains estiment qu’elle peut aller jusqu’à 8 % des cas. Un pourcentage suffisant pour s’en inquiéter.

Les allergies aux amalgames appartiennent à la catégorie des allergies dites de contact, avec manifestations cutanées sous forme d’irritation plus ou moins grave de la muqueuse (eczéma, dermite, « lichen plan »), apparaissant rapidement (24/48 heures) après la pause de l’amalgame, mais pas immédiatement, par opposition aux hypersensibilités immédiates avec asthme et oedèmes.

L’allergie est aisément repérable en présence de deux critères : une réaction positive aux tests avec allergènes, et la guérison rapide après suppression de l’allergène, en l’espèce l’amalgame dentaire.

Les allergies liées aux alliages en général et aux amalgames en particulier sont très variables selon les individus, mais plusieurs facteurs sont susceptibles de les accroître :

- tout d’abord, les allergies semblent « s’auto-entretenir ». Le risque d’être allergique aux amalgames est trois fois plus important chez un patient allergique à d’autres produits que chez un patient sain, sans antécédent allergénique.

- ensuite, les allergies semblent se « construire » petit à petit. On peut ainsi ne pas être allergique à un métal au début, mais le devenir après un certain temps ou un certain volume d’exposition. C’est ainsi que la proportion de femmes allergiques au nickel est le double de celle des hommes (10 % contre 5 %) tout simplement parce que les femmes sont plus exposées (bijoux, clips, boucles d’oreilles...).

- enfin, l’allergie aux amalgames semble également varier selon le temps de séjour des amalgames en bouche. Des patients porteurs d’amalgames depuis plus de cinq ans réagissent davantage aux tests épicutanés (en contrôlant la sensibilité aux

(1) Les phénomènes allergiques liés aux amalgames dentaires ont notamment été étudiés par l’Institut de médecine du travail de Lille. L’audition du professeur MF. Hildebrandt a été sur ce point particulièrement riche. La plupart des informations de cette partie sont issues de ses travaux.

Voir également : C. Véron, MF. Hildebrandt, JP. Fernandez, les pigmentations gingivales pour l’amalgame dentaire, J. Bromet. Dent. 1985 , 1, 47-52

composants des amalgames), que les nouveaux porteurs. Ce phénomène laisserait supposer que la sensibilité aux amalgames s’accroît avec la corrosion.

L’allergie dépend aussi et surtout de la qualité des alliages et amalgames, plus que de leur composition. Il n’y a pas une allergie unique aux amalgames. Les inflammations notamment, liées aux amalgames fraîchement posés, disparaissent après quelques jours.

S’il est tout à fait certain que la pose d’amalgame peut entraîner des allergies, il est non moins certain que « le mercure, quoique très souvent incriminé, n’est pas le seul agent sensibilisant de l’amalgame dentaire ». Son rôle n’est nullement exclusif. La sensibilité, voire l’hypersensibilité à l’argent, et de plus en plus au cuivre, dont la proportion a sensiblement augmenté dans les amalgames récents, est à prendre en compte. Ce phénomène n’est pas propre aux amalgames. Il existe également des cas d’allergies observées à partir de prothèses et implants chirurgicaux. On dénombre une centaine de cas graves.

Il peut être intéressant de constater que l’analyse du tissu gingival affecté par les tatouages par exemple fait clairement apparaître la présence de particules d’argent et de soufre, mais pratiquement pas de mercure. « Il semble donc que le mercure a totalement disparu des inclusions ». Pour le professeur Hildebrandt,

« l’argent et le mercure ont des mécanismes de distribution et de métabolisation bien différents. Le mercure a disparu de la gencive parce qu’il est passé dans l’organisme, en raison de sa dissolution et de sa diffusion facile à température corporelle, par voies sanguine et lymphatique (relatif à l’eau). Le mercure s’est lié sous forme de dérivés métallo-organiques à des molécules biologiques diverses qu’on trouve notamment dans les reins et le foie, qui créent des molécules spécifiques (les métallothionéines) qui facilitent l’élimination du mercure par voie urinaire ».

b) L’électrogalvanisme

L’électrogalvanisme consiste dans la création de courants électriques, de très basse tension. Ces courants sont générés par la proximité des matériaux métalliques hétérogènes. La cavité buccale constitue une mosaïque de restaurations métalliques diverses (amalgames de génération différente, alliages pour prothèses et implants...), qui présentent des potentiels électriques différents générant par conséquent une libération d’ions métalliques conduisant à la formation d’un courant galvanique (courant électrique de très basse tension, étudié par Galvani). Il y a libération d’ions métalliques lorsqu’un amalgame se trouve à proximité d’autres métaux, en particulier d’un alliage métallique plus électropositif, la salive jouant alors le rôle d’électrolyse. La différence de potentiel électrique crée un phénomène de pile, autoentretenu par la corrosion de l’amalgame (le courant accroît la libération d’ions métalliques, et le phénomène de micropile accélère la corrosion).

Cette réaction est susceptible de générer des manifestations buccales désagréables (goût métallique, brûlures, petites lésions de type « lichen plan »). Le phénomène est connu - on raconte même l’histoire (vraisemblablement « mise en forme » à partir d’un fait réel) d’une personne qui, depuis la pose d’amalgames dentaires, recevait RTL...- mais son analyse présente quelques difficultés. Tout d’abord, « il y a un doute considérable pour mesurer précisément les courants électriques dans la bouche (1). Les mesures courantes varient entre 4 à 50 micro ampères, avec quelques cas connus à 160 micro ampères (2). On cite également le cas de vapeurs mercurielles mesurées entre un amalgame et un inlay en or à 450 µg de mercure par m3.

Ensuite, il ne semble pas y avoir de lien clair entre symptôme et importance du courant, et encore moins entre symptôme et amalgames, dans la mesure où les symptômes peuvent venir d’autres soins ou d’autres causes.

Le polymétallisme doit cependant être évité et les restaurations doivent être les plus homogènes possible. On observera toutefois qu’il paraît exclu d’éviter totalement ce phénomène, ne serait-ce que parce qu’un grand nombre d’obturations à l’amalgame sont recouvertes de couronnes métalliques !