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QUINZIÈME SESSION Communication n° 79/1980

Présentée par : S. S., le 5 septembre 1 9 8 0

Au nom de : l'auteur

Etat partie concerné : Norvège

Date de la décision sur la recevabilité : 2 avril 1 9 8 2 (quinzième session)

Immixtions dans la vie privée et le domicile — Protec­

tion de la loi contre de telles immixtions — Non-épuisement des recours internes

ARTICLES DU PACTE : 2 et 1 7

ARTICLE DU PROTOCOLE FACULTATIF : 5 (par. 2 , b)

1. L'auteur de la communication (première lettre datée du 5 septembre 1 9 8 0 et observations complémen­

taires en date du 1 6 novembre 1 9 8 1 ) est un ressortissant norvégien de 7 7 ans vivant en Norvège. Il soumet la communication en son nom propre.

2 . 1 L'auteur se plaint que, depuis plus de 2 0 ans, il est victime d'immktions constantes dans sa vie privée de la part de jeunes garçons et de jeunes gens de la ville où il réside et que la police n'a pas donné suite à ses deman­

des réitérées d'assurer sa protection et de procéder à une enquête approfondie. Toutes les fenêtres du

rez-de-chaussée et du premier étage de son domicile ont été bri­

sées et il a renoncé à les remplacer et a préféré déména­

ger au sous-sol, où il dort dans une pièce sans fenêtre. Il arrive fréquemment que des voitures soient garées illé­

galement devant sa maison de sorte qu'il lui est difficile d'entrer chez lui et d'en sortir. D'angoisse et de déses­

poir, l'auteur a plusieurs fois commis des actes qu'il qualifie d'actes de légitime défense (en 1978, il a, à deux reprises, jeté des seaux d'excréments et d'urine sur des voitures garées devant chez lui; en 1979, il a tiré, avec un fusil de chasse, dans la direction d'un groupe de jeunes qui se trouvaient de l'autre côté de la rue et, accidentel­

lement, en a blessé trois). Lors de la procédure pénale qui a suivi, l'auteur a expliqué que, dans tous les cas, il soupçonnait les occupants des voitures et le groupe de jeunes de vouloir lui jeter des pierres et qu'il voulait sim­

plement leur faire peur. Cependant, il a été jugé coupa­

ble d'infractions à un certain nombre de dispositions du Code pénal, condamné à des dommages et intérêts et à trente jours de prison avec sursis.

2.2 L'auteur estime profondément injuste d'avoir été jugé coupable et condamné pour avoir simplement

— selon lui — tenté de se défendre et de protéger ses biens, tandis que les véritables coupables, ceux qui, depuis des années, le harcèlent, et s'attaquent à ses biens, n'ont été ni appréhendés ni inculpés. Il pense éga­

lement qu'il y a eu un certain nombre d'irrégularités dans la procédure intentée contre lui, commises par le Ministère public et le tribunal.

2.3 L'auteur n'a pas précisé au départ quels sont l'article ou les articles du Pacte international relatif aux droits civils et politiques que la Norvège aurait violés dans son cas. II ressort cependant des faits exposés dans sa lettre datée du 5 septembre 1980 qu'il prétend être victime de violations des dispositions de l'article 17 du Pacte.

2.4 II demande au Comité des droits de l'homme d'examiner sa plainte et souUgne qu'il a épuisé tous les recours internes disponibles, puisque, le 31 janvier 1980, la Cour suprême a refusé d'autoriser son appel. Il affirme également que les autres conditions énoncées dans le Protocole facultatif concernant la recevabilité des communications sont remplies.

2.5 La communication ne contient aucune indica­

tion selon laquelle la même affaire aurait déjà été sou­

mise à une autre instance internationale d'enquête ou de règlement.

3. Par sa décision du 27 mars 1981, le Comité des droits de l'homme a transmis la communication à l'Etat partie concerné conformément à l'article 91 du règle­

ment intérieur provisoire, et lui a demandé de fournir des renseignements et des observations concernant la question de la recevabilité de la communication, du fait que certaines difficultés pourraient y être soulevées à propos de l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

4.1 Par une note datée du 21 octobre 1981, l'Etat partie a contesté la compétence du Comité des droits de l'homme pour examiner la communication, et il a déclaré à cet égard que,

... si la communication doit être interprétée comme signifiant qu'il y a eu violation de l'article 17 dans le cas de S. S. parce que celui-ci, bien qu'ayant agi en état de légitime défense, n'a pas été acquitté lors du procès intenté contre lui, les autorités norvégiennes estiment qu'il con­

viendrait alors de la déclarer irrecevable comme étant incompatible

avec les dispositions du Pacte en vertu du dernier membre de phrase de l'article 3 du Protocole facultatif. En effet, l'article 17 stipule bien que nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie pri­

vée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illé­

gales à son honneur et à sa réputation. Mais il n'y est fait nulle men­

tion du droit d'être acquitté au motif de légitime défense.

4.2 L'Etat partie fait en outre observer que : A supposer même que l'article 17 implique un droit de légitime défense, il est de toute façon évident que l'auteur est allé trop loin dans l'exercice de ce droit (éventuel). En effet, trois enfants ont été atteints lorsque l'auteur a tiré. Des dégâts appréciables ont été causés à des voitures temporairement garées à l'arrêt de l'autobus et, dans un cas particulier, sans qu'il y ait eu un avertissement préalable de la part de l'auteur. De l'avis des membres de la Cour, l'auteur a outrepassé son droit de légitime défense, e^ c'est là aussi la conclusion à tirer pour ce qui est de l'article 17 du Pífete.

Il n'y a clairement pas eu d'immixtion des autorités norvégiennes dans la vie privée, le domicile, etc., de l'auteur. Le principal problème au regard de l'article 17 est donc de savoir si les autorités ont accordé une protection suffisante à S. S. contre les immixtions commises par d'autres personnes ou, en d'autres termes, si la Norvège a garanti à l'auteur le droit qui lui est reconnu à l'article 17 du Pacte (voir le para­

graphe 1 de l'article 2 de cet instrument).

Vus sous cet angle, les recours disponibles sur le plan interne ne relè­

vent pas des tribunaux, mais des divers services de la police qui ont pour principale tâche de maintenir l'ordre et de protéger les droits des particuliers. Toute personne qui prétend subir des tracasseries de la part d'autres personnes doit s'adresser aux autorités policières et leur donner l'occasion d'entreprendre une enquête en vue d'éviter que des faits analogues se reproduisent à l'avenir.

A la campagne, la première chose à faire éventuellement c'est d'informer le lensman (sorte de commissaire de police rural). Si la vic­

time estime que le lensman n'agit pas avec l'efficacité voulue, elle peut se plaindre à la police, qui entreprendra alors une enquête et deman­

dera des éclaircissements au lensman. Si l'intéressé n'est toujours pas satisfait, il peut s'adresser au procureur de la Couronne (statsadvoka-ten) et, en dernier ressort, au Procureur général (riksadvoka(statsadvoka-ten). Les personnes qui prétendent être victimes de tracasseries ou d'autres actes délictueux ont donc à leur disposition un système de recours à plu­

sieurs niveaux.

Pour ce qui est de S. S., il est évident qu'il ne s'est jamais plaint à la police ni au procureur de la Couronne des tracasseries qui lui étaient infligées [...]

4.3 L'Etat partie indique à ce sujet que « l'attitude de l'auteur vis-à-vis des autorités policières n'a pas été positive », et qu'en dehors des deux incidents mention­

nés dans sa communication,

S. s. n'a jamais informé le bureau du lensman des ennuis qu'il aurait eus sur sa propriété. S. S. déclare vivre dans la crainte depuis long­

temps. Or, il disposait d'un recours : la possibilité de signaler le pro­

blème au bureau du lensman, recours dont il ne semble pas avoir fait usage comme il aurait dû. Il aurait pu du moins se mettre en rapport avec la police ou avec le procureur de la Couronne en invoquant le fait qu'il n'était pas protégé de manière satisfaisante. Comme on l'a dit plus haut, il est clair qu'il ne l'a jamais fait.

Les autorités norvégiennes sont d'avis par conséquent que l'auteur n'a pas épuisé les recours internes dont il disposait (voir article 2 du Protocole facultatif).

4.4 L'Etat partie ajoute que :

Le bureau du lensman a en fait exercé une surveillance sur la maison de S. S., qui se trouve à quelque 6 à 8 kilomètres de ce bureau, puisque ces agents passaient devant cette maison plusieurs fois par jour.

Il conviendrait aussi de signaler que le territoire sous la juridiction du lensman couvre 240 km' et compte quelque 6 500 habitants. Le bureau du lensman a donc énormément de travail.

5.1 Le 16 novembre 1981, l'auteur a transmis ses observations en réponse à celles soumises par l'Etat par­

tie le 21 octobre 1981.

5.2 L'auteur réfute l'assertion de l'Etat partie selon laquelle la communication ne relève pas de violation de l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et n'est donc pas recevable, et déclare en particulier qu'« il est très décourageant et très

inquié-tant que le gouvernement considère que les faits et les actes de vandalisme dont je suis victime depuis si long­

temps ne relèvent pas de l'article 17. Mais la situation relève aussi de l'article 12 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui est rédigée en des termes tout à fait identiques à ceux de l'article 17. »

5.3 II affirme en outre que le droit de légitime défense a été reconnu par les tribunaux norvégiens dans de nombreux cas similaires au sien.

5.4 En ce qui concerne les incidents expressément mentionnés dans sa communication, et au sujet desquels l'Etat partie a formulé des observations, l'auteur déclare qu'il avait personnellement averti les propriétai­

res de voitures qui stationnaient illégalement devant sa propriété qu'ils s'exposaient « à cet effet assez fâcheux ». Il ajoute que :

Ceux qui ont par la suite prétendu le contraire étaient parfaitement au courant de la situation pour avoir entendu les autres dire que le meilleur moyen « d'embêter le forgeron » était de faire comme s'il n'existait pas et de continuer simplement à se garer là. Ces voitures étaient garées de telle sorte que le seul passage permettant d'accéder à ma maison était complètement bloqué tous les jours. En hiver, avec les amoncellements de neige, la situation était telle que j'étais contraint de sortir par la route 120, qui passe derrière chez moi, et de me frayer un chemin dans un mètre de neige pour rentrer chez moi. Quand, au bout d'un an, j'ai vu qu'il était impossible de faire comprendre aux autori­

tés (au tensman) et aux auteurs des infractions combien ma situation était désespérée et que mes apparitions étaient saluées de coups de klaxon et de rires moqueurs, que pouvais-je faire d'autre, moi qui suis un vieillard de 75 ans, que de prendre moi-même les choses en main en vertu du droit de rétorsion que prévoit le droit pénal (voir Code pénal, art. 228 et 250).

5.5 L'auteur réfute en outre l'assertion de l'Etat partie selon laquelle, en dehors des incidents mentionnés dans la communication, il n'a jamais informé le bureau du lensman des ennuis qu'il aurait eus sur sa propriété.

5.6 II se réfère également à la déclaration faite par son avocat, lors du dernier procès intenté contre lui, sui­

vant laquelle « les agents du lensman avaient eux-mêmes déclaré qu'ils avaient entendu dire, dès leur arri­

vée dans la ville, que S. le forgeron était un peu spécial, autrement dit qu'il n'était pas tout à fait normal ».

5.7 L'auteur conclut :

Ce que je veux dire est clair : les plaintes qui proviennent du « fou du village » sont-elles prises aussi au sérieux que celles qui proviennent des citoyens respectés d'Enebakk ? [...]. Il ne devrait pas être fait de différence entre ceux qui signalent au bureau du lensman d'Enebakk les actes délictueux qui se commettent dans la ville. Cela va de soi. Je ne suis pas resté passif et j'ai épuisé tous les moyens dont dispose un homme âgé pour se plaindre, sans que les autorités prêtent l'oreille. La distance à laquelle se trouve le bureau du lensman, l'étendue du terri­

toire qui relève de sa juridiction, l'importance de la population et le volume de travail du lensman n'ont rien à voir dans cette affaire. Seul compte le fait que ceux qui sont chargés de la répression n'ont pas bien compris en la circonstance que leur devoir était de faire respecter la loi et l'ordre pour que les personnes âgées, en particulier, soient à l'abri des méfaits des enfants et des adolescents.

6.1 La question qu'il incombe au Comité de tran­

cher en dernier ressort a trait à la question de savoir si l'auteur de la communication a épuisé ou non les recours internes.

6.2 Le Comité ne sait pas exactement s'il existait des recours et si, par exemple, l'auteur de la communication aurait pu intenter une action en justice pour violation de domicile. Toutefois, sur la base des renseignements dont il dispose, le Comité conclut que l'auteur ne s'est pas servi des moyens de recours que, d'après l'Etat partie, il avait, à savoir qu'il n'a pas poursuivi l'affaire devant des instances policières plus élevées, le procureur de la Couronne et, en dernier ressort, le Procureur général.

L'auteur laisse entendre que les autres efforts qu'il aurait pu faire pour épuiser les recours dont il disposait n'auraient sans doute pas été « pris au sérieux » par les autorités. Ses doutes quant à l'efficacité de ces recours ne le dispensent toutefois pas de les épuiser, comme le veut l'alinéa b du paragraphe 2 de l'article 5 du Proto­

cole facultatif.

Le Comité des droits de l'homme décide par consé­

quent :

1) Que la communication est irrecevable.

2) Que cette décision sera communiquée à l'auteur et à l'Etat partie.

S E I Z I È M E S E S S I O N Communication n° 121/1982 Présentée par : A. M., le 9 mars 1982

Au nom de : l'auteur

Etat partie concerné : Danemark

Date de la décision sur l'irrecevabilité : 23 juillet 1982 (seizième session) Réserve de l'Etat partie au sujet de l'alinéa a du para­

graphe 2 de l'article 5 du Protocole facultatif — Question déjà examinée par une autre instance inter­

nationale d'enquête — Commission européenne des droits de l'homme

ARTICLES DU PACTE : 7, 14 et 26

ARTICLES DU PROTOCOLE FACULTATIF : (par. 2, a)

Décision sur l'admissibilité^

1. L'auteur de la communication (première lettre datée du 9 mars 1982 et lettres ultérieurement datées du 20 avril et des 9, 29 et 30 juin 1982) est un ressortissant pakistanais de 39 ans, qui purge actuellement une peine ' Le texte d'une opinion individuelle présentée par un membre du Comité est joint en appendice aux présentes constatations.

de prison au Danemarlc. Il présente la communication en son nom personnel.

2.1 L'auteur déclare qu'il réside au Danemark depuis 1980, qu'il a épousé en 1977 au Pakistan une res­

sortissante de ce pays, que sa femme vit depuis cette date avec lui au Danemark et qu'ils ont deux enfants. Il décrit comme suit les faits qui sont à l'origine de sa plainte :

2.2 Le 31 juillet 1980, à Odense (Danemark), il s'est trouvé mêlé à une rixe grave avec plusieurs autres hom­

mes originaires du Pakistan, du Maroc et d'Algérie.

Quatre personnes au moins ont été grièvement blessées, et l'une d'elles est décédée. Inculpé notamment de

« blessures ayant entraîné la mort », l'auteur a été reconnu coupable le 30 janvier 1981 par la Cour orien­

tale d'appel (0stre Landsret) siégeant avec un jury, et condamné à trois ans et demi de détention. Il s'est pourvu devant la Cour spéciale de cassation (Den sœr-lige klageret), en vue d'obtenir un nouveau procès. La Cour a rejeté ce pourvoi le 4 décembre 1981.

2.3 Le 21 avril 1981, A . M. était informé par les autorités danoises d'immigration qu'il lui faudrait quit­

ter le Danemark après avoir purgé sa peine. Cette déci­

sion a été confirmée par le Ministère de la justice et A . M. en a été informé le 23 octobre 1981. Il déclare qu'il doit être libéré le 15 août 1982 et qu'il sera expulsé à cette date.

3.1 L'auteur affirme devant le Comité des droits de l'homme avoir été traité de façon injuste parce qu'il est étranger. Il soutient que la police a manqué d'honnêteté dans la manière dont elle a procédé à l'enquête prélimi­

naire en la matière et que la Cour a commis un déni de justice en accordant une importance excessive aux élé­

ments de preuve présentés par l'accusation, et notam­

ment aux dépositions prétendument obtenues de ses ennemis pakistanais au Danemark. Il est convaincu qu'une juste appréciation des éléments de preuve aurait entraîné son acquittement. L'auteur affirme en outre que la décision des autorités danoises de l'expulser à sa libération constitue un traitement et une peine dégra­

dants.

3.2 II se dit en particulier victime de violations, par le Danemark, des articles 5, 7 et 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme (droit de ne pas être soumis à un traitement ou une peine dégradants, droit à l'égalité devant la loi et droit à un procès équitable). Il invoque par ailleurs le paragraphe 1 de l'article 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme en ce qui concerne la présomption d'innocence. Ces articles cor­

respondent, quant au fond, aux articles 7, 14 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

4. Il ressort de la communication que l'auteur a sou­

mis le même cas à la Commission européenne des droits de l'homme. Cet organe a déclaré sa communication irrecevable, la déclarant manifestement mal fondée, le 1" mars 1982.

5. Avant d'examiner les allégations contenues dans une communication, le Comité des droits de l'homme doit décider si cette communication est recevable en application du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le Comité note à ce propos que, lorsqu'il a ratifié le Protocole facultatif et reconnu que le Comité avait com­

pétence pour recevoir et examiner des communications

émanant de particuliers relevant de sa juridiction, l'Etat partie — le Danemark — a formulé au sujet du paragra­

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