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nord-sud ?

Carte 10- Localisation des projets touristiques hors hôtellerie à M’hamid Lghazlane

1.2. Quels rapports avec l’activité touristique ?

De nos jours, l’industrie touristique a connu une évolution qui a bouleversé le système classique d’élaboration des projets touristiques ainsi que le fonctionnement de ces derniers. Comme nous

35Française de 47 ans, propriétaire d’une maison d’hôtes 2ème catégorie à Ouladdriss-M’hamid depuis 2007.

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l’avons précisé précédemment, il s’agit d’une des manifestations de l’ « après-tourisme » (Bourdeau, 2012) qui insiste sur le brouillage des repères entre le touristique et le non touristique lié à la dé-différenciation entre l’ici et l’ailleurs (Viard, Urry, 2000 ; 2006)37. En effet, avec la mondialisation les lieux deviennent partageables, ils appartiennent à tout le monde et il est très difficile voire même impossible de différencier un touriste d’un résident (migrant

à long terme).

Parmi les conséquences de cette ouverture des lieux, il y a l’ouverture sur de nouvelles

expériences professionnelles. En effet, plusieurs de nos porteurs de projets que nous avons

identifiés et questionnés n’ont aucun lien avec le domaine touristique. Aucune formation ou

expérience professionnelle n’ont été acquises dans ce dernier :

« ah ! moi j'étais commercial en France … non non, ça n'a rien à voir avec du tourisme »38

Mis à part les personnes ayant travaillé dans des administrations ou qui avaient occupé des postes de gestion ou de commerce et qui feront appel à leurs connaissances et savoir-faire pour

les réutiliser dans la gestion d’un projet touristique, les autres répondants de notre échantillon,

avaient exercé auparavant des activités initiales qui n’avaient absolument rien à voir avec l’activité touristique. Dans notre échantillon, il y a des personnes qui étaient des médecins, des

artistes peintres, des photographes :

« Moi, j’étais à la fois donc dans la médecine énergétique et j’ai été professeur, donc vous voyez, moi je travaillais pour une commune pour tout ce qui est social et culturel, un parcours très ! Surement pas touristique »39

« Avant j’ai fait les études de psychologie, j’ai travaillé en France comme dans le secteur d’étudesde marché et j’analysais, je faisais des rapports d’étude »40

« Alors, avant je faisais du commerce international et je faisais de l’administration des

ventes. Donc, je travaillais pour une entreprise américaine qui vendait des appareils scientifiques en France et donc je faisais l’administration des ventes, voilà je faisais l’import/ export (…). »41

37 Voir chapitre 1

38 Français de 38 ans, propriétaire d’une maison d’hôtes 2ème catégorie (écolodge) à Skoura depuis 2015.

39Française de 68 ans, associée dans une maison d’hôtes 2ème catégorie à Agdez depuis 2003.

40Française de 74 ans, propriétaire d’une maison d’hôtes 2ème catégorie à Amezrou-Zagora depuis 2004.

41Couple mixte dont l’épouse est une française de 45 ans, associé dans un projet familiale de camping à Agdez depuis 2000.

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D’autres personnes font du projet touristique une activité secondaire tout en gardant leur

fonction principale. Généralement, les personnes qui font du projet d’hébergement touristique

comme activité secondaire ont leurs propres entreprises à l’étranger et le Maroc représente une

opportunité économique où on peut investir à côté de son activité principale. Dans ce cas on ne peut pas résider dans le pays hôte mais un nouveau mode de vie est instauré, il s’agit de vivre

entre les deux pays et de pratiquer un mode de voyage pendulaire.

« Moi, je suis expert-comptable (…) non je n’ai pas changé d’activité, je suis toujours

expert-comptable en France,»42

D’autres font preuve de flexibilité et d’ouverture sur plusieurs domaines et activités, en se

livrant à une véritable multi-activité. C’est le cas de cet ex-responsable commercial qui, à la fois, fait du guidage touristique avec une entreprise implantée à Marrakech et de l’hébergement dans sa maison d’hôtes à Skoura tout en travaillant en tant que consultant pour une société

française.

« Je continue mon activité de guidage touristique (…) je la fais sur tout le Maroc, Maroc

et Côte d'Ivoire, je commence la Côte d'Ivoire, j'ai une société de guidage touristique (…)

oui, moi en fait, je travaille aussi, je suis consultant à côté, dans une société française et je travaille sur le Maroc, le Sénégal et la Côte d'ivoire» 43

La flexibilité se montre aussi dans le cas des personnes qui font toujours appel à leur

savoir-faire et compétences. Des fois, l’expérience professionnelle aide la personne à mieux gérer

quelques situations ou, mieux encore, elle permet de se projeter dans la même activité parallèlement au nouveau projet, ce que confirme cette déclaration de l'une de nos répondants qui bénéficie bien du savoir qu'elle a accumulé dans sa fonction antérieure qui relevait de l'import/export.

« Ça peut me servir, parce qu’il y’a des fois des trucs au niveau de la douane et je résous

des problèmes. Donc, je sais où chercher, mais sinon je m’en sers pas tous les jours »44

La dernière catégorie concerne ce que nous avons identifié comme migrants travailleurs qui changent seulement le territoire de leur travail tout en gardant la même profession, sauf que celle-ci est en lien avec l’activité touristique.

42Ibid.., Note 36, p 124

43Français de 58 ans, propriétaire d’une maison d’hôte (en pré-classement) à Skoura depuis 2013.

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« Alors le métier, on le connaissait déjà nous, mais on travaillait plus dans les grosses

structures, grosses résidences, moi j’étais responsable d’une résidence de 80

appartements »45

L’activité exercée peut être aussi en lien avec l’ancienne et en même temps en rapport avec une

diversification des métiers du tourisme. Le cas qui suit est représentatif d'une catégorie d'acteurs qui tout en se positionnant dans le secteur du tourisme, multiplient les types d'activités (hébergement, guidage, agence de voyage, transport touristique, etc.) avec même la possibilité de multiplier les structures d'hébergements dans différentes régions.

« En France oui, tout à fait et je suis venu au Maroc il y’a plus de 35 ans et donc en tant

que guide de montagne et moniteur de ski, rien à voir avec l’activité d’aujourd’hui. Mais le monde évoluant, le métier de guidage s’est tourné vers l’hébergement au fil des années,

et en même temps on a monté une agence de voyage, on a deux activités, une maison

d’hôtes et une agence de voyage….la maison d’hôtes étant l’hébergement… vous êtes là et l’agence de voyage est la structure qui nous permet la légalisation des activités. (…)

Donc, il faut une agence de voyage pour organiser les circuits au Maroc, c’est la loi ! »

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« Le changement de lieu d’habitation s’accompagne d’un changement professionnel : on pourra

alors légitimement parler de changement de vie. Un profil souvent rencontré est celui d’une

réorientation dans une activité liée au tourisme, certains passant un brevet sportif (guides, moniteurs, accompagnateurs) » (Niels, 2013).

Qu’ils aient une expérience en tourisme ou non, les porteurs de projets étrangers installés dans

le Pays d’Ouarzazate, se lancent dans l’aventure en réalisant un nouveau projet et en décidant de mener une nouvelle vie ailleurs. Et c’est à ce désir de s’installer dans un ailleurs, ici notre

arrière-pays d’Ouarzazate, et les diverses motivations qui sous-tendent ce désir que nous allons consacrer ce qui suit.