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Quelques observations conclusives

RÉPERTOIRES BILINGUES 4.1Avant-propos

4.8 Quelques observations conclusives

Au cours de cette présentation de différents travaux soutenant nos réflexions sur la nature des relations entre dialectologie et sociolinguistique, nous avons vu qu’il y a de nombreux points communs entre ces deux approches de la langue qui mettent la variation au centre de leur préoccupation. Ces éléments peuvent émerger ou rester cachés suivant les différentes perspectives d’étude, selon le contexte ou le moment historique d’observation, les différentes traditions de recherche ; nous avons souligné en effet que les conceptions de la linguistique italienne se rapprochent de celles qui caractérisent la production française et en partie allemande, et que ces conceptions se démarquent plutôt de celles qui cadrent les travaux aux États-Unis ou au Royaume Uni.

Par exemple, en Italie, au-delà des critiques nombreuses vis-à-vis de la dialectologie, plusieurs projets montrent un intérêt très marqué pour l’aspect de la variation diastratique ; plus généralement, Berruto (1977 : 78) souligne qu’un des mérites de la dialectologie italienne a été d’avoir mis en lumière les éléments principaux de l’histoire sociale italienne. En effet, comme l’indique Marcato (2002b : XXI) :

La complessità della situazione italiana, segnalata in modo innovativo nel modello di Pellegrini (1960, 1975) è un ottimo osservatorio per l’analisi di fenomeni di bilinguismo, di diglossia, di mistilinguismo, di mutamento e commistione di codice, essendo molto ampia la gamma delle varietà e delle distanze strutturali, e questo è ancora un settore d’indagine dialettologicamente interessante, che può interagire con modelli teorici diversi, suggerendo prospettive di costruttivi ‘ritorni’ teorici.

Comme le soulignent Francescato et Solari Francescato (1994 : 60), les méthodologies et les objectifs principaux caractérisant l’approche sociolinguistique et, respectivement, dialectologique, restent distinctes. Cependant, comme le remarque Romanello (2002 : 153), ce même travail de Francescato et Solari Francescato montre que les outils utilisés par la sociolinguistique sont adaptés (ou adaptable) pour étudier le répertoire plurilingue des groupes minoritaires d’Italie. Tempesta (2000 : 12) met également en relation le développement épistémologique et méthodologique de la dialectologie et de la sociolinguistique avec le développement d’un intérêt – commun à ces deux disciplines – pour les phénomènes de contact et de mélange linguistique. Ce n’est certainement pas un hasard si les nouveaux développements de l’observation dialectologique, et notamment des variétés en contact, sont perçus par plusieurs chercheurs comme une voie possible de renouvellement de la dialectologie, et d’une présence plus marquée de cette dernière dans les débats théoriques.

Plusieurs revues des recherches récentes dans les domaines de la dialectologie et de la sociolinguistique en Italie montrent la présence d’intérêts et de perspectives d’étude communs entre les deux disciplines ; c’est le cas, en particulier des synthèses de Romanello (2002) – pour le domaine de la dialectologie – et de Berruto (2002) pour le domaine de la sociolinguistique. En effet, maintes recherches des vingt dernières années sont citées dans les deux essais, aussi bien au niveau des descriptions qu’elles proposent que de leurs bibliographies112.

Nous avons procédé dans ce chapitre à une discussion sur la relation entre la dialectologie et la sociolinguistique, focalisant notre attention sur les discours les plus récents des deux matières concernées. Nous avons largement rendu compte de la tradition de recherche qui s’est développée dans la linguistique romane, et plus particulièrement dans le domaine italo-roman ; néanmoins, nous avons essayé de rendre compte aussi de traditions différentes et, quand cela s’est avéré possible, de comparer les différentes démarches.

Nous avons pu remarquer que cette relation est complexe et que plusieurs éléments s’entrecroisent sur le plan méthodologique. Ces disciplines montrent de nombreux points

112 Pourtant, il ne faut pas négliger le fait que les deux spécialistes se distinguent par leurs attitudes légèrement différentes à ce sujet : en effet, tandis que Romanello montre parfois une certaine tendance à mettre en relief les aspects communs, Berruto montre la tendance inverse, c’est-à-dire que dans son argumentation maintient les deux disciplines bien distinctes l’une de l’autre.

Chapitre 4 : Dialectologie et sociolinguistique et les différentes approches de l’étude des répertoires bilingues

communs ; toutefois, compte tenu des objectifs de recherche différents et des méthodologie appropriées aux différentes perspectives d’étude, il nous semble difficile à l’heure actuelle

de parler de dialectologie et de sociolinguistique comme de deux approches entièrement

intégrées, car la tendance à considérer la dialectologie et la sociolinguistique comme deux disciplines bien distinctes et irréductibles l’une à l’autre reste majoritaire.

Nous avons aussi consacré une place importante à deux thèmes de recherche très privilégiés aujourd’hui, celui de la ville et des jeunes : il s’agit de deux domaines très flous en réalité, mais qui montrent la possibilité d’opérer des analyses à plusieurs niveaux et selon plusieurs perspectives.

Dans le cadre de notre recherche, la perspective chronologique convergence dans

l’usageconvergence dans les structures (qui équivaudrait, finalement, à une connexion entre sociolinguistique et dialectologie) permet de reconsidérer toutes les instances avancées par Marcato, Avolio, Berruto, Stehl, Varvaro et les appliquer à une réflexion sur le passage d’éléments de l’italien dans le sarde et, vice-versa, du sarde dans l’italien (soit, italianisation du sarde et formation – développement de l’italien régional) dans les générations plus jeunes, notamment des étudiants du lycée et de l’université. À travers une comparaison de nos données avec les travaux publiés sur l’italien régional de Sardaigne (notamment, Lavinio, 1990, 1991 ; Loi Corvetto, 1979, 1983), et des variétés des jeunes (Gargiulo, 2002, 2003), il sera possible de montrer l’éventuel passage d’éléments linguistiques entre deux générations de locuteurs et vérifier si la convergence dans l’usage remarquée dans le passé (fin des années ‘70 – début des années ‘80 – début des années ‘90) a produit une convergence dans la dimension structurelle durable dans le temps, visible dans les pratiques des jeunes nos contemporaines.

5 L’AIRE URBAINE DE CAGLIARI : CONSIDÉRATIONS