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LA QUALITÉ DE LA MOTIVATION DES DÉCISIONS A. Constat

OBSERVATIONS FINALES

IV. LA QUALITÉ DE LA MOTIVATION DES DÉCISIONS A. Constat

On note une évolution de la motivation des décisions. Une première évolution a lieu à partir de 2007 ; avant cette date, la motivation est sommaire, les arrêts sont particulièrement courts et relatent exclusivement des faits de l’espèce. À partir de 2007, la motivation fait référence à la loi du pays 2006-15 du 15 janvier 2007 sur les actes coutumiers et à titre liminaire, les juges rappellent les principes coutumiers applicables de manière claire et précise. À partir de 2010, l’évolution est encore plus flagrante : les juges rappellent successivement dans leur motivation – et ce de manière méthodique – les principes coutumiers applicables à l’espèce en cause, puis les dispositions de la loi du pays 2006-15 du 15 janvier 2007.

Décisions antérieures à 2007 :

• Aucune motivation en droit : CA Nouméa 6 décembre 1999 n° RG : 343/98 ; TPI Nouméa,

section Koné, 19/25/1993 n° RG : 135/93 ; TPI Nouméa, section détachée de Koné, 25 décembre 1995 n° RG : 166/95 ; CA Nouméa 18 septembre 1995, n° RG : 113/95.

• Une motivation succincte mais rappelant le principe coutumier : CA Nouméa 25 sep-tembre 1995, n° RG : 44/92 ; TPI Nouméa, section détachée de Koné 10 août 1995, n° RG : 73/95 ; TPI Nouméa, section détachée de Koné, 18 août 1993, n° RG : 37/90.

216 - Ibid.

217 - CA Nouméa, arrêt n° 567 du 22 novembre 1993, W.c/ W. 218 - r. lafargue, op. cit, p. 133.

219 - TPI Nouméa, section Koné, 10 mai 2010, n° RG : 09/56.

220 - TPI Nouméa, section Koné, 10 mai 2010, n° RG : 09/56 ; TPI Nouméa, section Koné, 3 mai 1997, n° RG : n° 93/07 ; CA Nouméa, 24 avril 2013, n° RG : n° 2012/503.

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Décisions rendues à partir de 2007 :

• Le contenu des motivations s’est développé : CA Nouméa, 12 avril 2007, n° RG : 76/07 ;TPI Nouméa, section détachée de Koné, 19 juillet 2007, n° RG : 265/07 ; TPI section détachée de Koné, 13 décembre 2007, n° RG : 470/07 ; TPI Nouméa, section détachée de Koné, 20 août 2007, n° RG : 303/07 ; CA de Nouméa 3 mai 2007, n° RG : 93/07.

• Le contenu de la motivation est d’une particulière précision : TPI section détachée de Koné, 19 juillet 2007, n° RG : 265/07 ; TPI section détachée de Koné, 12 avril 2007, n° RG : 76/07.

Décisions rendues à partir de 2010 :

À partir de 2010 l’exposé des motifs est riche en éléments coutumiers et juridiques. Les juges prennent soin de rappeler les principes coutumiers applicables à l’espèce en cause, les disposi-tions légales (principalement la loi du pays sur les actes coutumiers et la loi organique 99-209

du 19 mars 1999), voire des jurisprudences antérieures222.

IV. B. Analyse

La raison de l’évolution de la qualité des décisions et, plus précisément des motifs, peut poser question. L’on peut se demander si cela ne vient pas de la présence d’un nouveau juge. L’on peut aussi se demander si ce changement ne peut provenir par ailleurs du souci de rendre une meilleure justice, à tout le moins plus efficiente et plus sécuritaire pour les justiciables. En effet, l’on peut remarquer, dans certaines décisions, une volonté du juge de clarifier la situation et l’interprétation de la coutume et ce afin que les justiciables et leurs conseils soient

plus au fait du droit qui leur est applicable223. Cette idée peut trouver ses fondements dans le

« rappel à l’ordre » opéré par la Cour de cassation dans son avis du 16 décembre 2005. Cet avis insiste sur l’importance de la coutume en Nouvelle-Calédonie et la nécessité de la présence d’assesseurs coutumiers au sein des juridictions de droit commun. Les assesseurs coutumiers, plus au fait des us et coutumes applicables aux différentes matières concernées, permettent une meilleure coordination et diffusion des principes coutumiers.

X X X

222 - TPI de Nouméa, 26 avril 2012, n° RG : 12/339 ; TPI Nouméa, 28 novembre 2011, n° RG : 11/1347 ; TPI de Nouméa, 7 novembre 2011 n° RG : 11/1213 ; TPI Nouméa, 10 août 2012, n° RG : 12/736.

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SECTION

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. L’AUTORITÉ PARENTALE

Victor Poux

Doctorant à l’Université Jean Moulin Lyon - III

Présentation

Cette présentation de l’intégration de la coutume kanak dans le corpus législatif en Nou-velle-Calédonie, spécialement en ce qui concerne l’autorité parentale, provient d’une recherche effectuée à partir d’un corpus de décisions compilées et référencées sur : http:// coutumier.univ-nc.nc/.

La présente étude résulte d’une analyse débutée en septembre 2015 et poursuivie jusqu’en

mars 2016. Le nombre de décisions est, in fine, évalué à 73, la période étudiée allant de 1992

à 2015. À partir de ces matériaux, trois parties distinctes composeront cette note. Après un rappel des objectifs qui composent cette étude, il conviendra de déterminer le contenu des différentes règles coutumières utilisées dans les décisions, afin de comprendre les principes coutumiers qui régissent l’autorité parentale, avant d’illustrer notre propos avec des consé-quences liées à l’application des règles coutumières. Enfin, ce sont les modes d’élaboration des décisions qui seront étudiées, et notamment sous l’aspect « sources du Droit ».

Objectifs de la recherche

Conformément aux objectifs généraux du projet de recherche, la présente étude se doit de dresser un panorama des règles coutumières relatives à l’autorité parentale à travers l’analyse des décisions provenant des juridictions coutumières de Nouvelle-Calédonie. Ne se position-nant pas dans un travail qui chercherait à inscrire les règles coutumières dans une volonté de systémisation, l’objectif réside avant tout dans la recherche des règles principales et des consé-quences engendrées. Qui plus est, les dissonances pouvant exister entre le droit coutumier et le droit civil commun se doivent d’être relevées.

I. PRINCIPES

Que cela soit dans le cadre des règles coutumières kanak ou de droit civil commun, la ques-tion de l’autorité parentale aspire à une finalité commune, celle de l’intérêt de l’enfant. Pour accomplir cette finalité, l’autorité se compose de droits et de devoirs. À titre de prolégo-mènes, il est loisible de rappeler que le système coutumier se fonde sur une consubstantia-lité des rapports humains et claniques. Le clan est un élément qui participe pleinement à la vie sociale et juridique de l’individu ; à ce titre, le cas de l’autorité parentale s’inscrit dans une logique où les rapports claniques sont primordiaux. Les règles, construites à travers des prismes différents, divergent dans leurs substances mais également dans les définitions des termes notionnels. Le Code civil dispose, en son article 371-1, que l’autorité parentale est dévolue aux parents de l’enfant. Dans le système coutumier, la prise en charge des enfants est indubitablement liée à la vie des clans. L’autorité parentale est ainsi rattachée à la fois aux parents et aux différents clans. Afin de décrire les caractéristiques essentielles du droit coutumier kanak sur la question de l’autorité parentale, il convient d’étudier la signification de la notion de « parents » pour pouvoir ensuite dresser une typologie des règles relatives à l’exercice de l’autorité parentale.

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I. A. Une possibilité de multiples « parents »

En droit civil commun, les parents sont désignés comme étant « les père et mère » de l’enfant, cette définition s’inscrivant dans la vision traditionnelle de la famille nucléaire, composée des deux parents et de l’enfant. L’autorité parentale est donc inscrite dans un rapport dyadique,

elle s’exerce ainsi communément entre les deux parents224 ou,  dans des cas particuliers, de

façon unilatérale225.

Les règles issues de la coutume kanak ne conditionnent pas l’autorité parentale aux deux seuls père et mère, les parents sont entendus dans un sens élargi puisqu’élaboré en reflet de la conception clanique de la famille. C’est donc une multiplicité de parents qui peut être recon-nue et donc titulaires de droits et devoirs. Dans une décision rendue par la Cour d’appel de Nouméa, l’une des parties invoque le fait que : « la coutume reconnaît donc sans difficulté plu-sieurs parents, les biologiques comme les élevants qu’ils soient les grands-parents ou d’autres membres de la famille ou encore des adoptants, ce point conférant aux enfants la certitude

d’un ancrage familial dans la mesure du respect des gestes coutumiers »226.

Les règles coutumières sont donc claires, l’autorité parentale peut être dévolue aux parents biologiques de l’enfant sans pour autant exclure les membres du clan auquel ce dernier est rattaché. Cette appartenance clanique est primordiale afin de déterminer qui aura l’exercice de l’autorité parentale.

I. B. Le rattachement clanique, élément central de l’exercice de l’autorité parentale

I. B. 1. L’autorité parentale sans geste coutumier paternel : rattachement de l’enfant au clan maternel

Si les clans et leurs membres participent activement à l’exercice de l’autorité parentale, il apparaît que l’appartenance à un clan est exclusive ; ainsi, seul un clan peut exercer l’autorité parentale. Au départ, et contrairement au droit civil commun, la reconnaissance biologique de l’enfant n’emporte pas l’autorité parentale : « le fait d’être géniteur n’emporte pas en soi de statut juridique, ni de droit ni d’obligation à l’égard de l’enfant, la paternité même fondée sur une réalité biologique étant exclusivement un fait social institué par la norme coutumière ;

qu’ainsi le rattachement de l’enfant à un clan et à une terre est déterminant »227. Le geste

cou-tumier est donc l’élément permettant le transfert d’un clan à l’autre, et plus spécialement le transfert du clan maternel au clan paternel. À défaut, l’enfant sera rattaché au clan maternel :

« tant que l’enfant n’a pas été donné aux paternels il est à la charge exclusive des maternels »228.

Quel que soit le cas, le clan maternel est le premier de l’enfant, il y restera à défaut de réali-sation de geste coutumier de la part du père. Il est intéressant de voir qu’ici, le rattachement

224 - Article 372 du Code civil : « Les père et mère exercent en commun l’autorité parentale [...] ».

225 - Article 373 du Code civil : « Est privé de l’exercice de l’autorité parentale le père ou la mère qui est hors d’état de manifester sa volonté, en raison de son incapacité, de son absence ou de toute autre cause ».

Article 373-1 du Code civil : « Si l’un des père et mère décède ou se trouve privé de l’exercice de l’autorité paren-tale, l’autre exerce seul cette autorité ».

226 - CA Nouméa, 26 mars 2015, RG n° 14/145.

227 - CA Nouméa, 9 septembre 2013, n° 2012/59 ; CA Nouméa, 26 mars 2015, n° 14/45. 228 - CA Nouméa, 9 septembre 2013, n° 2012/59.

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biologique au père n’est pas pris en compte alors qu’en droit civil, dans les couples mariés, le

mari est présumé être le père229. En droit coutumier, le lien du sang est pris en compte au seul

bénéfice de l’oncle utérin : article 62 de la Charte des valeurs : « la naissance d’un enfant est un acte de foi et un gage d’avenir pour le clan et sa destinée. La naissance implique la

reconnais-sance du lien de sang avec l’oncle maternel ».

I. B. 2. L’autorité parentale avec geste coutumier paternel : rattachement au clan paternel Le geste coutumier revêt une importance fondamentale au sein de la société clanique kanak. Il est avant tout une reconnaissance symbolique ayant une forte portée sociale et juridique per-mettant, pour le père biologique, de faire reconnaître son statut envers l’enfant. Il est intéres-sant de voir que, comme en droit civil, la portée du mariage est aujourd’hui amoindrie. Il n’est ainsi pas nécessaire à la réalisation du geste coutumier : « même en cas de vie commune hors mariage, l’enfant se voit conférer une place dans le clan du père, à la condition que celui-ci

vienne présenter un geste coutumier afin de réserver l’enfant et la mère. Est considéré

légitime-ment comme père celui qui a accompli vis-à-vis de la mère de ses frères et de leur clan le geste

pour prendre l’enfant »230.

Le geste est donc, dans le cadre de l’autorité parentale, à l’initiative du père biologique. Pour être reconnu, le geste coutumier est soumis à l’acceptation de la mère et des oncles utérins auxquels l’enfant est initialement rattaché  : «  un enfant de statut coutumier ne peut être

reconnu par le père naturel qu’avec l’accord de la mère et des oncles naturels »231. L’acceptation

du geste se manifeste pratiquement par un changement du nom patronymique de l’enfant, qui se verra confier celui du clan du père : « l’appartenance au clan paternel est alors manifestée publiquement par le nom ; […] lorsque les clans ont donné leur parole, la réalité de la filiation

n’est plus réversible, l’enfant appartient au clan dont il porte le nom »232.

Dès lors, une fois le geste coutumier réalisé par le père et accepté par la mère et les oncles uté-rins, l’exercice de l’autorité parentale est dévolu au clan paternel. Ce principe est essentiel à la compréhension des règles coutumières puisqu’il consacre les effets de la reconnaissance du geste coutumier. Elle sera d’ailleurs précisée en jurisprudence : « lorsque les gestes ont été faits pour intégrer l’enfant au clan paternel, il en résulte l’engagement pour le clan paternel de pro-téger, éduquer et élever l’enfant ; […] il lui incombe, et à lui seul, de pourvoir à ses besoins

maté-riels »233. Mais la jurisprudence n’est pas la seule à avoir apporté une telle précision comme le

démontre l’étude de la charte des valeurs et, plus précisément, de son article 63 selon lequel, « l’enfant porte le nom du père et de son clan. C’est de la responsabilité du clan paternel de le maintenir en bonne santé physique et mentale, de l’habiller, de le nourrir, de l’éduquer et de lui donner une place dans la société ».

Ce nouveau rattachement est considéré par la coutume comme étant définitif, le geste coutu-mier ayant des conséquences irrévocables : « l’échange propre à la coutume implique qu’il n’est

229 - Article 312 du Code civil : « L’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari ». 230 - CA Nouméa, 26 mars 2015, RG n° 14/45.

231 - CA Nouméa, 22 décembre 2014, n° 14/310 ; CA Nouméa, 16 février 2015, n° 14/285 ; CA Nouméa, 16 mars 2015, n° 14/286.

232 - CA Nouméa, 26 mars 2015, n° 14/45.

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pas permis de revenir sur la parole qui a été donnée, surtout quand cette parole scelle l’avenir d’un enfant ; […] dès lors l’enfant est lié aux maternels et aux paternels par rapport au geste

cou-tumier qui a été fait »234. Il convient cependant de préciser que le geste coutumier, s’il permet

à l’enfant de porter le nom du clan de son père et à ce dernier d’exercer l’autorité parentale, il ne va pas couper définitivement les liens entre l’enfant et le clan maternel, puisqu’il existe

une possibilité de « naviguer » entre les clans afin de « recueillir les paroles des deux clans »235.

Il existe donc une différence de premier ordre entre l’autorité parentale, telle que le Code civil la conçoit, et les règles coutumières : celle du rôle actif joué par les membres du clan auquel l’enfant est rattaché. En comparaison du droit civil, l’autorité parentale est exercée par un cercle de per-sonnes plus élargi. Toutefois, au-delà de cette divergence il existe un point commun entre les deux droits : l’exercice conjoint de l’autorité parentale entre les père et mère et leurs clans respectifs. I. C. L’exercice de l’autorité parentale : conjoint et clanique

À l’instar du droit civil commun, exception faite du particularisme clanique, l’autorité paren-tale est exercée conjointement entre les père et mère : « les parents vivant en concubinage au moment de la naissance des enfants et ceux-ci ayant été reconnus par les deux parents,

l’auto-rité parentale est exercée conjointement par eux, avec le soutien des membres des clans »236.

De même, lorsque la coutume vient préciser les devoirs de chacun des parents, et ce en fonc-tion de l’appartenance aux clans ou de la séparafonc-tion de fait des parents, l’exercice de l’autorité parentale n’est jamais exercé de façon exclusive par l’un d’eux.

Dans la coutume, le principe de solidarité qui lie les parents se manifeste dans le devoir d’aide et assistance mutuelles et réciproques, et, lorsque les parents ne sont pas mariés, les enfants appartenant au clan du père, celui-ci a l’obligation de les nourrir et les prendre en charge ; il en résulte l’obligation pour le père qui a reconnu les enfants, lorsque les parents, non mariés, vivent séparés, de contribuer aux charges de l’éducation de ses enfants, cette contribution s’appréciant en considération des obligations coutumières, incluant les solidarités familiales, et en considération des ressources respectives des parties.237

L’exercice conjoint de l’autorité parentale entre les père et mère est donc une caractéristique, au même titre que la solidarité clanique, des règles coutumières kanak.

II. CONSÉQUENCES

Suite à la description des caractéristiques principales des règles coutumières en matière d’au-torité parentale, deux conséquences semblent pouvoir être dégagées. La première d’entre elles

réside dans le fait que le père biologique de l’enfant, a contrario du droit civil commun, peut

être exclu de l’autorité parentale si le geste coutumier n’a pas été demandé ou accepté. Les

234 - TPI Nouméa, 21 février 2011, n° 09/1428 ; CA Nouméa, 26 mars 2015, n° 14/45. 235 - CA Nouméa, 26 mars 2015, n° 14/45.

236 - CA Nouméa, 22 décembre 2014, n°14/310 ; CA Nouméa, 16 février 2015, n° 14/285 ; CA Nouméa, 16 mars 2015, n°14/286.

237 - CA Nouméa, 16 février 2015, n° 14/285 ; CA Nouméa, 16 mars 2015, n° 14/66. Adde CA Nouméa, 12 juin 2013, n° 13-33 pour un couple marié.

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demandes de reconnaissances tardives de geste coutumier font d’ailleurs l’objet d’un fréquent contentieux coutumier. Quoi qu’il en soit, la jurisprudence coutumière reconnaît désormais une possibilité de pouvoir lutter contre cette exclusion. Ainsi, si cette dernière ne prend pas la forme d’une reconnaissance de l’autorité parentale au père, entraînant un nouveau rattache-ment clanique, celui-ci a la possibilité, devant les tribunaux coutumiers, de se faire reconnaître une obligation morale de contribuer à l’entretien de l’enfant. En effet, comme la Cour d’appel de Nouméa l’a exprimé, « les principes qui fondent l’obligation d’entretenir l’enfant sur le critère de son appartenance clanique, n’interdisent pas au juge d’entériner l’exécution d’une obligation naturelle quand, formellement, le père qui n’a pas de droit sur l’enfant, se reconnaît

néanmoins l’obligation morale de contribuer à son entretien »238.

Dans un second temps, les décisions étudiées ont permis de rendre compte de la prégnance des clans dans la dévolution de l’autorité parentale ; au-delà, les membres des clans possèdent une réelle influence sur l’éducation et l’entretien de l’enfant. Cette aspiration communautaire empêche d’envisager le retrait de l’autorité parentale aux vues des conséquences qui affecte-raient directement le clan, puisque, comme le souligne la Cour d’appel, « le fait de retirer l’au-torité parentale à la mère, reviendrait à supprimer aux maternels toute aul’au-torité sur l’enfant et tout droit de regard quant à son éducation, ce qui ne serait pas conforme au principe dégagé précédemment, et serait préjudiciable à l’enfant, cette réalité juridique ne correspondant en aucune façon à la réalité coutumière entourant cet enfant, aucun geste coutumier, ni échange

entre les clans n’ayant été diligenté précédemment afin d’établir une telle situation »239.

III. SOURCES

À titre de remarques générales, il nous faut préciser que les arrêts rendus par la Cour d’appel de Nouméa connaissent une grande diversité quant aux fondements juridiques dont les juri-dictions font usage. Une évolution peut être constatée à partir de 2010. Il ressort de notre étude que cette différentiation des arrêts pourrait être liée à l’arrivée de nouveaux magistrats en Nouvelle-Calédonie.

Tout d’abord, les arrêts ante 2010 n’explicitent pas le fondement juridique servant au rendu

de la décision, ce qui aboutit à une motivation très factuelle et lapidaire. Il apparaît, de façon minoritaire, qu’il est fait application du droit civil commun par référence aux textes du code civil. La plus grande partie de ces décisions ne rappelle pas directement la règle de droit (qu’elle soit coutumière ou issue du droit civil commun).

Illustrations :

Aucune motivation en droit  : CA Nouméa, 18/09/95, n°118/95  ; CA Nouméa, 11/12/95 n°118/95 ; CA Nouméa, 20/12/99 n°158/99 ; CA Nouméa, 16/11/98 n°505/97.

Application du droit civil commun : CA Nouméa, 19/04/99, n°353/98 (ici les juges utilisent les articles 377 et 377-1 du Code civil afin de débouter une demande en délégation de l’autorité parentale).

Ensuite, les arrêts post 2010, quant à eux, établissent une véritable explicitation du fondement

coutumier utilisé. En effet, il est ici possible de constater la prégnance des règles coutumières