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B. Les conditions spécifiques

LE CONTENTIEUX PRÉALABLE DU CHANGEMENT DE STATUT

I. B. Les conditions spécifiques

Article 13 al. 2. L’art. 13 al 2 de la loi organique du 19 mars 1999 prévoit que « Dans le délai de cinq ans qui suit la promulgation de la présente loi, toute personne qui justifie que l’un de ses ascen-dants a eu le statut civil coutumier peut renoncer au statut civil de droit commun au profit du statut civil coutumier ». Selon les travaux préparatoires :

On considère en effet que, pour permettre à un certain nombre de personnes de mieux s’intégrer dans les tribus où elles vivent, il faut leur laisser la possibilité de revenir au statut coutumier qui régit le fonctionnement de la communauté. Cet alinéa vise les enfants de parents kanak ayant, par exemple pour divorcer, renoncé à leur statut coutumier. Si ces enfants, devenus adultes, continuent à vivre au sein d’un clan, il paraît logique qu’ils puissent être soumis à ses règles coutumières. 37 Cette possibilité est à l’origine de l’abondante série de décisions rendues en 2004 : l’article 13 al. 2, qui avait pour vocation d’ouvrir une période transitoire permettant de réparer les abus des politiques assimilationnistes menées auparavant, a donc eu une véritable portée pratique

qui n’a pas été éclipsée par sa « valeur symbolique et politique »38. Dans le cadre de cette action,

34 - Koné, 23 juin 2005, n° 176/05 ; n° 175/05 ; n° 174/05.

35 - Art. 16 al. 1 LO : « Toute requête ayant pour objet de demander l’accession ou le retour au statut civil coutumier est motivée et précise le registre d’état civil coutumier sur lequel l’inscription de l’accession ou du retour au statut civil coutumier sera portée ».

36 - Koné, 22 mai 2006, n° 162/2006 ; 6 avril 2006, 97/06 ; 15 juin 2006, n° 171/06. 37 - R. Dosière, sous art. 12.

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les changements de statut sont accordés au terme d’une motivation type. Elle rappelle que le plaideur saisit le tribunal « afin que soit constatée sa volonté de retrouver le statut civil cou-tumier avec toutes les conséquences de droit pouvant en résulter » et demande « le transfert de son acte d’état civil dans les registres des citoyens de statut coutumier ». Faisant systéma-tiquement droit à cette demande, les décisions annulent les anciens actes d’état civil et les suppléent par un nouvel acte dont elles ordonnent l’inscription au registre de statut civil particulier concerné. Les motifs permettant de parvenir à cette décision sont également sté-réotypés : « Le tribunal ne peut que constater la volonté ainsi exprimée de changer de statut et qu’il convient de faire droit à la requête », après mention de la consultation de l’autorité coutumière et de l’avis du ministère public. C’est du fait de l’opposition de celui-ci que cer-taines décisions font état de la preuve de l’ascendance et de la date de forclusion de l’action. Précisons qu’il n’est nulle part trace dans le contentieux de l’article 13 al. 3 selon lequel « La requête est rejetée si le juge constate que les intérêts du conjoint, des ascendants, des des-cendants, des collatéraux et des tiers sont insuffisamment préservés » : la demande repose dès lors sur la volonté discrétionnaire du requérant et échappe au contrôle d’opportunité pourtant prévu par la loi. L’absence d’invocation de ce contrôle par le ministère public, par ailleurs vigilant sur le respect des autres conditions, laisse imaginer que les différents intérêts étaient préservés mais il reste étonnant qu’aucune décision ne fasse la moindre mention de cette limite légale, témoignant fortement de la politique jurisprudentielle favorable à la faci-litation du changement de statut.

Preuve de l’ascendance – L’action de l’article 13 al. 2 a été ouverte temporairement pour « toute personne qui justifie que l’un de ses ascendants a eu le statut civil coutumier ».

Plu-sieurs décisions mentionnent un avis défavorable du ministère public « faute de justificatif que

l’intéressé avait un ascendant de statut coutumier ». Deux observations peuvent être faites. D’une part, cet avis défavorable n’aboutit pas au rejet de la demande mais à la production ultérieure de la preuve : il est ainsi précisé que le requérant produit l’acte de naissance de l’un

de ses deux ascendants, de statut coutumier, soit par courrier39, soit à l’audience40, soit dans

un cas plus original, en cours de délibéré, le requérant ayant expliqué à l’audience qu’il

four-nirait les documents41. Le plus souvent, une fois la preuve apportée, la décision précise que le

ministère public ne s’oppose plus à la demande42. La preuve apportée est le plus souvent l’acte

de naissance de l’un des parents mais il est possible qu’elle concerne un « ascendant » de degré plus éloigné : un jugement relate que le père de la requérante avait fait une demande de chan-gement de statut et avait à cette occasion produit son acte de naissance « qui montre qu’il est

le fils de François X. de statut particulier »43. L’absence de preuve, et l’opposition du ministère

public liée, est à l’origine de la seule décision rejetant une demande de changement de statut fondée sur l’article 13 al. 2. Le ministère public s’opposait à la requête : outre que le requérant ne pouvait demander le changement de statut de sa femme et de l’un de ses enfants majeur, il ne produisait ni les actes de naissance de ses enfants, « ni le sien propre établissant qu’il serait de statut coutumier ». La décision précise qu’il a été indiqué au requérant par courrier les conséquences de cette absence de production, et les avoir rappelés à l’audience « sans avoir

39 - Ex. Koné, 19 mai 2004, 351/2003 ; 350/2003 ; 345/2003 ; 348/2003 ; 351/2003 ; 347/2003 ; 346/2003. 40 - 214/2003.

41 - Koné, 19 mai 2004, 324/2003.

42 - En tout état de cause, l’opposition maintenue ne fait pas obstacle à ce qu’il soit fait droit à la demande : ex. 114/2003. 43 - Koné, 19 mai 2004, 114/2003.

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d’effet », avant de conclure que le tribunal « ne peut que constater la carence du requérant et

qu’il convient de rejeter la requête »44.

D’autre part, les autres décisions sont totalement silencieuses sur cette preuve : il est dès lors simplement possible de déduire de ce silence, de l’absence d’opposition du ministère public et de la formule générale « les conditions légales prévues par les articles 13 alinéa 2, 14 et 16 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 sont remplies » que la preuve avait été apportée. Forclusion – Le pic de décisions rendues en mai et juin 2004 correspond à l’approche du terme de cette action largement ouverte mais à titre transitoire. Certaines décisions rendues en 2005 ont précisé la date limite de recevabilité des demandes, en réponse à l’avis défavorable du procureur de la république invoquant la forclusion de demandes formées en 2004. Selon ces décisions, la renonciation doit être exercée dans le délai indiqué « c’est-à-dire jusqu’au 21 mars

2004, cette date étant un dimanche, le délai est repoussé jusqu’au 22 mars »45. La date retenue

est contestable, en ce qu’elle repose sur la date d’entrée en vigueur de la loi quand le texte recourt au critère de sa promulgation : il faut toutefois relever que les demandes ainsi formées en 2004 auraient également été dans les délais si ces derniers avaient été calculés en tenant

compte de la promulgation (19 mars 2004)46. Passé cette date, outre que le contentieux

dimi-nue soudainement, les oppositions du ministère public se multiplient, ce dernier invoquant souvent la forclusion de l’action et l’absence de réunion des conditions légales exigées par les autres fondements.

Article 11 – Avant la loi organique, les changements de statut d’un mineur étaient liés à un changement de filiation. Outre les hypothèses d’adoption déjà rencontrées, une décision de 1993 porte sur le cas d’un enfant dont l’acte de naissance a été établi avant la reconnaissance par la mère et, dès lors, porté sur les registres de droit commun : une fois l’enfant reconnu, deux mois après la naissance, la mère demande la transcription sur le registre de statut particulier, ce

qui est accordé sans motivation particulière47. Hors de ces modifications de filiation, le

change-ment ne pouvait se faire sur la base de la renonciation : une décision de cette époque rejette la demande d’un père de statut de droit commun pour son enfant mineur, les juges estimant que la renonciation ne peut résulter « que d’un acte de volonté de la personne qu’elle concerne et non de la manifestation de la volonté d’un tiers fut-il le père » ; dès lors, l’enfant né de statut civil particulier « ne peut en changer en raison de circonstances indépendantes de sa propre volonté […] jusqu’au jour où majeur il en décide autrement par une manifestation de volonté

claire et expresse »48. La rigueur de la solution, conforme à la jurisprudence locale antérieure49,

peut se comprendre du fait de l’importance du changement de statut de l’époque  : celui-ci ne pouvait jouer qu’en sens unique et de façon irrévocable. La loi organique va mettre fin à cette interprétation par son article 11, au terme duquel : « Le statut civil coutumier peut être demandé au bénéfice d’un mineur par toute personne de statut civil coutumier exerçant dans les faits l’autorité parentale. » Sur ce fondement, les juges accordent le changement de statut au terme d’une motivation largement identique à celle fondée sur l’article 13 al. 2, seul changeant,

44 - Koné, 5 avril 2005, 31/05. 45 - Koné, 23 juin 2005, n° 176/05.

46 - 176/05 : requête du 9 mars ; Koné, 23 juin 2005, 175/05 : 16 mars. 47 - Koné, 25 août 1993, n° 76/93.

48 - Koné, 20 oct. 1993, 100 bis/93. 49 - Voir R. Lafargue, p. 37-38.

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sauf exception50, le texte visé au profit de l’article 11 de la loi organique. Là encore, il est possible

de souligner que certaines conditions prévues par la loi sont totalement absentes des décisions. En effet, l’article 11 précise que « La requête est rejetée si le juge constate que les intérêts du mineur, ou de l’un de ses ascendants, descendants ou collatéraux sont insuffisamment préservés. Le mineur capable de discernement est entendu par le juge. L’audition du mineur peut être écartée par une décision spécialement motivée ». Comme pour l’article 13 al. 2, aucune décision n’évoque la préservation, suffisante ou insuffisante, des intérêts visés, quand on pourrait estimer que, du fait de l’incapacité du mineur, les juges seraient plus attentifs à ce contrôle. Les décisions ne portent pas plus mention de l’audition du mineur, pourtant très souvent capable de

discer-nement51 : or, en la matière, c’est l’absence d’audition qui devrait faire l’objet d’une décision

spé-cialement motivée. Il est difficile d’interpréter ce silence, notamment pour savoir s’il relève plus d’une volonté d’accorder largement le changement de statut à un enfant vivant dans une tribu ou de respecter les conceptions de la famille kanak.

Absence de forclusion – Après 2004, les demandes fondées sur l’article 13 al. 2 sont frappées de forclusion, la loi organique n’ayant ouvert cette faculté que pour une période déterminée. Les décisions vont faire échapper les demandes faites pour un mineur à cette règle de for-clusion, au motif que « le délai de forclusion prévu à l’article 13 alinéa 2 […] ne concerne que les personnes de statut civil de droit commun désirant accéder au statut civil coutumier et qui peuvent justifier qu’ils ont eu un ascendant de statut civil coutumier ; qu’en l’espèce la demande est fondée sur les dispositions de l’article 11 de la loi, qui ne comporte aucun délai

d’action »52. Ainsi, l’article 11 n’est pas une modalité de l’article 13 al. 2 lorsque la demande est

faite pour un mineur mais une action dissociée, dont la finalité est de permettre à un mineur vivant dans une tribu de voir son statut aligné sur sa réalité sociologique. Cette dissociation peut trouver un argument lointain dans l’article 13 lui-même, qui porte ses propres

disposi-tions en présence d’un mineur53, mais semble surtout s’inscrire dans une politique

jurispru-dentielle favorable au changement de statut dans un but de concordance sociologique. Qualité du demandeur – Il est difficile de cerner le rôle accordé par les juridictions à l’accord de l’autre parent. Il est parfois mentionné, par exemple lorsqu’il est précisé que la « mère du

mineur s’est présentée à l’audience et a donné son accord pour le changement de statut »54.

Dans un cas, une décision précise que le procureur ne s’oppose pas à la demande mais requiert

que l’accord de la mère soit recueilli, ce qui est fait à l’audience55. Pourtant, cet accord, comme

cette exigence du procureur, ne se retrouve pas dans de nombreuses décisions, sans qu’il soit

possible d’interpréter ce silence56 : absence d’autorité parentale de fait de la mère, accord

50 - Certaines décisions relatives au changement de statut d’un mineur visant l’article 13 al. 2, sans faire la moindre mention de l’article 11, sans qu’il soit possible de savoir si cette mention est due à une intention réelle ou à l’usage de décisions types, ex. : Koné, 19 mai 2004, n° 349/2003 ; 339/2003.

51 - Ex. Koné, 19 mai 2004, n° 200/2004 : 13 ans ; 349/2003 : 17 ans. 52 - Koné, 23 juin 2005, n° 174/2005.

53 - Al. 4, mais qui concerne l’hypothèse d’abandon du statut coutumier, sans que les travaux préparatoires de la loi organique ne semblent vouloir dissocier les modalités des différentes renonciations prévues à l’article 13. 54 - Koné, 19 mai 2004, n° 38/2004 RG ; 36/2004 RG ; 34/2004 RG ; 37/2004 RG ; semblant plus clairement encore en

faire une condition de changement de statut, Koné, 23 juin 2005, n° 174/2005 : « attendu que le père est de statut coutumier et que la mère présente à l’audience, consent à ce changement de statut ».

55 - 19 mai 2004, n° 349/2003.

56 - Ex. ne faisant aucune mention de la mère, sans qu’il semble que celle-ci soit décédée ou privée de l’autorité paren-tale, Koné, 19 mai 2004, n° 200/2004 ; n° 46/2004.

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donné mais non mentionné ou absence de vérification par les juges ? Cet intérêt à éclipse pour l’avis de l’autre parent contraste avec la sévérité dont fait preuve la juridiction dans un cas très particulier, dans lequel la demande était formée par un majeur « n’ayant jamais pu obtenir l’adoption de l’enfant car celui-ci est de droit commun ». Cette demande est rejetée, non sans un effort de pédagogie, la décision expliquant qu’« Il est possible à la mère naturelle de for-mer la demande de changement de statut. Il est également possible que Madame K. obtienne l’adoption de l’enfant et son changement de statut ». Il est pourtant possible de s’étonner de cette solution en présence d’une requérante ayant « demandé l’adoption de l’enfant qui vivait avec eux mais que, malgré un PV de palabre, la demande n’a jamais aboutie. À ce jour, l’enfant

vit toujours avec elle »57. Les juges semblent succomber à un réflexe de droit commun là où

l’article 11 de la loi organique tient compte de la société kanak en ouvrant l’action à « toute personne de statut civil coutumier exerçant dans les faits l’autorité parentale ». Les travaux

préparatoires sont sans ambiguïté : l’expression « dans les faits » a été ajoutée par amendement

pour tenir compte du fait que « dans les tribus kanak que, parfois, un parent qui n’exerce pas

l’autorité parentale au sens classique du droit civil l’assume pourtant dans les faits »58. Ainsi,

l’un des deux seuls cas de rejet d’une demande de changement de statut s’avère peu justifié au regard de la loi.

L’article 13 al. 1 – Plus rares mais ponctuelles sont les applications de l’article 13 al. 1 au terme duquel « Toute personne ayant eu le statut civil coutumier et qui, pour quelque cause que ce soit, a le statut civil de droit commun, peut renoncer à ce statut au profit du statut civil coutu-mier ». Il s’agit dans les cas rencontrés de demandeurs, nés sous le statut civil coutumier, ayant

accédé au statut de droit commun par décision de justice, parfois59 lorsqu’ils étaient mineurs60,

et demandant ensuite le retour au statut civil coutumier. Les demandeurs les plus âgés

solli-citant un changement de statut relèvent de cette hypothèse61. La motivation dans ces cas est

identique62 à celle retenue pour les demandes fondées sur l’article 13 alinéa 2, au point parfois

que cet article soit cité63 à la place de l’article 13 alinéa 164. Seule la formule du dispositif est

adaptée, en ce que le tribunal « prononce le retour au statut coutumier » de l’intéressé. L’article 15 – Certaines actions sont introduites par des demandeurs de statut coutumier pour obtenir le statut coutumier, pour eux ou leurs enfants. Leur demande étant sans objet, le

tribu-nal, suivant la position du parquet, peut se contenter de dire n’y avoir lieu à statuer65. La

solu-tion est pourtant minoritaire : le plus souvent, les décisions vont invoquer l’article 15 de la loi organique. Lorsque cette référence est développée, les décisions estiment « toutefois, que l’ar-ticle 15 de la loi permet à toute personne de faire déclarer qu’elle a ou qu’elle n’a point le statut coutumier. Qu’en l’espèce il y a lieu de déclarer que l’enfant […] est de statut coutumier », le

57 - Koné, 25 avril 2005, 58bis/05.

58 - Ass. Nat., Comm. Lois, R. Dosière, 16 déc. 1998, n° 1275, sous art. 10. 59 - Koné, 6 mai 2004, n° 100/2004 : 28 ans ; Koné, 5 avril 2005, n° 33/05 : 36 ans. 60 - Koné, 6 mai 2004, 97/2004 : 10 ans ; 91/2004 : 16 ans ; 102/2004 : 17 ans.

61 - Ex. 97/2004 : 52 ans ; 100/2004 : 53 ans ; 91/2004 : 56 ans ; 33/05 : 74 ans ; 102/2004 : 42 ans.

62 - À l’exception de la décision 33/05, du fait de deux particularités du litige  : l’opposition du ministère public contestant la qualité de chef de clan de la requérante, voir supra ; la difficulté à clairement retracer les statuts de la requérante : au moment de sa naissance, les registres de statut civil particulier n’existaient pas et le jugement emportant renonciation au statut particulier est ambigu.

63 - 97/2004 ; 100/2004.

64 - 91/2004 ; 102/2004 citant l’article intégralement, 33/05. 65 - Ex. Koné, 19 mai 2004, n° 05/2004 RG.

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dispositif reprenant cette déclaration66. La terminologie utilisée par les dispositifs n’est pas

clairement stabilisée : des décisions plus récentes préfèrent à cette « déclaration » le « constat »

que les requérants sont de statut coutumier67 ou combinent les formules et « constate que

la requête est sans objet ; déclare que Mme B. est de statut coutumier », avant d’ordonner la

transcription du jugement sur les registres68. Précisons que, comme pour les mineurs, cette

« constatation » échappe à la règle de forclusion de l’article 13 alinéa 269. Il est possible de

relever deux situations particulières.

D’une part, certains requérants ignoraient être de statut coutumier du fait d’un changement de filiation. Les décisions, pour déclarer qu’ils relèvent déjà de ce statut, précisent que la reconnaissance par un père de statut droit commun ne modifie pas ce statut, sauf légitimation

par mariage70. La même solution a été retenue pour l’adoption simple : ainsi d’une requérante,

née d’une mère de statut particulier puis adoptée par un père de droit commun, pour laquelle les juges rappellent que « l’adoption simple n’emporte pas le changement de statut, sauf si

l’enfant est légitimé par mariage, ce qui n’est pas le cas en l’espèce »71. Ces décisions perpétuent

ainsi une jurisprudence locale antérieure à la loi organique72, au mépris de la réserve

d’inter-prétation posée par le Conseil constitutionnel selon laquelle «  si la filiation de cet enfant venait à être établie à l’égard de l’autre parent, il ne saurait conserver le statut civil coutumier

que si ce parent a lui-même le statut civil coutumier »73.

D’autre part, ce même article 15 est utilisé en présence d’une erreur matérielle, particulière-ment pour les requérants nés au Vanuatu, et inscrits de ce fait sur le registre de droit commun, faute d’un registre de statut particulier : procureurs et juges s’accordent en ce cas pour consta-ter que le requérant est déjà de statut coutumier et que « c’est par la suite de la naissance au Vanuatu que la requérante a été inscrite sur les registres du droit commun, alors que ses deux parents sont de statut coutumier ». L’acte de naissance est annulé, le jugement lui supplée et ordonne sa transcription sur les registres de l’état civil des citoyens de statut coutumier de

Nantes (France)74.

Pour clore ce bilan, on relèvera l’absence d’utilisation de l’article 12, enfermé dans des condi-tions strictes : action entre 18 et 21 ans, père ou mère de statut coutumier, preuve d’une