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PARTIE III : ANALYSES, RESULTATS ET DISCUSSIONS

3. Q UESTION DE RECHERCHE N °3

Quelle est la perception des élèves quant à leur évolution au fil des séances ? 3.1. Données recueillies et dépouillements

Afin de répondre à cette question, nous pouvons nous baser sur leurs résultats figurant sur la fiche bilan, fiche qu’ils ont dû remplir tout au long des quatre séances après chaque activité de groupe. Cette fiche bilan comporte quatre éléments, répétés chacun quatre fois vu qu’il y a quatre séances :

1) J’ai donné mes idées.

2) J’ai écouté les idées des autres.

3) Les autres élèves ont écouté et pris en compte mes idées.

4) Nous avons réussi à faire le travail demandé.

Les élèves devaient entourer un chiffre entre un (1) et cinq (5) en fonction du degré de correspondance à la situation qu’ils avaient vécue durant l’activité. Le total pour chaque activité est de 20 au maximum, ce qui donne, pour toute la fiche bilan, un total maximum pouvant atteindre 80 points.

Voici un petit tableau synthétisant les résultats de cette fiche bilan pour les élèves du groupe cible des deux classes. Chaque question comporte cinq points au maximum, une fiche en comprend donc vingt au total. En additionnant toutes les fiches bilan entre elles nous obtenons un total maximum de 80 points que nous mettons en pourcentage.

Classe Elèves Fiche bilan 1 Fiche bilan 2 Fiche bilan 3 Fiche bilan 4

Total fiche bilan

1 Elève A

++

5 5 4 4 5 5 4 4 5 5 4 5 5 5 5 4 66/8084%

1 Elève B -- 5 5 3 2 4 5 2 1 5 5 4 5 5 5 5 5 75/8094%

1 Elève C + 4 5 4 5 4 4 5 5 4 4 4 5 5 5 5 4 72/8090%

1 Elève D - absent Absent absent absent Absent

2 Elève A

++

5 4 5 4 4 4 4 4 5 5 5 5 5 5 5 5 74/8093%

2 Elève B -- 2 5 1 3 3 5 3 5 1 3 1 5 2 5 2 5 35/8044%

2 Elève C + 4 5 4 4 5 5 5 4 5 5 5 5 5 5 5 5 76/8095%

2 Elève D - 5 4 5 3 5 4 4 4 5 4 4 5 5 5 5 5 72/8090%

Par ailleurs, nous nous baserons sur le questionnaire final (voir annexe n°16), présenté plus en détail dans la question de recherche n°4 de ce même chapitre ainsi que sur les entretiens que nous avons eus avec les élèves cibles des deux classes.

3.2. Résultats

Grâce à ce tableau, nous pouvons remarquer qu’au fil des séances les élèves de haut statut des deux classes ont, selon eux, pu donner leurs idées qui ont été écoutées par les autres membres de leur groupe. De plus, ils ont, toujours en fonction des résultats, écouté les idées des autres et le travail de groupe a été fait. En revanche, nous remarquons que les élèves de bas statut des deux classes sont plus critiques. D’après eux, le travail de groupe, notamment lors des deux premières séances n’a pas été réalisé correctement. De plus, ils considèrent parfois que leurs idées n’ont pas été écoutées et prises en compte par les autres élèves tandis qu’un des élèves de la classe n°2, l’élève B, estime qu’il n’a pas pu donner ses idées au fil des séances.

Prenons d’abord les élèves de la classe n°1. Pour l’énoncé « J’ai donné mes idées », lors de la séance n°1, les élèves oscillent entre 4 et 5 sur 5 points au maximum, ce qui montre qu’ils ont pu donner leurs idées comme ils le voulaient. Ce sont les mêmes indices que nous remarquons pour les quatre autres séances bien que l’élève B ait mis un point de moins, passant de 5 à 4 pour la séance n°2 et que l’élève C ait ajouté un point pour la séance n°4.

En ce qui concerne les élèves de la classe n°2, nous voyons que les résultats sont les mêmes sauf pour l’élève B. En effet, ses camarades estiment qu’ils ont pu donner leurs idées de manière adéquate durant les quatre séances, résultats variant un petit peu selon les élèves et les séances, restant stables pour l’élève D durant la séquence entière. En revanche, l’élève B considère qu’il n’a pas pu donner ses idées facilement : 2 pour la première séance, 3 pour la deuxième, 1 pour la troisième séance et finalement 2 pour les sketches. Rappelons que ces points sont établis sur un maximum de 5 par items.

En ce qui concerne l’influence dans le groupe, l’élève B de la classe n°1 a eu le sentiment que ses idées n’étaient écoutées qu’à partir de la troisième séance et totalement prises en compte à la quatrième séance. Pour la première, elle était plutôt mitigée avec 3 points sur 5 et lors de la deuxième elle attribuait seulement 2 points sur 5. Quant à l’autre élève B, il considère que le moment où l’on a le plus pris en compte ses idées se situe durant la séance n°2 avec 3 points sur 5, les séances n°1 et n°3 comptabilisant chacune 1 seul point et la dernière 2 points.

3.3. Discussions

3.3.1. La participation

Au fil des séances, ainsi que nous l’avons présenté comme éléments de réponses aux deux premières questions de recherche, nous avons montré que la participation au travail de groupe, notamment par des propositions faites, est un facteur significatif pour évaluer les statuts des élèves (Cohen, 1994). Grâce aux fiches bilan que nous avons fait remplir aux élèves après chaque activité, nous pouvons mettre en lumière leur ressenti par rapport aux nombreuses observations que nous avons relevées durant cette séquence.

Nous voyons ainsi que la participation de l’élève B, en tant qu’élève de bas statut, est peu fréquente lors des quatre séances. Nous l’avions déjà remarqué en classe, mais plus encore lors des analyses des données, notamment pour les deux questions de recherche précédentes. Nous avons maintenant la certitude que cet élève n’a que très peu participé aux activités, du moins pour ce qui est de donner ses idées, il l’écrit d’ailleurs lui-même. Nous pouvons compléter cette analyse en intégrant les réponses que cet élève nous a données lors de l’entretien final que nous avons eu avec lui.

Ozz : Je parlais quand même un peu, mais pas trop.

E : Pas trop. Et pourquoi tu ne parlais pas trop ?

Ozz. : Ben, parce que j’avais pas trop trop d’idées et que au début j’arrivais pas trop à m’intégrer dans le groupe.

E : Sais-tu pourquoi tu n’arrivais pas trop à t’intégrer dans le groupe ? Ozz. : Aucune idée.

E : Aucune idée ? Les autres ont-ils essayé de t’intégrer au groupe ou… ? Ozz. : Oui, ils ont essayé. Après j’y suis arrivé.

Nous voyons donc que non seulement cet élève avait peu d’idées en relation avec le thème des troubles du comportement alimentaire, mais qu’il avait par ailleurs de la peine à s’intégrer dans le groupe. Nous l’avons remarqué lors de la première séance où il s’est éloigné physiquement du groupe. Cohen (1994) explique que : « le langage du corps est un bon indicateur de statut. Un élève qui n’a pas accès au matériel sera fréquemment séparé physiquement du reste du groupe. » (p.35). En outre, elle écrit que les élèves de bas statut vont être plus souvent en retrait que leurs camarades de statut supérieur, ce que nous avons aussi constaté durant la totalité des séances.

3.3.2. L’influence

Ce que nous venons d’énoncer dans la partie précédente nous amène à parler de l’influence des élèves dans les interactions de groupe. Ont-ils aussi l’impression que certains d’entre eux sont plus influents que d’autres ? Nous n’avons pas demandé aux élèves de nous citer des noms, mais par un des éléments de la fiche bilan, les autres élèves ont écouté et pris en compte mes idées, nous pouvons établir des liens entre l’influence ressentie par les élèves et l’influence réelle qui s’est produite au fil des séances et que nous avons observée et mise en avant dans les parties précédentes. Cette question est semblable à celle qui se trouve dans le questionnaire final.

Une fois encore, nous constatons que les élèves de haut statut ont eu l’impression que leurs camarades ont écouté et pris en compte leurs idées. Les élèves A et C des deux classes ont des réponses qui varient entre 4 et 5 pour les quatre séances, ainsi que pour l’élève D de la classe n°2. Relevons le fait que l’élève D de la classe n°1 était absent et que nous n’avons pas pu récupérer ses fiches bilan. En revanche, les élèves B de statut bas des deux classes, ne partagent pas ces réponses. La prise en compte des idées est un élément essentiel pour la participation et l’influence des élèves dans le travail de groupe. Les élèves de statut haut sont souvent plus influents que leurs pairs (Cohen, 1994). Cette auteure explique d’ailleurs que les élèves qui participent le plus à la tâche sont ceux qui ont commencé à parler au début de l’activité. De plus, Cohen (1994) indique que les élèves de statut bas voient souvent leurs

idées ignorées, car ils sont mis de côté, physiquement mais aussi dans la tâche. Nous percevons donc à travers ces résultats ce que les élèves ont ressenti durant les activités, notamment pour ces deux élèves de statut faible dont les idées n’ont pas toujours été prises en compte. Bien que l’élève B de la classe n°2 ait ressenti cela tout au long de la séquence, nous trouvons étonnant que celle de la classe n°1 ne l’ait pas éprouvé également, car elle ne l’a pas évoqué durant son entretien :

Etudiante : Est-ce que tu as eu l’occasion de donner tes idées pendant les discussions ? Mél.(élève B) : Oui.

E : Souvent ? Mél. : Oui.

E : Et est-ce que tu étais la seule à parler ou les autres parlaient aussi ?

Mél. : Non, non. Les autres parlaient aussi. Parfois j’étais la seule, mais il y avait aussi les autres.

Cependant, elle considère en effet qu’il y a eu une évolution car elle nous dit :

E : D’accord. Maintenant que c’est passé, est-ce que tu as l’impression qu’il y a quelque chose qui a changé avec tes camarades ?

Mél. : Heu…

E : Est-ce que tu penses qu’ils sont plus à l’écoute, moins à l’écoute ? Mél. : Plus à l’écoute.

E : Plus à l’écoute ? De ce que tu dis, à ton avis?

Mél. : Oui.

E : Et toi ? Est-ce que tu es plus à l’écoute d’eux ou pas ?

Mél. : Oui. J’ai toujours plus écouté mais encore plus maintenant. J’ai toujours bien écouté mais là c’est encore plus.

Nous remarquons donc qu’elle a senti cette évolution et qu’elle en est contente, apparemment.

Nous avons aussi ce sentiment à l’égard de l’élève B de la classe n°2 qui nous a dit que : Etudiante : Tu penses que les autres sont aussi plus à l’écoute de toi ?

Ozz.(élève B) : Oui.

E : C’est bien ça.

E : Et est-ce que pendant que vous discutiez, tu étais plutôt le seul à parler ou pas du tout ? Ozz : Je parlais quand même un peu mais pas trop.

E : Pas trop. Et pourquoi ne parlais-tu pas trop ?

Ozz. : Ben, parce que j’avais pas trop trop d’idées et que au début j’arrivais pas trop à m’intégrer dans le groupe.

E : Tu sais pourquoi tu n’arrivais pas trop à t’intégrer dans le groupe ?

Ozz. : Aucune idée.

E : Aucune idée ? Les autres ont-ils essayé de t’intégrer au groupe ou… ? Ozz. : Oui, ils ont essayé. Après j’y suis arrivé.

L’évolution semble moins évidente mais est quand même présente.

Afin de mettre en évidence le fait qu’une élève de statut faible, l’élève D de la classe n°2, a quant à elle eu l’impression d’être bien écoutée, nous pouvons constater, comme l’écrit Cohen que « des membres de bas statut peuvent être plus influents que des membres de haut statut. » (1994, p. 34). Cette élève, nous l’avons signalé, s’entend bien avec ses camarades.

D’ailleurs, nous n’avons pas perçu durant les quatre séances le même comportement de ses pairs face à elle qu’envers son homologue l’élève B. Elle n’a jamais été séparée du groupe physiquement. Au contraire elle en était bien souvent le centre et parlait beaucoup avec ses camarades. Ceux-ci acceptaient ses propositions. Nous l’avons noté particulièrement dans la séance n°3 où trois de ses propositions sont acceptées par l’élève A et trois autres par l’élève C, bien que son influence ne soit pas égale à celle des deux élèves de statut élevé de sa classe.

Elle est en outre très grande et se manifeste dans sa manière de se tenir, de parler mais aussi dans l’assurance dont elle fait preuve durant le sketch où elle n’a eu que 2 secondes de temps de parole de moins que le premier élève, l’élève A.

3.3.3. La difficulté à entrer dans les apprentissages

Nous avons réussi à faire le travail demandé. Il n’est pas forcément aisé de répondre à cette question assez générale. Pourtant, elle permet de voir à quel point les élèves arrivent à porter un regard critique sur ce qu’ils ont fait. Une fois de plus, nous retrouvons les élèves de statut haut des deux classes indiquant entre 4 et 5 points sur 5 pour cet énoncé lors des quatre séances. Selon leurs dires, la constance semble réelle au fil de cette séquence. Quant aux élèves de statut bas, nous relevons qu’ils sont plus critiques. L’élève B de la classe n°1 considère que le travail n’a pas été effectué correctement lors des deux premières séances.

Peut-on dire qu’il existe un rapport avec le fait que les autres élèves n’ont pas écouté ses idées ? En analysant l’entretien que nous avons passé avec cette élève, nous n’avons trouvé aucun indice mettant ces deux faits en relation. Pour les deux dernières séances, cette élève a indiqué 5 points lors de l’évaluation du travail effectué. Peut-être qu’au moment de l’entretien, elle ne s’est remémorée que les séances qui se sont bien déroulées. Nous ne pouvons pas le certifier.

L’élève B de la classe n°2 n’a, quant à lui, trouvé qu’une seule séance, la première, qui a posé problème pour le travail effectué. Moins critique que sa camarade de l’autre classe, il a

inscrit 3 points à propos de cette question. À vrai dire, cette séance fut plutôt chaotique dans la plupart des groupes et cela pour plusieurs raisons. Tout d’abord, ce fut la première à laquelle ils participaient en notre compagnie. Bien que les élèves nous connaissent, nous n’avions jamais travaillé ensemble auparavant. Par ailleurs, le thème de cette activité n’était pas introduit au début de la séance, mais présenté seulement à la fin. De plus, ils avaient comme support des images qui laissaient libre court à l’imagination et ils devaient écrire des phrases à leur sujet. La consigne, qui paraît peut-être très générale et vaste, a peut-être perturbé plusieurs élèves. Enfin, comme nous l’indique Cohen (1994), la nature de la tâche peut entraîner des difficultés chez les élèves et les troubler. Nous émettons l’hypothèse que ces divers éléments ont déstabilisé certains élèves et que de ce fait ils n’ont pas considéré que le travail était terminé. Nous pouvons aussi le supposer en nous basant sur les résultats des autres séances de cet élève qui a inscrit 5 points lors des trois autres séances pour cet énoncé : nous avons réussi à faire le travail demandé.

C’est le même scénario pour l’élève D de cette même classe qui n’a donné que 3 points à cette question après la première séance, mais par la suite en a inscrit 4 puis 5.

3.4. Bilan

En conclusion de cette question de recherche (quelle est la perception des élèves quant à leur évolution au fil des séances ?), nous pouvons dire que les élèves les plus critiques envers eux-mêmes et les activités sont les élèves de bas statut. Assez proches de diverses observations que nous avons pu effectuer, ils n’hésitent pas à inscrire le nombre de points qui leur semble juste face à telle ou telle question. De plus, nous retrouvons certains de ces éléments dans leurs réponses à l’entretien final réalisé après la dernière séance.

Par ailleurs, nous remarquons que les élèves de haut statut considèrent que tout s’est bien passé en nuançant parfois leur réponse. Ils le certifient dans leur entretien final. Comme leurs pairs de statut faible, ils rejettent la faute sur un élève de statut bas si quelque chose ne va pas. Nous avons repéré cette attitude lors de l’entretien avec l’élève A de la classe n°2 qui considérait que son camarade l’élève B ne participait pas assez aux discussions et ne s’intégrait pas suffisamment (voir annexe n°17). Le même phénomène s’est produit pour les élèves A et B de la classe n°1 qui estimaient que parfois l’élève D parlait trop (voir annexe n°17).

En outre, nous réalisons que les élèves de statut le plus bas (les élèves B) n’ont pas eu l’impression que leurs idées étaient suffisamment écoutées et prises en compte par les autres

élèves du groupe. Ils relèvent cependant une certaine évolution autant de leur part que de celle de leurs pairs dans l’entretien final.