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3- Objectifs et plan de la thèse

4.3 Dans les plasmas d’argon-oxygène

4.3.4 La puissance déposée à la surface du substrat dans les plasmas

Nous avons vu dans la partie consacrée à l’étude des plasmas d’argon que la puissance Pin déposée par le plasma à la surface du substrat étudié dépend essentiellement des puissances dues aux bombardements électronique et ionique, et à la recombinaison électron-ion à la surface. Nous avons montré que dans le cas de l’argon pur, la somme de ces trois contributions est très proche de la puissance totale mesurée par la méthode calorimétrique. Ce résultat nous a permis de calculer la densité électronique du plasma en combinant les résultats de la méthode calorimétrique et ceux du tracé de Boltzmann modifié. Dans cette section, nous discuterons de l’applicabilité de cette technique à des plasmas d’ArO2 obtenus dans différentes conditions de pression et de puissance micro-onde.

Avant d’appliquer cette technique aux plasmas d’ArO2, il apparaît important de voir à quel point l’égalité entre la puissance totale mesurée par la méthode calorimétrique et la somme des trois contributions précédemment énoncées est valide en présence d’ions négatifs. En effet, les décharges contenant de l’O2 font intervenir plusieurs autres par- ticules chargées qu’il convient de considérer dans l’analyse du bilan énergétique à la surface. Dans ce type de plasma, en plus des électrons, on trouve les ions positifs et négatifs de l’atome d’oxygène (O+ et O), les ions de l’oxygène moléculaire (O+2, O2), et ceux de l’ozone (O3−). Généralement, l’apport de ces trois dernières espèces au bilan de puissance des particules arrivant à la surface est négligeable [126]. Concernant les ions négatifs, la majorité d’entre eux n’atteint pas la surface du substrat du fait du potentiel positif de celui-ci (potentiel flottant). Par conséquent, leur contribution au chauffage du substrat peut également être négligée. Toutefois, comme on a pu le voir dans les sections précédentes, la présence de ces ions négatifs altère les propriétés de la décharge lorsque leur densité est importante (dans des plasmas à forte électronégativité). Dans cette situation, les équations permettant de calculer les contributions électronique et ionique (Eq. (3.4) et Eq. (3.6) respectivement) doivent être réévaluées pour tenir compte des changements apportés par les ions négatifs [127].

La présence des molécules du dioxygène dans la décharge ajoute des contraintes supplémentaires à l’analyse du bilan de puissance à la surface. En effet, les réactions d’association de l’oxygène atomique sur la surface ne sont pas négligeables [128]. L’énergie

issue de ces réactions doit donc être prise en compte dans l’analyse. De plus, comme c’est le cas pour l’argon, l’oxygène moléculaire peut s’exciter par impact électronique. La désexcitation des états vibrationnels de la molécule d’O2 peut alors contribuer au chauffage de la surface. Toutefois, les probabilités de réaction et les produits finaux issues de ces deux phénomènes sont assez méconnus. Ceci rend difficile l’estimation de leur contribution au bilan de puissance du substrat.

Pour tenir compte des changements qui peuvent être apportés par la présence de l’oxygène dans la décharge, nous allons refaire l’analyse du bilan de particules à la surface. Pour ce faire, nous considérons que les équations permettant d’estimer les puissances apportées par les électrons et les ions positifs à la surface restent inchangées. Afin de tenir compte de l’énergie transférée lors de l’association des atomes d’oxygène à la surface, nous utilisons la formule suivante [79,126] :

Pass = 0, 5 ΓO Ediss NO

s

8kBTg πMO

As [W ] (4.16)

Dans cette équation, l’indice O se réfère à l’atome d’oxygène. ΓO est la probabilité que l’atome d’oxygène transfère de l’énergie vers le substrat. Sa valeur dépend fortement de la surface du matériau et varie très peu avec la pression. Pour des surfaces actives telles que les métaux, elle varie entre 0,1 et 1. Pour une sonde calorimétrique en verre Péjak et al. [79] ont utilisé la valeur de ΓO= 1 (valeur maximale). C’est cette dernière valeur que nous considérons dans nos calculs. MO est la masse de l’atome d’oxygène. La température Tg du gaz est supposée constante et égale à 350 K et la densité des atomes d’oxygène nO dépend de la pression du gaz. Les données utilisées dans les calculs sont résumées dans le tableau (4.2).

nk (m−3) ni,k (m−3)

Gaz Mk (m.a) Eion,k eV Ediss (eV ) 10 Pa 60 Pa 10 Pa 60 Pa

Ar 39,9 15,7 — 1.1020 5.1020 5.1017 8, 5.1016

O2 31,8 12,07 5,15 5.1018 8.1018 2.1016 6.1015

O 15,9 13,61 — 5.1018 8.1018 5.1016 2.1015

Tableau 4.2 – Les constantes spécifiques des espèces utilisées dans le calcul et les densités atomiques et ioniques associées dans le cas des plasmas d’Ar(90%) + O2(10%). Puissance MO de 150 W.

La recombinaison électron-ion à la surface peut s’estimer par la formule suivante [74] :

Precomb = ji(Eion,k−Ediss,k) = η

X k n i,k Mk  vB  1−2eVf kBTe β

(Eion,k−Ediss,k) [W ] (4.17)

où η et β sont deux constantes dépendantes de la géométrie du substrat. Leurs valeurs sont respectivement égales à 1 et à 0 pour une géométrie plane (le terme en puissance β

est donc égal à 1). ni,k et Mk sont respectivement la densité et la masse de l’ion k. Eion,k représente l’énergie d’ionisation de l’atome k et Ediss,k son énergie de dissociation. vB est la vitesse de Böhm dans le cas d’un plasma contenant plusieurs types d’ions [75] :

vB = v u u t kBTe ne X k n i,k Mk  (4.18)

Dans la nouvelle formule (Eq. (4.17)), nous ne considérons que des ions majoritaires O+ et O2+ (en plus des ions positifs de l’argon). Pour implémenter cette équation, il faut connaître la densité de chacun de ces ions. Celles-ci ont été déduites des résultats du modèle global (grandeurs moyennées sur le volume) développé par Gudmundsson et al. [123] pour des plasmas d’ArO2 et des résultats expérimentaux de Hsu et al. [129]

et de Kutasi et al. [130] (voir tableau (4.2)).

Sur la figure (4.25) sont représentés les résultats de mesures de la puissance Pin et les résultats de calcul des différentes contributions dues à : l’énergie cinétique des électrons Pe et des ions positifs Pion+; l’énergie transférée par les processus de recombinaison électron-ion Precomb; et celle provoquée par l’association des atomes d’oxygène à la surface du substrat Pass. La figure 4.25(a), présente la variation de ces différentes puissances en fonction de la pression du gaz. Ces résultats montrent que la puissance totale déposée à la surface du substrat suit la même allure que la densité électronique en fonction de la pression, présentée sur la figure 4.21(a). Ceci indique que Pin dépend essentiellement de la densité des électrons. Le maximum de puissance est obtenu entre 15 et 20 Pa, comme cela était le cas dans les plasmas d’argon. Une chute drastique de Pin est visible pour des pressions supérieures à 20 Pa, correspondant à des baisses d’une décade au niveau de la densité électronique et de 1 eV de la température électronique. Concernant la somme Psomme des différentes contributions considérées dans cette section, son évolution en fonction de la pression est similaire à celle mesurée par la méthode calorimétrique. Des écarts plus en moins importants entre les deux puissances sont visibles sur les graphiques noir et rouge de la figure 4.25(a). Ces écarts sont dus aux erreurs commises dans l’approximation des puissances Precomb et Pass. En effet, ces deux puissances ont été calculées à partir de données issus de la littérature. Des incertitudes avérées sur les densités ionique et atomique utilisées dans le calcul des équations (4.16) et (4.17) sont donc à considérer.

L’effet de la puissance micro-onde sur les différentes puissances est montré sur la figure (4.25)(b). Une évolution similaire à celle de la densité électronique en fonction de la puissance micro-onde est visible sur les tracés de Pin et Psomme. Les écarts enregistrés entre les deux puissances sont dus aux mêmes raisons évoquées précédemment, mais aussi au fait que l’élévation de la température du gaz en fonction de la puissance n’ait pas été considérée dans l’équation (4.16). En effet, bien que l’approximation qui consiste à

Figure 4.25 – Puissances déposées par le plasma à la surface du substrat en verre en fonction de la pression du gaz à 150 W (a) et de la puissance MO injectée dans la décharge à 15 Pa (b) dans le cas de l’ArO2.

considérer Tg constante dans la plage de pression étudiée soit réaliste, il n’en demeure pas moins que celle-ci peut beaucoup changer avec la puissance déposée dans le gaz [131].

Pe Pion+ Precomb Pass Psomme Pin

Gaz Ar ArO2 Ar ArO2 Ar ArO2 ArO2 Ar ArO2 Ar ArO2 15 Pa 2,56 1,29 3,97 1,38 11,11 7,73 6,38 17,64 16,78 18,56 19,47

20 Pa 2,10 1,34 3,25 1,42 9,87 8,40 6,06 15,21 17,23 16,09 19,82

30 Pa 1,38 0,41 2,15 0,41 8,91 3,14 5,14 12,45 9.01 12,13 7.52

Tableau 4.3 – Comparaison entres les puissances mesurées et les puissances calculées dans les plasmas d’argon pur et les plasmas d’argon-oxygène à 150 W et trois pressions.

Dans tous les cas présentés sur la figure (4.25), les puissances dues aux bombardements électronique et ionique restent minoritaires. La recombinaison électron-ion et l’association des atomes d’oxygène à la surface constituent les phénomènes majoritaires de chauffage. Globalement, les puissances mesurées et calculées dans les plasmas d’ArO2 sont très proches de celles obtenues dans l’argon pur. Le tableau (4.3) résume les résultats dans les deux gaz.

et la somme des trois contributions (Pe+Pions++Precomb) n’est pas satisfaite dans les plasmas d’ArO2. Par conséquent, il n’est pas possible d’utiliser l’équation (3.14) pour déterminer la densité électronique. En effet, comme on a pu le voir dans la section (3.3), cette équation n’est valide que dans le cas où les différentes contributions ne dépendent que de Te et ne.