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est diverse, elle peut se faire en distance autour du point central qu'est l’église ou elle peut dépendre de la topographie du site (LAUWERS, 2005). Ces espaces sur lesquels s'installent les cimetières font l'objet bien souvent d'une cohabitation avec les vivants au moins jusqu’à la grande peste pour les sépultures intra-muros36. La pénétration des vivants dans ces lieux

destinés aux morts peut s'observer par diverses structures comme les silos...

Par la suite, on observe peu de changement hormis le fait que les sépultures sortent de la ville avec les grandes épidémies de pestes qui débutent au XIVe siècle.

Le cimetière est une terre consacrée. Elle est réservée à tous ceux qui sont baptisés par l’Eglise de Rome. Tous sujets baptisés appartiennent à l’ecclesia (assemblée des fidèles), ils sont donc inhumés dans le cimetière communautaire à l’image de la communauté des vivants. En sont exclus les non baptisés37, les païens, les infidèles. Le non-respect de cette

règle témoigne d’évènements que la population doit gérer différemment.

Nous avons vu les points importants de l’Église Catholique en ce qui concerne l'organisation de la mort, Lescar étant au cœur des troubles religieux, il est bon de s'interroger sur l'organisation sépulcrale de l’Église Réformée.

2/ Les protestants face à la mort

La période Moderne voit l'arrivée de la réforme en Béarn. Une des principales questions qui se pose alors, est de connaître et identifier les lieux d'inhumations des deux religions principales de la principauté. Nous savons par les textes, que la paroisse Saint-Julien de Lescar a divisé son cimetière en deux zones afin de permettre l'inhumation des protestants en son sein sous Jeanne d'Albret.

A Orthez, on sait qu’un lieu funéraire conçu spécialement pour les réformés a existé, cependant, la localisation de ce site est actuellement inconnu faute de sources écrites mentionnant la position et de données archéologiques. Orthez est une ville où la population était majoritairement protestante, et ce même après le règne de Jeanne d’Albret. On sait

36A Rodez par exemple, les sépultures intra muros ont été sorties lors de la Grande Peste, c'est la fin de la

cohabitation vivants/défunts.

qu’un temple ainsi qu’un cimetière leurs étaient dédiés.

Nous savons également qu’en 1620 lors de la restitution des biens de 1620, il est demandé aux protestants du territoire de restituer les lieux de cultes qui n’ont pas encore été rendus et de sortir des cimetières catholiques.

De là, il est demandé aux catholiques de fournir un lieu d'inhumation aux protestants en contre partie de la restitution. A l'heure actuelle, nous n'avons pas connaissance de ces lieux d'inhumations de Lescar et nous ne pouvons pas non plus certifier que des terrains leurs aient bien été remis à des fins funéraires. Une chose est certaine, c'est qu'après la résiliation de l'édit de Nantes, les inhumations protestantes se sont effectuées clandestinement et souvent dans le jardin d'iceux. Quand est-il avant sa résiliation ? Comment le choix du terrain concédé a-t-il été effectué ? Y a-t-il réellement eu cession ? Si oui, de quelle façon se déroulait les inhumations huguenotes ? Nous sommes face ici, à des questions qui ont actuellement peu de réponses.

Un autre point attire notre attention dans la question des inhumations protestantes : A travers les notes du consistoire béarnais, nous savons que l’adhésion à la nouvelle religion n'est pas acquise promptement mais se fait sur la durée. En effet, on voit par exemple dans les actes du consistoire que certaines personnes se rendent en cachette à la messe catholique ce qui montre que la transition de changement de religion a été faite brusquement et qu'il reste dans la population des attachements à leur ancienne religion. De plus, après la mort de Jeanne d'Albret et également après la résiliation de l'édit de Nantes, de nombreux protestants sont redevenus ou devenus catholiques.

Une question se pose donc, si l’on sait que les religions protestantes se démarquent de la religion catholique par le refus de l'iconoclasme et de la transsubstantiation, les rites funéraires se différencient-ils également ? En conséquence, quelles sont les différences dans les rites funéraires huguenots et une personne calviniste ne peut-elle pas se faire inhumer ad sanctos malgré qu’ils prônent des funérailles simples ?

Cette question a été étudiée par J.-M. Meyeur (et al) Dans « L'Âge de raison (1620- 1750) : Histoire du christianisme » (1998).

« La Réforme s'inscrit comme une révolution dans la mort » (M. Vovelle) ; Les messes et les prières mortuaires sont perçues comme inutiles par les huguenots. Le protestantisme

nie le purgatoire et l'intercession des Saints et de la Vierge. Il ne voit pas la nécessité de préparer la mort n'est pas une nécessité pour ces vivants, dans ce sens, les cantiques, livres de raison... tendent à montrer que pour eux, la mort « comme délivrance des misères terrestres, d'un bref pèlerinage et comme amorce d'une éternité bienheureuse » (VOVELLE, 2000, p. 205-209).

Les Luthériens ont gardé l'accompagnement des morts avec chants et cérémonies, le but étant de soulager la tristesse des familles. Le rituel peut se clore par un baquet funèbre. En Allemagne et en Scandinavie notamment, les lieux de cultes de l'élite n'ont pas pu être annihilés. Le cimetière reste une terre sacrée, dont la spatialisation des tombes est marquée par des stèles comportant souvent des épitaphes dès le XVIIe siècle.

A contrario, le calvinisme français a créé une rupture totale avec les rites catholiques. Les premiers synodes de l’Église Réformée de France à la fin du XVIe siècle, affirmaient

qu’« il ne sera fait aucune prière ou prédication, ni aumône publique aux enterrements pour obvier toutes superstitions ». Le banquet et le deuil sont également prohibés. Cependant, la récurrence des injonctions synodales montre leur difficile mise en application. En effet, les rites autour de la mort sont ancrés dans les mentalités du temps, cela ne s’efface pas en si peu de temps de mise en application. Le besoin de consoler les vivants et la volonté de certains de garder leurs statuts sociaux dans la mort oblige le calvinisme à garder certaines coutumes comme les cortèges.

Lors de la révocation de l'édit de Nantes, des arrêtés obligent à l'inhumation qu'à l'aube ou dans la soirée. Pour tous, l'inhumation dans les champs ou dans la propriété familiale est déjà pratiquée sous l'édit de Nantes, là, où il n’existait pas de cimetières destinés à ceux de la religion Réformée.

Concernant l'inhumation ad ecclesiam, elle est tolérée chez les luthériens mais elle est totalement prohibée chez les calvinistes.

Ceci dit, une question demeure. L'inhumation des huguenots se faisant dans des lieux privés ou ex-nihilo, si le site était désaffecté n'a-t-il pas pu être utilisé dans des fins de servir de cimetière à des calvinistes qui veulent retourner à leur foi première ou qui utilisent un terrain alors non utilisé pour leurs inhumations ?

L'étude des modes d'inhumation va nous ouvrir des pistes de réflexions pour nous permettre de répondre à cette question.