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1.2. Structure de la chromatine et implication dans la régulation de la transcription

1.2.1. Les protéines histones et le nucléosome

La compaction de l!ADN va être réalisée par les protéines histones qui vont former avec l!ADN des structures appelées nucléosomes qui sont l!unité de base de la chromatine.

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1.2.1.1. Les protéines histones

Les protéines histones H2A, H2B, H3 et H4 sont des protéines courtes (environ 120 résidus) fortement conservées chez tous les eucaryotes. Ces protéines sont très fortement chargées positivement, cette charge leur permettant dinteragir avec des molécules chargées négativement comme lADN. Les histones sont toutes composées dun domaine central, également appelé domaine globulaire, qui adopte un repliement de type « histone fold » (HFD, Histone Fold Domain), chaque protéine histone contenant également une extension amino-terminale variable et non structurée (Figure 11A).

Figure 11 : Architecture et structure dune protéine histone, formation de la paire H3/H4.

Les protéines histones H2A, H2B, H3 et H4 sont formées dun domaine central de type « Histone Fold Domain » entouré dune queue amino-terminale spécifique de chaque histone et carboxy-terminale variable. Les paires dhistones spécifiques H2A/H2B et H3/H4 vont se former par une interaction tête-

bêche de leur HFD respectif.

Les domaines HFD sont constitués dune hélice g centrale longue (g2) flanquée de part et dautre de boucles qui relient deux hélices g plus courtes (g1 et g3) (Figure 11B). Ces domaines HFD permettent la mise en place dinteractions protéine-protéine spécifiques. Ils ne sont dailleurs pas seulement retrouvés dans les histones. En effet, plusieurs protéines, notamment certaines protéines TAF qui font partie des facteurs co-activateurs de la transcription TFIID et SAGA contiennent également ce type de domaines qui sont impliqués dans la formation de ces complexes (Gangloff et al., 2001). Dans le cas des histones, les

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paires H2A/H2B et H3/H4 vont être formées par l!interaction tête-bêche de leurs motifs HFD (Figure 11C).

Une cinquième protéine histone, l!histone H1, va également être impliquée dans la formation du nucléosome (Ramakrishnan, 1997). Cette protéine, qui ne possède pas de domaine HFD va stabiliser l!ADN à l!entrée et à la sortie du nucléosome, stabilisant par la même l!entitée nucléosome.

Les gènes codants pour les protéines histones sont présents en plusieurs copies dans les génomes eucaryotes, la levure contenant par exemple deux copies de l!histone H3. De plus, les histones H3 et H2A possèdent des isoformes également appelés variants. Les séquences de ces variants sont très proches des protéines canoniques, les modifications entre un variant et la forme canonique de l!histone étant généralement minimes. Ces variants vont notamment permettre l!annotation de la chromatine lors d!évènements particuliers comme la présence de cassures dans l!ADN ou l!initiation de la transcription et permettent alors le recrutement de facteurs spécifiques. Le remplacement des histones canoniques par son variant va nécessiter des facteurs de remodelage et des chaperonnes d!histones.

L!expression des protéines histones est fortement régulée au cours du cycle cellulaire, les histones canoniques n!étant produits et déposés sur l!ADN qu!au cours de la phase de synthèse du cycle cellulaire, c!est-à-dire lors de la réplication (phase S). Les variants d!histones sont par contre produits et utilisés indépendamment de la réplication.

1.2.1.2. Structure du nucléosome

Les premières structures de nucléosomes ont été résolues en utilisant un ADN rendu palindromique et issu de séquences répétées retrouvées au niveau des télomères dans le génome humain (satellites g) (Luger et al., 1997). Plus récemment, une séquence d!ADN (Widom 601) non palindromique et synthétisée de manière aléatoire a été sélectionnée pour sa forte affinité pour l!octamère d!histone et la structure du nucléosome contenant cet ADN a été résolue (Vasudevan et al., 2010; Makde et al., 2010).

Le nucléosome est formé de l!assemblage d!un octamère des histones H2A, H2B, H3 et H4, qui contient deux copies de chaque protéine, autour desquelles un fragment de 147 paires de bases d!ADN est enroulé, représentant 1,7 tour d!hélice. La structure du nucléosome est sphérique et plane, l!octamère d!histone formant une structure compacte autour de laquelle l!ADN vient s!enrouler (Figure 12). Dans cette structure, seules les queues des histones

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émergent mais ne sont pas visibles dans la structure du fait de leur flexibilité. L!octamère d!histone est formé de deux copies de chaque protéine histone, les dimères H2A/H2B s!associant avec le tétramère (H3/H4)2 pour obtenir l!arrangement

(H2A/H2B)(H3/H4)2(H2A/H2B). Les deux paires H3/H4 interagissent par une interaction de

type « four helix bundle » formée par les deux protéines H3. Ce type d!interaction est principalement hydrophobe et fait intervenir les hélices g2 et g3 des deux protéines. Chaque paire H2A/H2B interagit avec le tétramère (H3/H4)2 à la fois par une seconde interaction de

type « four helix bundle » réalisée entre les hélices g2 et g3 des histones H4 et H2B et par une interaction de la partie carboxy-terminale de H2A avec les paires H3/H4. Les deux paires H2A/H2B n!interagissent que faiblement ensemble (Figure 12). Lors de sa mise en place sur l!ADN, le nucléosome est formé de manière séquentielle : le tétramère (H3/H4)2 se lie dans

un premier temps à l!ADN, les deux paires H2A/H2B étant alors recrutées pour compléter le nucléosome.

Figure 12 : Structure tridimensionnelle du nucléosome

Le nucléosome est formé des histones qui sont organisés en un octamère central autour duquel lADN vient senrouler, assurant le premier niveau de compaction de lADN.

Le tétramère (H3/H4)2 interagit à la fois avec la région centrale de l!ADN, recouvrant

environ 60 paires de bases, et avec les extrémités de l!ADN au niveau de la région amino- terminale non structurée de H3. Chaques dimères H2A/H2B s!associent sur une région d!environ 30 paires de bases avec l!ADN à l!opposé du tétramère (H3/H4)2. Toutes les

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interactions ADN : protéines réalisées impliquent des résidus des protéines histones et des liaisons phosphodiester du sillon mineur de l!ADN, la plupart de ces interactions étant formées par des liaisons hydrogènes. Cependant, alors que les nucléotides présents dans le sillon mineur ne semblent pas interagir avec les histones, la résolution de la structure du nucléosome contenant l!ADN 601 suggère que la présence de paires adénine " thymine dans le sillon mineur de l!ADN favorise le positionnement correct du nucléosome. Ainsi, les nucléosomes ne semblent pas positionnés aléatoirement sur l!ADN in vitro.

Lhistone H1 lie lADN à la sortie du nucléosome, interagissant notamment avec lADN localisé entre deux structures nucléosomales, appelé « linker ». La longueur de ces linker va varier de 10 à 50 paires de bases. Cette protéine va également permettre la compaction de la chromatine en fibre de 30nm.

1.2.1.3. Le positionnement des nucléosomes sur lADN

Les nucléosomes ne sont pas répartis de manière aléatoire sur lADN, leur positionnement va notamment dépendre de la région génomique considérée. En effet, dans le noyau de la cellule, deux types principaux de chromatine peuvent être distingués : leuchromatine, qui est transcriptionnellement active, et lhétérochromatine, qui est une forme très condensée de la chromatine qui nest pas transcrite (Figure 13).

Figure 13 : Organisation de lhétéro- et leuchromatine dans les noyaux des cellules

Dans la cellule, observée ici par microscopie électronique, la chromatine peut adopter deux états, leuchromatine qui est peu condensée et qui est accessible aux machineries cellulaires et lhétérochromatine qui est fortement condensée et qui forme la chromatine dite silencieuse.

La position des nucléosomes sur lADN est principalement dictée par la séquence nucléotidique, démontré par une forte corrélation entre la position des nucléosomes observée

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in vivo et celle observée sur un ADN génomique condensé in vitro par l!ajout d!histones

purifiés (décrit au paragraphe 1.2.1). Cependant, la position des nucléosome peut également être imposée par des facteurs qui vont déplacer ces structures et notamment les facteurs de remodelage.

Ainsi, chez la levure, des études à grande échelle ont permis de mettre en évidence que plus de 90% des promoteurs des gènes contiennent des régions d!environ 150 paires de bases qui sont dépourvues de nucléosome, le reste du promoteur étant occupé par des nucléosomes qui contiennent des variants d!histone, notamment H2AZ. De plus, chez la levure, le site d!initiation de la transcription est toujours occupé par un nucléosome, appelé nucléosome +1, ce nucléosome étant retrouvé dans les gènes humains, mais légèrement décalé dans la séquence codante. Les nucléosomes entourant ce site particulier sont répartis de manière plus aléatoire.

Le positionnement des nucléosomes au niveau des sites d!initiation de la transcription est également impliqué dans la régulation de l!expression des gènes inductibles chez la levure. Ainsi, en conditions non induites, le promoteur des gènes est condensé par des nucléosomes, seule une courte région de l!ADN étant exposée. Au moment de l!induction, les nucléosomes qui occupent le promoteur sont éliminés, permettant notamment d!exposer les sites de liaison des activateurs et la TATA-box, afin de former le complexe de pré-initiation. Ce mode de régulation est notamment mis en place lors de la régulation de l!expression des gènes PHO5,

GAL1-10 et PHO8 (Segal et Widom, 2009; Travers et al., 2009; Bai et Morozov, 2010).

Par contre, la position des nucléosomes sur le corps des gènes au cours de l!élongation de la transcription fait encore débat. En effet, l!élimination complète des nucléosomes au cours de ce mécanisme semble peu plausible. Il semblerait plutôt que les nucléosomes soient dissociés (voire partiellement) devant la machinerie transcriptionnelle puis rapidement reconstitués une fois l!ARN polymérase II passée (Subtil-Rodríguez et Reyes, 2011).