1.3 Laser à cavité dégénérée
1.3.1 Propriétés de base
Les cavités Fabry–Perot dégénérées ont suscité l’intérêt dès les premiers instants du Laser [62].
Une étude plus détaillée sur la géométrie des modes transverses dans ce type de cavités est réalisée
dans la thèse de Dingjan [63]. Nous allons tout d’abord montrer qu’une cavité dégénérée d’ordreN
possède la propriété d’être auto–imageante pour tout faisceau faisant un nombreN d’aller–retours
dans la cavité. Nous présenterons ensuite quelques trajectoires de rayons géométriques possibles
à certaines longueurs de dégénérescence, qui nous seront utiles par la suite pour l’interprétation
des profls transverses des modes oscillant dans de telles cavités.
Système auto–imageant
Nous repartons ici de l’expression de la matrice ABCDM
cavdonnée par (1.23) décrivant notre
cavité plan–concave. La recherche des valeurs propres σ
+etσ− de Mcav conduit directement à
l’équation suivante :
σ
±2−2σ±
1−2 L
Rc
+ 1 = 0. (1.74)
On en déduit l’expression des valeurs propres :
σ±=
1−2 L
R
c±2i
s
L
R
c1− L
R
c. (1.75)
En posant L/Rc = sin
2α, ce qui est possible car la condition de stabilité implique 0 <
L/Rc<1, on parvient à simplifier cette expression de la manière suivante :
σ±=e
±i2α. (1.76)
On retrouve bien le fait que les valeurs propresσ
+etσ−sont complexes conjuguées l’une de
l’autre et que le déterminant de M
cavvaut un. De plus, on déduit de (1.76) que M
cavN=I si et
seulement siα=kπ/N, k∈N. En d’autres termes, on a :
M
cavN=I ⇐⇒ L=R
csin
2k
Nπ
, k∈N, (1.77)
ce qui correspond rigoureusement à la condition de dégénérescence de la cavité donnée par (1.32).
La relation (1.19) permet d’affirmer que lorsque M
Ncav
= I, tout faisceau gaussien d’ordre
unique retrouve son waist original après N aller–retours dans la cavité. De plus, nous avons vu
qu’à dégénérescence la phase de Gouy sur un aller vaut Ψ
G(L) = kπ/N. La phase de Gouy
sur N aller–retours est donc un multiple de 2π, ce qui signifie qu’après N aller–retours dans la
cavité tout mode d’ordre unique revient égal à lui même en phase, et ce quel que soit l’ordre du
mode. Par linéarité ceci est également valable pour toute combinaison linéaire de modes d’ordres
uniques, et donc pour toutes les distributions possibles de champ puisque ces derniers forment
une base.
On a donc montré que la notion de dégénérescence est équivalente à une propriété auto–
imageante de la cavité, à la fois en amplitude et en phase, pour N aller–retours d’un faisceau
quelconque dans cette cavité. Nous nous servirons de cette propriété par la suite pour développer
une methode permettant de construire des modes propres d’une cavité dégénérée en partant d’une
distribution initiale de champ quelconque.
Trajectoires géométriques
D’un point de vue de l’optique géométrique, la conditionM
cavN=Is’interprète immédiatement
comme l’existence de trajectoires fermées des rayons qui bouclent sur eux mêmes aprèsN aller–
retours dans la cavité. Nous allons présenter quelques trajectoires possibles, en fonction de la
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position et l’angle d’incidence du rayon initial, dans des situations de dégénérescences distinctes
pour lesquellesL =Rc/2 (Ψ
G(L) =π/4), L = 3Rc/4 (Ψ
G(L) =π/3), et L =Rc/4 (Ψ
G(L) =
π/6). Par souci de simplicité nous supposerons que les trajectoires des rayons considérés ont lieu
dans un plan.
Les tracés de rayons correspondant aux dégénérescences d’ordreN = 4,N = 3 etN = 6sont
réprésentés dans les figures 1.22, 1.23 et 1.24, respectivement.
Figure 1.22 – Trajectoires géométriques particulières lorsqueL=R
c/2 (ordre 4), ainsi que les
profils d’intensité des modes attendus sur le miroir plan (1), sur le miroir sphérique (2), et dans
un plan intermédiaire.
La première chose évidente à remarquer est que les dégénérescences d’ordre pair conduisent à
des trajectoires symétriques par rapport à l’axe optique, ce qui n’est pas le cas des dégénérescences
d’ordre impair. Ceci se traduira évidemment dans la symétrie du profil transverse observé dans un
laser, et nous verrons qu’une disymétrie dans le profil d’intensité d’un mode transverse témoigne
obligatoirement d’une configuration dégénérée ou proche de dégénérescence d’ordre impair.
La seconde chose à remarquer est que les impacts sur le miroir plan n’ont pas la même
géo-métrie que les impacts sur le miroir sphérique, ce qui conduira à des profils transverses différents
au niveau de ces deux plans. D’une manière générale, un mode transverse issu d’une cavité
dé-générée ne sera plus invariant de forme par propagation, ce qui est évident étant donné qu’il
combine plusieurs modes d’ordres différents.
Si on cherche maintenant à associer un profil transverse à chacun de ces rayons, on peut
raisonner sur un profil gaussien pour plus de simplicité. Si le waist de ce mode gaussien est bien
choisi, celui-ci peut rester à peu près le même au cours des différents aller–retours dans la cavité.
On peut alors prédire l’allure que possèderait le champ dans chaque plan en supposant que
l’intersection de deux rayons ayant des angles différents donne lieu à des franges d’interférence.
Figure1.23 – Trajectoires géométriques particulières lorsqueL= 3Rc/4(ordre 3), ainsi que les
profils d’intensité des modes attendus sur le miroir plan (1), sur le miroir sphérique (2), et dans
un plan intermédiaire.
On obtient donc des profils transverses constitués à la fois de motifs gaussiens et de franges
d’interférence, représentés sur les figures 1.22, 1.23 et 1.24. Des modes ainsi construits en partant
de trajectoires de rayons géométriques et en leur associant un profil transverse sont appelés
modes géométriques [64]. Nous verrons d’ici peu que de tels modes ont effectivement été observés
expérimentalement, et que l’analyse géométrique se prète très bien à leur description. Cependant
le raisonnement qui vient d’être fait ici est purement qualitatif, et nous donnerons une méthode
rigoureuse pour construire ces modes à la fin de cette section.
Enfin, il reste à remarquer que les profils transverses obtenus par l’application de ce
raison-nement géométrique peuvent être très différents en fonction du choix du rayon initial et de la
distribution initiale de champ attachée à ce rayon. La question de savoir comment prédire le bon
motif à partir des conditions expérimentales (notamment la position et le profil du gain) a été
très peu discutée, et nous verrons que ce problème ne peut pas réellement trouver de solution
satisfaisante. À défaut, on est malgré tout capable de constater a posteriori que les observations
expérimentales entrent dans la catégorie des modes géométriques.
Dans le document
Étude de la sélection des structures transverses stationnaires dans les lasers
(Page 50-53)